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géopolitique

Le grand paradoxe des bombardements de l’OTAN en Yougoslavie n’a donc pas été celui dont se sont plaints les pacifistes occidentaux (en bombardant la Yougoslavie dans le but d’empêcher la purification ethnique du Kosovo, l’OTAN a en réalité déclenché une purification à grande échelle et a ainsi créé la catastrophe humanitaire même qu’elle était censée prévenir), mais un plus grand paradoxe encore, inclus dans l’idéologie victimaire : le fait que l’OTAN a privilégié la faction kosovar "modérée" d’Ibrahim Rugova, désormais discréditée, au détriment de l’Armée de libération du Kosovo "radicale" (UCK). Cela signifie que l’OTAN a volontairement bloqué la résistance armée des Albanais eux-mêmes. [...] Après l’accord sur le retrait de l’armée serbe du Kosovo, cette méfiance à l’égard de l’UCK a refait surface de plus belle : une fois encore était évoqué le "danger" que représenterait l’accession au pouvoir de l’UCK – comme les sources de l’OTAN et les médias ont aimé à le répéter – la "place étant libre" depuis le retrait de l’armée serbe du Kosovo. Le contenu réel de cette méfiance n’aurait pas pu être plus clair : d’accord pour défendre les Albanais sans défense face aux monstres serbes, mais à la condition qu’ils ne puissent en aucune manière se défendre eux-mêmes en s’affirmant comme sujets politiques autonomes et souverains, des sujets n’ayant aucun besoin du parapluie bienveillant du "protectorat" de l’OTAN...

Bref, alors que l’OTAN intervenait pour protéger les victimes kosovars, elle prenait bien soin par ailleurs qu’ils restent des victimes, les habitants d’un pays dévasté à la population passive et non pas une force politico-militaire capable de se défendre elle-même. La stratégie de l’OTAN a ainsi été perverse au strict sens freudien du terme : elle s’est rendue elle-même (co)responsable des calamités qu’elle était censée combattre [...]. C’est ce même paradoxe victimaire que l’on rencontre ici : l’Autre ne doit être défendu que s’il demeure victime (c’est la raison pour laquelle nous fûmes bombardés d’images de mères kosovars sans défense, de récits émouvants de la souffrance d’enfants et de vieillards). Et c’est au moment où la victime cesse de se comporter comme une victime, en voulant répliquer en son nom, qu’elle se transforme magiquement et immédiatement en un Autre terroriste, intégriste ou trafiquant de drogue... Il s’agit donc, et cela est crucial, de reconnaître sans détour dans cette idéologique victimaire mondiale, dans cette identification du sujet humain lui-même à "quelque chose qui peut être blessé", le mode idéologique typique du capitalisme mondial contemporain. Cette idéologie victimaire est le mode même par lequel s’exerce le règne du Capital, et ce d’autant plus implacablement qu’il s’exerce la plupart du temps de façon invisible à l’œil nu.

Auteur: Zizek Slavoj

Info: Dans "Fragile absolu", éditions Flammarion, 2010, pages 87 à 89

[ interprétation psychanalytique ] [ instrumentalisation ] [ manipulation affective ] [ domination américaine ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

recherche fondamentale

Pourquoi nous pouvons cesser de nous inquiéter et aimer les accélérateur de particules

En plongeant dans les mystères de l'Univers, les collisionneurs sont entrés dans l'air du temps et ont exploité  merveilles et  craintes de notre époque.

Le scénario semble être le début d'une mauvaise bande dessinée de Marvel, mais il se trouve qu'il éclaire nos intuitions sur les radiations, la vulnérabilité du corps humain et la nature même de la matière. Grâce aux accélérateurs de particules, les physiciens peuvent étudier les particules subatomiques en les accélérant dans de puissants champs magnétiques, puis en retraçant les interactions qui résultent des collisions. En plongeant dans les mystères de l'Univers, les collisionneurs se sont inscrits dans l'air du temps et ont nourris des émerveillements et des craintes de notre époque.

Dès 2008, le Grand collisionneur de hadrons (LHC), exploité par l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN), a été chargé de créer des trous noirs microscopiques qui permettraient aux physiciens de détecter des dimensions supplémentaires. Pour beaucoup, cela ressemblait à l'intrigue d'un film catastrophe de science-fiction. Il n'est donc pas surprenant que deux personnes aient intenté une action en justice pour empêcher le LHC de fonctionner, de peur qu'il ne produise un trou noir suffisamment puissant pour détruire le monde. Mais les physiciens firent valoir que l'idée était absurde et la plainte fut rejetée.

Puis, en 2012, le LHC détecta le boson de Higgs tant recherché, une particule nécessaire pour expliquer comment les particules acquièrent une masse. Avec cette réalisation majeure, le LHC est entré dans la culture populaire ; il a figuré sur la pochette de l'album Super Collider (2013) du groupe de heavy metal Megadeth, et a été un élément de l'intrigue de la série télévisée américaine The Flash (2014-).

Pourtant, malgré ses réalisations et son prestige, le monde de la physique des particules est si abstrait que peu de gens en comprennent les implications, la signification ou l'utilisation. Contrairement à une sonde de la NASA envoyée sur Mars, les recherches du CERN ne produisent pas d'images étonnantes et tangibles. Au lieu de cela, l'étude de la physique des particules est mieux décrite par des équations au tableau noir et des lignes sinueuses appelées diagrammes de Feynman. Aage Bohr, lauréat du prix Nobel dont le père Niels a inventé le modèle Bohr de l'atome, et son collègue Ole Ulfbeck sont même allés jusqu'à nier l'existence physique des particules subatomiques, qui ne sont rien d'autre que des modèles mathématiques.

Ce qui nous ramène à notre question initiale : que se passe-t-il lorsqu'un faisceau de particules subatomiques se déplaçant à une vitesse proche de celle de la lumière rencontre la chair du corps humain ? Peut-être parce que les domaines de la physique des particules et de la biologie sont conceptuellement très éloignés, ce ne sont pas seulement les profanes qui manquent d'intuition pour répondre à cette question, mais aussi certains physiciens professionnels. Dans une interview réalisée en 2010 sur YouTube avec des membres de la faculté de physique et d'astronomie de l'université de Nottingham, plusieurs experts universitaires ont admis qu'ils n'avaient aucune idée de ce qui se passerait si l'on introduisait une main à l'intérieur du faisceau de protons du LHC. Le professeur Michael Merrifield l'exprima de manière succincte : "C'est une bonne question. Je ne connais pas la réponse. Ce serait probablement néfaste pour la santé". Le professeur Laurence Eaves se montra également prudent avant de tirer des conclusions. "À l'échelle de l'énergie que nous percevons, ce ne serait pas si perceptible que cela, déclara-t-il, sans doute avec un brin d'euphémisme britannique. Est-ce que je mettrais ma main dans le faisceau ? Je n'en suis pas sûr."

De telles expériences de pensée peuvent être des outils utiles pour explorer des situations qui ne peuvent pas être étudiées en laboratoire. Il arrive cependant que des accidents malencontreux donnent lieu à des études de cas : occasions pour les chercheurs d'étudier des scénarios qui ne peuvent pas être induits expérimentalement pour des raisons éthiques. Etude de cas ici avec un échantillon d'une personne et qui ne comporte pas de groupe de contrôle. Mais, comme l'a souligné en son temps le neuroscientifique V S Ramachandran dans Phantoms in the Brain (1998), il suffit d'un seul cochon qui parle pour prouver que les cochons peuvent parler. Le 13 septembre 1848, par exemple, une barre de fer transperça la tête de Phineas Gage, un cheminot américain, et modifia profondément sa personnalité, ce qui constitue une première preuve de l'existence d'une base biologique de la personnalité.

Et puis le 13 juillet 1978, un scientifique soviétique du nom d'Anatoli Bugorski plongea sa tête dans un accélérateur de particules. Ce jour-là, Bugorski vérifiait un équipement défectueux sur le synchrotron U-70 - le plus grand accélérateur de particules d'Union soviétique - lorsqu'un mécanisme de sécurité a lâché et qu'un faisceau de protons se déplaçant à une vitesse proche de celle de la lumière lui a traversé la tête, à la manière de Phineas Gage. Il est possible qu'à ce moment de l'histoire, aucun autre être humain n'ait jamais été confronté à un faisceau de rayonnement concentré à une énergie aussi élevée. Bien que la protonthérapie - un traitement du cancer utilisant des faisceaux de protons pour détruire les tumeurs - ait été mise au point avant l'accident de Bugorski, l'énergie de ces faisceaux ne dépasse généralement pas 250 millions d'électronvolts (une unité d'énergie utilisée pour les petites particules). Bugorski aurait pu subir de plein fouet les effets d'un faisceau d'une énergie plus de 300 fois supérieure, soit 76 milliards d'électrons-volts.

Le rayonnement de protons est en effet très rare. Les protons provenant du vent solaire et des rayons cosmiques sont stoppés par l'atmosphère terrestre, et le rayonnement de protons est si rare dans la désintégration radioactive qu'il n'a été observé qu'en 1970. Les menaces plus familières, telles que les photons ultraviolets et les particules alpha, ne pénètrent pas dans le corps au-delà de la peau, sauf en cas d'ingestion d'une substance radioactive. Le dissident russe Alexandre Litvinenko, par exemple, fut tué par des particules alpha qui ne pénètrent même pas le papier lorsqu'il ingéra à son insu du polonium-210 radioactif livré par un assassin. Mais lorsque les astronautes d'Apollo, protégés par des combinaisons spatiales, furent exposés à des rayons cosmiques contenant des protons et à des formes de rayonnement encore plus exotiques, ils signalèrent des éclairs de lumière visuelle, signe avant-coureur de ce qui allait arriver à Bugorski le jour fatidique de son accident. Selon une interview publiée dans le magazine Wired en 1997, Bugorski a immédiatement vu un flash lumineux intense, mais n'a ressenti aucune douleur. Le jeune scientifique fut transporté dans une clinique de Moscou, la moitié du visage gonflée, et les médecins s'attendaient au pire.

Les particules de rayonnement ionisant, telles que les protons, font des ravages dans l'organisme en brisant les liaisons chimiques de l'ADN. Cette atteinte à la programmation génétique d'une cellule peut tuer la cellule, l'empêcher de se diviser ou induire une mutation cancéreuse. Les cellules qui se divisent rapidement, comme les cellules souches de la moelle osseuse, sont les plus touchées. Les cellules sanguines étant produites dans la moelle osseuse, par exemple, de nombreux cas d'irradiation se traduisent par une infection et une anémie dues à la perte de globules blancs et de globules rouges, respectivement. Mais dans le cas particulier de Bugorski, les radiations étaient concentrées le long d'un faisceau étroit à travers la tête, au lieu d'être largement dispersées lors des retombées nucléaires, comme cela a été le cas pour de nombreuses victimes de la catastrophe de Tchernobyl ou du bombardement d'Hiroshima. Pour Bugorski, les tissus particulièrement vulnérables, tels que la moelle osseuse et le tractus gastro-intestinal, auraient pu être largement épargnés. Mais là où le faisceau a traversé la tête de Bugorski, il a déposé une quantité obscène d'énergie de rayonnement, des centaines de fois supérieure à une dose létale selon certaines estimations.

Et pourtant, Bugorski est toujours en vie aujourd'hui. La moitié de son visage est paralysée, ce qui donne à un hémisphère de sa tête une apparence étrangement jeune. Il serait sourd d'une oreille. Il a souffert d'au moins six crises tonico-cloniques généralisées. Communément appelées crises de grand mal, ce sont les crises les plus fréquemment représentées au cinéma et à la télévision, impliquant des convulsions et une perte de conscience. L'épilepsie de Bugorski est probablement le résultat de la cicatrisation des tissus cérébraux causée par le faisceau de protons. Il souffre également de crises de petit mal ou d'absence, des crises beaucoup moins spectaculaires au cours desquelles la conscience est brièvement interrompue. Aucun cancer n'a été diagnostiqué chez Bugorski, bien qu'il s'agisse souvent d'une conséquence à long terme de l'exposition aux rayonnements.

Bien que son cerveau ait été traversé par rien de moins qu'un faisceau d'accélérateur de particules, l'intellect de Bugorski est resté intact et il a passé son doctorat avec succès après l'accident.  

Auteur: Frohlich Joel

Info: https://bigthink.com/   23 juin  2020

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Ajouté à la BD par miguel

USA

Est-ce que Washington nous tuera tous?
Saviez-vous que Washington maintient 450 ICBM [missiles balistiques intercontinentaux] nucléaires en alerte instantanée? Washington pense que cela nous met en sécurité. Le raisonnement, si on peut appeler cela de la raison, est qu'en étant capables de tirer en quelques minutes, personne n'essaiera d'attaquer les États-Unis avec des armes nucléaires. Les missiles états-uniens sont en mesure de faire ce qu'ils doivent avant que les missiles de l'ennemi puissent atteindre les États-Unis pour détruire les nôtres.
Si cela vous fait vous sentir en sécurité, vous avez besoin de lire le livre d'Éric Schlosser, Command and Control.
Le problème avec les alertes instantanées est qu'elles peuvent faire des erreurs, des lancements accidentels et plus probablement non autorisés. Schlosser fait l'histoire de quasi lancements d'attaques qui auraient pu apporter un Armaggedon au monde.
Dans Catalyst, une publication de l'Union of Concerned Scientists [Union des scientifiques concernés], Elliott Negin raconte l'histoire du lieutenant-colonel soviétique Stanislav Petrov. Juste après minuit, en 1983, le système satellitaire d'alerte précoce de l'Union soviétique a déclenché l'alarme parce que 4 ICBM états-uniens se dirigeaient vers l'Union soviétique.
Le colonel Petrov était censé informer le dirigeant soviétique, qui aurait eu huit à dix minutes pour décider s'il lançait une attaque en représailles. Qui sait ce qu'il aurait décidé. Au lieu de quoi, le colonel Petrov a fait appel à son jugement. Il n'y avait pas de raison pour que les États-Unis attaquent l'Union soviétique. En plus, Petrov a raisonné qu'une attaque américaine impliquerait des centaines d'ICBM, peut-être des milliers. Il a vérifié si le radar au sol soviétique avait détecté l'entrée des ICBM, et il ne l'avait pas fait. Petrov a donc décidé que c'était une fausse alerte, et s'est assis dessus.
Il s'est avéré que le système d'alerte précoce avait pris par erreur un reflet de lumière solaire sur les nuages pour des missiles. C'était de justesse, ils ont eu chaud, mais Negin rapporte qu'une puce d'ordinateur abîmée et une carte de circuit mal installée sont parmi les coupables qui pourraient déclencher une guerre nucléaire. En d'autres termes, les sources de fausses alertes sont nombreuses.
Maintenant, venons-en à aujourd'hui. Imaginez un officier américain en train de surveiller le système d'alerte précoce des États-Unis. Pendant 15 ans, cet officier a entendu de la propagande de guerre, accompagnée des invasions et des bombardements de huit pays par les États-Unis. Les avertissements terroristes et les alertes à la sécurité abondent, tout comme les appels de politiciens américains et israéliens à larguer des bombes atomiques sur l'Iran. Les médias l'ont convaincu que la Russie avait envahi l'Ukraine et qu'elle est sur le point d'envahir les États baltes et la Pologne. Des troupes américaines et des blindés ont été dépêchés sur la frontière russe. On parle d'armer l'Ukraine. Poutine est dangereux et menace de la guerre atomique, amenant ses bombardiers stratégiques tout près de nos frontières et faisant exécuter des exercices nucléaires. L'officier américain vient d'entendre sur Fox News un général appeler à nouveau à tuer les Russes. Les Républicains l'ont convaincu qu'Obama vend l'Amérique à l'Iran, avec l'avertissement du sénateur Tom Cotton que la conséquence sera la guerre nucléaire. Nous serons tous tués parce qu'il y a un musulman à la Maison Blanche.
Pourquoi n'y a-t-il personne pour soutenir l'Amérique, s'étonne l'officier américain patriote, juste au moment où l'alarme se déclenche: ICBM entrants. Est-ce que c'est des Russes ou des Iraniens? Est-ce qu'Israël n'avait pas raison, après tout? Un programme d'armement nucléaire iranien caché? Ou Poutine a-t-il décidé que les États-Unis font obstacle à sa reconstruction de l'Empire soviétique, dont les médias américains affirment que c'est l'objectif de Poutine? Il n'y a aucun espace pour la réflexion dans l'esprit de l'officier américain. Il a été mis en alerte immédiate par la propagande incessante que les Américains appellent information. Il transmet l'avertissement.
Le conseiller néocon russophobe d'Obama à la Sécurité nationale: "Vous ne pouvez pas laisser Poutine continuer avec ça !" "Ce pourrait être une fausse alerte", réplique le président nerveux et agité. "Vous, espèce de lavette libérale! Ne savez-vous pas que Poutine est dangereux!? Pressez sur le bouton!"
Et c'est là que va le monde.
Considérons la russophobie extrême suscitée chez les Américains par le ministère de la Propagande, la diabolisation de Vladimir Poutine - le nouvel Hitler, Vlad l'Empaleur - la création propagandiste de la menace russe, le désir fou des néocons d'une hégémonie états-unienne mondiale, la haine de la Russie et de la Chine en tant que rivaux émergents capables d'exercer un pouvoir indépendant, la perte du statut de puissance américaine universelle et de liberté d'action unilatérale. Au milieu de ces émotions et de ces esprits influencés non par des faits mais par de la propagande, de l'orgueil et de l'idéologie, il y a une grande chance pour que la réponse de Washington à une fausse alerte provoque la fin de la vie sur la terre.
Quelle confiance avez-vous en Washington? Combien de fois Washington - et en particulier les fous néocons - ont-ils eu tort?
Vous rappelez-vous la guerre de trois semaines en Irak, du gâteau, qui coûterait $70 milliards et serait payée par les revenus du pétrole irakien? Aujourd'hui, le coût se monte à $3 000 milliards et augmente encore, et après douze ans, l'État islamique radical contrôle la moitié du pays. Pour payer les guerres, les Républicains veulent privatiser, c'est-à-dire s'emparer de la sécurité sociale et de Medicare.
Vous vous souvenez de la mission accomplie en Afghanistan? Douze ans plus tard, les talibans contrôlent de nouveau le pays et Washington, après avoir assassiné des femmes, des enfants, des funérailles, des mariages, des anciens dans les villages et des enfants jouant au foot, a été chassé par quelques milliers de talibans légèrement armés.
Les frustrations provoquées par ces défaites se sont accumulées à Washington et dans l'armée. Le mythe est que nous avons perdu parce que nous n'avons pas engagé toute notre force. Nous avons été intimidés par l'opinion mondiale ou par ces maudits manifestants étudiants, ou empêchés de vaincre par quelque président lâche, une lavette libérale qui n'utilise pas toute notre puissance. Pour la droite, la rage est un mode de vie.
Les néocons croient ardemment que l'Histoire a choisi l'Amérique pour diriger le monde, et ici nous avons été vaincus par la guérilla vietnamienne, par les tribus afghanes, par les fondamentalistes islamiques, et maintenant Poutine a envoyé ses missiles pour achever le travail.
Le fou de la Maison Blanche, quel qu'il soit, pressera sur le bouton.
La situation se détériore, elle ne s'améliore pas. Les Russes, espérant quelque signe d'intelligence en Europe, contredisent les mensonges antirusses de Washington. Le contraire exact de sa propre propagande, Washington l'appelle propagande russe. Washington a ordonné au Broadcasting Board of Governors, une agence gouvernementale, dirigée par Andrew Lack, un ancien directeur de NBC News, de contrer une prétendue - mais inexistante - Armée de trolls du Kremlin, qui gueule plus fort que les presstitués occidentaux et perpétue un dialogue prorusse sur Internet. Au cas où vous ne vous en souviendriez pas, Lack est l'idiot qui a déclaré que RT était une organisation terroriste. En d'autres termes, de l'avis de Lack, celui qu'il peut imposer, quelqu'un qui dit la vérité est un terroriste.
Lack incarne bien le point de vue de Washington sur la véracité des récits: si cela ne sert pas la propagande de Washington, ce n'est pas vrai. C'est du terrorisme.
Lack espère contrôler RT par l'intimidation: en effet, il a dit à RT de se taire et de dire ce que nous voulons qu'ils disent, sinon nous vous fermerons comme organisation terroriste. Nous pourrions même arrêter vos employés américains comme instigateurs et complices de terrorisme.
Pour contrer une Russie revancharde et son armée de trolls sur Internet, le régime d'Obama distribue $15 400 000 à ce fou de Lack pour discréditer chaque déclaration véridique publiée sur les versions en anglais des médias russes. Cette somme, évidemment, va augmenter considérablement. Bientôt elle se comptera en milliards de dollars, tandis que des Américains sont expulsés de leurs maisons et envoyés en prison à cause de leurs dettes.
Dans sa demande d'argent, Lack, qui semble manquer de toutes les qualités humaines, dont l'intelligence, l'intégrité et la moralité, a justifié sa requête, qui sera honorée, de recevoir l'argent durement gagné des Américains dont le niveau de vie baisse, par l'affirmation rocambolesque que la Russie "menace ses voisins et, par extension, les États-Unis et leurs alliés occidentaux".
Lack promet de faire encore plus: "Les médias internationaux états-uniens sont maintenant tenus de réfuter la propagande russe et d'influencer les esprits des Russes et des russophones dans l'ancienne Union soviétique, en Europe et dans le monde." Lack va faire de la propagande contre la Russie à l'intérieur de la Russie.
Évidemment, les organisations de la CIA - le National Endowment for Democracy et Radio Free Europe/Radio Liberty - seront enrichies par cette campagne de propagande antirusse et l'appuieront sans réserve.
Donc l'appel de l'Union of Concerned Scientists à la coopération avec la Russie pour mettre les ICBM hors statut d'alerte immédiate a peu de chances de se concrétiser. Comment les tensions nucléaires peuvent-elles se réduire lorsque Washington construit des tensions aussi rapidement qu'il peut? Le ministère de la Propagande à Washington a portraituré Poutine comme Oussama Ben Laden, comme Saddam Hussein, des personnages diaboliques, des épouvantails qui effraient des Américains moutonniers à qui on a bourré le crâne. La Russie est transformée en al-Qaida avide de lancer une nouvelle attaque contre le World Trade Center et de faire déferler l'Armée rouge (de nombreux Américains pensent que la Russie est toujours communiste) sur l'Europe.
Gorbatchev était une ruse. Il a trompé le vieil acteur de cinéma [Reagan]. Les Américains trompés sont des cibles faciles, et voici qu'arrivent les ICBM. Les vues folles des politiciens américains, des militaires et des gens sont incapables de saisir la vérité ou de reconnaître la réalité.
Les médias américains propagandistes et les néoconservateurs fous ont amené l'humanité sur le chemin de la destruction.
L'Union of Concerned Scientists, dont je suis membre, a besoin de reprendre ses esprits. Il est impossible de travailler à une réduction de la menace nucléaire aussi longtemps qu'un camp fait tout pour diaboliser l'autre. La diabolisation de la Russie et de son dirigeant par les New York Times, Washington Post, CNN, Fox News, et le reste du ministère de la Propagande américaine, par la quasi totalité de la Chambre et du Sénat, et par la Maison Blanche, rend impossible la réduction de la menace de guerre nucléaire.
Le peuple américain et le monde entier doivent comprendre que la menace à la vie sur terre réside à Washington et que jusqu'à ce que Washington ait fondamentalement et totalement changé, cette menace restera comme la pire menace à la vie sur la terre. Le réchauffement climatique peut disparaître en un instant dans l'hiver nucléaire.

Auteur: Paul Craig Roberts

Info: 16 avril 2015

[ parano ] [ oppression ] [ guerre atomique ]

 

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exo-contact

Rice News : - Comment un professeur des religions comparées devient-il un expert des OVNIs ? 

JK : - Eh bien, personne n'est expert de ceci. Personne. C'est la première chose à savoir. Pour ma part, je réfléchis et écris sur le phénomène OVNI depuis 2004 environ. J'y ai d'abord été confronté parce que j'y étais obligé :  on le retrouvait tout simplement partout dans les sources historiques et ethnographiques avec lesquelles je travaillais pour une grande histoire des courants spirituels alternatifs dans la contre-culture californienne que j'écrivais à l'époque. Mes propres intérêts ont définitivement commencé là, à l'Institut Esalen.

Les gens supposaient alors couramment que le phénomène OVNI n'était pas sérieux ou qu'il s'agissait d'une sorte de truc "californien". Mais ce n'est tout simplement pas vrai, et ne l'a jamais été. Certaines des rencontres modernes les plus documentées et les plus spectaculaires ont eu lieu autour de sites militaires nucléaires et dans des cultures et des lieux comme le Brésil, la France, le Nouveau-Mexique - au cours de l'été 1945, à quelques kilomètres du site de la bombe atomique Trinity récemment irradiée et une semaine seulement après les bombardements d'Hiroshima et de Nagasaki - et la Nouvelle-Angleterre. Plus récemment on peut voir un grand mélange quant à l'appréciation de cette problématique : par exemple les militant des droits civiques, rien que ça. L'armée et les services de renseignement américains, son exploration spatiale aussi, le colonialisme occidental, les cosmologies indigènes américaines, avec une religion noire importante - la Nation of Islam. Les zones frontalières entre États-Unis et Mexique, l'Amérique latine, les relations américano-soviétiques et maintenant américano-russes, l'OTAN, les industries aérospatiales et aéronautiques, les courants ésotériques et mystiques occidentaux, la littérature de science-fiction et l'histoire des sciences ont tous été impliqués. Et ce n'est qu'un début.

Étudier convenablement le phénomène ovni, c'est en fait étudier à peu près tout. C'est aussi se heurter, durement, à la prise de conscience que l'ordre institutionnel ou universitaire de la connaissance dans lequel nous travaillons et pensons aujourd'hui - un ordre qui sépare effectivement les sciences des humanités - n'est tout simplement pas utile, et ne reflète certainement pas la réalité que nous essayons de comprendre. La difficile vérité est que le phénomène OVNI présente à la fois un aspect "matériel" objectif (pensez aux vidéos et photographies d'avions de chasse, aux prétendus méta-matériaux, aux méthodes de propulsion apparemment avancées et aux marques d'atterrissage) et un aspect "humain" subjectif (pensez aux rencontres rapprochées, aux observations visuelles multiples et coordonnées, aux états de conscience altérés, aux manifestations visionnaires, souvent de type baroque ou science-fictionnel, et aux enlèvements traumatiques ou transcendants vécus). Et les deux côtés - les dimensions matérielles et mentales - sont incroyablement importants pour avoir une idée de l'ensemble du tableau.

Bien sûr, on peut découper le phénomène ovni en deux catégories, "scientifique" et "humaniste", mais on ne le comprendra jamais en procédant ainsi. C'est, en fin de compte, la raison pour laquelle je pense que le sujet est si incroyablement important : il a le pouvoir particulier de défier, ou simplement d'effacer, notre ordre actuel de connaissance et ses divisions arbitraires. Quel que soit ce "ça", il ne se comporte tout simplement pas selon nos règles et hypothèses.  

RN : - Quelle est donc votre évaluation globale de ce nouveau rapport ?

JK : - Eh bien, j'ai un truc positif à dire, avec une forte critique. La chose positive est la suivante : La récente publication, ainsi que la fuite de la vidéo radar datant de décembre 2017 qui a été si efficacement rapportée dans le New York Times par mes collègues Leslie Kean, Ralph Blumenthal et Helene Cooper, a fondamentalement changé la conversation publique autour du sujet. Les chercheurs sérieux ne sont plus regardés avec autant de mépris, et les débunkers dogmatiques n'ont plus le dessus - si jamais ils l'ont vraiment eu.

En outre, et c'est tout aussi important, des gens de tous horizons qui se sont tus jusque-là, sortent maintenant de leur placard et prennent la parole. Pour ne prendre qu'un petit exemple, Miles O'Brien, le correspondant scientifique de PBS, a reconnu devant la caméra il y a quelques jours avoir été témoin d'un OVNI avec un comportement fondamentalement identique à celui des objets rapportés dans le document. Bref le point le plus fondamental de l'interview d'O'Brien est que la publication du gouvernement constitue une sorte de "tournant" dans la conversation publique. 

RN : - OK, quelle est la critique alors ?

JK : - La mauvaise nouvelle concerne la nature de cette "révélation " erratique et classifié de données - le refus du gouvernement de libérer la marchandise, pour ainsi dire, et de donner aux chercheurs sérieux un accès complet à toutes les données. Toutes les données. En procédant de la sorte, ils essaient essentiellement de contrôler le récit. Mon souci peut être résumé par cette sagesse populaire "si vous n'avez qu'un marteau, vous ne verrez que des clous". Dans ce contexte, vu que les données sont collectées par des professionnels de l'armée dont le but premier est de protéger l'État-nation contre les intrus ou les ennemis, le phénomène UAP ou OVNI est inévitablement présenté en termes de "menaces" potentielles. Je veux dire, mon Dieu, les vidéos que nous regardons ont été prises par les systèmes radar d'avions de chasse avancés conçus pour faire une seule chose : abattre un objet ennemi. Faut-il s'étonner que ces objets filmés soient présentés, littéralement et métaphoriquement, comme des menaces ?

RN : - Et sont-ils vraiment des menaces ? Nous n'en avons aucune idée.

JK : - Dans la culture populaire américaine, dans le cinéma et la science-fiction, ce que j'appelle la "mythologie de l'invasion de la guerre froide" a été dominante jusqu'à très récemment. Dans cette mythologie, l'OVNI est considéré comme une invasion "extraterrestre" qui doit être combattue ou à laquelle doivent résister les citoyens patriotes et craignant Dieu. Pensez, par exemple, au roman de 1898 de H.G. Wells "La guerre des mondes", une histoire d'invasion, soit dit en passant, inspirée par le colonialisme britannique. Ou, du côté américain, "Independence Day" en 1996. Ce n'est que récemment que les écrivains et les cinéastes ont commencé à s'éloigner de cette mythologie de l'invasion de la guerre froide pour s'orienter vers quelque chose de beaucoup plus positif, et franchement plus fidèle à ce que nous voyons réellement dans les cas de rencontre et de contact, si nous les étudions vraiment au lieu de simplement supposer des choses à leur sujet. Comme le récent film d'un réalisateur canadien, assez significatif en ce sens - "Arrival" sorti en 2016. 

Ce film frise la profondeur, car il tourne avec amour et contemplation autour de la transformation paranormale de son personnage central, une linguiste humaniste douée, le Dr Louise Banks. En effet, dans les faits historiques, les témoins humains sont souvent radicalement transformés par leurs rencontres, souvent de manière extrêmement positive, mais aussi difficile.

Ces rencontres, par exemple, peuvent être de nature profondément spirituelle, et je ne veux pas dire "bonnes" ou "agréables". Les gens éprouvent de la crainte, de la peur, de l'étrangeté et une terreur absolue ; le psychiatre de Harvard John Mack a appelé cela à juste titre "choc ontologique". Ils font l'expérience, soit pendant l'événement lui-même, soit plus tard, de nouvelles capacités étonnantes - pensez à la télépathie et, oui, à la précognition. Et ils adoptent de nouvelles visions du monde, beaucoup plus cosmiques.

Ainsi, dans le film, le Dr Louise Banks développe la capacité de précognition : Elle se "souvient" de la mort précoce et tragique de sa fille, pas encore née, alors qu'elle apprend progressivement que le temps, comme la grammaire de la langue extraterrestre qu'elle déchiffre, est circulaire et non linéaire. Cette idée de l'espace-temps est d'ailleurs bien connue des humanistes, de la philosophie grecque antique à Nietzsche.

Ce où je veux en venir ? Que nous devrions aborder le phénomène OVNI beaucoup plus comme "Arrival" et beaucoup moins comme "La Guerre des Mondes". Mais nous n'y arrivons pas. Au lieu de cela, nous parlons encore et encore de "menaces" potentielles et promulguons des mesures de sécurité et de secret sans fin. Et ensuite nous nous demandons pourquoi personne ne comprend cela ? En conséquence de ces actions, les témoins humains, leurs observations, leurs transformations et leurs traumatismes sont ignorés avec arrogance et dédaignés comme étant "anecdotiques" et donc indignes d'être étudiés.

J'avoue que je méprise l'aspect narquois de ce mot - anecdotique - et la façon dont il empêche une enquête complète. Toute expérience humaine, après tout, est techniquement "anecdotique". En ce sens, je suis moi aussi une "anecdote". Vous aussi. Nous le sommes tous. Et pourtant, il n'y a pas de science ou de mathématiques, pas de littérature, de langue, d'art ou de religion, et certainement pas d'OVNI, sans ce sujet humain, sans ce témoin anecdotique, ce penseur ou ce voyant. Alors pourquoi ne parlons-nous pas des expériences de ces témoins humains et de la façon dont ce phénomène semble déclencher ou catalyser l'imagination humaine de manière fantastique ? Pourquoi ne voyons-nous pas avec empathie ces drames, soi-disant imaginaires, comme des signes significatifs au lieu de les ignorer avec arrogance comme de l'écume neurologique ? Pourquoi ne parlons-nous pas de ce qu'il advient des pilotes terrifiés, des professionnels de l'armée désorientés, ou des citoyens confus qui voient ces choses, parfois de très près et de manière très personnelle ? Cela ne fait-il pas également partie du phénomène OVNI ? Pourquoi détournons-nous le regard ? Et de quoi ?

RN : - Ce serait le sujet d'une nouvelle conversation. Comment voulez-vous conclure ?

JK : On a jamais fini avec ça. J'aimerais conclure en mettant l'accent sur le fait que la pièce de technologie la plus sophistiquée sur terre pour détecter des présences non humaines ou surhumaines n'est pas un ordinateur quantique ou un système de radar militaire avancé. C'est le corps, le cerveau et l'être humain évolué. Je voudrais également suggérer que l'humain détecte d'étranges présences humanoïdes dans le ciel et l'environnement non pas depuis quelques années ou quelques décennies, mais depuis des millénaires. Tout ce que nous avons à faire est d'ouvrir nos yeux et regarder. Il suffit de ranger notre marteau et de regarder attentivement l'histoire, nos littératures et, surtout, nos religions.

Ainsi au sein de cette nouvelle grande toile humaniste et historique, ce que nous rencontrons dans le ciel et voyons du sol aujourd'hui, pourra prendre des significations fondamentalement nouvelles, et d'autres futurs potentiels. Je ne prétends pas savoir ce que cela impliquera - et ne crois certainement pas non plus aux mythologies régnantes, qu'elles soient politiques, séculaires ou religieuses - mais je parie qu'elles auront très peu à voir avec l'évaluation de ces "menaces". C'est la vieille mythologie de la guerre froide qu'il est temps de dépasser, et bien au-delà.

RN : Vous parlez de l'absence de toute limite.

JK : Oui. Il n'y en a aucune.

Auteur: Kripal Jeffrey

Info: Entretien avec Katharine Shilcut sur " how to think about the UFO phenomenon" http://news.rice.edu/ - June 30, 2021

[ US paranoïa ] [ rencontre du 3e type ]

 

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manipulation des masses

De l'hégémonie du dollar au réchauffement climatique : mondialisation, glyphosate et doctrine du consentement.

Depuis l'abandon des accords de Bretton Woods en 1971, il y a eu un changement tectonique continu en Occident. Qui s'est accéléré lorsque l'URSS a pris fin et a abouti à la " mondialisation néolibérale " que nous connaissons aujourd'hui.

Dans le même temps, une campagne sans précédent a été menée pour réinventer le consensus social en Occident. Une partie de cette stratégie consistant à amener les populations des pays occidentaux à se focaliser sur le "réchauffement climatique", l'"équité entre les sexes" et l'"antiracisme". Les effets dévastateurs et les injustices causés par le capitalisme mondialisé et le militarisme qui en découle restant largement inexprimé pour la masse des gens.

Tel est l'argument présenté par Denis Rancourt, chercheur à l'Ontario Civil Liberties Association, dans un nouveau rapport. M. Rancourt est un ancien professeur titulaire de physique à l'Université d'Ottawa au Canada et auteur de : "La géoéconomie et la géo-politique conduisent à des époques successives de mondialisation prédatrice et d'ingénierie sociale : Historical emergence of climate change, gender equity, and antiracism as state doctrines' (avril 2019)."

Dans ce rapport, Rancourt fait référence au livre de Michael Hudson de 1972 intitulé "Super Imperialism" : The Economic Strategy of American Empire" pour aider à expliquer le rôle clé du maintien de l'hégémonie du dollar et l'importance du pétrodollar dans la domination mondiale des États-Unis. Outre l'importance du pétrole, M. Rancourt soutient que les États-Unis ont un intérêt existentiel à faire en sorte que les opioïdes soient commercialisés en dollars américains, un autre grand produit mondial. Ce qui explique en partie l'occupation américaine de l'Afghanistan. Il souligne également l'importance de l'agro-industrie et de l'industrie de l'armement américaines pour la réalisation des objectifs géostratégiques des États-Unis.

Depuis la chute de l'URSS en 1991, M. Rancourt indique que les campagnes de guerre américaines ont, entre autres, protégé le dollar américain de l'abandon, détruit des nations en quête de souveraineté contre la domination américaine, assuré le commerce de l'opium, renforcé leur contrôle du pétrole et entravé l'intégration eurasiatique. En outre, nous avons vu certains pays faire face à un bombardement de sanctions et d'hostilité dans une tentative de détruire des centres de production d'énergie que les États-Unis ne contrôlent pas, notamment la Russie.

Il souligne également les impacts dans les pays occidentaux, y compris : la perte relative systématique du rang économique de la classe moyenne, la montée du sans-abrisme urbain, la décimation de la classe ouvrière industrielle, les méga-fusions des entreprises, la montée des inégalités, le démantèlement du bien-être, la spéculation financière, les salaires qui stagnent, les dettes, la dérégulation et les privatisation. De plus, l'assouplissement accru de la réglementation des aliments et des médicaments a entraîné une augmentation spectaculaire de l'utilisation de l'herbicide glyphosate, qui s'est accompagnée d'une recrudescence de nombreuses maladies et affections chroniques.

Face à cette dévastation, les pays occidentaux ont dû obtenir le maintien du consentement de leurs propres populations. Pour aider à expliquer comment cela a été réalisé, Rancourt se concentre sur l'équité entre les sexes, l'antiracisme et le réchauffement climatique en tant que doctrines d'État qui ont été utilisées pour détourner l'attention des machinations de l'empire américain (et aussi pour empêcher la prise de conscience de classe). J'ai récemment interrogé Denis Rancourt sur cet aspect de son rapport.

CT : Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur vous et sur la façon dont vous avez produit ce rapport ? Quel est son objectif ?

DR : Ancien professeur de physique, scientifique de l'environnement et défenseur des droits civils, je travaille actuellement comme chercheur pour l'Ontario Civil Liberties Association (ocla.ca). Au cours d'une conversation que j'ai eue avec le directeur exécutif de l'OCLA au sujet des droits civils, nous avons identifié plusieurs phénomènes sociaux et économiques importants qui semblaient liés au début des années 1990. J'ai donc fini par m'installer pour faire ce "gros boulot", du point de vue de la recherche.

Bien que nous ne manquions pas d'intellectuels et d'experts engagés pour guider notre perception à tort, mes recherches démontrent qu'il existe un lien entre la montée en flèche de la répression et de l'exploitation à grande échelle des populations nationales et l'accélération d'une mondialisation agressive et abusive.

CT : Dans votre rapport, vous avez décrit les conséquences de l'abandon de Bretton Woods et de la dissolution de l'URSS en termes d'hégémonie du dollar, du militarisme américain et des effets dévastateurs de la "mondialisation néolibérale" tant pour les États nations que pour les citoyens.

Il ne fait guère de doute que les analystes russes et chinois comprennent bien ce que j'ai exposé dans mon rapport. Par exemple, en prévision de la guerre commerciale de Trump, le discours prononcé en avril 2015 par le major-général Qiao Liang de l'Armée populaire de libération du peuple devant le Comité central et le bureau du gouvernement du Parti communiste chinois, comprenait ce qui suit :

"Depuis ce jour [dissolution de Bretton Woods], un véritable empire financier a émergé, l'hégémonie du dollar américain s'est établie, et nous sommes entrés dans une véritable ère de monnaie de papier. Il n'y a pas de métal précieux derrière le dollar américain. Le crédit du gouvernement est le seul soutien du dollar américain. Les États-Unis tirent profit du monde entier. Cela signifie que les Américains peuvent obtenir des richesses matérielles du monde entier en imprimant un morceau de papier vert. (...) Si nous reconnaissons [maintenant] qu'il existe un cycle de l'indice du dollar américain [ponctué de crises machinées, dont la guerre] et que les Américains utilisent ce cycle pour faire la récolte dans les autres pays, alors nous pouvons conclure que le moment était venu pour eux d'en faire autant en Chine..."

CT : Vous discutez de la nécessité pour les États d'obtenir le consentement : la nécessité de pacifier, d'hypnotiser et d'aligner les populations pour poursuivre la mondialisation ; plus précisément, la nécessité de détourner l'attention de la violence structurelle des politiques économiques et de la violence réelle du militarisme. Pouvez-vous nous dire comment la question du réchauffement climatique est liée à cela ?

DR : Que la soi-disant "crise climatique" soit réelle, exagérée ou fabriquée de toutes pièces, il est clair, d'après les données de mon rapport, que l'éthique du réchauffement climatique a été conçue et manipulée à l'échelle mondiale et qu'elle bénéficie aux exploiteurs de l'économie du carbone et, plus indirectement, à l'État.

Par exemple, l'une des études que j'ai passées en revue montre qu'une multiplication des reportages sur le réchauffement climatique dans les médias grand public s'est soudainement produite au milieu des années 2000, dans tous les grands médias, au moment même où les financiers et leurs acolytes, comme Al Gore, ont décidé de créer et de gérer une économie mondiale du carbone. Cette campagne médiatique s'est poursuivie depuis lors et l'éthique du réchauffement climatique a été institutionnalisée.

Les programmes de piégeage du carbone ont dévasté les communautés locales sur tous les continents occupés. En fait, les programmes de réduction des émissions de carbone - des parcs éoliens à la récolte de biocarburants, en passant par la production industrielle de batteries, les installations de panneaux solaires, l'extraction de l'uranium, la construction de méga barrages hydroélectriques, etc. on accéléré les destructions d'habitats.

Pendant ce temps, la guerre économique et militaire fait rage, le glyphosate est déversé dans l'écosphère à un rythme sans précédent (déversé sur des cultures mercantiles résistant aux phytocides GM), des génocides actifs sont en cours (Yémen), les États-Unis se désistent de façon unilatérale et imposent une course aux armes aux machines nucléaires et aux armes nucléaires de prochaine génération ; des prêts extortionnels sont accordés par les Etats-Unis qui ont transformé l'usage de leurs terres au plan national, et des enfants scolarisés développent des crises psychotiques afin de faire "bouger les gouvernements" pour qu'ils "agissent" contre le climat.

Au début des années 1990, une conférence mondiale sur l'environnementalisme climatique fut une réponse expresse à la dissolution de l'Union soviétique. Cela faisait partie d'un projet de propagande globale visant à masquer la nouvelle vague de mondialisation accélérée et prédatrice qui se déchaînait alors que l'URSS était définitivement sortie du droit chemin.

CT : Que pensez-vous de Greta Thunberg et du mouvement qui l'entoure ?

DR : C'est triste et pathétique. Ce mouvement témoigne du succès du projet mondial de propagande que je décris dans mon rapport. Le mouvement est aussi un indicateur du degré d'enracinement du totalitarisme dans les sociétés occidentales, où les individus, les associations et les institutions perdent leur capacité de pensée indépendante pour détourner la société des des desseins d'une élite d'occupation. Les individus (et leurs parents) deviennent la police de la moralité au service de cet "environnementalisme".

CT : Vous parlez aussi de l'émergence de l'égalité des sexes (féminisme de la troisième vague) et de l'antiracisme comme doctrines d'État. Pouvez-vous dire quelque chose à ce sujet ?

DR : Dans mon rapport, j'utilise des documents institutionnels historiques et des données sociétales pour démontrer qu'une triade de "religions d'État" a été engendrée à l'échelle mondiale et qu'elle est apparue au moment opportun après la dissolution de l'Union soviétique. Cette triade se compose d'alarmisme climatique, d'une vision tunnel exagérée de l'équité entre les sexes et d'une campagne antiraciste machinée axée sur les pensées, le langage et les attitudes.

Ces idéologies étatiques ont été conçues et propulsées via les efforts de l'ONU et les protocoles signés qui en ont résulté. Le milieu universitaire de l'Ouest a adopté et institutionnalisé le programme avec enthousiasme. Les médias grand public ont fait la promotion religieuse de l'ethos nouvellement créé. Les partis politiques ont largement appliqué des quotas accrus de représentants élus par sexe et par race.

Ces processus et ces idées ont servi à apaiser, à assouplir, rassembler et à occuper l'esprit occidental, en particulier chez les classes moyennes supérieures, professionnelles et de gestion et les élites des territoires économiquement occupés, mais n'ont rien fait pour atténuer les formes de racisme et de misogynie les plus violentes et répandues dans le monde en raison de la mondialisation prédatrice et du militarisme.

Ironiquement, les atteintes globales à la dignité humaine, à la santé humaine et à l'environnement ont été proportionnelles aux appels systématiques et parfois criards à l'équité entre les sexes, à la lutte contre le racisme et à l'"action" climatique. Tout l'édifice de ces "religions d'Etat" ne laisse aucune place aux conflits de classes nécessaires et sape expressément toute remise en cause des mécanismes et des conséquences de la mondialisation.

CT : Pouvez-vous nous parler des Gilets Jaunes, de Brexit et du phénomène électoral Trump ?

DR : Combiner une mondialisation agressive, une prédation financière constante, l'éviscération des classes ouvrières et moyennes occidentales et un discours désinvolte sur le changement climatique, l'antiracisme et l'équité entre les sexes fait quelque chose ne peut qu'arriver. Le géographe français Christophe Guilluy a prédit ces réactions de façon assez détaillée, ce qui n'est pas difficile à comprendre. Ce n'est pas un hasard si les classes populaires et moyennes qui se révoltent critiquent les récits de la crise climatique, de l'antiracisme et de l'équité entre les sexes, d'autant que les médias grand public les présentent comme racistes, misogynes et ignorants des sciences.

Il semble que toute classe qui s'oppose à sa propre destruction soit accusée d'être peuplée de gens racistes et ignorants qui ne voient pas que le salut réside dans un monde géré par le carbone et globalisé. Il devient donc impératif de fermer tous les lieux où un tel "lot d'ignorants" pourrait communiquer ses vues, tenter de s'organiser et ainsi menacer l'ordre social dominant.

Auteur: Todhunter Colin

Info: Counterpunch.org. Trad Mg

[ géopolitique ] [ ingénierie sociale ]

 

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homme-animal

La conscience du Dauphin
Bien entendu, les modèles du monde ne manqueront pas de différer selon le degré où les systèmes sensoriels périphériques diffèrent.
Le travail du cerveau est en effet, au moins en partie, de construire une réalité cohérente à partir de données sensorielles spécifiques, réalité qui constitue d’ailleurs la seule connue par celui qui l’expérimente au détriment de toutes les autres.
Dans le cas du dauphin, le système nerveux est celui d’un herbivore retourné à la mer, il y a quelques millions d’années, et ne diffère donc pas fondamentalement de celui de n’importe quel autre grand mammifère.
Le monde physique en revanche, au sein duquel il évolue, nous poserait à nous, humains, d’impossibles défis. C’est pourquoi les cétacés ont développé tout à la fois des formes physiques mieux adaptées au milieu marin mais surtout tout un outillage sensoriel susceptible des les aider à survivre dans un monde humide, froid et obscur, où règnent de fortes pressions.
Faire l’expérience d’une telle subjectivité est par définition une tâche impossible. Même entre époux, entre amis, entre enfants et parents, cette connaissance ne peut s’acquérir que par le biais maladroit du discours mais jamais nous ne pourrons accéder au "goût du monde" d’une autre espèce que la nôtre.
Il se fait heureusement que nos organes sensoriels et nos structures cérébrales sont des outils communs à tous les êtres humains, ce qui nous permet de fonder l’illusion d’un univers de formes stables et tangibles, dont l’existence fait l’unanimité mais que nous sommes les seuls à percevoir comme telles.
En revanche, nous sommes génétiquement incapables de nous figurer un monde filtré par d’autres sens que les nôtres, de la même manière qu’il nous est impossible de visualiser un cube en quatre dimensions ou simplement le monde des abeilles….
"Pouvez-vous imaginer l’expérience que représente le fait d’être sans cesse corrélé à une boussole solaire ?" nous demande le neurologue H.Jerison à ce propos "L’information consiste en la triangulation des objets externes relativement à un observateur (le je) et au soleil comme point de référence. Si cette réaction devait être représentée en terme de perception, on pourrait dire que l’abeille ou la fourmi ressent de manière constante l’existence des points cardinaux au sein d’un monde tridimensionnel de type euclidien. Si notre système sensoriel était celui des hyménoptères, c’est cela la seule réalité que nous pourrions percevoir.
L’intégration de deux points de référence, le soi et le soleil, plutôt qu’un seul soi unitaire en tant qu’origine et centre d’un monde périphérique, doit certainement mener à d’autres perspectives sur les dimensions fondamentales de la réalité. Il est intéressant d’imaginer les catégories additionnelles que Kant aurait pu reconnaître en tant qu’à priori si nous avions été équipés d’un tel système de navigation!"
Les expériences de Louis Herman nous apprennent que les dauphins partagent tout de même les mêmes dimensions que nous : le haut, le bas, la gauche la droite, devant, derrière, tout cela existe chez eux mais il semble qu’ils ignorent la nuance entre les adjectifs "grand" et "petit" et qu’ils construisent leurs phrases selon un mode syntaxique particulier. Ces expériences, profondément anthropocentristes, n’offrent qu’un pâle reflet d’un monde mental autrement plus riche et foisonnant en liberté, comme le montre avec bien plus d’éclat le très étrange langage delphinien mis à jour par le chercheur russe Vladimir Markov, mais elles sont à tout le moins significatives de la nature d’une conscience "autre" qui ne s’appuie pas sur nos paramètres.
Les sens et l’Umwelt
Imaginons un instant ce que pourrait être "l’Umwelt" d’un dauphin.
Au centre d’un réseau d’informations sensorielles qu’il ré-organise sans cesse en tant qu’images du monde, pulse un noyau de conscience conscient de lui-même.
La vision
Le monde visuel du dauphin peut être comparé à celui des espèces-proies, non prédatrices, comme le lapin ou le chevreuil, en ce sens que les champs visuels de ses yeux latéraux couvrent ensemble 360° mais qu’ils ne se chevauchent pas ou très peu.
L’absence de fibres non-croisées dans le chiasma optique suggère une plus large indépendance dans le contrôle des yeux et dans l’usage de l’information qu’ils fournissent, par rapport à ce que l’on observe chez les autres mammifères. Chacun des yeux est capable de mouvements propres, indépendants de ceux de l’autre œil et une certaine focalisation frontale peut donc être obtenue.
On peine cependant à imaginer un monde dans lequel le Soi se trouve ainsi de manière constante au centre d’un champ visuel circulaire de 360°.
Le nôtre, comme on le sait, se réduit à un cône de 120°.
Notre Soi se place juste derrière le front et les yeux, en vis-à-vis de l’objet focalisé par notre regard binoculaire et dans la ligne de fuite du cône, c’est-à-dire à peu près sur la glande pinéale. On comprend mieux dès lors la fausse intuition de René Descartes.
Incapables de distinguer le vert du rouge, les yeux des dauphins n’en sont pas moins d’une sensibilité extrême à l’instar des yeux de chat, percent l’obscurité et peuvent, d’une simple torsion de la rétine, adapter leur vision aux fonds marins ou à l’air libre. Par contre, le sens du relief leur est impossible, puisqu’ils ne sont pas binoculaires.
La "quasi-olfaction"
Le goût et l’odorat sont absents en tant que tels, remplacés par la "quasi-olfaction" qui consiste à filtrer une certaine quantité d’eau au travers de l’évent et à en goûter le parfum. Un tel sens est fondamental : le dauphin s’en sert pour repérer les femelles en rut autant que pour sentir les fèces de son groupe, nuage diffus de couleur foncée expulsé de manière régulière et qui donne à l’ensemble social une "odeur" propre.
Le toucher et le sens proprioceptif
Quiconque a jamais caressé la peau satinée d’un tursiops sait à quel point ce tissu est sensible, doux et fragile. Le sens du toucher joue lui aussi un rôle essentiel dans la vie de ces mammifères nus, qui n’aiment rien tant que de rester collés les uns contre les autres et d’échanger les caresses les plus voluptueuses.
Au niveau plus profond du sens proprioceptif, la différence avec nos perceptions s’accroît cependant encore davantage : "L’Umwelt des dauphins se fonde comme tout autre sur les caractéristiques de leur environnement" déclare Jerison, "et cet univers mental représente très certainement une adaptation cognitive optimale aux exigences environnementales du monde aquatique. A cet égard, l’un des traits principaux de cet univers marin – considéré depuis notre point de vue – est notamment l’absence d’une plate-forme stable tel que les mammifères l’éprouvent en se tenant sur la terre ferme".
Ce point est important, car le sol sur lequel nous nous tenons, le rôle essentiel de la gravité dans les adaptations anatomiques de la plupart des mammifères occupe une place centrale au plan biologique mais ne sont que rarement notées au niveau de la conscience vigile. Notre intuition s’épuise en revanche lorsque nous tentons d’imaginer les adaptations perceptuelles chez certaines espèces dont les données sensorielles sont profondément différentes des nôtres, et cela d’autant plus que nous ne sommes même pas conscients de notre propre spécificité sensorielle. Les informations relatives aux forces gravitationnelles qui s’exercent sur nos corps jouent également un rôle-clé chez le dauphin, mais d’une autre manière.
Celui-ci s’oriente en effet en "s’informant" régulièrement de la position de son corps par rapport aux fonds marins, à la surface de l’eau ou à la place du soleil au moment de l’observation.
Bien que les dauphins ne disposent d’aucun sol référentiel en guise de plate-forme fixe, mais qu’ils possèdent en revanche un degré de liberté dans les trois dimensions plus important que le nôtre, le sens de l’orientation spatiale est certainement fondamental pour eux. On peut imaginer ce que les cétacés ressentent en pensant à ces appareils d’entraînement destinés aux astronautes afin de les préparer à l’apesanteur.
Ces instruments sont de gigantesques balançoires, disposant de six degrés de liberté et permettant aux candidats pour l’espace de contrôler au mieux les diverses rotations possibles de leur axe corporel aussi bien que les mouvements de propulsion linéaire.
Si nous étions dauphins, nous nous trouverions dans un monde un peu semblable à celui d’un vol spatial à gravité zéro. Il est intéressant de noter à ce propos que l’expérience de l’apesanteur a crée chez les astronautes divers problèmes liés à cet environnement, telles que nausées, vertiges, migraines, etc. mais qu’elles n’ont cependant jamais altéré leur perception "juste" des choses.
Rappelons aussi, sans nous y étendre, à quel point la gestuelle constitue un mode de communication privilégié chez les dauphins : les degrés de liberté dont leur corps dispose leur a permis d’élaborer un véritable vocabulaire d’attitudes : ventre en l’air, en oblique, corps groupés par faisceaux, rostre au sol, caudale haute, inclinée, etc., le tout agrémenté ou non d’émissions de bulles et de vocalisations.
L’audition
Mais de tous les sens dont dispose le dauphin, c’est certainement l’audition qui est le plus développé et qui atteint des capacités discriminatoires sans aucun équivalent connu. Ce système sensoriel s’est transformé au cours des millénaires en écholocation, tout à la fois outil de connaissance (le monde externe "vu" par le son) et moyen de communication (le monde interne transmis par le langage). Cette convergence fonctionnelle ne manque pas d’entraîner des conséquences étonnantes !
D’après Harry J. Jerison : "Si le spectre auditif des dauphins est plus large que le nôtre de plusieurs octaves dans les fréquences les plus élevées, la caractéristique principale de ce système auditif est bien évidemment l’écholocation. Celle-ci pourrait contribuer à conférer au monde des dauphins une dimension inhabituelle, dépassant largement les perceptions élémentaires relatives aux événements survenant à distance. En tant qu’adaptation sensori-motrice, l’écholocation partage en effet certaines caractéristiques similaires à celles du langage humain".
Rappelons brièvement en quoi consiste cette vision acoustique d’un type inusité. Le dauphin émet en permanence – dès lors qu’il se déplace et cherche sa route activement – une série de "sons explosés" extrêmement brefs (moins d’une seconde d’émission continue). Ces "clicks" ne sont pas des sons purs mais des "bruits", d’inextricables petits paquets d’ondes situés sur des fréquences de 120 à 130 Khz et d’une puissance frisant parfois les 220 décibels. Ils retentissent sous l’eau comme une grêle de minuscules coups secs et nets enchaînés l’un à l’autre en de courtes séquences.
Les clicks sont émis sous forme d’un large faisceau, qui balaie par intermittence le sol sablonneux à la façon d’un projecteur. On peut donc dire que la nuit ou sous une certaine profondeur, le dauphin ne voit que lorsqu’il éclaire le paysage de ses éclairs sonores. Les informations reçues, assez grossières, concernent l’aspect du fond marin ou une masse importante, bateau ou autre cétacé.
Supposons à présent qu’un poisson soit repéré dans ce champ de vision "stroboscopique". Puisqu’il fait nuit, l’œil ne peut confirmer l’image en mode visuel.
Lorsque la chasse commence, le dauphin resserre alors le rayon de son biosonar et le dédouble en deux faisceaux.
Plus précis, mieux ciblés les trains de click bombardent le poisson sous tous ses angles et peuvent même pénétrer dans son corps en renvoyant l’image de ses organes internes.
Les deux trains de clicks sont produits presque simultanément, l’un à 20° à gauche de la ligne du rostre et l’autre à 20° sur la droite. Les deux rayons se chevauchent au point focal (0°) et fournissent une "visiaudition" de type, cette fois, binoculaire.
Un intervalle de 80 millièmes de seconde sépare l’émission de chacun des faisceaux, de sorte qu’en calculant le léger retard d’un écho par rapport à l’autre, le dauphin peut estimer la profondeur de champ et la distance qui le sépare de chaque élément de l’objet observé.
Se rapprochant de sa proie à toute vitesse, le dauphin n’a de cesse que de conserver le contact avec elle et multiplie la fréquence et l’intensité de ses trains de clicks, comme pour maintenir le "projecteur" allumé presque en continu.
Les ondes à haute fréquence ont une portée plus courte mais fournissent en revanche une bien meilleure définition des détails. En nageant, le dauphin opère un mouvement de balayage avec la tête avant d’obtenir une image complète de sa cible, que ses organes visuels conforteront par ailleurs.
S’il veut obtenir davantage de détails encore sur son contenu, le dauphin la bombardera alors sa cible à bout portant, d’un faisceau de clicks aussi fin et précis qu’un rayon laser.
Celui-ci pénètre la matière et en estime la densité avec une incroyable précision : la nature d’un métal (zinc plutôt que cuivre) ou des variations de l’épaisseur d’un tube de l’ordre d’un millième de millimètres sont alors parfaitement perçus par cette échographie biologique.
Une telle "vision acoustique" nous sera à tout jamais inimaginable, comme la couleur rouge l’est pour l’aveugle. Néanmoins, au prix d’une comparaison grossière, on peut mettre en parallèle la pluie d’échos que perçoivent les cétacés avec les pixels que l’œil humain perçoit sur un écran de télévision. Les pixels dessinent très rapidement une image en se succédant l’un à l’autre et laissent sur la rétine du téléspectateur une série de rémanences qui figurent le mouvement et les formes. Une scène visuelle est ainsi décodée à partir d’une séquence de taches ultra rapides surgissant sur l’écran. De la même manière, une expérience éidétique similaire est sans doute générée par les données discrètes de l’écholocation (clicks).
L’information pourrait être alors parfaitement comparable à celle que l’on obtient grâce au bombardement de photons dans le système visuel, à ceci près qu’elle parviendrait par un autre canal, en l’occurrence le canal auditif.

Auteur: Internet

Info: http://www.dauphinlibre.be/dauphins-cerveau-intelligence-et-conscience-exotiques

[ comparaisons ]

 

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univers protonique

À l’intérieur du Proton, " la chose la plus complexe qu'on puisse imaginer "

La particule chargée positivement au cœur de l’atome est un objet d’une complexité indescriptible, qui change d’apparence en fonction de la manière dont elle est sondée. Nous avons tenté de relier les nombreuses faces du proton pour former l'image la plus complète à ce jour.

(image : Des chercheurs ont récemment découvert que le proton comprend parfois un quark charmé et un antiquark charmé, particules colossales puisqeu chacune est plus lourde que le proton lui-même.)

Plus d’un siècle après qu’Ernest Rutherford ait découvert la particule chargée positivement au cœur de chaque atome, les physiciens ont encore du mal à comprendre pleinement le proton.

Les professeurs de physique des lycées les décrivent comme des boules sans relief contenant chacune une unité de charge électrique positive – des feuilles parfaites pour les électrons chargés négativement qui bourdonnent autour d’elles. Les étudiants apprennent que la boule est en réalité un ensemble de trois particules élémentaires appelées quarks. Mais des décennies de recherche ont révélé une vérité plus profonde, trop bizarre pour être pleinement saisie avec des mots ou des images.

"C'est la chose la plus compliquée que l'on puisse imaginer", a déclaré Mike Williams, physicien au Massachusetts Institute of Technology. "En fait, on ne peut même pas imaginer à quel point c'est compliqué."

Le proton est un objet de mécanique quantique qui existe sous la forme d’un brouillard de probabilités jusqu’à ce qu’une expérience l’oblige à prendre une forme concrète. Et ses formes diffèrent radicalement selon la manière dont les chercheurs mettent en place leur expérience. Relier les nombreux visages de la particule a été l’œuvre de plusieurs générations. "Nous commençons tout juste à comprendre ce système de manière complète", a déclaré Richard Milner , physicien nucléaire au MIT.

Alors que la poursuite se poursuit, les secrets du proton ne cessent de se dévoiler. Plus récemment, une analyse monumentale de données publiée en août a révélé que le proton contient des traces de particules appelées quarks charmés, plus lourdes que le proton lui-même.

Le proton " a été une leçon d’humilité pour les humains ", a déclaré Williams. " Chaque fois qu'on pense pouvoir maîtriser le sujet, il nous envoie des balles à trajectoires courbées (en référence aux Pitchers du baseball)

Récemment, Milner, en collaboration avec Rolf Ent du Jefferson Lab, les cinéastes du MIT Chris Boebel et Joe McMaster et l'animateur James LaPlante, ont entrepris de transformer un ensemble d'intrigues obscures qui compilent les résultats de centaines d'expériences en une série d'animations de la forme -changement de proton. Nous avons intégré leurs animations dans notre propre tentative de dévoiler ses secrets.

Ouvrir le proton

La preuve que le proton contient de telles multitudes est venue du Stanford Linear Accelerator Center (SLAC) en 1967. Dans des expériences antérieures, les chercheurs l'avaient bombardé d'électrons et les avaient regardés ricocher comme des boules de billard. Mais le SLAC pouvait projeter des électrons avec plus de force, et les chercheurs ont constaté qu'ils rebondissaient différemment. Les électrons frappaient le proton assez fort pour le briser – un processus appelé diffusion inélastique profonde – et rebondissaient sur des fragments ponctuels du proton appelés quarks. "Ce fut la première preuve de l'existence réelle des quarks", a déclaré Xiaochao Zheng , physicien à l'Université de Virginie.

Après la découverte du SLAC, qui remporta le prix Nobel de physique en 1990, l'examen minutieux du proton s'est intensifié. Les physiciens ont réalisé à ce jour des centaines d’expériences de diffusion. Ils déduisent divers aspects de l'intérieur de l'objet en ajustant la force avec laquelle ils le bombardent et en choisissant les particules dispersées qu'ils collectent par la suite.

En utilisant des électrons de plus haute énergie, les physiciens peuvent découvrir des caractéristiques plus fines du proton cible. De cette manière, l’énergie électronique définit le pouvoir de résolution maximal d’une expérience de diffusion profondément inélastique. Des collisionneurs de particules plus puissants offrent une vision plus nette du proton.

Les collisionneurs à plus haute énergie produisent également un plus large éventail de résultats de collision, permettant aux chercheurs de choisir différents sous-ensembles d'électrons sortants à analyser. Cette flexibilité s'est avérée essentielle pour comprendre les quarks, qui se déplacent à l'intérieur du proton avec différentes impulsions.

En mesurant l'énergie et la trajectoire de chaque électron diffusé, les chercheurs peuvent déterminer s'il a heurté un quark transportant une grande partie de l'impulsion totale du proton ou juste une infime partie. Grâce à des collisions répétées, ils peuvent effectuer quelque chose comme un recensement, déterminant si l'impulsion du proton est principalement liée à quelques quarks ou répartie sur plusieurs.

(Illustration qui montre les apparences du proton en fonction des types de collisions)

Même les collisions de division de protons du SLAC étaient douces par rapport aux normes actuelles. Lors de ces événements de diffusion, les électrons jaillissaient souvent d'une manière suggérant qu'ils s'étaient écrasés sur des quarks transportant un tiers de l'impulsion totale du proton. Cette découverte correspond à une théorie de Murray Gell-Mann et George Zweig, qui affirmaient en 1964 qu'un proton était constitué de trois quarks.

Le " modèle des quarks " de Gell-Mann et Zweig reste une façon élégante d'imaginer le proton. Il possède deux quarks " up " avec des charges électriques de +2/3 chacun et un quark " down " avec une charge de −1/3, pour une charge totale de protons de +1.

(Image mobile : Trois quarks sont présents dans cette animation basée sur les données.)

Mais le modèle avec des quarks est une simplification excessive qui présente de sérieuses lacunes.

Qui échoue, par exemple, lorsqu'il s'agit du spin d'un proton, une propriété quantique analogue au moment cinétique. Le proton possède une demi-unité de spin, tout comme chacun de ses quarks up et down. Les physiciens ont initialement supposé que — dans un calcul faisant écho à la simple arithmétique de charge — les demi-unités des deux quarks up moins celle du quark down devaient être égales à une demi-unité pour le proton dans son ensemble. Mais en 1988, la Collaboration européenne sur les muons a rapporté que la somme des spins des quarks était bien inférieure à la moitié. De même, les masses de deux quarks up et d’un quark down ne représentent qu’environ 1 % de la masse totale du proton. Ces déficits ont fait ressortir un point que les physiciens commençaient déjà à comprendre : le proton est bien plus que trois quarks.

Beaucoup plus que trois quarks

L'accélérateur annulaire de hadrons et d'électrons (HERA), qui a fonctionné à Hambourg, en Allemagne, de 1992 à 2007, a projeté des électrons sur des protons avec une force environ mille fois supérieure à celle du SLAC. Dans les expériences HERA, les physiciens ont pu sélectionner les électrons qui avaient rebondi sur des quarks à impulsion extrêmement faible, y compris ceux transportant aussi peu que 0,005 % de l'impulsion totale du proton. Et ils les ont détectés : Les électrons d'HERA ont rebondi sur un maelström de quarks à faible dynamique et de leurs contreparties d'antimatière, les antiquarks.

(Photo image animée : De nombreux quarks et antiquarks bouillonnent dans une " mer " de particules bouillonnantes."

Les résultats ont confirmé une théorie sophistiquée et farfelue qui avait alors remplacé le modèle des quarks de Gell-Mann et Zweig. Développée dans les années 1970, il s’agissait d’une théorie quantique de la " force forte " qui agit entre les quarks. La théorie décrit les quarks comme étant liés par des particules porteuses de force appelées gluons. Chaque quark et chaque gluon possède l'un des trois types de charges "colorées ", étiquetées rouge, verte et bleue ; ces particules chargées de couleur se tirent naturellement les unes sur les autres et forment un groupe – tel qu’un proton – dont les couleurs s’additionnent pour former un blanc neutre. La théorie colorée est devenue connue sous le nom de chromodynamique quantique, ou QCD.

Selon cette QCD, les gluons peuvent capter des pics d’énergie momentanés. Avec cette énergie, un gluon se divise en un quark et un antiquark – chacun portant juste un tout petit peu d’impulsion – avant que la paire ne s’annihile et ne disparaisse. C'est cette " mer " de gluons, de quarks et d'antiquarks transitoires qu'HERA, avec sa plus grande sensibilité aux particules de faible impulsion, a détecté de première main.

HERA a également recueilli des indices sur ce à quoi ressemblerait le proton dans des collisionneurs plus puissants. Alors que les physiciens ajustaient HERA pour rechercher des quarks à faible impulsion, ces quarks – qui proviennent des gluons – sont apparus en nombre de plus en plus grand. Les résultats suggèrent que dans des collisions à énergie encore plus élevée, le proton apparaîtrait comme un nuage composé presque entièrement de gluons. (Image)

Les gluons abondent sous une forme semblable à un nuage.

Ce pissenlit de gluon est exactement ce que prédit la QCD. "Les données HERA sont une preuve expérimentale directe que la QCD décrit la nature", a déclaré Milner.

Mais la victoire de la jeune théorie s'est accompagnée d'une pilule amère : alors que la QCD décrivait magnifiquement la danse des quarks et des gluons à durée de vie courte révélée par les collisions extrêmes d'HERA, la théorie est inutile pour comprendre les trois quarks à longue durée de vie observés suite à un plus léger bombardement du SLAC.

Les prédictions de QCD ne sont faciles à comprendre que lorsque la force forte est relativement faible. Et la force forte ne s'affaiblit que lorsque les quarks sont extrêmement proches les uns des autres, comme c'est le cas dans les paires quark-antiquark de courte durée. Frank Wilczek, David Gross et David Politzer ont identifié cette caractéristique déterminante de la QCD en 1973, remportant le prix Nobel 31 ans plus tard.

Mais pour des collisions plus douces comme celle du SLAC, où le proton agit comme trois quarks qui gardent mutuellement leurs distances, ces quarks s'attirent suffisamment fortement les uns les autres pour que les calculs de QCD deviennent impossibles. Ainsi, la tâche de démystifier plus loin une vision du proton à trois quarks incombe en grande partie aux expérimentateurs. (Les chercheurs qui mènent des " expériences numériques ", dans lesquelles les prédictions QCD sont simulées sur des superordinateurs, ont également apporté des contributions clés .) Et c'est dans ce genre d' images à basse résolution que les physiciens continuent de trouver des surprises.

Une charmante nouvelle approche

Récemment, une équipe dirigée par Juan Rojo de l'Institut national de physique subatomique des Pays-Bas et de l'Université VU d'Amsterdam a analysé plus de 5 000 instantanés de protons pris au cours des 50 dernières années, en utilisant l'apprentissage automatique pour déduire les mouvements des quarks et des gluons à l'intérieur du proton via une procédure qui évite les conjectures théoriques.

Ce nouvel examen a détecté un flou en arrière-plan dans les images qui avait échappé aux chercheurs antérieurs. Dans des collisions relativement douces, juste capables d'ouvrir à peine le proton, la majeure partie de l'impulsion était enfermée dans les trois quarks habituels : deux ups et un down. Mais une petite quantité d’impulsion semble provenir d’un quark " charmé " et d’un antiquark charmé – particules élémentaires colossales dont chacune dépasse de plus d’un tiers le proton entier.

(Image mobie : Le proton agit parfois comme une " molécule " de cinq quarks.)

Ces charmés de courte durée apparaissent fréquemment dans le panorama " mer des quarks " du proton (les gluons peuvent se diviser en six types de quarks différents s'ils ont suffisamment d'énergie). Mais les résultats de Rojo et de ses collègues suggèrent que les charmés ont une présence plus permanente, ce qui les rend détectables lors de collisions plus douces. Dans ces collisions, le proton apparaît comme un mélange quantique, ou superposition, d'états multiples : un électron rencontre généralement les trois quarks légers. Mais il rencontrera occasionnellement une " molécule " plus rare de cinq quarks, comme un quark up, down et charmé regroupés d'un côté et un quark up et un antiquark charmé de l'autre.

Des détails aussi subtils sur la composition du proton pourraient avoir des conséquences. Au Grand collisionneur de hadrons, les physiciens recherchent de nouvelles particules élémentaires en frappant ensemble des protons à grande vitesse et en observant ce qui en ressort ; Pour comprendre les résultats, les chercheurs doivent commencer par savoir ce que contient un proton. L’apparition occasionnelle de quarks charmés géants rendrait impossible la production de particules plus exotiques.

Et lorsque des protons appelés rayons cosmiques déferlent ici depuis l'espace et percutent les protons de l'atmosphère terrestre, des quarks charmés apparaissant au bon moment inonderaient la Terre de neutrinos extra-énergétiques, ont calculé les chercheurs en 2021. Cela pourrait dérouter les observateurs à la recherche de neutrinos à haute énergie provenant de tout le cosmos.

La collaboration de Rojo prévoit de poursuivre l'exploration du proton en recherchant un déséquilibre entre les quarks charmés et les antiquarks. Et des constituants plus lourds, comme le quark top, pourraient faire des apparitions encore plus rares et plus difficiles à détecter.

Les expériences de nouvelle génération rechercheront des fonctionnalités encore plus inconnues. Les physiciens du Laboratoire national de Brookhaven espèrent lancer le collisionneur électron-ion dans les années 2030 et reprendre là où HERA s'est arrêté, en prenant des instantanés à plus haute résolution qui permettront les premières reconstructions 3D du proton. L'EIC utilisera également des électrons en rotation pour créer des cartes détaillées des spins des quarks et des gluons internes, tout comme le SLAC et HERA ont cartographié leurs impulsions. Cela devrait aider les chercheurs à enfin déterminer l'origine du spin du proton et à répondre à d'autres questions fondamentales concernant cette particule déroutante qui constitue l'essentiel de notre monde quotidien.

 

Auteur: Internet

Info: https://www.quantamagazine.org/ - Charlie Bois, 19 octobre 2022

[ univers subatomique ]

 

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non-voyant

Le monde tel que l'imaginent ceux qui n'ont jamais vu. (I)
Depuis les opérations pratiquées par le chirurgien anglais Cheselden en 1728 sur des personnes atteintes de cataracte congénitale, redonner la vue aux aveugles ne tient plus du miracle biblique mais de la science - et les avancées extraordinaires que la médecine a effectuées dans ce domaine invitent à être optimistes pour l'avenir. Toutefois, la plupart des aveugles de naissance qui vivent aujourd'hui savent que ces progrès bénéficieront surtout aux générations futures et que, pour la majorité d'entre eux, ils quitteront ce monde sans en avoir rien vu. Pour autant, à en croire certains, il n'y a nullement là de quoi s'affliger :" Je ne regrette jamais de ne pas voir. Je vois autrement et puis je n'ai jamais vu avec les yeux, ça ne peut pas me manquer." affirme Sophie Massieu (36 ans, journaliste).
L'aveugle de naissance "ne sait pas ce qu'il perd", littéralement parlant, il n'a donc aucune raison de soupirer après un état qu'il n'a jamais connu. Ce n'est donc pas, dans son cas, sur le mode de la lamentation ou du regret lyrique qu'il faut entendre le mot "jamais", comme ce peut être le cas pour les aveugles tardifs qui restent longtemps hantés par leurs souvenirs de voyant... Non, pour l'aveugle-né, ce "jamais" fonctionne à la manière d'un levier, d'une faille où s'engouffre son imagination : à quoi peut ressembler ce monde visible dont tout le monde parle autour de lui ? Comment se représenter des notions proprement visuelles, telles que les couleurs, l'horizon, la perspective ? Toutes ces questions pourraient tenir en une seule : comment concevoir ce qu'est la vue sans voir ? Question qui a sa réciproque pour le voyant : comment se représenter ce que c'est que de ne pas voir pour quiconque a toujours vu ? Il y a là un défi lancé à l'imagination, défi d'autant plus difficile à relever que les repères auxquels chacun aura spontanément tendance à se référer seront tirés d'un univers perceptif radicalement différent de celui qu'on cherche à se représenter, et qu'ils risquent fort, par conséquent, de nous induire en erreur. Il n'est pas dit que ce fossé perceptif puisse être franchi par l'imagination - mais comme tout fossé, celui-ci appelle des passerelles : analogies puisées dans les autres sens ou dans le langage, efforts pour s'abstraire de ses automatismes de pensée - ce que Christine Cloux, aveugle de naissance, appelle une forme de "souplesse mentale"... L'enjeu, s'il est vital pour l'aveugle, peut sembler minime pour le voyant : que gagne-t-on à imaginer le monde avec un sens en moins ? On aurait tort de négliger l'intérêt d'une telle démarche intellectuelle, car s'interroger sur la perception du monde d'un aveugle de naissance, c'est remettre la nôtre en perspective, en appréhender le caractère relatif, mesurer à quel point nos représentations mentales dépendent de nos dispositions sensibles - enfin, c'est peut-être le moyen de prendre conscience des limites de notre point de vue et, le temps d'un effort d'imagination, de les dépasser...
Imaginer le monde quand on est enfant
Le jeune enfant voyant croit que les choses cessent d'exister dès lors qu'elles quittent son champ de vision : un moment très bref, dit-on, sépare le temps où il croit encore sa mère absente et celui où il la croit déjà morte. Qu'on s'imagine alors ce qu'il en est pour l'enfant aveugle de naissance... "J'avais peur de lancer un ballon, parce que je pensais qu'il allait disparaître. Mon monde s'arrêtait à un mètre, au-delà, pour moi, c'était le vide. "explique Natacha de Montmollin (38 ans, informaticienne de gestion). Comment être sûr que les objets continuent d'exister quand ils sont hors de portée, d'autant plus quand on ne les retrouve pas là où on les avait laissés ? Comment accorder sa confiance à monde aussi inconstant ? Un enfant aveugle de naissance aura nécessairement besoin de plus de temps qu'un enfant voyant pour trouver ses marques et pour comprendre le monde qui l'entoure.
Dans les premières années de sa vie, l'aveugle de naissance n'a pas conscience de son handicap... De fait, s'il ne vivait dans une société de voyants, il passerait toute sa vie sans se douter de l'existence du monde visible. Dans la nouvelle de H. G. Wells Le pays des aveugles, le héros, voyant débarqué dans une communauté d'aveugles qui vit repliée sur elle-même, découvre à ses dépens qu'on y traite ceux qui se prétendent doués de la vue non comme des dieux ou des rois, mais comme des fous, comme nous traitons ceux qui affirment voir des anges - pour le dire autrement : au royaume des aveugles de naissance, les borgnes seraient internés. C'est uniquement parce qu'il vit dans une société organisée par et pour des voyants que l'aveugle finit par contracter, avec le temps, le sentiment de sa différence. Cette découverte peut se faire de différentes manières : les parents peuvent, quand ils estiment leur enfant assez mûr, lui expliquer son infirmité ; l'enfant peut également la découvrir par lui-même, au contact des autres enfants. "On ne m'a jamais expliqué que j'étais aveugle, j'en ai pris conscience avec le temps, explique Sophie Massieu. Quand je jouais à cache-cache avec les autres enfants, je ne comprenais pas pourquoi j'étais toujours la première débusquée... Evidemment, j'étais toujours cachée sous une table, sans rien autour pour me protéger, je sautais un peu aux yeux..."
Le jeune aveugle de naissance finit donc par comprendre qu'il existe une facette de la réalité que les autres perçoivent mais qui lui demeure inaccessible. Dans un premier temps, cette "face du monde" doit lui paraître pour le moins abstraite et difficile à concevoir. Pour avoir un aperçu de l'effort d'imagination que cela exige, le voyant devrait tenter de se représenter une quatrième dimension de l'espace qui l'engloberait sans qu'il en ait conscience...
Il est inévitable que l'aveugle de naissance commence par se faire de certaines choses une représentation inexacte : ces "fourvoiements de l'imagination" constituent des étapes indispensables à l'élaboration de l'intelligence, qu'on soit aveugle ou non. En outre, ils peuvent avoir leur poésie. Un psychologue russe (cité par Pierre Villey dans son ouvrage Le monde des aveugles) mentionne l'exemple d'un jeune aveugle de naissance qui se représentait absolument tous les objets comme en mouvement, jusqu'aux plus immobiles : "pour lui les pierres sautent, les couleurs jouent et rient, les arbres se battent, gémissent, pleurent". Cette représentation peut prêter à sourire, mais après tout, la science et la philosophie ne nous ont-elles pas enseigné que l'immobilité du monde n'était qu'une illusion de la perception, découlant de l'incomplétude de notre point de vue ? A ce titre, l'imagination de ce garçon semblait lui avoir épargné certaines illusions dont l'humanité a eu tant de mal à se déprendre : par exemple, quoiqu'il ne sut rien du mouvement des corps célestes, on raconte que, lorsqu'on lui posa la question : "le soleil et la lune se meuvent-ils ?", il répondit par l'affirmative, sans aucune hésitation.
L'aveugle de naissance peut se représenter la plupart des objets en les palpant. Quand ceux-ci sont trop imposants, des maquettes ou des reproductions peuvent s'y substituer. "J'ai su comment était foutue la Tour Eiffel en ayant un porte-clefs entre les mains... " se souvient Sophie Massieu. Tant que l'objet demeure hors de sa portée, hors du champ de son expérience, il n'est pas rare que l'aveugle s'en fasse une image fantaisiste en se fondant sur la sonorité du mot ou par associations d'idées. Ce défaut n'est pas propre aux aveugles, et "chez chacun, l'imagination devance l'action des sens", pour reprendre l'expression de Pierre Villey. Mais ce défaut peut avoir des conséquences nettement plus fâcheuses chez l'aveugle de naissance, car s'il se contente de ces représentations inexactes et ne cherche pas à les corriger, il risque de méconnaître le monde qui l'entoure et de s'isoler dans un royaume fantasque construit selon les caprices de son imagination. L'aveugle-né n'a pas le choix : il doit s'efforcer de se représenter le monde le plus fidèlement possible, sous peine d'y vivre en étranger...
Imaginer les individus
Très tôt, l'aveugle va trouver des expédients pour se représenter le monde qui l'entoure, à commencer par les gens qu'il côtoie. Leur voix, pour commencer, constitue pour lui une mine d'informations précieuses : l'aveugle prête autant attention à ce que dit son interlocuteur qu'à la manière dont il le dit. La voix révèle un caractère, le ton une humeur, l'accent une origine... "On peut dire ce qu'on veut, mais notre voix parle de nous à notre insu." explique Christine Cloux (36 ans, informaticienne). Certains aveugles considèrent qu'il est beaucoup plus difficile de déguiser les expressions de sa voix que celles de son visage, et pour eux, c'est la voix qui est le miroir de l'âme : "Un monde d'aveugle aurait ses Lavater [auteur de"L'Art de connaître les hommes par la physionomie"]. Une phonognomie y tiendrait lieu de notre physiognomie." écrit Pierre Villey dans Le monde des aveugles. Mais à trop se fier au caractère révélateur d'une voix, l'aveugle s'expose parfois à de cruelles désillusions... Villey cite le cas d'une jeune aveugle qui s'était éprise d'une actrice pour le charme de sa voix : "Instruite des déportements peu recommandables de son idole elle s'écrie dans un naïf élan de désespoir : "Si une pareille voix est capable de mentir, à quoi pourrons-nous donc donner notre confiance ?".
De nombreux autres indices peuvent renseigner l'aveugle sur son interlocuteur : une poignée de main en dit long (Sophie Massieu affirme haïr "les poignées de main pas franches, mollasses...", qu'elle imagine comparables à un regard fuyant) ; le son des pas d'un individu peut renseigner sur sa corpulence et sa démarche ; les odeurs qu'il dégage peuvent donner de précieux renseignements sur son mode de vie - autant d'indices que le voyant néglige souvent, en se focalisant principalement sur les informations que lui fournit sa vue. Quant à l'apparence physique en elle-même, la perspicacité de l'aveugle atteint ici ses limites : "Il y a des choses qu'on sait par le toucher mais d'autres nous échappent : on a la forme du visage, mais on n'a pas la finesse des traits, explique Sophie Massieu. On peut toujours demander aux copines "tiens, il me plaît bien, à quoi il ressemble ?" Bon, il faut avoir des bonnes copines... " Certains aveugles de naissance sont susceptibles de se laisser influencer par les goûts de la majorité voyante : Jane Hervé mentionne la préférence d'une aveugle de naissance pour les blonds aux yeux bleus :"Je crois que les blonds sont beaux. Peut-être que c'est rare...". "D'une façon générale, je pense que la manière dont nous imaginons les choses que nous ne pouvons pas percevoir tient beaucoup à la manière dont on nous en parle, explique Sophie Massieu. Si la personne qui vous le décrit trouve ça beau, vous allez trouvez ça beau, si elle trouve ça moche, vous allez trouver ça moche...". De ce point de vue, l'aveugle dépend - littéralement - du regard des autres : "Mes amis et ma famille verbalisent beaucoup ce qu'ils voient, alors ils sont en quelque sorte mon miroir parlant..." confie Christine Cloux.
Imaginer l'espace
On a cru longtemps que l'étendue était une notion impossible à concevoir pour un aveugle. Platner, un médecin philosophe du siècle dernier, en était même arrivé à la conclusion que, pour l'aveugle-né, c'était le temps qui devait faire office d'espace : "Eloignement et proximité ne signifient pour lui que le temps plus ou moins long, le nombre plus ou moins grand d'intermédiaires dont il a besoin pour passer d'une sensation tactile à une autre.". Cette théorie est très poétique - on se prend à imaginer, dans un monde d'aveugles-nés, des cartes en relief où la place dévolue à chaque territoire ne serait pas proportionnelle à ses dimensions réelles mais à son accessibilité, au temps nécessaire pour le parcourir... Dans les faits, cependant, cette théorie nous en dit plus sur la manière dont les voyants imaginent le monde des aveugles que sur le contraire. Car s'il faut en croire les principaux intéressés, ils n'ont pas spécialement de difficulté à se figurer l'espace.
"Tout est en 3D dans ma tête, explique Christine Cloux. Si je suis chez moi, je sais exactement comment mon appartement est composé : je peux décrire l'étage inférieur sans y aller, comme si j'en avais une maquette. Vraiment une maquette, pas un dessin ou une photo. De même pour les endroits que je connais ou que j'explore : les gares, des quartiers en ville, etc. Plus je connais, plus c'est précis. Plus j'explore, plus j'agrandis mes maquettes et j'y ajoute des détails."La représentation de l'espace de l'aveugle de naissance se fait bien sous formes d'images spatiales, mais celles-ci n'en sont pas pour autant des images-vues : il faudrait plutôt parler d'images-formes, non visuelles, où l'aveugle projette à l'occasion des impressions tactiles. Pour décrire cette perception, Jane Hervé utilise une comparaison expressive :"les sensations successives et multiples constituent une toile impressionniste - tramée de mille touchers et sensations - suggérant la forme sentie, comme les taches d'or étincelant dans la mer composant l'Impression, soleil devant de Claude Monet."
A l'époque des Lumières, certains commentateurs, stupéfaits par les pouvoirs de déduction des aveugles, s'imaginaient que ceux-ci étaient capables de voir avec le bout de leurs doigts (ils étaient trompés, il faut dire, par certains aveugles qui prétendaient pouvoir reconnaître les couleurs d'un vêtement simplement en touchant son étoffe). Mais les aveugles de naissance eux-mêmes ne sont pas à l'abri de ce genre de méprises : Jane Hervé cite le cas d'une adolescente de 18 ans - tout à fait intelligente par ailleurs - qui pensait que le regard des voyants pouvait contourner les obstacles - exactement comme la main permet d'enserrer entièrement un petit objet pour en connaître la forme. Elle pensait également que les voyants pouvaient voir de face comme de dos, qu'ils étaient doués d'une vision panoramique : "Elle imaginait les voyants comme des Janus bifaces, maîtres du regard dans toutes les directions.". L'aveugle du Puiseaux dont parle Diderot dans sa Lettre sur les aveugles, ne sachant pas ce que voulait dire le mot miroir, imaginait une machine qui met l'homme en relief, hors de lui-même. Chacun imagine l'univers perceptif de l'autre à partir de son univers perceptif propre : le voyant croit que l'aveugle voit avec les doigts, l'aveugle que le voyant palpe avec les yeux. Comme dans la parabole hindoue où des individus plongés dans l'obscurité tentent de déduire la forme d'un éléphant en se fondant uniquement sur la partie du corps qu'ils ont touché (untel qui a touché la trompe prétend que l'éléphant a la forme d'un tuyau d'eau, tel autre qui a touché l'oreille lui prête la forme d'un éventail...) - semblablement les êtres humains imaginent un inconnu radical à partir de ce qu'ils connaissent, quand bien même ces repères se révèlent impropres à se le représenter.
Parmi les notions spatiales particulièrement difficiles à appréhender pour un aveugle, il y a la perspective - le fait que la taille apparente d'un objet diminue proportionnellement à son éloignement pour le sujet percevant. "En théorie je comprends ce qu'est la perspective, mais de là à parvenir à réaliser un dessin ou à en comprendre un, c'est autre chose - c'est d'ailleurs la seule mauvaise note que j'ai eu en géométrie, explique Christine Cloux. Par exemple, je comprends que deux rails au loin finissent par ne former qu'une ligne. Mais ce n'est qu'une illusion, car en réalité il y a toujours deux rails, et dans ma tête aussi. Deux rails, même très loin, restent deux rails, sans quoi le train va avoir des ennuis pour passer..." Noëlle Roy, conservatrice du musée Valentin Haüy, se souvient d'une aveugle âgée, qui, effleurant avec ses doigts une reproduction en bas-relief du tableau l'Angélus de Millet, s'était étonnée que les deux paysans au premier plan soient plus grands que le clocher dont la silhouette se découpe sur l'horizon. Quand on lui expliqua que c'était en vertu des lois de la perspective, les personnages se trouvant au premier plan et le clocher très loin dans la profondeur de champ, la dame s'étonna qu'on ne lui ait jamais expliqué cela... On peut se demander comment cette dame aurait réagi si, recouvrant l'usage de la vue suite à une opération chirurgicale, elle avait aperçu la minuscule silhouette d'un individu dans le lointain : aurait-elle pensé que c'était là sa taille réelle et que cet individu, s'approchant d'elle, n'en serait pas plus grand pour autant ? Jane Hervé cite le témoignage d'une aveugle de 62 ans qui a retrouvé la vue suite à une opération : "Tout était déformé, il n'y avait plus aucune ligne droite, tout était concave... Les murs m'emprisonnaient, les toitures des maisons paraissaient s'effondrer comme après un bombardement. Ce que je voyais ovale, je le sentais rond avec mes mains. Ce que je distinguais à distance, je le sentais sur moi. J'avais des vertiges permanents. "On peut s'imaginer le cauchemar que représente une perception du monde où la vision et la sensation tactile ne concordent pas, où les sens envoient au cerveau des signaux impossibles à concilier... D'autres aveugles de naissance, ayant recouvré l'usage de la vue suite à une opération, dirent avoir l'impression que les objets leur touchaient les yeux : ils eurent besoin de plusieurs jours pour saisir la distance et de plusieurs semaines pour apprendre à l'évaluer correctement. Cela nous rappelle que notre vision du monde en trois dimensions n'a rien d'innée, qu'elle résulte au contraire d'un apprentissage et qu'il y entre une part considérable de construction intellectuelle.

Auteur: Molard Arthur

Info: http://www.jeanmarcmeyrat.ch/blog/2011/05/12/le-monde-tel-que-limaginent-ceux-qui-nont-jamais-vu

[ réflexion ] [ vacuité ] [ onirisme ] [ mimétisme ] [ synesthésie ] [ imagination ]

 
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consumérisme

Comment réguler l’exploitation de notre attention ? Dans Les marchands d’attention (The Attention Merchants, 2017, Atlantic Books, non traduit), le professeur de droit, spécialiste des réseaux et de la régulation des médias, Tim Wu (@superwuster), 10 ans après avoir raconté l’histoire des télécommunications et du développement d’internet dans The Master Switch (où il expliquait la tendance de l’industrie à créer des empires et le risque des industries de la technologie à aller dans le même sens), raconte, sur 400 pages, l’histoire de l’industrialisation des médias américains et de la publicité de la fin du XIXe siècle à aujourd’hui. En passant d’une innovation médiatique l’autre, des journaux à la radio, de la télé à l’internet, Wu tisse une très informée histoire du rapport de l’exploitation commerciale de l’information et du divertissement. Une histoire de l’industrialisation des médias américains qui se concentre beaucoup sur leurs innovations et leurs modèles d’affaires, c’est-à-dire qui s’attarde à montrer comment notre attention a été convertie en revenus, comment nous avons été progressivement cédés à la logique du commerce – sans qu’on n’y trouve beaucoup à redire d’ailleurs.

"La compétition pour notre attention n’a jamais cherché à nous élever, au contraire."

Tout le long de cette histoire, Tim Wu insiste particulièrement sur le fait que la capture attentionnelle produite par les médias s’est faite par-devers nous. La question attentionnelle est souvent présentée comme le résultat d’une négociation entre l’utilisateur, le spectateur, et le service ou média qu’il utilise… mais aucun d’entre nous n’a jamais consenti à la capture attentionnelle, à l’extraction de son attention. Il souligne notamment que celle-ci est plus revendue par les médias aux annonceurs, qu’utilisée par les médias eux-mêmes. Il insiste également à montrer que cette exploitation vise rarement à nous aider à être en contrôle, au contraire. Elle ne nous a jamais apporté rien d’autre que toujours plus de contenus insignifiants. Des premiers journaux à 1 cent au spam publicitaire, l’exploitation attentionnelle a toujours visé nos plus vils instincts. Elle n’a pas cherché à nous élever, à nous aider à grandir, à développer nos connaissances, à créer du bien commun, qu’à activer nos réactions les plus instinctives. Notre exploitation commerciale est allée de pair avec l’évolution des contenus. Les journaux qui ont adopté le modèle publicitaire, ont également inventé des rubriques qui n’existaient pas pour mieux les servir : comme les faits divers, les comptes-rendus de procès, les récits de crimes… La compétition pour notre attention dégrade toujours les contenus, rappelle Tim Wu. Elle nous tourne vers "le plus tapageur, le plus sinistre, le plus choquant, nous propose toujours l’alternative la plus scandaleuse ou extravagante". Si la publicité a incontestablement contribué à développer l’économie américaine, Wu rappelle qu’elle n’a jamais cherché à présenter une information objective, mais plutôt à déformer nos mécanismes de choix, par tous les moyens possibles, même par le mensonge. L’exploitation attentionnelle est par nature une course contre l’éthique. Elle est et demeure avant tout une forme d’exploitation. Une traite, comme disait le spécialiste du sujet Yves Citton, en usant volontairement de ce vocabulaire marqué au fer.

Wu souligne que l’industrie des contenus a plus été complice de cette exploitation qu’autre chose. La presse par exemple, n’a pas tant cherché à contenir ou réguler la publicité et les revenus qu’elle générait, qu’à y répondre, qu’à évoluer avec elle, notamment en faisant évoluer ses contenus pour mieux fournir la publicité. Les fournisseurs de contenus, les publicitaires, aidés des premiers spécialistes des études comportementales, ont été les courtiers et les ingénieurs de l’économie de l’attention. Ils ont transformé l’approche intuitive et improvisée des premières publicités en machines industrielles pour capturer massivement l’attention. Wu rappelle par exemple que les dentifrices, qui n’existaient pas vraiment avant les années 20, vont prendre leur essor non pas du fait de la demande, mais bien du fait de l’offensive publicitaire, qui s’est attaquée aux angoisses inconscientes des contemporains. Plus encore que des ingénieurs de la demande, ces acteurs ont été des fabricants de comportements, de moeurs…

L’histoire de l’exploitation de notre attention souligne qu’elle est sans fin, que "les industries qui l’exploitent, contrairement aux organismes, n’ont pas de limite à leur propre croissance". Nous disposons de très peu de modalités pour limiter l’extension et la croissance de la manipulation attentionnelle. Ce n’est pas pour autant que les usagers ne se sont pas régulièrement révoltés, contre leur exploitation. "La seule dynamique récurrente qui a façonné la course des industries de l’attention a été la révolte". De l’opposition aux premiers panneaux publicitaires déposés en pleine ville au rejet de services web qui capturent trop nos données ou exploitent trop notre attention, la révolte des utilisateurs semble avoir toujours réussi à imposer des formes de régulations. Mais l’industrie de l’exploitation attentionnelle a toujours répondu à ces révoltes, s’adaptant, évoluant au gré des rejets pour proposer toujours de nouvelles formes de contenus et d’exploitation. Parmi les outils dont nous nous sommes dotés pour réguler le développement de l’économie de l’attention, Wu évoque trop rapidement le travail des associations de consommateurs (via par exemple le test de produits ou les plaintes collectives…) ou celui des régulateurs définissant des limites au discours publicitaire (à l’image de la création de la Commission fédérale du commerce américaine et notamment du bureau de la protection des consommateurs, créée pour réguler les excès des annonceurs, que ce soit en améliorant l’étiquetage des produits ou en interdisant les publicités mensongères comme celles, nombreuses, ventant des produits capables de guérir des maladies). Quant à la concentration et aux monopoles, ils ont également toujours été surveillés et régulés, que ce soit par la création de services publics ou en forçant les empires des médias à la fragmentation.

L’attention, un phénomène d’assimilation commercial et culturel L’invention du prime time à la radio puis à la télé a été à la fois une invention commerciale et culturelle, fusionnant le contenu au contenant, l’information/divertissement et la publicité en inventant un rituel d’attention collective massive. Il n’a pas servi qu’à générer une exposition publicitaire inédite, il a créé un phénomène social, une conscience et une identité partagée, tout en rendant la question de l’exposition publicitaire normale et sociale.

Dans la succession des techniques qu’ont inventés les médias de masse pour mobiliser et orienter les foules que décrit Tim Wu, on constate qu’une sorte de cycle semble se reproduire. Les nouvelles technologies et les nouveaux formats rencontrent des succès très rapides. Puis, le succès rencontre des résistances et les audiences se délitent vers de nouvelles techniques ou de nouveaux formats proposés par des concurrents. On a l’impression d’être dans une course poursuite où chaque décennie pourrait être représentée par le succès d’un support phare à l’image des 28 courts chapitres qui scandent le livre. L’essor de la télévision par exemple est fulgurant : entre 1950 et 1956 on passe de 9% à 72% des maisons équipées et à la fin des années 50, on l’a regarde déjà 5 heures par jour en moyenne. Les effets de concentration semblent très rapides… et dès que la fatigue culturelle pointe, que la nouveauté s’émousse, une nouvelle vague de propositions se développe à la fois par de nouveaux formats, de nouvelles modalités de contrôle et de nouveaux objets attentionnels qui poussent plus loin l’exploitation commerciale des publics. Patiemment, Wu rappelle la très longue histoire des nouveaux formats de contenus : la naissance des jeux, des journaux télé, des soirées spéciales, du sport, des feuilletons et séries, de la télé-réalité aux réseaux sociaux… Chacun ayant généré une nouvelle intrication avec la publicité, comme l’invention des coupures publicitaires à la radio et à la télé, qui nécessitaient de réinventer les contenus, notamment en faisant monter l’intrigue pour que les gens restent accrochés. Face aux outils de révolte, comme l’invention de la télécommande ou du magnétoscope, outils de reprise du contrôle par le consommateur, les industries vont répondre par la télévision par abonnement, sans publicité. Elles vont aussi inventer un montage plus rapide qui ne va cesser de s’accélérer avec le temps.

Pour Wu, toute rébellion attentionnelle est sans cesse assimilée. Même la révolte contre la communication de masse, d’intellectuels comme Timothy Leary ou Herbert Marcuse, sera finalement récupérée.

De l’audience au ciblage

La mesure de l’audience a toujours été un enjeu industriel des marchands d’attention. Notamment avec l’invention des premiers outils de mesure de l’audimat permettant d’agréger l’audience en volumes. Wu prend le temps d’évoquer le développement de la personnalisation publicitaire, avec la socio-géo-démographie mise au point par la firme Claritas à la fin des années 70. Claritas Prizm, premier outil de segmentation de la clientèle, va permettre d’identifier différents profils de population pour leur adresser des messages ciblés. Utilisée avec succès pour l’introduction du Diet Coke en 1982, la segmentation publicitaire a montré que la nation américaine était une mosaïque de goûts et de sensibilités qu’il fallait adresser différemment. Elle apporte à l’industrie de la publicité un nouvel horizon de consommateurs, préfigurant un ciblage de plus en plus fin, que la personnalisation de la publicité en ligne va prolonger toujours plus avant. La découverte des segments va aller de pair avec la différenciation des audiences et la naissance, dans les années 80, des chaînes câblées qui cherchent à exploiter des populations différentes (MTV pour la musique, ESPN pour le sport, les chaînes d’info en continu…). L’industrie du divertissement et de la publicité va s’engouffrer dans l’exploitation de la fragmentation de l’audience que le web tentera de pousser encore plus loin.

Wu rappelle que la technologie s’adapte à ses époques : "La technologie incarne toujours l’idéologie, et l’idéologie en question était celle de la différence, de la reconnaissance et de l’individualité". D’un coup le spectateur devait avoir plus de choix, plus de souveraineté… Le visionnage lui-même changeait, plus inattentif et dispersé. La profusion de chaînes et le développement de la télécommande se sont accompagnés d’autres modalités de choix comme les outils d’enregistrements. La publicité devenait réellement évitable. D’où le fait qu’elle ait donc changé, devenant plus engageante, cherchant à devenir quelque chose que les gens voudraient regarder. Mais dans le même temps, la télécommande était aussi un moyen d’être plus branché sur la manière dont nous n’agissons pas rationnellement, d’être plus distraitement attentif encore, à des choses toujours plus simples. "Les technologies conçues pour accroître notre contrôle sur notre attention ont parfois un effet opposé", prévient Wu. "Elles nous ouvrent à un flux de sélections instinctives et de petites récompenses"… En fait, malgré les plaintes du monde de la publicité contre la possibilité de zapper, l’état d’errance distrait des spectateurs n’était pas vraiment mauvais pour les marchands d’attention. Dans l’abondance de choix, dans un système de choix sans friction, nous avons peut-être plus perdu d’attention qu’autre chose.

L’internet a démultiplié encore, par de nouvelles pratiques et de nouveaux médiums, ces questions attentionnelles. L’e-mail et sa consultation sont rapidement devenus une nouvelle habitude, un rituel attentionnel aussi important que le prime time. Le jeu vidéo dès ses débuts a capturé toujours plus avant les esprits.

"En fin de compte, cela suggère aussi à quel point la conquête de l’attention humaine a été incomplète entre les années 1910 et les années 60, même après l’entrée de la télévision à la maison. En effet, même s’il avait enfreint la sphère privée, le domaine de l’interpersonnel demeurait inviolable. Rétrospectivement, c’était un territoire vierge pour les marchands d’attention, même si avant l’introduction de l’ordinateur domestique, on ne pouvait pas concevoir comment cette attention pourrait être commercialisée. Certes, personne n’avait jamais envisagé la possibilité de faire de la publicité par téléphone avant même de passer un appel – non pas que le téléphone ait besoin d’un modèle commercial. Ainsi, comme AOL qui a finalement opté pour la revente de l’attention de ses abonnés, le modèle commercial du marchand d’attention a été remplacé par l’un des derniers espaces considérés comme sacrés : nos relations personnelles." Le grand fournisseur d’accès des débuts de l’internet, AOL, a développé l’accès aux données de ses utilisateurs et a permis de développer des techniques de publicité dans les emails par exemple, vendant également les mails de ses utilisateurs à des entreprises et leurs téléphones à des entreprises de télémarketing. Tout en présentant cela comme des "avantages" réservés à ses abonnés ! FB n’a rien inventé ! "

La particularité de la modernité repose sur l’idée de construire une industrie basée sur la demande à ressentir une certaine communion". Les célébrités sont à leur tour devenues des marchands d’attention, revendant les audiences qu’elles attiraient, à l’image d’Oprah Winfrey… tout en transformant la consommation des produits qu’elle proposait en méthode d’auto-récompense pour les consommateurs.

L’infomercial a toujours été là, souligne Wu. La frontière entre divertissement, information et publicité a toujours été floue. La télé-réalité, la dernière grande invention de format (qui va bientôt avoir 30 ans !) promettant justement l’attention ultime : celle de devenir soi-même star.

Le constat de Wu est amer. "Le web, en 2015, a été complètement envahi par la malbouffe commerciale, dont une grande partie visait les pulsions humaines les plus fondamentales du voyeurisme et de l’excitation." L’automatisation de la publicité est le Graal : celui d’emplacements parfaitement adaptés aux besoins, comme un valet de chambre prévenant. "Tout en promettant d’être utile ou réfléchi, ce qui a été livré relevait plutôt de l’intrusif et pire encore." La télévision – la boîte stupide -, qui nous semblait si attentionnellement accablante, paraît presque aujourd’hui vertueuse par rapport aux boucles attentionnelles sans fin que produisent le web et le mobile.

Dans cette histoire, Wu montre que nous n’avons cessé de nous adapter à cette capture attentionnelle, même si elle n’a cessé de se faire à notre détriment. Les révoltes sont régulières et nécessaires. Elles permettent de limiter et réguler l’activité commerciale autour de nos capacités cognitives. Mais saurons-nous délimiter des frontières claires pour préserver ce que nous estimons comme sacré, notre autonomie cognitive ? La montée de l’internet des objets et des wearables, ces objets qui se portent, laisse supposer que cette immixtion ira toujours plus loin, que la régulation est une lutte sans fin face à des techniques toujours plus invasives. La difficulté étant que désormais nous sommes confrontés à des techniques cognitives qui reposent sur des fonctionnalités qui ne dépendent pas du temps passé, de l’espace ou de l’emplacement… À l’image des rythmes de montage ou des modalités de conception des interfaces du web. Wu conclut en souhaitant que nous récupérions "la propriété de l’expérience même de la vie". Reste à savoir comment…

Comment répondre aux monopoles attentionnels ?

Tim Wu – qui vient de publier un nouveau livre The Curse of Bigness : antitrust in the new Gilded age (La malédiction de la grandeur, non traduit) – prône, comme d’autres, un renforcement des lois antitrusts américaines. Il y invite à briser les grands monopoles que construisent les Gafam, renouvelant par là la politique américaine qui a souvent cherché à limiter l’emprise des monopoles comme dans le cas des télécommunications (AT&T), de la radio ou de la télévision par exemple ou de la production de pétrole (Standard Oil), pour favoriser une concurrence plus saine au bénéfice de l’innovation. À croire finalement que pour lutter contre les processus de capture attentionnels, il faut peut-être passer par d’autres leviers que de chercher à réguler les processus attentionnels eux-mêmes ! Limiter le temps d’écran finalement est peut-être moins important que limiter la surpuissance de quelques empires sur notre attention !

La règle actuelle pour limiter le développement de monopoles, rappelle Wu dans une longue interview pour The Verge, est qu’il faut démontrer qu’un rachat ou une fusion entraînera une augmentation des prix pour le consommateur. Outre, le fait que c’est une démonstration difficile, car spéculative, "il est pratiquement impossible d’augmenter les prix à la consommation lorsque les principaux services Internet tels que Google et Facebook sont gratuits". Pour plaider pour la fragmentation de ces entreprises, il faudrait faire preuve que leur concentration produit de nouveaux préjudices, comme des pratiques anticoncurrentielles quand des entreprises absorbent finalement leurs concurrents. Aux États-Unis, le mouvement New Brandeis (qui fait référence au juge Louis Brandeis acteur majeur de la lutte contre les trusts) propose que la régulation favorise la compétition.

Pour Wu par exemple, la concurrence dans les réseaux sociaux s’est effondrée avec le rachat par Facebook d’Instagram et de WhatsApp. Et au final, la concurrence dans le marché de l’attention a diminué. Pour Wu, il est temps de défaire les courtiers de l’attention, comme il l’explique dans un article de recherche qui tente d’esquisser des solutions concrètes. Il propose par exemple de créer une version attentionnelle du test du monopoleur hypothétique, utilisé pour mesurer les abus de position dominante, en testant l’influence de la publicité sur les pratiques. Pour Tim Wu, il est nécessaire de trouver des modalités à l’analyse réglementaire des marchés attentionnels.

Dans cet article, Wu s’intéresse également à la protection des audiences captives, à l’image des écrans publicitaires des pompes à essence qui vous délivrent des messages sans pouvoir les éviter où ceux des écrans de passagers dans les avions… Pour Wu, ces nouvelles formes de coercition attentionnelle sont plus qu’un ennui, puisqu’elles nous privent de la liberté de penser et qu’on ne peut les éviter. Pour lui, il faudrait les caractériser comme un "vol attentionnel". Certes, toutes les publicités ne peuvent pas être caractérisées comme telles, mais les régulateurs devraient réaffirmer la question du consentement souligne-t-il, notamment quand l’utilisateur est captif ou que la capture cognitive exploite nos biais attentionnels sans qu’on puisse lutter contre. Et de rappeler que les consommateurs doivent pouvoir dépenser ou allouer leur attention comme ils le souhaitent. Que les régulateurs doivent chercher à les protéger de situations non consensuelles et sans compensation, notamment dans les situations d’attention captive ainsi que contre les intrusions inévitables (celles qui sont augmentées par un volume sonore élevé, des lumières clignotantes, etc.). Ainsi, les publicités de pompe à essence ne devraient être autorisées qu’en cas de compensation pour le public (par exemple en proposant une remise sur le prix de l’essence)…

Wu indique encore que les réglementations sur le bruit qu’ont initié bien des villes peuvent être prises pour base pour construire des réglementations de protection attentionnelle, tout comme l’affichage sur les autoroutes, également très réglementé. Pour Tim Wu, tout cela peut sembler peut-être peu sérieux à certain, mais nous avons pourtant imposé par exemple l’interdiction de fumer dans les avions sans que plus personne aujourd’hui n’y trouve à redire. Il est peut-être temps de prendre le bombardement attentionnel au sérieux. En tout cas, ces défis sont devant nous, et nous devrons trouver des modalités pour y répondre, conclut-il.

Auteur: Guillaud Hubert

Info: 27 décembre 2018, http://internetactu.blog.lemonde.fr

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