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résignation

(...) Une des propriétés les plus extraordinaires de la nature humaine qu'ait révélé cette période est la soumission. On a vu d'énormes files d'attente se constituer devant les lieux d'exécution et les victimes elles-même veillaient au bon ordre de ces files. On a vu des mères prévoyantes qui, sachant qu'il faudrait attendre l’exécution pendant une longue et chaude journée, apportaient des bouteilles d'eau et du pain pour leurs enfants. Des millions d'innocents, pressentant une arrestation prochaine, préparaient un paquet avec du linge et une serviette et faisaient à l'avance leurs adieux. (...) Et ce ne furent pas des dizaines de milliers, ni même des dizaines de millions, mais d'énormes masses humaines qui assistèrent sans broncher à l'extermination des innocents. Mais ils ne furent pas seulement des témoins résignés; quand il le fallait, ils votaient pour l'extermination, ils marquaient d'un murmure approbateur leur accord avec les assassinats collectifs. Cette extraordinaire soumission des hommes révéla quelque chose de neuf et d'inattendu. Bien sûr, il y eut la résistance, il y eut le courage et la ténacité des condamnés, il y eut des soulèvements, il y eut des sacrifices, quand, pour sauver un inconnu, des hommes risquaient leur vie et celle de leurs proches. Mais, malgré tout, la soumission massive reste un fait incontestable.(...)

Auteur: Grossman Vassili

Info: Vie et Destin, Extrait n°2 p. 280

[ ww2 ] [ fatalisme ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

guerre

Le nerf de la guerre : Il n'y a pas d'opinion plus fausse que celle qui veut que l'argent soit le nerf de la guerre. Elle a été formulée par Quinte-Curce, à l'occasion de la guerre d'Antipater, roi de Macédoine, contre Lacédémone. Il raconte que par défaut d'argent, le roi de Sparte fut obligé de livrer bataille et fut vaincu ; que, s'il eût pu différer de quelques jours, la nouvelle de la mort d'Alexandre serait arrivée et qu'il eût été vainqueur sans coup férir : mais manquant d'argent, et craignant que son armée, faute de paye, ne l'abandonnât, il fut obligé de hasarder la bataille, et c'est là-dessus que l'historien se fonde pour écrire que l'argent est le nerf de la guerre. [...] Ce n'est pas l'or, ce sont les bons soldats qui sont le nerf de la guerre. L'or ne fait pas trouver de bonnes troupes, mais les bonnes troupes font trouver de l'or. Si les Romains avaient voulu faire la guerre avec de l'or plus qu'avec du fer, tous les trésors de l'univers ne leur auraient pas suffi, à en juger par la grandeur de leurs entreprises et par les difficultés qu'ils y rencontrèrent ; mais l'usage qu'ils faisaient du fer les empêchait de manquer d'or : les peuples qui les redoutaient leur apportaient leurs richesses jusque dans leur camp.

Auteur: Machiavel Nicolas

Info: Discours sur la première Décade de Tite-Live II x p.538

[ force ] [ pouvoir ] [ historique ] [ fric ]

 

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renaissance

Raphaël, Léonard et Michel-Ange furent, tous trois, élevés à l'ancienne école; leurs maîtres, presque aussi grands qu'eux, connaissaient la véritable mission de l'art et l'avaient remplie; imbus du vieil et profond esprit religieux, ils le communiquèrent à leurs disciples qui, se désaltérant, en même temps, aux vives sources de savoir qui jaillissaient de toutes parts, excitèrent l'admiration universelle. Dans son émerveillement, le monde crut que leur grandeur venait de leur nouvelle science, au lieu de l'attribuer aux anciens principes qui apportaient la vie. Et, depuis lors, on a essayé de produire des Michel-Ange et des Léonard, par l'enseignement aride des sciences et on s'est étonné qu'il n'en apparût pas, sans se rendre compte que ces nobles patriarches tenaient par leurs racines aux grands rochers des siècles passés, et que notre enseignement scientifique d'aujourd'hui consiste à arroser, avec assiduité, des arbres dont toutes les branches ont été coupées.
Et j'ai été généreux pour la science de la Renaissance en admettant que ces grands maîtres en ont profité, car ma conviction, partagée par beaucoup de ceux qui aiment Raphaël, est qu'il peignit mieux alors qu'il savait moins. Michel-Ange fut souvent entrainé dans une vaine et désagréable démonstration de ses connaissances anatomiques qui cache encore à beaucoup de gens son immense puissance; et Léonard gâcha tellement sa vie dans ses travaux d'ingénieur qu'il reste à peine un tableau portant son nom.

Auteur: Ruskin John

Info:

[ art pictural ]

 

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poésie

Pour écrire un seul vers, il faut avoir vu beaucoup de villes, d’hommes et de choses, il faut connaître les animaux, il faut sentir comment volent les oiseaux et savoir quel mouvement font les fleurs en s’ouvrant le matin. Il faut pouvoir repenser à des chemins dans des régions inconnues, à des rencontres inattendues, à des départs que l’on voyait longtemps approcher, à des jours d’enfance dont le mystère ne s’est pas encore éclairci, à ses parents qu’il fallait qu’on froissât lorsqu’ils vous apportaient une joie et qu’on ne la comprenait pas (c’était une joie faite pour un autre), à des maladies d’enfance qui commençaient si singulièrement, par tant de profondes et graves transformations, à des jours passés dans des chambres calmes et contenues, à des matins au bord de la mer, à la mer elle-même, à des mers, à des nuits de voyage qui frémissaient très haut et volaient avec toutes les étoiles – et il ne suffit même pas de savoir penser à tout cela. Il faut avoir des souvenirs de beaucoup de nuits d’amour, dont aucune ne ressemblait à l’autre, de cris de femmes hurlant en mal d’enfant, et de légères, de blanches, de dormantes accouchées qui se refermaient. Il faut encore avoir été auprès de mourants, être resté assis auprès de morts, dans la chambre, avec la fenêtre ouverte et les bruits qui venaient par à-coups. Et il ne suffit même pas d’avoir des souvenirs. Il faut savoir les oublier quand ils sont nombreux, et il faut avoir la grande patience d’attendre qu’ils reviennent. Car les souvenirs ne sont pas encore cela. Ce n’est que lorsqu’ils deviennent en nous sang, regard, geste, lorsqu’ils n’ont plus de nom et ne se distinguent plus de nous, ce n’est qu’alors qu’il peut arriver qu’en une heure très rare, du milieu d’eux, se lève le premier mot d’un vers.

Auteur: Rilke Rainer Maria

Info: Les Cahiers de Malte Laurids Brigge (1910)

[ expériences ] [ vécu ] [ sensibilité ] [ sensations ] [ conseil d'écriture ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

repli narcissique

Et pourtant, de nombreux ex-radicaux ont eux-mêmes embrassé la sensibilité thérapeutique dans les années 1970. Rennie Davis abandonne le radicalisme politique pour suivre Maharaj Ji, le gourou adolescent. Abbie Hoffman, l’ancien chef des Yippies, décide qu’il est plus important de rassembler ses esprits que de mouvoir les multitudes. Son associé d’antan, Jerry Rubin, lorsqu’il atteignit l’âge terrible de trente ans, se trouva confronté à ses peurs et à ses anxiétés secrètes ; il déménagea alors de New York à San Francisco, et se mit à acheter – avec des revenus apparemment inépuisables – tous les produits offerts par les supermarchés spirituels de la côte Ouest. […]

Dans ses mémoires, modestement intitulées Grandir à trente-sept ans, Rubin témoigne des effets salutaires du régime thérapeutique. Après avoir négligé son corps pendant des années, il se donna "la permission d’être en bonne santé", et perdit rapidement quinze kilos. Nourriture diététique, jogging, yoga, saunas, chiropraxie, acupuncture lui donnèrent l’impression, à trente-sept ans, "d’en avoir vingt-cinq". Sur le plan spirituel, ses progrès se révélèrent tout aussi satisfaisants et indolores. Abandonnant son armure protectrice, son sexisme, sa "manie de l’amour", il apprit "à s’aimer suffisamment soi-même pour n’avoir pas besoin d’un autre pour se rendre heureux", et parvint à comprendre que sa politique révolutionnaire cachait un "conditionnement puritain" qui provoquait parfois en lui un certain malaise, à cause de sa célébrité et des avantages monétaires qu’elle lui valait. C’est apparemment sans efforts psychiques épuisants que Rubin a réussi à se convaincre « qu’il n’y a pas de mal à "goûter les bienfaits de la vie qu’apporte l’argent". […]

Pourtant, cet "énorme auto examen" donne peu d’indications touchant la compréhension de soi auquel il serait parvenu sur le plan personnel ou collectif. Sa conscience de soi demeure embourbée dans les clichés de la libéralisation des mœurs. Rubin examine "la femme en lui", son besoin de se faire une conception plus tolérante de l’homosexualité et son envie de "faire la paix" avec ses parents, comme si ces lieux communs apportaient des révélations difficilement acquises sur la condition humaine. […]

Comme tant d’anciens radicaux, Rubin n’a fait que substituer des slogans thérapeutiques en vogue aux slogans politiques de naguère, qu’il utilise dans l’un et l’autre cas sans tenir compte de leur signification.

Auteur: Lasch Christopher

Info: Dans "La culture du narcissisme", trad. Michel L. Landa, éd. Flammarion, Paris, 2018, pp. 35-38

[ itinéraire ] [ critique ] [ autosatisfaction ] [ beat generation ]

 
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Ajouté à la BD par miguel