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virtualisation

Par ailleurs, il me semble que notre époque est tout sauf matérialiste. Le moteur de la société de consommation n’est pas la possession d’objets, mais la lutte pour la reconnaissance à travers ce qui est consommé. Le vrai matérialiste serait attaché aux objets, alors que le consommateur s’en détache très vite au profit de nouveaux objets qui le valorisent davantage. Quant au plan philosophique, ce qui se donne pour du matérialisme me semble plutôt ressortir à un dualisme radical, qui n’est pas sans rappeler celui des anciens gnostiques qui rêvaient d’affranchir l’esprit de sa prison charnelle. La différence est qu’aujourd’hui l’esprit entend, non pas s’affranchir de la matière mais, par l’intermédiaire de la science et de la technologie, s’imposer à elle. S’il est des transhumanistes pour rêver de quitter leur corps caduc pour se transférer sur ordinateur, c’est bien qu’ils conçoivent leur identité comme indépendante de son support. Le genre de spiritualité dont notre temps a besoin n’est pas une spiritualité qui nous ferait rompre avec la matière, mais qui au contraire nous ferait renouer avec elle. Saint Thomas d’Aquin, le docteur angélique, accordait bien plus d’importance et d’attention à la matière que nous ne le faisons. Ce qui entrave la spiritualité aujourd’hui, ce n’est pas la matière, mais le bain d’abstraction dans lequel l’empire technologico-économique planétaire nous fait vivre.

Auteur: Rey Olivier

Info: https://linactuelle.fr/index.php/2019/02/08/olivier-rey-pasolini-consumerisme/

[ idéalisme ] [ évolution ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

historique

Selon Girard, c’est le judéo-christianisme qui nous a appris à repérer le mécanisme sacrificiel par lequel les sociétés conjurent la violence mimétique en la polarisant sur une victime émissaire. La Bible hébraïque et les Evangiles révèlent ce qui doit demeurer caché pour que le procédé jouisse de sa pleine efficacité : la victime qu’on élimine est innocente de la gangrène sociale dont on la rend responsable. […]
En retirant aux sociétés humaines l’usage libre et innocent d’un moyen aussi efficace pour se purger de la violence mimétique qui menace périodiquement de les emporter, le judéo-christianisme a davantage fragilisé ces sociétés qu’il ne les a renforcées. […]
Contre le déchaînement de la violence mimétique, les sociétés modernes, interdites de rites sacrificiels – ou plutôt, très contraintes sur ce chapitre – ont dû recourir à d’autres instruments de régulation sociale. Entre autres, la production de masse, chargée de calme momentanément – très momentanément – l’envie ; l’apparition d’une instruction obligatoire prolongée, dont une des fonctions est d’inculquer à tous les enfants les principes de la vie commune ; la place croissante prise par le droit, saisi de tous les conflits et appelé à les trancher avant qu’ils puissent s’étendre ou prendre de dangereuses proportions ; le développement de la police, veillant au respect des lois et arrêtant les contrevenants, ainsi que la multiplication des prisons maintenant ces derniers à l’écart. Sans parler d’une multitude d’autres instances régulatrices comme les hôpitaux psychiatriques, l’industrie pharmaceutique pourvoyeuse de neuroleptiques, l’industrie des loisirs charge d’épuiser les surplus d’énergie en dérivatifs inoffensifs.

Auteur: Rey Olivier

Info: Dans "Une folle solitude", pages 34 à 36

[ contention ] [ vie en société ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

collapsologie

L’an 2050 est présenté [par Joe Quirk] comme une "échéance mortelle" (deadly deadline), du fait de la conjonction de plusieurs manques en ressources essentielles pour la survie de l’humanité :
- Pénurie d’eau. La moitié de la population mondiale sera touchée. (Au cours du dernier demi-siècle, la quantité d’eau douce disponible par habitant de la terre a déjà été divisée par deux.)
- Pénurie de nourriture. Même avec un accroissement de 50% des rendements agricoles, avance Quirk, il faudrait pour nourrir l’humanité en 2050 augmenter l’aire des surfaces cultivées de 22 millions de kilomètres carrés, une étendue presque équivalente à celle de l’Amérique du Nord (ou quarante fois la France, dont on sait par ailleurs que les surfaces agricoles se réduisent à un rythme alarmant sous les avancées du bitume).
- Pénurie d’hydrocarbures. (On pourrait aussi ajouter : pénurie de métaux. Il reste beaucoup d’hydrocarbures dans le sol, mais de plus en plus de métaux sont nécessaires pour les extraire ; il reste beaucoup de minerais à exploiter, mais il faut de plus en plus d’énergie pour y avoir accès […].)
- Pénurie de poissons. Au rythme actuel de pêche, les océans seront vides en 2050. (L’aquaculture ne saurait être une solution, dans la mesure où les poissons d’élevage sont nourris avec des farines de poissons sauvages – qui n’existeront plus -, ou des farines végétales – mais les terres agricoles manqueront.)
- Pénurie de phosphates. (L’épuisement des sols provoqué par l’agriculture telle qu’elle est actuellement pratiquée ne peut être compensé que par un recours massif aux engrais phosphatés, qui viendront à manquer.)
- Pénurie des terres. 80% des mégapoles, qui ne cessent de grossier, sont situées sur une côte ou dans une plaine fluviale menacées par l’élévation du niveau de la mer.

Auteur: Rey Olivier

Info: Dans "Leurre et malheur du transhumanisme", pages 172 à 174

[ épuisement des ressources naturelles ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

mutation économique

Cormac McCarthy a intitulé un des ses romans No Country for Old Men, qu’on pourrait traduire par : pas de place ici pour les hommes à l’ancienne. Le remplacement des hommes à l’ancienne par les nouveaux consommateurs s’est opéré partout dans ce qu’on appelle le monde "développé", à des moments et à des vitesses variables. En Europe, une bonne partie de l’Italie est demeurée longtemps en marge du mouvement. La "modernisation", dans les décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, n’en a été que plus spectaculaire. Pasolini a été témoin de l’entrée brusque et massive du petit peuple italien dans l’univers de la consommation – événement qui a aussi signifié sa destruction en tant que peuple. Au début des années 1960, Pasolini a tourné L’Evangile selon saint Matthieu dans des villages du sud de l’Italie. Il avait le sentiment que les personnes qui vivaient là étaient très semblables à celles qui vivaient en Palestine il y a deux millénaires. Dix ans plus tard, il s’est rendu compte qu’un tel tournage n’aurait plus été possible : les visages des habitants de ces villages étaient devenus des visages de personnes qui regardaient la télévision. Pasolini a été bouleversé par ce basculement anthropologique. Pour lui, "le fossé entre l’univers de la consommation et le monde paléo-industriel est encore plus profond et total que le fossé entre le monde paléo-industriel et le monde préindustriel". Pasolini qualifie donc de paléo-industriel le monde qui va de la révolution industrielle à l’entrée dans la société de consommation. Pour exprimer la même idée que Pasolini en d’autres termes : il y a moins de distance entre le paysan des Travaux et les Jours et l’ouvrier de Germinal qu’entre l’ouvrier de Germinal et le consommateur contemporain. Pasolini nous aide ainsi à percevoir, à prendre conscience de ce fossé gigantesque, ordinairement négligé, précisément parce qu’il est si gigantesque que la pensée peine à l’enjamber.

[...]

Pasolini a vécu l’avènement du consumérisme comme une catastrophe anthropologique. Le consumérisme allant de pair avec le règne de ce qu’on appelle le capitalisme, il a une critique virulente du capitalisme. Pour cette raison, il a été classé et s’est classé lui-même résolument à gauche. Pour autant, la locution "homme de gauche" me semble, concernant Pasolini, inappropriée. Kundera a remarqué que ce qui "unit les gens de gauche de tous les temps et de toutes les tendances", c’est l’idée de la Grande Marche en avant qui, malgré tous les obstacles, nous achemine vers la fraternité, l’égalité, la justice, le bonheur universel : "La dictature du prolétariat ou la démocratie ? Le refus de la société de consommation ou l’augmentation de la production ? La guillotine ou l’abolition de la peine de mort ? Ça n’a aucune importance. Ce qui fait d’un homme de gauche un homme de gauche ce n’est pas telle ou telle théorie, mais sa capacité à intégrer n’importe quelle théorie dans le kitsch appelé Grande Marche." Pasolini n’était pas de ceux qui refusaient la société de consommation parce qu’à son époque, la Grande Marche supposait le rejet de la société de consommation ; il refusait la société de consommation parce qu’il la trouvait monstrueuse – refus qui, dans la période qui va de l’après-guerre aux années 1970, le plaçait à gauche.

Les guerres mondiales ont beaucoup détruit. Mais ces destructions étaient somme toute peu de chose en comparaison des ravages perpétrés, après 1945, par trois décennies de modernisation intensive des modes de vie, des modes de production, des villes, des campagnes, des âmes, de tout. Nulle trace, chez Pasolini, d’une quelconque idéalisation du passé. Mais s’il estimait la révolution nécessaire, ce n’était pas pour se débarrasser du "vieux monde" comme d’une immondice, c’était pour amener ce qui, dans le passé, était déjà là, mais à l’état entravé, opprimé, à son épanouissement, à sa pleine fécondité. Pour Pasolini, la société de consommation avait ceci de terrifiant que, au contraire de celles qui l’avaient précédée, elle ne se contentait pas d’entraver ou d’opprimer, mais détruisait. Elle prétendait libérer, et répandait la dévastation.

De son vivant, Pasolini a été en butte à nombre d’attaques venues de la gauche "progressiste". Un billet le résume, adressé par un lecteur de ses chroniques dans l’hebdomadaire Tempo : "Pier Paolo, tu es un réactionnaire et un conservateur." À quoi Pasolini répond : "Toi, tu es de gauche, d’extrême gauche, plus à gauche entre tous, et pourtant tu es un fasciste : tu es fasciste parce que tu es bête, autoritaire, incapable d’observer la réalité, esclave de quelques principes qui te semblent si inébranlablement justes qu’ils sont devenus une foi (horrible chose, lorsqu’elle ne s’accompagne pas de la charité : autrement dit, d’un rapport concret, vivant et réaliste avec l’histoire)." Après la mort de Pasolini, la gauche a préféré l’oublier, ou l’embaumer, et adhérer à la société de consommation. On a vu se mettre en place, entre droite et gauche, ce que Jean-Claude Michéa appelle un régime d’alternance unique, où les camps prétendument opposés rivalisent en furie modernisatrice. On comprend que dans ce contexte, Pasolini soit passé de mode. Mais c’est précisément pour cela qu’il a quelque chose à nous dire.

Auteur: Rey Olivier

Info: https://linactuelle.fr/index.php/2019/02/08/olivier-rey-pasolini-consumerisme/

[ préjugé politique ] [ mondialisation ] [ TV ] [ abrutissement ]

 

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