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affliction

Semblable à la marée, la vie s'est retirée. Mes pieds nus se délectent et marquent mon passage sur ce sable doré. Un squelette de poisson ballotte doucement, bercé bien tendrement par un souffle léger. Voilà que ton visage vient se superposer au vestige d'une vie passée. Et la vue de ces vagues, qui tout au loin se brisent, embrume pour un temps mes yeux si fatigués. Je fixe l'horizon, je me dis que bientôt la mer va remonter, emportant avec elle ce qu'elle a déposé. Et la vie reprendra juste là sous mes pieds. Subitement je suis bien, je profite de l'instant, le soleil me réchauffe, mon amour est présent. Le deuil est comme la mer, il subit les marées qui déposent çà et là les traces d'un temps révolu.

Auteur: Bauwens Pascale

Info: Petit Ogre, Témoignage sur le suicide chez l'enfant 2014

[ souffrance ]

 

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mégapole

Elle sortit de l'atelier et, depuis la terrasse, contempla la cité que Karan avait choisie comme sujet. Des carrés bien géométriques et éclatants de piments rouges mis à sécher sur la terrasse de ses voisins n'avaient pas encore été ramassés : dans la lumière du jour déclinante, on aurait dit des motifs sur un tapis mythique, tellement sombres qu'ils paraissaient teints dans le sang. Des chauves-souris fusaient des branches envahissantes d'un immense banian, dont les épaisse racines aériennes plongeaient jusqu'au sol, tels des tentacules. Des lumignons clignotaient sur la mer d'Oman : dhows manoeuvrés, au loin, par d'étiques pêcheurs avinés. Ces images se fondaient en un flou de détails familiers et rassurants, ceux-là même qui avaient bercé l'enfance de Rhea : pour la première fois de sa vie, elle se demanda ce que ce spectacle aurait signifié aux yeux de qui n'aurait pas été natif de Bombay.

Auteur: Siddharth Dhanvant Shanghvi

Info: Les derniers flamants de Bombay

[ Asie ] [ Inde ]

 
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saisons

Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres;

Adieu, vive clarté de nos étés trop courts!

J'entends déjà tomber avec des chocs funèbres

Le bois retentissant sur le pavé des cours.

Tout l'hiver va rentrer dans mon être: colère,

Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,

Et, comme le soleil dans son enfer polaire,

Mon coeur ne sera plus qu'un bloc rouge et glacé.

J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe;

L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd.

Mon esprit est pareil à la tour qui succombe

Sous les coups du bélier infatigable et lourd.

II me semble, bercé par ce choc monotone,

Qu'on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.

Pour qui? — C'était hier l'été; voici l'automne!

Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.

Auteur: Baudelaire Charles

Info: Les Fleurs du Mal

[ poème ]

 

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progrès

- Je tiens la civilisation pour le grand fossoyeur de l'humanité, déclara-t-il avec emphase. Le civilisé vit certes plus longtemps qu'auparavant, mais dans quel état ! Coupé de la nature et de ses instincts, il a perdu son énergie vitale et végète dans les villes pestilentielles et bruyantes, névrosé, faible, débile, aveuglé de lumière électrique, décérébré d'informatique, abruti de viande, de vin, de chimie, de travail absurde et de loisirs infantilisants, bercé par le rythme infernal de l'accumulation sans fin, baignant dans une orgie de science dont il se délecte sans même savoir pourquoi, et tout cela pour le plus grand profit des exploiteurs et des vandales gouvernementaux ! L'Etat est une prison, camarades ! La société, un asile de fous où la police monte la garde au profit des capitalistes ! La civilisation est consubstantielle à la terreur !
Il reprit son petit panier et se remit à tresser ses lianes de chèvrefeuille.

Auteur: Maulin Olivier

Info: Le bocage à la nage, p. 76

[ dénigrement ]

 

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mourir

La mort ne faisait pas souffrir. C'était la vie, cette atroce sensation d'étouffement : c'était le dernier coup que devait lui porter la vie. Ses mains et ses pieds, dans un dernier sursaut de volonté, se mirent à battre, à faire bouillonner l'eau, faiblement, spasmodiquement. Mais malgré ses efforts désespérés, il ne pourrait jamais plus remonter ; il était trop bas, trop loin. Il flottait languissement, bercé par un flot de visions très douces. Des couleurs, une radieuse lumière l'enveloppaient, le baignaient, le pénétraient. Qu'était-ce ? On aurait dit un phare. Mais non, c'était dans son cerveau, cette éblouissante lumière blanche. Elle brillait de plus en plus resplendissante. Il y eut un long grondement, et il lui sembla glisser sur une interminable pente. Et, tout au fond, il sombra dans la nuit. Ca, il le sut encore : il avait sombré dans la nuit. Et au moment même où il le sut, il cessa de le savoir.

Auteur: London Jack

Info: Martin Eden

[ littérature ] [ disparaître ]

 

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éducation nationale

En lisant dans le substantiel discours de M. Thierry Cazes l’histoire de ces malheureux instituteurs, tour à tour gourmandés par le préfet pour leur indifférence, récompensé par le député qu’ils ont servi, honnis par celui qu’ils ont combattu, je pensais à l’infortuné maître d’école est vraiment la plus pitoyable victime de notre glorieuse République.

Nous avons pris un paysan et nous l’avons bourré d’une science hâtive de manuel, où se heurtent effroyablement les niaiseries de l’ancienne scolastique, les mensonges de la philosophie officielle et d’informes données scientifiques sans coordination, sans vue d’ensemble.

Puis nous l’avons bercé d’une illusion magique, nous lui avons dit qu’il était l’ambassadeur de la République auprès des habitants des campagnes, qu’il avait mission d’ouvrir à la lumière, d’éveiller aux idées de liberté, de solidarité, de justice, ces jeunes intelligences jusqu’ici maintenues dans l’inconscience : réservoir inépuisable des énergies de l’avenir. Et, dans la belle école toute neuve, nous avons installé le prophète ébloui du verbe nouveau.

Auteur: Clemenceau Georges

Info: Le grand Pan (Éd.1896)

[ France ] [ historique ] [ formatage ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

patriotisme

Depuis l'enfance ils s'étaient bercés des illusions d'une nouvelle civilisation barbare. Ils avaient brûlé des livres en chantant, dansé d'innocentes rondes enfantines autour de bambins sanglotants, coupables d'embrasser une religion différente de la leur, dénoncé le père, le frère, le camarade de classe, le voisin féru de politique ou le professeur idéaliste, à une police d'hommes en noir qui venaient chercher leurs proies au beau milieu de la nuit. Ils avaient crié leur haine dans de curieuses retraites aux flambeaux qui n'étaient pas sans nous rappeler les ridicules pantomimes de la "place du serpent". Comme les Mayas, ils avaient voué leurs âmes à des chamans grotesques et grimaçants qui annonçaient la fin de l'ancien monde, l'avènement d'un "ordre nouveau" et la disparition des prétendus responsables de tous les maux de la société dans de gigantesques holocaustes.
Nous ne sommes pas des êtres miséricordieux.
Quand nous avons vu ces deux-là s'aventurer dans nos souterrains, quand ils ont brisé les portes et profané notre sanctuaire, riant des sépultures de nos frères, nous avons compris qu'ils étaient venus ici pour effacer jusqu'au souvenir des civilisations des siècles passés.
Alors nous sommes devenus impitoyables.

Auteur: Przybylski Stéphane

Info: Origines, tome 1 : Le Château des Millions d'Années

[ défense ]

 

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écoute

EXTASE MUSICALE
Je sens que je perds de la matière, que mes résistances physiques tombent et que je me dissous dans l'harmonie et la montée des mélodies intérieures. Une sensation diffuse, un sentiment ineffable me réduisent à une somme indéterminée de vibrations, de résonnances intimes et de sonorités envoutantes.
Tout ce que j'ai cru singulier en moi, isolé dans la solitude matérielle, fixé dans une consistance physique et déterminé par une structure rigide, semble s'être résolu dans un rythme d'une fascination séduisante et d'une fluidité insaisissable. Comment pourrais-je décrire avec des mots la façon dont les mélodies se déploient, et celle qu'à mon corps de vibrer, intégré à la vibration universelle, évoluant dans des sinuosités fascinantes dont l'irréalité aérienne me transporte ? Dans les moments de musicalisation intérieure je perdais le goût des matérialités pesantes, je perdais ma substance minérale, cette pétrification qui me reliait à une fatalité cosmique, et je m'élançais dans l'espace, bercé de mirages, oublieux de leur illusion, et de rêves indifférent à leur réalité. Nul ne comprendra le sortilège irrésistible des mélodies intérieures, nul ne ressentira l'exaltation et la béatitude s'il ne se réjouit pas de cette irréalité et n'aime le rêve plus que l'évidence. L'état musical n'est pas une illusion parce qu'aucune illusion ne peut donner ni certitude d'une telle ampleur, ni sensation organique d'absolu, de vécu incomparable, significative par elle-même et expressive dans son essence.

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Le livre des leurres

[ fuite ] [ onirisme ] [ musique ]

 

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pensée-de-femme

Les coups je les ai reçus et le secret je l’ai gardé jusqu’au bout. J’ai trente-huit ans et je n’ai pas d’enfant. Je n’ai pas de photo à montrer, ni prénom ni âge à annoncer, pas d’anecdote ou de bon mot à raconter.

J'abrite en moi-même, et à l’insu de tous, l’enfant que je n’aurai pas. Mon ventre abîmé est peuplé de visages à la peau diaphane, de dents minuscules et blanches, de cheveux de soie. Et lorsqu’on me pose la question – c’est-à-dire chaque fois que je rencontre une nouvelle personne (en particulier des femmes), chaque fois qu’après m’avoir demandé quel est mon métier (ou juste avant), on me demande si j’ai des enfants –, chaque fois donc que je dois me résigner à tracer sur le sol cette ligne à la craie blanche qui sépare le monde en deux (celles qui en ont, celles qui n’en ont pas), j’ai envie de dire : non je n’en ai pas, mais regarde dans mon ventre tous les enfants que je n’ai pas eus, regarde comme ils dansent au rythme de mes pas, ils ne demandent rien d’autre qu’à être bercés, regarde cet amour que j’ai retenu converti en lingots, regarde l’énergie que je n’ai pas dépensée et qu’il me reste à distribuer, regarde la curiosité naïve et sauvage qui est la mienne, et l’appétit de tout, regarde l’enfant que je suis restée moi-même faute d’être devenue mère, ou grâce à cela.

Auteur: Vigan Delphine de

Info: Les loyautés

[ nullipare ] [ regrets ]

 

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moi-sujet

Au premier instant de répit, dès que je n'ai plus besoin de surveiller ma marche, pour éviter des véhicules ou ne pas gêner les passants, dès que je n'ai plus à parler au premier venu, ni la pénible obligation de franchir une porte toute proche - alors je pars de nouveau sur les eaux du rêve, comme un bateau de papier à bouts pointus, et je retourne une nouvelle fois à l'illusion languissante qui avait bercé ma vague conscience du matin naissant, au son des carrioles qui légumisent.

C'est alors, au beau milieu de la vie, que le rêve déploie ses vastes cinémas. Je descends une rue irréelle de la Ville Basse, et la réalité des vies qui n'existent pas m'enveloppe tendrement le front d'un chiffon blanc de fausses réminiscences. Je suis navigateur, sur une mer ignorée de moi-même. J'ai triomphé de tout, là où je ne suis jamais allé. Et c'est une brise nouvelle que cette somnolence dans laquelle je peux avancer, penché en avant pour cette marche sur l'impossible.

Chacun de nous a son propre alcool. Je trouve assez d'alcool dans le fait d'exister. Ivre de me sentir, j'erre et marche bien droit. Si c'est l'heure, je reviens à mon bureau, comme tout le monde. Si ce n'est pas l'heure encore, je vais jusqu'au fleuve pour regarder le fleuve, comme tout le monde. Je suis pareil. Et derrière tout cela, il y a mon ciel, où je me constelle en cachette et où je possède mon infini.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info: Le livre de l'intranquillité

[ refuge intérieur ]

 

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Ajouté à la BD par miguel