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empathie

Quand je les rencontre pour la première fois, c'est toujours la même image que je cherche, celle de l'Avant. Derrière leur regard flou, leurs gestes incertains, leur silhouette courbée ou pliée en deux, comme on tenterait de deviner sous un dessin au vilain feutre une esquisse originelle, je cherche le jeune homme ou la jeune femme qu'ils ont été. Je les observe et je me dis : elle aussi, lui aussi a aimé, crié, joui, plongé, couru à en perdre haleine, monté des escaliers quatre à quatre, dansé toute la nuit. Elle aussi, lui aussi a pris des trains, des métros, marché dans la campagne, la montagne, bu du vin, fait la grasse matinée, discuté à bâtons rompus. Cela m'émeut, de penser à ça. Je ne peux pas m'empêcher de traquer cette image, de tenter de la ressusciter.

Auteur: Vigan Delphine de

Info: Les gratitudes ,Page 41, JCLattès, 2019

[ personnes âgées ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

adolescence

- Je voulais te demander un truc. Est-ce que tu sais dans quel sens on tourne la langue quand on embrasse un garçon ?

D'abord elle ouvre ses yeux, très très grand. Et puis elle rit. Je ne l'ai jamais vue rire comme ça. Alors je ris aussi. Si j'avais plus d'argent, j'appellerais le garçon et je crierais "Champagne", je claquerais dans mes mains, je ferais venir des petits-fours comme au mariage de ma grande cousine, des quantités, on mettrait la musique à fond dans le café, on danserait sur les tables, on inviterait tous les gens à notre fête, No irait se changer dans les toilettes, elle enfilerait une belle robe et des jolies chaussures, on fermerait les portes pour être tranquille et pour faire le noir, on monterait le son comme dans la chanson.

- T'as de ces questions ! Y a pas de sens pour embrasser, on n'est pas des machines à laver !

Auteur: Vigan Delphine de

Info: No et moi

[ question ] [ french kiss ] [ rouler une pelle ]

 

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souvenirs

Quand je serai vieille, je m'allongerai sur mon lit ou me calerai les reins dans un fauteuil et j'écouterai la musique que j'écoute aujourd'hui, celle qui passe à la radio ou dans les boîtes de nuit. Je fermerai les yeux pour retrouver la sensation de mon corps en train de danser. Mon corps délié, souple, obéissant, mon corps au milieu des autres corps, mon corps affranchi de tout regard, quand je danse seule au milieu de mon salon. Quand je serai vieille, je passerai des heures ainsi, attentive à chaque son, à chaque note, à chaque impulsion. Oui, je fermerai les yeux et je me projetterai mentalement dans la danse, dans la transe, je retrouverai un à un les mouvements, les ruptures, et mon corps épousera de nouveau le rythme, la mesure, au plus près de sa pulsation.

Quand je serai vieille, si je le suis un jour, il me restera ça. Le souvenir de la danse, les basses qui cognent dans le ventre, et l'ondulation de mes hanches.

Auteur: Vigan Delphine de

Info: Les gratitude, Les gratitude Page 96, JCLattès, 2019

[ futur antérieur ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

solitude

Je ris aussi je crois, je suis heureuse, là, tout de suite, dans l'engourdissement du sommeil, et si c'était ça le bonheur, pas même un rêve, pas même une promesse, juste l'instant.
Moi, je m'en fous pas mal qu'il y ait plusieurs mondes dans le même monde et qu'il faille rester dans le sien. Je ne veux pas que mon monde soit un sous ensemble A qui ne possède aucune intersection avec d'autres (B,C ou D), que mon monde soir une patate étanche tracée sur une ardoise, un ensemble vide.
Dans les livres il y a des chapitres pour bien séparer les moments, pour montrer que le temps passe ou que la situation évolue, et même parfois des parties avec des titres chargés de promesses, La rencontre, L'espoir, La chute, comme des tableaux. Mais dans la vie il n'y a rien, pas de titre, pas de pancarte, pas de panneau, rien qui indique attention danger, éboulements fréquents ou désillusion imminente. Dans la vie on est tout seul avec son costume, et tant pis s'il est tout déchiré.

Auteur: Vigan Delphine de

Info: No et moi

[ condition humaine ] [ assumer ] [ littérature ]

 

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pensée-de-femme

Les coups je les ai reçus et le secret je l’ai gardé jusqu’au bout. J’ai trente-huit ans et je n’ai pas d’enfant. Je n’ai pas de photo à montrer, ni prénom ni âge à annoncer, pas d’anecdote ou de bon mot à raconter.

J'abrite en moi-même, et à l’insu de tous, l’enfant que je n’aurai pas. Mon ventre abîmé est peuplé de visages à la peau diaphane, de dents minuscules et blanches, de cheveux de soie. Et lorsqu’on me pose la question – c’est-à-dire chaque fois que je rencontre une nouvelle personne (en particulier des femmes), chaque fois qu’après m’avoir demandé quel est mon métier (ou juste avant), on me demande si j’ai des enfants –, chaque fois donc que je dois me résigner à tracer sur le sol cette ligne à la craie blanche qui sépare le monde en deux (celles qui en ont, celles qui n’en ont pas), j’ai envie de dire : non je n’en ai pas, mais regarde dans mon ventre tous les enfants que je n’ai pas eus, regarde comme ils dansent au rythme de mes pas, ils ne demandent rien d’autre qu’à être bercés, regarde cet amour que j’ai retenu converti en lingots, regarde l’énergie que je n’ai pas dépensée et qu’il me reste à distribuer, regarde la curiosité naïve et sauvage qui est la mienne, et l’appétit de tout, regarde l’enfant que je suis restée moi-même faute d’être devenue mère, ou grâce à cela.

Auteur: Vigan Delphine de

Info: Les loyautés

[ nullipare ] [ regrets ]

 

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