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pensée-de-mort

C’est à cette époque, l’an dernier, que je mourus.
Je sais que j’entendais le Maïs,
Comme on me transportait le long des Fermes –
Il avait mis ses Glands –

Je songeais combien il serait doré –
Quand Richard irait au moulin –
Et alors, je voulus sortir,
Mais quelque chose me retint.

Je songeais au Rouge – des Pommes tassées
Entre les rangs d’Eteules –
Aux Charrettes allant penchées dans les champs
Pour charger les Citrouilles –

Je me demandais qui me regretterait, le moins,
Et lorsque viendrait Thanksgiving,
Si Père multiplierait les couverts –
Pour faire une Somme égale –

Et cela troublerait-il la joie de Noël,
Que mon Bas soit suspendu trop haut
Pour qu’un Santa Claus puisse atteindre
L’Altitude de ma personne –

Mais ces pensées, me chagrinaient,
Alors, j’ai songé à l’inverse,
Qu’à pareille époque, en une année parfaite –
Eux-mêmes, viendraient à moi –

Auteur: Dickinson Emily

Info: Cahier 16, 445, trad Claire Malroux

[ morts-vivants ] [ poème ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

pensée-de-femme

Petit coin de vent, de sable et de soleil. Univers paisible et paradoxal, où les guides enturbannés dans les 4×4 côtoyaient les bergers en charrette et où les femmes, enveloppées d'immenses tissus aux couleurs vives, observaient d'un oeil curieux le passage (parfois) dénudé des étrangères. Un entre-deux assez étrange, où tous les clichés alors en vogue en France se trouvaient représentés : voiles, islam dit modéré, Al Jazeera dans tous les postes de télévision... J'avais évidemment été choquée par un certain nombre de coutumes. Choquée, aussi... Par toutes ces mères et épouses que je voyais faire ce que les femmes de mon pays avaient décidé de reléguer aux oubliettes ; moi qui n'avais presque jamais mis les pieds dans une cuisine... Moi qu'on avait élevée à être libre, indépendante, et que la seule idée de rester à la maison rendait hystérique (....)
Elle parla des sorties de crèche, avec les autres mamans, de ce rôle étrange à jouer d'un quotidien paisible, de ce besoin pressant de repartir, nourri d'un sentiment qui m'apparut quasi claustrophobique.

Auteur: Nivat Anne

Info: Correspondante de Guerre

[ simplicité ]

 

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pouvoir

Quand je dis : - J’ai arrêté de croire à la culture", entendons-nous bien, c’est idiot comme phrase ! Non, j’ai arrêté de croire, pour être précis, en cette chose qu’on appelle chez nous "la démocratisation culturelle".

C’est l’idée qu’en balançant du fumier culturel sur la tête des pauvres, ça va les faire pousser, vous voyez ? Qu’ils vont donc rattraper les riches !

Voilà, c’est à ça que j’ai arrêté de croire.

Je faisais ça dans les banlieues, c’est là qu’ils sont souvent, les pauvres… Et donc, je leur balançais des charrettes d’engrais culturel. Essentiellement sous forme d’art contemporain. Et de "création". Il y a beaucoup de fumier dans l’art contemporain. De la danse contemporaine, du théâtre contemporain, de la musique contemporaine. L’idée, c’est que les pauvres vont pousser… et rattraper les riches. C’est l’idée de "l’ascension sociale" par la culture.

C’est à cela que j’ai arrêté de croire. […]

L’idée n’était pas bête, au début : "On va cultiver les pauvres !" oui, mais les riches, ils n’attendent pas pendant ce temps-là, si vous voyez ce que je veux dire.

Auteur: Lepage Franck

Info: 2006

[ conservation ] [ subversion ] [ beaux-arts ]

 

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condamné à mort

J’imagine qu’il devait éprouver un supplice analogue à ce qu’éprouve le criminel qu’on mène au supplice à la potence : il y a encore toute une longue, longue rue à parcourir, et au pas encore, devant des milliers de spectateurs, puis il y aura le tournant dans une autre rue, et au bout de cette rue seulement la sinistre place ! Il me semble qu’au début du trajet le condamné, dans sa charrette d’infamie, doit précisément sentir qu’il a encore une vie infinie devant lui. Mais voici cependant que les maisons défilent, la charrette ignominieuse avance toujours, oh, ce n’est rien, jusqu’au tournant de l’autre rue il y a encore si loin, et il regarde encore d’un air alerte à droite et à gauche, et ces milliers de curieux impassibles dont le regard est rivé à lui, et il lui semble toujours être un homme comme eux. Mais voici déjà qu’on tourne dans l’autre rue, oh ! ce n’est rien, rien, il reste encore toute une rue. Et quel que soit le nombre de maisons qu’il laisse derrière lui, il pense toujours : "il reste encore beaucoup de maisons". Et ainsi jusqu’au bout, jusqu’à la place même.

Auteur: Dostoïevski Fédor Mikhaïlovitch

Info: Dans "Les Frères Karamazov", volume 2, traduction d'Elisabeth Guertik, le Cercle du bibliophile, pages 500-501

[ dernières pensées ] [ intensité ] [ perception du monde ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

homme-animal

Soudain, une bordée d’éclats de rire retentit dans la foule et couvre la voix de Mikolka. La jument, accablée de coups redoublés, avait perdu patience et s’était mise à ruer malgré sa faiblesse. Le vieux n’y peut tenir et partage l’hilarité générale. Il y avait de quoi rire en effet : un cheval qui tient à peine sur ses pattes et qui rue ! Deux gars se détachent de la foule, s’arment de fouets et courent cingler la bête des deux côtés, l’un à droite, l’autre à gauche. - Fouettez-la sur le museau, dans les yeux, en plein dans les yeux, vocifère Mikolka. - Frères, une chanson, crie quelqu’un dans la charrette, et tous de reprendre le refrain ; la chanson grossière retentit, le tambourin résonne, on siffle la ritournelle ; la paysanne croque ses noisettes et ricane. Rodia s’approche du petit cheval ; il s’avance devant lui ; il le voit frappé sur les yeux, oui sur les yeux ! Il pleure. Son cœur se gonfle ; ses larmes coulent. L’un des bourreaux lui effleure le visage de son fouet ; il ne le sent pas, il se tord les mains, il crie, il se précipite vers le vieillard à la barbe blanche qui hoche la tête et semble condamner cette scène. 

Auteur: Dostoïevski Fédor Mikhaïlovitch

Info: Crime et châtiment, chapitre 6. Passage parfois décrit comme ayant été le déclencheur de la crise de folie finale de Nietzsche, qui avait lu cet ouvrage.

[ empathie ] [ déclencheur ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

décor

Attelé à une charrette de livraison, un gaye mâchouillait son mors en attendant son cocher parti lever le coude. Au gré des fils électriques, des trams traversaient les avenues. Un receveur est descendu remettre la perche sur les câbles d'où elle avait sauté. Une moto au side-car plein de journaux nous a croisés en pétaradant. Au guidon, un gars à blouson de cuir et lunettes de soudeur avait l'air de vouloir tout bouffer sur sa route.
- On va rentrer, dit Leboeuf, le sac plus gonflé que celui du Père Noël.
- On a pas gagné un petit café ?
- Si. Au coin, on fait la pause.
La Civette levait son rideau de fer. Le patron tenait encore la manivelle à la main quand on a franchi le seuil. L'intérieur sentait la salle que l'on chauffe et le jus qui passe. Trois cantonniers qui nous avaient précédés se tapaient un calva. Leboeuf a commandé deux crèmes. J'ai épluché un oeuf dur à la coquille rougie par l'oignon de la cuisson. Le taulier a servi nos cafés brûlants et le miroir du bar s'est couvert de buée. Chacune des bouchées, chaque gorgée bue me procuraient une sensation de plénitude. Leboeuf avalait son jus avec l'air de s'en foutre, mais je n'étais pas dupe. Je lui ai tapé sur l'épaule. Il n'a pas moufté. Je voyais qu'il m'observait dans la glace du comptoir. Sa canadienne raidie par le froid faisait comme une carapace. Il a posé sa tasse dans la soucoupe et il a dit :
- Va falloir y aller, môme.
Je savais qu'il était heureux.

Auteur: Pécherot Patrick

Info: Les brouillards de la Butte

[ bistrot ] [ littérature ] [ ville ]

 

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femmes-hommes

Tout cela ne dura que quelques secondes. Il ne se passa rien d’ailleurs : nous nous tenions tous quatre comme figés. Frédéric dit, en désignant du doigt à Karol le pantalon un peu trop long du garçon, qui traînait par terre :
― Dites donc, il faudrait retrousser les jambes.
― C’est vrai, dit Karol.
Il se pencha. Frédéric dit :
― Une seconde.
Visiblement, ce qu’il avait à dire ne venait pas tout seul. Il se détourna un peu pour ne pas leur faire face et regardant droit devant lui, d’une voix enrouée mais distincte, dit :
― Non, attendez. Elle peut le faire, elle.
Il répéta :
― Elle peut le faire, elle.
L’impudeur de cette exigence - c’était comme de pénétrer en eux par effraction - recelait l’aveu : c’est cette excitation que j’attends de vous, faites-le, c’est ce que je veux, ce que je désire... Il les introduisait ainsi dans la dimension de notre désir, du désir que nous avions d’eux, l’espace d’une seconde leur silence en frémit. Ce qui suivit fut à ce point simple et facile, oui, "facile" que la tête m’en tourna, comme si un abîme s’ouvrait brusquement sous mes pas. Elle ne dit rien. Mais, s’étant penchée jusqu’à terre, elle releva les jambes du pantalon. Lui n’avait même pas bougé ; le silence de leurs corps était absolu.
Me frappa soudain avec une force angoissée la nudité étrange de cette cour de ferme, avec les timons des charrettes à ridelles pointant vers le ciel, l’abreuvoir fendu, la grange récemment couverte de chaume frais, tache claire sur le fond brunâtre du sol battu et du bois entassé.

Auteur: Gombrowicz Witold

Info: La Pornographie

[ instant suspendu ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

génocide

(...) Victoire Abraham, femme Pichot (25 ans), demeurant à la Sécherie, près Nantes, est entendue. Je déclare, dit ce témoin, avoir vu, du 18 au 20 brumaire [8 au 10 novembre], des charpentiers faire des trous à une sapine, ou gabarre, et le lendemain j'appris qu'on avait noyé des prêtres. [...]
Lorsqu'on effectuait une noyade, on faisait descendre de la galiote dans un chaland (espèce de bateau) ceux qu'on voulait expédier. Ces chalands avaient des trous pratiqués exprès, par lesquels l'eau s'introduisait et faisait couler le vaisseau. J'en ai vu plusieurs submergés de cette manière : il fallait un chaland pour chaque noyade. On a noyé à Nantes pendant deux mois.
Je vis un jour amener des prisonniers sur des charrettes. Ils venaient de l'Entrepôt : on les disposa dans une galiote où on les oublia pendant 48 heures. On avait eu la précaution de fermer le pont. Lorsqu'il fut ouvert, on trouva soixante malheureux étouffés. On les fit enlever par d'autres prisonniers qu'on venait d'amener. Robin, le sabre à la main, fit jeter ces cadavres dans la Loire. Cette opération finie, il fait mettre à nu tous les prisonniers, hommes, femmes et enfants, on leur lie les mains derrière le dos, on les fait entrer dans un chaland, où ils sont noyés.
Le président dit au témoin. Cette noyade s'est-elle faite de jour ou de nuit ?
Le témoin. Elle s'est faite en plein jour. J'observe que les noyeurs se rendaient très familiers avec les femmes, qu'ils les faisaient même servir à leurs plaisirs, lorsqu'elles leur plaisaient, et ces femmes, pour récompense de leurs complaisances, obtenaient l'avantage précieux d'être exceptées de la noyade."

Auteur: Gérard Alain

Info: Vendée, Les Archives de l'extermination, Bull. du Trib. révol., séance du 25 octobre 1794

[ historique ] [ Gaule ]

 

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dépliages

Je me suis laissé aller à produire quelques considérations sur J.S. Bach, tôt imprégné que je fus par ses soieries auditives (à 5 ans : maman, remets le disque stp), impressionné plus tard (mieux informé) par la force de travail, l'équilibre foncier et la puissance computationnelle du maître des variations symétriques. C'est beaucoup plus tard que mon inculture naturelle - aaah, bonheur de découvrir des choses ! - m'a amené à prendre connaissance des développements de Deleuze sur Leibniz et le baroque. Ces fameux textes de Deleuze sur le pli sont des périples mentaux que je qualifierai de "chimiques", tant ça vous embarque et dévoile des choses qui agissent comme un subtil médicament qui vous tripatouille les méninges. Écrits où les développements s’enchaînent sans discontinuer, présentant surprise après surprise, à l'image des plis qu'il défend, présente... Démontre... Déplie et replie... Le fond rejoint la forme.

C'est costaud.

Deleuze montre que le pli a toujours existé dans les arts, le propre du Baroque étant de le porter. Telle est la philosophie de Leibniz dont il s'inspire, où tout se plie, se déplie, se replie. Comme dans sa thèse la plus célèbre, celle de l’âme “monade”, sans porte ni fenêtre, qui tire d’un fond sombre toutes ses perceptions claires, et qui ne peut se confondre que par analogie avec l’intérieur d’une chapelle baroque de marbre noir où la lumière n’arrive que par des ouvertures imperceptibles vers l’observateur du dedans.

Aussi l’âme est-elle emplie de plis obscurs. Chacun sait que Bach, de la génération suivant Leibniz, est considéré comme le pinacle de la musique baroque. Mais je n'ai pas connaissance d'un travail quelconque (si ça se trouve il y en a des charrettes) sur les analogies de son oeuvre avec la philo de Leibniz*. Je n'ai pas non plus la présomption de m'y lancer. Pas vraiment les compétences. Et les journées sont courtes.

Auteur: Mg

Info: 3 juin 2020 *Les 4 inversions de base du contrepoint dont JSB fut le maître absolu pourraient peut-être servir de base de départ, en éventuelle corrélation avec la tétravalence - alcènes et alcynes - de l'atome du carbone, qui est à la source de la vie telle que nous la connaissons

[ post-renaissance ] [ convergence ] [ mathématiques ] [ éloge ] [ repliements ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

cité imaginaire

Pour finir, le voyage conduit à la ville de Tamara. On y pénètre par des rues hérissées d’enseignes qui sortent des murs. L’œil ne voit pas des choses maisdes figures de choses qui signifient d’autres choses: la tenaille indique la maison de l’arracheur de dents, le pot la taverne, les hallebardes le corps de garde, la balance romaine le marchand de fruits et légumes. Statues et écussons représentent des lions, des dauphins, des tours, des étoiles : signes que quelque chose— qui sait quoi? — a pour signe un lion ou un dauphin ou une tour ou une étoile. D’autres signes avertissent de ce qui est quelque part défendu — entrer dans la ruelle avec des charrettes, uriner derrière le kiosque, pêcher à la ligne du haut du pont — et de ce qui est permis — faire boire les zèbres, jouer aux boules, brûler les cadavres de ses parents. Par la porte des temples on voit les statues des dieux, tous représentés avec leurs attributs: la corne d’abondance, le sablier, la méduse, par quoi le fidèle peut les reconnaître et leur adresser les prières qui conviennent. Si un édifice ne porte aucune enseigne ou figure, sa forme même et l’endroit qu’il occupe dans l’ordonnance de la ville suffisent à en indiquer la fonction : le château royal, la prison, l’hôtel de la monnaie, l’école pythagoricienne, le bordel. Même les marchandises que les commerçants disposent sur leurs étalages valent non pas pour elles-mêmes mais comme signes d’autrechose: le bandeau brodé pour le front veut dire élégance, la chaise à porteurs dorée pouvoir, les volumes d’Averroès sagesse, le collier de cheville volupté. Le regard parcourt les rues comme des pages écrites: laville dit tout ce que tu dois penser, elle te fait répéter son propre discours, et tandis que tu crois visiter Tamara tu ne fais qu’enregistrer les noms par lesquels elle se définit elle-même et dans toutes ses parties. Comment sous cette épaisse enveloppe de signes la ville est-elle en vérité, que contient-elle ou cache-t-elle, l’homme ressort de Tamara sans l’avoir appris. Au-dehors s’étend jusqu’à l’horizon la terre vide, s’ouvre le ciel où courent les nuages. Dans la forme que le hasard et le vent donnent aux nuages, l’homme déjà s’applique à reconnaître des figures: un voilier, une main, un éléphant.

Auteur: Calvino Italo

Info: Villes invisibles

[ pancartes ] [ panneaux ] [ langage ] [ reconnaissance des formes ] [ symboles ]

 

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