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transmission

Parmi les choses que les gens n'ont pas envie d'entendre, qu'ils ne veulent pas voir alors même qu'elles s'étalent sous leurs yeux, il y a celles-ci : que tous ces perfectionnements techniques, qui leur ont si bien simplifié la vie qu'il n'y reste presque plus rien de vivant, agencent quelque chose qui n'est déjà plus une civilisation ; que la barbarie jaillit comme de source de cette vie simplifiée, mécanisée, sans esprit ; et que parmi tous les résultats terrifiants de cette expérience de déshumanisation à laquelle ils se sont prêtés de si bon gré, le plus terrifiant est encore leur progéniture, parce que c'est celui qui en somme ratifie tous les autres. C'est pourquoi, quand le citoyen-écologiste prétend poser la question la plus dérangeante en demandant : "Quel monde allons-nous laisser à nos enfants ?" il évite de poser cette autre question, réellement inquiétante : "À quels enfants allons-nous laisser le monde ?"

Auteur: Semprun Jaime

Info: Dans "L'abîme se repeuple"

[ avenir ] [ pessimisme ]

 

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crépuscule

L'orbe d'or du soleil tombé des cieux sans bornes
S'enfonce avec lenteur dans l'immobile mer,
Et pour suprême adieu baigne d'un rose éclair
Le givre qui pétille à la cime des mornes.

En un mélancolique et languissant soupir,
Le vent des hauts, le long des ravins emplis d'ombres,
Agite doucement les tamariniers sombres
Où les oiseaux siffleurs viennent de s'assoupir.

Parmi les caféiers et les cannes mûries,
Les effluves du sol, comme d'un encensoir,
S'exhalent en mêlant dans le souffle du soir
A l’arôme des bois l'odeur des sucreries.

Une étoile jaillit du bleu noir de la nuit,
Toute vive, et palpite en sa blancheur de perle ;
Puis la mer des soleils et des mondes déferle
Et flambe sur les flots que sa gloire éblouit.

Et l'âme, qui contemple, et soi-même s'oublie
Dans la splendide paix du silence divin,
Sans regrets ni désirs, sachant que tout est vain,
En un rêve éternel s'abîme ensevelie.

Auteur: Leconte de Lisle Charles-Marie

Info: L'orbe d'or

[ couchant ] [ poème ]

 

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crépuscule

La voûte du ciel se mirait dans ce jardin prodigieux, dont l'ardeur du soleil n'embrasait pas les profondeurs, car l'astre du jour, épuisé par sa course, allait au fond de l'abîme chercher le repos et, dans ses forges marines, aiguiser ses rayons émoussés. La lune envoyait sa clarté d'argent jusqu'aux confins de cette immense étendue, et se baignait avec volupté dans ses courants. Les Pléiades, avec une exquise et virginale pudeur, scintillaient jusque dans ses gouffres inexplorés, qu'elles traversaient comme des sondes lancées pour en mesurer la profondeur, pour en toucher le fond.
On entendait mille bruits résonner dans les grottes et les rochers qui entouraient cette surface immaculée - des gémissement de plaisir amoureux aussi bien que des fracas guerriers amplifiés par l'écho. Des sensations suaves, des parfums légers s'exhalaient de toutes parts et embaumaient les brises. Les embruns, le feu du soleil, colorant et durcissant les chairs, hâlaient les visages et leur donnaient un air viril.

Auteur: Papadiamándis Aléxandros

Info: L'ile d'Ouranitsa

[ océan ]

 

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douleur

Artaud a cette phrase terrible, atroce, insoutenable, qu’on peut en effet mettre sur le compte du délire, de la psychose, etc. – la "passion d’Artaud", a dit cliniquement Lacan l’une des très rares fois où il a daigné s’exprimer là-dessus, lui qui avait diagnostiqué en 1937 ou 38, je ne sais plus, qu’Artaud "n’écrirait plus une ligne"* –, ce passage se trouve dans les cahiers d’Ivry, ceux sortis en fac-similé – justement –, et je crois bien n’avoir jamais rien lu de si bouleversant. C’est une phrase où un abîme éthique est en jeu : "Je ne veux pas être bien, parce que je me / reposerais / et que je serais / soulagé dans le mal / Je veux être mal dans / le mal / et mal tant qu’il y aura du mal / Je ne veux pas être bien / Tant qu’il y / aura un atome / un soupçon de mal / je veux souffrir / toujours".

Auteur: Belhaj Kacem Mehdi

Info: Artaud et la théorie du complot. *Une anerie lacanienne de plus. Mg

[ souffrance ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

poète

Lorsqu'il souriait, il lui semblait que pour amener ce sourire sur ses lèvres, il lui avait fallu au préalable, péniblement, l'extraire du plus profond d'une caverne rocheuse. (...) Alors qu'en lui l'homme désespérait, que son être saignait de mille blessures douloureuses, son art s'élevait comme un danseur richement paré, très haut, et là où Hölderlin sentait qu'il sombrait, sa musique et ses vers enchantaient. Il chantait la destruction et l'anéantissement de sa vie sur l'instrument de la langue qu'il parlait, dans de merveilleuses mélodies dorées. Il demandait justice pour son droit et son bonheur en miettes comme seuls demandent les rois, avec une fierté, une hauteur sans égale dans toute la littérature.

Les mains d'un pouvoir fatal l'arrachèrent au monde et à ses dimensions trop étriqués pour lui, et le jetèrent par-dessus le bord du saisissable, dans la folie, et il sombra comme un géant dans ses abîmes désirables et bienfaisantes, inondés de lumière, riche en feux follets, afin d'y somnoler pour toujours, dans une douce distraction et dans l'opaque.

Auteur: Walser Robert

Info: Hölderlin

[ éloge ] [ contraste ] [ portrait ]

 

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problème des universaux

[...] un des éléments déterminants de la philosophie d'Occam, assurément le plus incisif, consiste en une humanisation radicale du langage. Les mots, comme le soulignait E. Bréhier, sont désormais conventionnels, ils sont le fruit d'une institution. Ainsi, le langage n'est plus le reflet privilégié de l'être ; les idées, les concepts, l'universel n'ont de réalité que dans l'âme. Selon Occam, "les mots sont créés par imposition", c'est-à-dire par une donation de sens qui réunit de façon arbitraire un son à un concept. Cette innovation vise une dissolution du rapport naturel entre le nom et la chose qu'il désigne. Un abîme est donc creusé entre la réalité objective et le langage, de telle sorte que celui-ci n'a plus de prise directe sur le monde. Autrement dit, les mots ne contiennent plus, ils ne révèlent plus l'essence des êtres. Les noms des choses, comme le pensait encore Cratyle, ne dérivent plus de leur nature. Ainsi, le mystère qui associait depuis les origines l'acte divin de Création à l'acte de nomination se trouve-t-il occulté dans la nouvelle conception nominaliste du verbe.

Auteur: Geay Patrick

Info: Dans "Hermès trahi", pages 94-95

[ résumé ] [ autonomisation ] [ sécularisation ] [ éloignements sémantiques ]

 
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ego reproducteur

Essayons de cerner l'essentiel : la pérennité de l'homme, lorsque au moins il en a conscience, si misérablement et grotesquement inutile qu'il se représente à lui-même aux heures de découragement. Cette conscience-là, comment la retrouverait-il, comment y puiserait-il la force de durer et la fierté d'avoir duré, sinon en baissant la tête vers les abîmes du passé et en plongeant dans ces profondeurs un regard aveugle et reconnaissant ? Voici le malllon doué de vie qui prend conscience de la chaîne ininterrompue à laquelle il appartient. Vers l'avenir, c'est le vide sidéral, peuplé de foules en suspens, livré aux plèbes. Il est le dernier mailIon : de l'avenir il ne sait rien et l'ébauche des maillons suivants qui se forment l'inquiète. Il peut ensemencer conformément aux lois de l'espèce, par les temps que nous vivons il n'engendrera que l'incertitude, quelque chose et quelqu'un qui lui ressembleront de moins en moins et qui, très vite, ne lui ressembleront plus du tout et ne ressembleront plus à rien. Tandis qu'à l'opposé, combien la chaîne se révèle solide, si toutefois on veut bien s'aviser de son existence !

Auteur: Raspail Jean

Info: Le Son des tambours sur la neige et autres nouvelles d'ailleurs

[ dérisoire ]

 

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sociologie politique

À compter des années 80 on nous a expliqué que les Trente Glorieuses étaient notre dernier grand récit collectif. Cette aventure-là étant terminée, elle entraînait dans la mort, avec elle, tous les récits collectifs qui lui étaient liés — au nombre desquels le syndicalisme, censé veiller à la redistribution des fruits de cette croissance. Mais l'activité syndicale n'étant pas apparue avec la croissance, elle en était indépendante et la mort de l'une n'aurait pas dû abîmer l'autre, ou la ringardiser — en bonne logique. On en a pourtant profité pour décréter la mort du syndicalisme et de ses visées sociales. Un exemple de cette atrophie des discours collectifs: l'expression "plein-emploi" n'est plus du tout utilisée, elle sonne comme un vieux piano désaccordé. Plus aucun élu ou candidat ne l'utilise. Ils ont tous renoncé à ce projet de société. Les forces de l'ordre ont besoin du chômage de masse, qui crée l'inquiétude, l'insécurité mentale, la précarité matérielle et spirituelle ou psychologique. Quand tu trembles comme une feuille, tu n'es plus en état de combattre (la direction). La guerre de tous contre tous a été entérinée.

Auteur: Bertina Arno

Info: Ceux qui trop supportent, Pp 79-80, Verticales

[ vingtième siècle ] [ France ]

 

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remords

- Peur de vous ? Non, pas une seconde ! Peur de mourir ? Pas davantage. Il y a cinq ans que je n'ai peur que d'une seule chose... que la mort m'oublie !
- Taré ! Cracha Stanislas avec dégout.
Steinberg prit une profonde respiration avant de s'expliquer.
- Voyez-vous, monsieur de Saint Avril, hier était un anniversaire pour moi. Ma femme et mes deux enfants sont morts voilà exactement cinq ans. Une plaque de verglas dans un virage, cela a fait vingt lignes dans le journal et un abîme dans mon existence. J'ai cinquante-huit ans à présent et depuis, vous me croirez ou pas, je survis, je végète. Je fais croire que j'existe, c'est de l'illusion. Je ne suis qu'une ombre, incapable de vivre le deuil de mes fils et de ma femme. Je donne des conseils à mes patients, je les aide, les soutiens, les bouscule... mais moi... je suis impuissant à régler mon propre drame. Je n'arrive pas... je ne veux pas apaiser ce deuil... Je... Je ne pense pas que vous puissiez comprendre... Juste ceci... la voiture... c'est moi qui conduisais... !

Auteur: Ben Kemoun Hubert

Info: Les hasards sont assassins

[ deuil ] [ responsabilité ] [ famille ]

 

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existence

Les gouttes de pluie sur la vitre ont un bombement argenté et une bordure laiteuse. La pluie s'arrête. Les gouttelettes ne partent pas tout de suite. Elles forment une voix lactée cloutée. Elles semblent figée comme parfois nos vies. Puis l'une se met en route. Il est difficile de ne pas penser qu'elle va vers sa mort. La jeune élue, poussée par le vent, s'éloigne de ses sœurs idolâtres, crispées dans une fausse immortalité. La petite vivante avec sa joie muette glisse en oblique vers l'abîme, dans l'angle de la vitre encadrée d'acier froid. Voilà. C'est fini. Vivre n'est rien d'autre que donner sa lumière, traverser la voie lactée des épreuves, disparaître - et continuer, car telle était la parole qui se matin se fracassait en dizaines de gouttes d'eau sur la vitre insensible d'un train entre Paris et Genève : aucune lumière ne se perd. Nous sommes des paillettes d'or détachées d'une statue vivante. Nous sommes des instants de son souffle, des pollens de sa voix, des petites gouttes de pluie qui prennent le train sans billet jusqu'à l'éternel qui est ceci, ici, maintenant.

Auteur: Bobin Christian

Info: Un bruit de balançoire

[ éphémère ] [ instant présent ]

 
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Ajouté à la BD par miguel