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éducation

Le réveil des petits et des grands enfants
SI vous travaillez tous les deux ou que votre enfant va à la crèche ou à l'école, vous devez sans doute le réveiller et le prier de se lever alors qu'il préférait rester au lit. Pour beaucoup de parents, ce moment est particulièrement stressant. Il peut toutefois en être autrement :
- Réveillez votre enfant le plus calmement et le plus tendrement possible en lui faisant un câlin et en lui apportant un contact physique. Il peut ainsi tranquillement prendre congé de la nuit.
- Beaucoup d'enfants aiment bien, tôt le matin, venir faire un petit câlin dans le lit de des parents. Ils apprécient aussi quand maman ou papa vient se glisser dans leur lit et les réveillent par des câlins, des baisers, une chanson ou un poème.
Se réveiller avec le sourire
Il n'y a rien de plus beau le matin que de se réveiller en riant.
Faites donc ce petit plaisir à votre enfant pour l'aider à entamer sa journée :
- Prenez sa peluche ou bien le doudou de votre bambin et laissez-le se charger du réveil en le caressant ou en le chatouillant doucement.

Auteur: Kunze Petra

Info: Les meilleurs rituels pour mon enfant

[ matin ]

 

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deuil amoureux

Ça me plaît que vous n’ayez pas le mal de moi
Et ça me plaît que je n’aie pas le mal de vous,
Que la lourde boule terrestre n’aille pas
S’enfuir sous nos pieds tout à coup.
Ça me plaît de pouvoir être amusante –
Dévergondée – sans jeux de mots ni leurre –
Et de ne pas rougir sous la vague étouffante
Quand nos manches soudainement s’effleurent.

Ça me plaît aussi que vous enlaciez
Calmement devant moi une autre femme,
Et que, pour l’absence de mes baisers ;
Vous ne me vouiez pas à l’enfer et aux flammes.
Que jamais sur vos lèvres, mon très doux,
Jour et nuit mon doux nom – en vain – ne retentisse…
Que jamais l’on n’aille entonner pour nous :
Alléluia ! dans le silence d’une église.

Merci, de tout mon cœur et de ma main,
Pour m’aimer tellement – sans le savoir vous-même ! - ,
Pour mon repos nocturne et pour, de loin en loin,
Nos rencontres qu’un crépuscule enchaîne,
Pour nos non-promenades sous la lune parfois,
Pour le soleil qui luit – pas au-dessus de nous.
Merci de n’avoir pas – hélas – le mal de moi,
Merci de n’avoir pas – hélas – le mal de vous.

Auteur: Tsvetaeva Marina

Info: 3 mai 1915

[ tristes consolations ] [ amour impossible ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

femmes-par-femme

Les hommes disent toujours ça comme un compliment déterminant, n'est-ce pas ? C'est une fille cool. Être la Cool Girl signifie être une nana sexy, brillante et drôle qui adore le football, le poker, les blagues cochonnes et les rots, qui joue aux jeux vidéo, qui boit de la bière bon marché, qui aime les parties à trois et le sexe anal, et qui s'enfile des hot-dogs et des hamburgers dans la bouche comme si elle accueillait le plus grand gang bang culinaire du monde tout en gardant une taille 28, parce que les Cool Girls sont avant tout sexy. Chaudes et compréhensives. Les Cool Girls ne se mettent jamais en colère ; elles ne font que sourire de manière chagrine et affectueuse et laissent leurs hommes faire ce qu'ils veulent. Vas-y, chie-moi dessus, ça ne me dérange pas, je suis la Cool Girl. Les hommes pensent vraiment que cette fille existe. Peut-être qu'ils sont trompés par le fait qu'il y a tant de femmes qui sont prêtes à se faire passer pour ce genre de fille. Pendant longtemps, la Cool Girl m'a offensée. Je voyais des hommes - amis, collègues, étrangers - s'étourdir devant ces affreuses simulatrices, et je voudrais prendre ces hommes à part et leur dire calmement : - vous ne sortez pas avec une femme, vous sortez avec une nénette qui a regardé trop de films conçus par des hommes socialement maladroits qui aimeraient croire que ce genre de créature existe et puisse les embrasser.

Auteur: Flynn Gillian

Info: Gone Girl

[ bimbos ] [ potiches ] [ pétasses ] [ gourde sexy ] [ séductrices ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

inspiration

Même en plein jour, on peut apprendre à voir chamaniquement les aspects non ordinaires d’un phénomène naturel. Par exemple, voici une méthode de vision dans la pierre, technique que j’ai apprise auprès d’un homme-médecine sioux lakota. Tout d’abord, choisissez une question à laquelle vous désirez recevoir une réponse. Puis marchez simplement dans une étendue sauvage jusqu’à ce que sur le sol, une pierre grosse comme deux poings semble attirer votre attention. Prenez-la et transportez-la jusqu’à un endroit où vous pouvez vous asseoir confortablement avec elle.
Placez la pierre sur le sol devant vous, posez la question à laquelle vous désirez recevoir une réponse. Examinez soigneusement la surface supérieure de la pierre jusqu’à ce que vous soyez capable de discerner une ou plusieurs créatures vivantes formées par ses lignes, crevasses et irrégularités. Cela peut prendre quelques minutes.
Lorsque vous êtes satisfait d’avoir discerné un ou plusieurs animaux, plantes, insectes, visages, formes humaines ou autres entités à la surface de la pierre, pensez à ce que la pierre essaie de vous dire sur la question que vous avez posée. Fixez votre conclusion dans votre esprit, puis retournez la pierre. Réitérez le même processus de vision et de réflexion en utilisant cette nouvelle surface. Si la pierre est assez épaisse, vous pouvez répéter le processus avec ses deux faces restantes.
Ensuite, considérez calmement la façon dont les communications individuelles de chacune des quatre faces se rassemblent pour former un message qui constitue une réponse à votre question. Pour finir, avec respect et gratitude, reposez la pierre dans la position et à la place où vous l’avez trouvée.

Auteur: Harner Michael

Info: Dans La voie du chamane, page 100

[ quête ] [ silence ] [ communion ] [ divination ] [ méthode ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

maman-enfant

Je me suis assise dans le studio et j’ai parlé à mon enfant.

J’ai dit à mon enfant qu’il devrait se réjouir de ne pas être lâché dans ce monde où même les plus grandes joies sont teintées de souffrance, où nous sommes les esclaves des forces matérielles. Il a remué et m’a donné un coup de pied. Si plein d’énergie mon enfant, mon enfant à demi créé que je vais renvoyer au néant.

Renvoyer à l’obscurité, à l’inconscience, et au paradis du non-être.

Je t’ai connu ; j’ai vécu avec toi. Tu n’es que l’avenir. Tu es l’abdication.

Je vis au présent, avec des hommes qui sont plus près de la mort. Je veux des hommes, et non une future extension de moi-même, comme une branche. Mon tout petit, pas encore né, il fait très sombre dans la pièce où nous sommes assis tous les deux, certainement aussi sombre qu’à l’intérieur de moi où tu te trouves, mais il doit être plus doux pour toi de reposer dans ma chaleur que pour moi de rechercher dans cette pièce sombre la joie de ne pas savoir, de ne pas sentir de ne pas voir, la joie de rester calmement allongée dans cette chaleur et cette obscurité. Nous tous, à jamais condamnés à rechercher cette chaleur et cette obscurité, cette vie sans souffrance, cette vie sans angoisse, sans peur et sans solitude. Tu es impatient de vivre ; tu frappes de tes petits pieds, mon tout petit, pas encore né ; tu dois mourir.

Tu dois mourir avant de connaître la lumière, la souffrance et le froid. Tu dois mourir dans la chaleur et l’obscurité. Tu dois mourir parce que tu es sans père.

Auteur: Nin Anaïs

Info: Journal, 1932-1934. Agée de 30 ans, elle a décidé d'avorter

[ interruption de grossesse ] [ IVG ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

attitude

Va paisiblement ton chemin au travers du bruit et de la hâte et souviens-toi que le silence est paix. Autant que faire se peut et sans courber la tête, sois amis avec tes semblables; exprime ta vérité calmement et clairement; écoute les autres même les plus ennuyeux ou les plus ignorants. Eux aussi ont quelque chose à dire.
Fuis l'homme à la voix haute et autoritaire; il pêche contre l'esprit. Ne te compare pas aux autres par crainte de devenir vain ou amer car toujours tu trouveras meilleur ou pire que toi. Jouis de tes succès mais aussi de tes plans. Aime ton travail aussi humble soit-il car c'est un bien réel dans un monde incertain. Sois sage en affaires car le monde est trompeur. Mais n'ignore pas non plus que vertu il y a, que beaucoup d'hommes poursuivent un idéal et que l'héroïsme n'est pas chose si rare.
Sois toi même et surtout ne feins pas l'amitié; n'aborde pas non plus l'amour avec cynisme car malgré les vicissitudes et les désenchantements il est aussi vivace que l'herbe que tu foules. Incline-toi devant l'inévitable passage des ans laissant sans regret la jeunesse et ses plaisirs. Sache que pour être fort tu dois te préparer mais ne succombe pas aux craintes chimériques qu'engendrent souvent fatigue et solitude. En deçà d'une sage discipline, sois bon avec toi-même.
Tu es bien fils de l'univers, tout comme les arbres et les étoiles. Tu y as ta place. Quoique tu en penses, il est clair que l'univers continue sa marche comme il se doit. Sois donc en paix avec Dieu, quel qu'il puisse être pour toi; et quelle que soit ta tâche et tes aspirations dans le bruit et la confusion, garde ton âme en paix. Malgré les vilenies, les labeurs, les rêves déçus la vie a encore sa beauté. Sois prudent. Essaie d'être heureux.

Auteur: Ehrmann Max

Info:

[ sagesse ] [ lenteur ]

 

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christianisme

Le scepticisme a pour effet d’affaiblir les opérations normales d’un être humain.

Dans un des plus brillant et amusant livre de Mr Sinclair Lewis (1885-1951 premier écrivain américain à recevoir le prix Nobel de littérature), il y a un passage que je citerai de mémoire, plus ou moins correctement. Il a dit que la foi catholique diffère du puritanisme actuel en ce qu’elle ne demande pas à quelqu’un d’abandonner son goût du beau, son humour ou ses petits vices agréables (par lesquels il entendait probablement le fait de fumer et de boire, qui ne sont pas du tout des vices), mais elle demande d’abandonner sa vie, son âme, son esprit et son corps, sa raison et tout le reste. Je demande au lecteur de considérer ce jugement aussi calmement et impartialement que possible, et de le comparer avec tous les autres faits concernant la fossilisation des opérations de l’esprit humain par les principaux doutes d’aujourd’hui.

Il serait bien plus vrai de dire que la foi rend aux hommes leurs corps et leurs âmes, leurs intelligences et leurs volontés, et en fin de compte toute leur vie. Il serait bien plus vrai de dire que l’homme qui l’a reçue reçoit toutes les vieilles capacités humaines, que toutes les autres philosophies sont en train de lui enlever. Il serait plus proche de la réalité de dire que le croyant sera le seul à posséder la liberté, la volonté, parce qu’il sera le seul à professer le libre-arbitre ; qu’il sera le seul à avoir une intelligence puisque le doute systématique renie l’intelligence tout comme il renie l’autorité ; qu’il sera le seul à agir véritablement puisqu’une action est toujours accomplie en vue d’une fin. Il serait donc moins improbable de dire que tout ce durcissement et ce désespoir intellectuel feront du croyant le seul citoyen capable de marcher et de parler dans une cité de paralytiques.

Auteur: Chesterton Gilbert Keith

Info: Pourquoi je suis Catholique, Versailles, Via Romana, 2017. Page 42.

[ agir moral ] [ force ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

migraine

J'avais mal à la tête. Je pensais à la douleur et me demandais comment il était possible que l'agonie physique soit si intense. Je n'avais jamais imaginé qu'une telle torture pouvait être endurée. Pourtant, j'étais là, à la fois conscient et capable de penser clairement. Et non seulement de penser, mais aussi d'observer le processus et de faire des calculs à son sujet. Le cercle d'acier autour de mon crâne se refermait comme avec de faibles bruits de craquement. Combien de temps pouvait-il encore rétrécir ? J'ai compté les fendillements. Depuis que j'avais pris la triple dose d'analgésique, il y en avait eu deux de plus. ...J'ai sorti ma montre et l'ai posée sur la table.

"Donnez-moi de la morphine", ai-je dit d'un ton calme, hostile et glacial.

" Il ne faut pas prendre de la morphine ! Vous le savez parfaitement. Quelle idée ! Et que faites-vous avec cette montre ?"

"Vous allez me donner de la morphine dans trois minutes."

Ils m'ont considéré avec inquiétude sous tous les angles. Personne n'a bougé. Trois minutes passèrent. Puis dix de plus. Je glissai calmement la montre dans ma poche et me relevai d'un pas chancelant.

"Alors emmenez-moi au Fiakker Bar. On dit qu'il s'y donne un bon spectacle et ce soir j'ai envie de m'amuser."

Tous se sont levés d'un bond avec un sentiment de soulagement.

Je n'ai jamais avoué le secret à personne, ni à ce moment-là ni par la suite. À la fin de ces trois minutes, j'avais décidé - pour la première et la dernière fois de ma vie - que si mon mal de tête ne cessait pas dans les dix minutes suivantes, je me jetterais sous le tram le plus proche.

Je n'ai jamais su si j'aurais dû tenir ma résolution, car la douleur a disparu à la vitesse de l'éclair.

Auteur: Karinthy Frigyes

Info: Voyage autour de mon crâne

[ thérapie ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

science profane

Si le freudisme affirme que la rationalité n’est qu’un camouflage hypocrite d’une animalité refoulée, cette affirmation - évidemment rationnelle — tombe sous le même verdict ; le freudisme, s’il avait raison, ne serait lui-même pas autre chose qu’une dénaturation symbolisante d’instincts physico-psychiques. Sans doute, les psychanalystes diront que dans leur cas, le raisonnement n’est pas fonction de refoulements inavouables ; mais nous ne voyons pas du tout, premièrement en vertu de quoi cette exception serait admissible sur la base de leur propre doctrine, et deuxièmement pourquoi cette loi d’exception ne jouerait qu’en leur faveur et non en faveur des doctrines spirituelles qu’ils rejettent haineusement, et avec un révoltant manque du sens des proportions. Au demeurant, rien n’est plus absurde qu’un homme se faisant l’accusateur, non de quelque accident psychologique, mais de l’homme comme tel ; d’où vient donc ce demi-dieu qui accuse, et d’où vient sa faculté d’accuser ? Si l’accusateur a raison, c’est que l’homme n’est pas si mauvais et qu’il y a en lui une capacité d’adéquation ; sinon il faudrait admettre que les protagonistes de la psychanalyse soient des dieux tombés imprévisiblement du ciel, ce dont on ne voit pas ombre de vraisemblance, pour dire le moins. La psychanalyse, d’abord élimine les facteurs transcendants essentiels à l’homme et ensuite remplace les complexes d’infériorité ou de frustration par des complexes d’aisance et d’égoïsme ; elle permet de pécher calmement, avec assurance, et de se damner avec sérénité. Comme toutes les philosophies de démolition - celle de Nietzsche par exemple - le freudisme attribue une portée absolue à une situation relative ; comme toute la pensée moderne, il ne sait que tomber d’un extrême à l’autre, incapable qu’il est de se rendre compte que la vérité - et la solution - se trouve dans la nature la plus profonde de l’homme, dont les religions et les sagesses traditionnelles sont, précisément, les porte-parole, les conservatrices et les garantes. En fait, la mentalité créée et diffusée par la psychanalyse consiste à refuser le dialogue logique ou intellectuel - seul digne d’êtres humains et à répondre par le biais de conjectures insolentes ; on ne cherche plus à savoir si l’interlocuteur a raison ou non, on demande qui étaient ses parents ou quelle est sa pression sanguine - pour nous borner à des exemples symboliques et encore assez anodins -, comme si de tels arguments ne pouvaient pas se retourner aisément contre leurs auteurs, ou comme si, en changeant même d’arguments, il n’était pas facile de répondre à une analyse par une autre analyse. Les pseudo-critères de l’analyse sont de préférence physiologiques ou sociologiques, conformément à la manie de l’époque ; il ne serait pas difficile de trouver des contre-critères et de faire l’analyse sérieuse de l’analyse imaginaire.

Auteur: Schuon Frithjof

Info: Dans "Logique et transcendance", éditions Sulliver, 2007, pages 16-17

[ critique ] [ réfutation ] [ égocentrisme ]

 
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nocturne

L’impénétrable obscurité enserrait le navire de si près qu’il semblait qu’en allongeant la main par-dessus bord on pourrait toucher quelque substance surnaturelle. Cela produisait un effet de terreur inconcevable et de mystère inexprimable. Les rares étoiles au ciel jetaient une lumière indistincte sur le navire seul, sans le moindre miroitement sur l’eau, sous forme de rais séparés perçant une atmosphère transformée en suie. C’était une chose que je n’avais jamais vue auparavant, et qui ne donnait aucune indication sur la direction d’où viendrait n’importe quel changement, comme une menace se refermant sur nous de toutes parts.

Il n’y avait toujours personne à la barre. L’immobilité de toutes choses était absolue. Si l’air était devenu noir, rien ne prouvait que la mer ne fût pas devenue compacte. Il ne servait à rien de regarder dans une direction quelconque, à la recherche du moindre signe, en spéculant sur la proximité de l’instant critique. Le moment venu, l’obscurité submergerait silencieusement la faible clarté des étoiles tombant sur le navire, et la fin de toutes choses viendrait sans un soupir, un mouvement ou un murmure quelconque, et tous nos cœurs cesseraient de battre comme des pendules que l’on n’a pas remontées.

Il était impossible de se débarrasser de ce sentiment d’irrévocabilité. La quiétude qui m’envahit était comme un avant-goût d’annihilation. Elle m’apporta une sorte de réconfort, comme si mon âme s’était soudainement résignée à une éternité d’immobilité aveugle.

Seul l’instinct du marin survivait entier à ma dissolution morale. Je descendis l’échelle vers le gaillard d’arrière. La lueur des étoiles sembla s’effacer avant que j’atteignisse ce point, mais quand je demandai calmement : "Vous êtes là, garçons ?" mes yeux distinguèrent des formes obscures qui se dressaient autour de moi, très peu nombreuses, très indistinctes ; et une voix parla : "On est tous là, capitaine." Une autre rectifia anxieusement :

"Tous ceux qui peuvent être bons à quelque chose, capitaine."

Les deux voix étaient très calmes et assourdies, sans caractéristique particulière d’empressement ou de découragement. Des voix très prosaïques. "Nous devons essayer de carguer la grand-voile", dis-je. Les ombres s’écartèrent de moi sans un mot. Ces hommes étaient les fantômes d’eux-mêmes, et leurs poids sur un cordage ne pouvait être plus que le poids d’une poignée de fantômes. En vérité, si jamais voile fut carguée par la force pure de l’esprit, ce dut être cette voile-là, car à proprement parler, il ne restait pas suffisamment de muscles pour cette tâche à bord du navire, et à plus forte raison dans notre misérable groupe sur le pont. Bien sûr, je mis moi-même la première main à l’ouvrage. Ils errèrent faiblement après moi d’un cordage à l’autre, haletant et trébuchant. Ils peinèrent comme des Titans. Il nous fallut une heure au moins, et tout ce temps l’univers noirci ne produisit aucun son. 

Auteur: Conrad Joseph Teodor Korzeniowski

Info: La ligne d'ombre. Chapitre V. Trad de l’anglais,  Florence Herbulot.

[ maritime ] [ équipage ]

 

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Ajouté à la BD par miguel