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décès

Mourir n'est plus ce qu'il était !
Intensiviste à l'Hôpital Saint-Luc et président du Comité du don d'organes et de tissus du CHUM, le Dr Pierre Aslanian considère son travail comme très valorisant, car il contribue à l'effort collectif de sauver des vies.
"Dans les années 50, l'arrêt définitif du coeur constituait le seul critère de la mort. Ce n'est plus le cas aujourd'hui", déclare le Dr Pierre Aslanian, intensiviste à l'Hôpital Saint-Luc et président du Comité du don d'organes et de tissus du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM). "Depuis l'introduction du concept de mort cérébrale, soit l'arrêt complet et définitif de toute activité du cerveau, par un comité de la Harvard Medical School en 1968, c'est l'état du cerveau qui fait pencher la balance."
La peau du patient est rosée et chaude, son coeur bat, même son thorax se soulève à un rythme régulier, puisque sa respiration est maintenue artificiellement par un appareil et, pourtant, le patient est bel et bien mort. Pour confirmer la mort cérébrale, deux médecins indépendants de l'équipe de prélèvement et de transplantation ont reproduit divers tests cliniques selon un protocole bien défini. "D'abord, il faut connaître l'étiologie du dommage au cerveau, indique Pierre Aslanian. Sans la cause, on ne peut pas conclure à une mort cérébrale. Il faut aussi s'assurer qu'il n'y a aucun facteur confondant comme des sédatifs en circulation dans le sang au moment où l'on effectue les tests."
Concrètement, pour évaluer l'état et l'évolution d'un patient, les médecins disposent d'échelles internationales standardisées, comme l'échelle de coma Glasgow et le protocole de diagnostic du décès neurologique (DDN) de Transplant Québec, grâce auxquelles on peut mesurer notamment la réponse motrice à la douleur et les réflexes du tronc cérébral, la partie inférieure du cerveau responsable de la conscience. L'absence de réflexe respiratoire est validée par un test d'apnée. En cas de doute ou s'il y a présence de facteurs confondants, le DDN doit être établi par un examen complémentaire, par exemple une angiographie cérébrale qui permet d'objectiver l'arrêt de la circulation sanguine encéphalique. Le diagnostic est sans équivoque. L'absence de circulation intracrânienne entraîne une destruction totale et irréversible du cerveau.
"La souffrance d'une famille ébranlée par la mort brutale d'un proche l'empêche souvent de comprendre ce qui se passe exactement, souligne le Dr Aslanian. Les médecins doivent bien expliquer que les organes sont maintenus en fonction de manière artificielle, mais que le patient ne peut pas se réveiller d'un décès neurologique. Son cerveau est mort !"
Toutes les semaines, l'intensiviste, qui possède 20 ans de pratique à l'unité des soins intensifs du centre hospitalier, est confronté à cette dure réalité. Cela est d'autant plus difficile que parfois le patient en état de mort cérébrale peut avoir des réflexes spinaux, mentionne le Dr Aslanian. "On le pince et il y a un mouvement, mais celui-ci n'est pas provoqué par le cerveau. Ce sont les nerfs périphériques reliés à la moelle épinière qui en sont responsables." Le professeur de clinique de la Faculté de médecine de l'Université de Montréal donne régulièrement à l'intention des infirmières et résidents en médecine du CHUM des ateliers sur ce qu'est la mort cérébrale. "Pour offrir l'option du don d'organes aux familles, il faut d'abord savoir reconnaître les donneurs potentiels, signale-t-il. Malheureusement, encore de nos jours, environ 20 % des donneurs potentiels ne le sont pas dans les hôpitaux du Québec."
L'histoire de la mort
Longtemps on a déterminé la mort d'une personne par un acte rudimentaire. Le croquemort se contentait de mordre le gros orteil du défunt pour vérifier qu'il avait réellement trépassé. L'absence de réaction de sa part confirmait définitivement son état. Jusqu'aux années 50, les médecins tâtaient le pouls et cherchaient à voir si de la condensation se formait sur un miroir placé près de la bouche et du nez. La présence ou l'absence de battements du coeur décidait du classement définitif du patient du côté des morts ou des vivants. Puis, avec la venue de la ventilation mécanique qui maintient artificiellement la respiration, on commence à suspendre l'instant de la mort. En 1968, la mort cardiovasculaire cède la place au concept de mort cérébrale, soit "la perte irrémédiable de toutes les fonctions de l'ensemble du cerveau, du tronc cérébral et des deux hémisphères", comme la définit pour la première fois le comité de l'Université Harvard.
"Le premier article scientifique sur la question présenté à la communauté médicale a été publié dans une revue neurologique française en 1959. Les médecins y décrivaient le dommage cérébral important associé à un coma profond duquel les patients ne se réveillaient pas. C'est de cette publication qu'est né le concept de mort cérébrale que les experts de Harvard ont fait connaître internationalement", raconte le Dr Aslanian en précisant que cette époque correspond aussi aux débuts de la transplantation d'organes.
"La notion du décès neurologique a complètement changé notre rapport à la mort", estime le Dr Aslanian. Bien reçu et adopté par divers organismes à l'échelle de la planète, le DDN a néanmoins été contesté sans succès à plusieurs reprises devant les tribunaux américains. "Une commission présidentielle relative aux problèmes bioéthiques et aux aspects biomédicaux en recherche a voulu en 1981 légiférer pour une définition encore plus claire du DDN", rappelle l'intensiviste. En 1995, l'Académie américaine de neurologie constate pour sa part que beaucoup de médecins retiennent des critères différents et insiste pour standardiser les pratiques.
"Même si l'on reconnaît l'intérêt d'uniformiser les façons de faire, les politiques de déclaration de mort cérébrale varient non seulement d'un pays à l'autre, mais aussi d'un État à l'autre", note Pierre Aslanian. Au Canada, en France, en Angleterre et aux États-Unis, le DDN est fait conformément aux pratiques médicales reconnues. Mais il y a certaines nuances. Ainsi, en France, le recours à l'électroencéphalogramme ou à l'angiographie est obligatoire pour attester le caractère irréversible de l'arrêt des fonctions cérébrales. Chez nous et chez nos voisins du Sud, ces tests auxiliaires sont réalisés seulement en cas de doute ou lorsque l'examen clinique ne peut être effectué.
Et puis, il y a les exceptions comme le Japon, où il se pratique très peu de transplantations à partir de donneurs cadavériques. Car, dans l'empire du Soleil-Levant, un grand malaise persiste quant au concept de mort cérébrale.

Auteur: http://www.techno-science.net/

Info: 19.04.2016

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septénaires forcés

- (Q) Tu as écrit "il peut y avoir des cas où une structure ou un processus au sein de tissus organiques ou de colonies d'insectes peut être conceptualisé ou catégorisé en sept parties ou étapes". Peux-tu me donner des exemples ?

- (R) Certainement !  voici quelques exemples où une structure ou un processus au sein de tissus organiques ou de colonies d'insectes pourrait potentiellement être conceptualisé ou catégorisé en sept parties ou étapes :

1 Le développement de l'abeille : Le développement des abeilles mellifères, de l'œuf à l'adulte, passe par plusieurs étapes distinctes. Une division possible de ces stades peut être grossièrement classée en sept parties : œuf, stade larvaire 1, stade larvaire 2, stade larvaire 3, nymphe, adulte pharate et adulte. Chaque stade représente une phase spécifique du cycle de vie de l'abeille.

2 Organisation sociale des fourmis : Certaines colonies de fourmis présentent une division du travail entre différentes castes. Les castes peuvent être classées en sept catégories principales : reine, mâle (castes reproductives), ouvrière principale, ouvrière secondaire, soldat, butineuse et infirmière. Ces castes représentent différents rôles et responsabilités au sein de la colonie de fourmis.

3 Renouvellement des cellules de la peau : Le processus de renouvellement des cellules de la peau implique un renouvellement continu des cellules de la peau. Ce processus peut être divisé en plusieurs étapes, notamment la division cellulaire, la migration, la différenciation et l'élimination. Bien que le nombre précis d'étapes puisse varier, une catégorisation possible pourrait inclure sept étapes : division des cellules basales, migration vers les couches supérieures, différenciation des kératinocytes, formation de la couche cornée, élimination des cellules mortes et renouvellement à partir des cellules basales.

Il est important de noter que ces exemples ne sont pas universellement applicables et qu'ils sont fournis en tant que catégorisations hypothétiques qui représentent approximativement une division en sept étapes. Le nombre réel de stades ou de divisions peut varier en fonction du contexte spécifique, de l'espèce et du niveau de détail considéré.

Dans l'ensemble, bien que ces exemples illustrent des conceptualisations potentielles en sept parties ou étapes, il est essentiel d'aborder l'analyse des structures et des processus dans les tissus organiques et les colonies d'insectes avec un esprit ouvert, en tenant compte des caractéristiques spécifiques et des complexités de chaque système.

De même, bien qu'il ne soit pas courant que la peau d'un animal ou l'écorce d'un arbre comporte exactement sept couches discernables, il existe certains cas où une catégorisation approximative en sept couches peut être observée ou approchée. Toutefois, il est important de noter que le nombre et la classification des couches peuvent varier en fonction du contexte spécifique et du niveau de détail considéré. Voici quelques exemples :

L'écorce des arbres : Dans le cas de certaines espèces d'arbres, une division approximative en sept couches peut être observée dans l'écorce, bien que le nombre de couches et leur catégorisation spécifique puissent varier. Par exemple, dans certaines descriptions de l'écorce de chêne, sept couches ont été identifiées : (1) la couche externe de cellules mortes, (2) le cambium du liège, (3) les cellules du liège, (4) le phelloderme, (5) le cortex, (6) le phloème secondaire, et (7) la couche la plus interne, comprenant le cambium et le xylème. Il est important de noter que cette division peut varier en fonction de l'espèce d'arbre et du cadre analytique utilisé.

La peau : Dans certaines discussions sur la peau, une catégorisation grossière en sept couches peut être envisagée, mais elle ne représente pas nécessairement une classification universellement acceptée ou standard. Les couches typiquement décrites dans l'épiderme comprennent le stratum corneum, le stratum lucidum (présent uniquement dans certaines régions du corps), le stratum granulosum, le stratum spinosum, le stratum basale et la membrane basale. En outre, le derme et le tissu sous-cutané peuvent être considérés comme des couches plus profondes. Toutefois, la classification et la terminologie des couches peuvent varier en fonction de la recherche ou du contexte médical.

Il est important de rappeler que la classification en sept couches dans ces exemples est une approximation et non une règle définitive ou universelle. Le nombre réel de couches et leur classification peuvent varier en fonction de facteurs tels que l'espèce spécifique, l'approche de recherche et le cadre analytique utilisés pour étudier les tissus.

(Q) - Merci. Dans les transitions complexes de polymères, y a-t-il des processus, étapes, transformations, etc... qui sont en quelque sorte divisés en sept  ?

(R) - Si le passage des polymères simples aux polymères complexes peut impliquer plusieurs étapes et processus, il n'est pas nécessairement divisé en sept étapes distinctes. La progression des polymères simples vers les polymères complexes est un domaine de recherche continu et évolutif, dans lequel les scientifiques et les ingénieurs explorent diverses stratégies pour obtenir les architectures de polymères souhaitées. Toutefois, je peux donner un aperçu général de certains processus et transformations courants qui se produisent au cours de cette transition :

1 Polymérisation : L'étape initiale de la synthèse des polymères est la polymérisation, au cours de laquelle les monomères subissent une réaction chimique pour former des chaînes de polymères. Cette réaction peut être réalisée par des méthodes telles que la polymérisation par addition, la polymérisation par condensation ou la polymérisation par ouverture de cycle.

2 Copolymérisation : La copolymérisation est utilisée pour introduire de la complexité. Différents monomères sont combinés pour créer des copolymères aux propriétés uniques. La disposition des monomères (copolymères alternés, aléatoires ou en bloc) affecte le comportement et les caractéristiques du matériau résultant.

3 Ramification : la ramification peut être introduite en incorporant des agents de ramification pendant la polymérisation. Cela conduit à la formation de chaînes latérales qui se ramifient à partir de la chaîne principale du polymère, modifiant les propriétés telles que la flexibilité, la solubilité et le comportement mécanique.

4 Réticulation : La réticulation implique la formation de liaisons covalentes entre les chaînes de polymères. Elle peut être réalisée par différentes méthodes, notamment par des agents de réticulation chimiques, par la chaleur ou par des radiations. Les polymères réticulés présentent une résistance mécanique, une stabilité et une résistance aux solvants accrues.

5 Fonctionnalisation : Des groupes ou des motifs fonctionnels peuvent être introduits dans les chaînes de polymères, soit pendant, soit après la polymérisation. Ce processus permet de modifier les propriétés des polymères, par exemple en ajoutant des sites réactifs, en améliorant la compatibilité avec d'autres matériaux ou en introduisant des fonctionnalités spécifiques.

6 Auto-assemblage : Les polymères complexes peuvent s'auto-assembler, c'est-à-dire que leur structure moléculaire entraîne l'organisation des chaînes de polymères en nanostructures bien définies ou en architectures supramoléculaires. Ce processus peut être guidé par des facteurs tels que la composition du copolymère à blocs, les conditions du solvant ou des stimuli externes.

7 Architectures avancées : Les architectures polymères avancées impliquent des structures spécialisées, telles que les copolymères greffés, les polymères en forme d'étoile, les dendrimères et les copolymères séquencés avec des arrangements précis de blocs multiples. Ces architectures sont conçues pour offrir des propriétés et des fonctionnalités spécifiques adaptées à des applications particulières.

Il est important de noter que ces processus et transformations ne sont pas nécessairement distincts et peuvent se produire simultanément ou en combinaison, en fonction de l'architecture polymère souhaitée. La complexité du polymère peut être influencée par le choix des monomères, les conditions de réaction, les techniques de polymérisation et les modifications post-polymérisation.

Globalement, le passage des polymères simples aux polymères complexes implique un continuum de processus et de transformations, les chercheurs explorant continuellement de nouvelles techniques et stratégies pour créer des polymères aux propriétés et fonctionnalités améliorées.

(Q) - Merci beaucoup. On peut donc essayer de trouver des structures/processus divisés en 7 dans ces architectures de polymères avancées.

(R) Tout à fait ! Bien qu'il soit difficile de trouver exactement sept structures ou processus distincts dans les architectures polymères avancées, je peux vous donner un aperçu de quelques exemples courants :

1 Copolymères greffés : Les copolymères greffés sont constitués d'une chaîne polymère principale (épine dorsale) à laquelle sont attachées des chaînes latérales (greffons). Les chaînes latérales peuvent être de longueurs et de compositions différentes, ce qui leur confère des propriétés et des fonctionnalités uniques. Les copolymères greffés sont utilisés dans des applications telles que les compatibilisants, les modificateurs d'impact et les modificateurs de surface.

2 Polymères étoilés : Les polymères étoilés ont un noyau central à partir duquel de multiples chaînes de polymères rayonnent vers l'extérieur, ressemblant à la forme d'une étoile. Cette architecture offre une meilleure solubilité, de meilleures propriétés rhéologiques et peut être utilisée comme modèle pour la synthèse de nanomatériaux ou comme système d'administration de médicaments.

3 Dendrimères : Les dendrimères sont des polymères hautement ramifiés dont la structure arborescente est bien définie. Ils sont constitués de plusieurs générations de ramifications, ce qui donne une architecture moléculaire contrôlée avec précision. Les dendrimères trouvent des applications dans l'administration de médicaments, la thérapie génique et la nanotechnologie en raison de leur taille, de leur forme et de leurs fonctionnalités de surface bien définies.

4 Copolymères à blocs : Les copolymères à blocs sont constitués de deux ou plusieurs blocs de polymères distincts reliés entre eux. Les blocs peuvent avoir des compositions chimiques et des propriétés différentes, ce qui entraîne la formation de microdomaines ou de structures auto-assemblées dans le matériau. Les copolymères à blocs sont largement utilisés dans les nanotechnologies, les revêtements et les membranes.

5 Polymères amphiphiles : Les polymères amphiphiles possèdent des segments hydrophiles et hydrophobes dans leur structure. Ces polymères peuvent s'auto-assembler en milieu aqueux, formant des micelles, des vésicules ou d'autres structures organisées. Les polymères amphiphiles trouvent des applications dans l'administration de médicaments, la stabilisation des émulsions et la modification des surfaces.

6 Brosses de polymères : Les brosses de polymères sont constituées de chaînes de polymères attachées à une surface, se tenant debout comme les poils d'une brosse. Elles permettent de contrôler les propriétés de la surface, telles que la lubrification, l'adhérence et la biocompatibilité. Les brosses en polymère sont utilisées dans des domaines tels que les biomatériaux, les capteurs et les revêtements.

7 Polymères Janus : Les polymères Janus comportent deux régions distinctes ou plus au sein d'une même chaîne de polymères, chaque région ayant des compositions chimiques ou des fonctionnalités différentes. Les polymères Janus présentent des propriétés uniques, telles que le comportement asymétrique, les interactions sélectives et l'auto-assemblage. Ils trouvent des applications dans des domaines tels que la catalyse, les membranes et les matériaux réactifs.

Il ne s'agit là que de quelques exemples d'architectures polymères avancées. Bien qu'il n'y ait pas de division stricte de ces structures et processus en sept catégories exactement, elles représentent certaines catégories clés dans le domaine des architectures polymères complexes.

 


Auteur: chatGPT4

Info: 13, 16 juin 2023

[ machine-homme ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

philosophie occidentale

Le symbolique, l'imaginaire et le réel : Lacan, Lévi-Strauss et Freud

" Tout comportement est communication." Gregory Bateson

Contrairement à l'expérience de la psychanalyse aux Etats-Unis, Freud arriva très tard en France où il fut plus ou moins réfuté par Sartre dans Son "Etre et Néant" avant même son arrivée. Curieusement, c'est à l'apogée de l'existentialisme et de la psychanalyse existentielle, dans les années cinquante et au début des années soixante, qu'un analyste français inconnu de la génération Sartre entama une relecture radicale des textes freudiens.
Son travail devait avoir une telle influence dans les années soixante-dix qu'il sauva entièrement Freud de l'orientation médicale positiviste apportée par la société psychanalytique parisienne, et réintégra son travail dans ce que les Français appellent encore les sciences humaines.
Il s'agit de Jacques Lacan, pilier de l'Ecole freudienne de Paris - styliste hermétique et obscur, conférencier envoûtant, penseur intransigeant et inflexible, profondément préoccupé par ses propres écrits et prérogatives - qui fut interdit par la Fédération internationale lorsque lui et ses collègues, principalement du à des rivalités internes, quittèrent la société parisienne en 1953.
Il y a sans doute plus d'anecdotes dénigrantes, et probablement calomnieuses, qui circulent sur Lacan au sein de l'incestueux climat intellectuel parisien que sur tout autre penseur influent. Mais si le travail de Lacan signifie quelque chose, nous devons séparer les idiosyncrasies personnelles bien connues de Lacan de la contribution unique qu'il apporta à notre compréhension de Freud.

Bien que Lacan ait commencé son oeuvre originale à la fin des années trente, sous l'influence de la phénoménologie et de l'existentialisme husserliens, ce n'est que dans les années soixante qu'il commença à être réellement écouté en France, et ses écrits ne commencèrent à arriver en Angleterre et aux Etats-Unis que récemment. S'attaquant à l'"intellectualisme" français et au culte de l'"expert", à l'"empirisme", tout comme à la "biologisation" britanniques et à l'"adaptation" et au "behaviorisme" américains dans une série de polémiques cinglantes, son seul travail a rendu impossible, à tout penseur français qui se respecte, de continuer à ignorer les textes de Freud. L'intégration de ce texte dans la culture du cogito cartésien a déjà eu des résultats surprenants et féconds. Reste à savoir ce que Lacan va faire passer aux Etats-Unis - où l'enthousiasme même de l'acceptation initiale de Freud par les Américains eut tendance à réduire ses idées à des banalités et ses théories quasi au statut de jeu social.

Nous découvrons maintenant, par exemple, un nouveau retour à la théorie de Breuer-Freud sur la catharsis thérapeutique - autrefois popularisée en tant que "psychodrame" - sous une nouvelle forme de "désublimation répressive" : thérapie du "cri primal". Mais les héros des talk-shows de fin de soirée vont et viennent avec une régularité monotone et, en fin de compte, il nous reste toujours les grandes œuvres du génie pour y méditer : Hegel, Marx, Freud, Dostoïevski, Rousseau, Balzac, pour ne citer que quelques-uns de nos prédécesseurs les plus récents. Et ce que nous découvrons, c'est que nous devons apprendre à lire avant de parler, que nous devons apprendre à les lire d'un point de vue social critique, aussi libre de préjugés ethnocentriques, socioéconomiques et culturels que possible.
En un mot, nous devons apprendre à lire dans une perspective non académique, dans la perspective d'une expérience de vie où ces auteurs et leurs quêtes personnelles font partie de notre quête individuelle et collective. Je préférerais lire l'Interprétation des rêves comme un roman, par exemple, ou le célèbre cas du docteur " psychotique " Schreber comme de la philosophie, ou les Frères Karamazov comme une étude métapsychologique, que l'inverse. Lacan a contribué à rendre ce genre de lecture possible.
Une grande partie de ce que Lacan cherchait à accomplir avec ses étudiants dans les années cinquante n'a plus grand intérêt aujourd'hui, car il s'agissait d'attaques contre la technique thérapeutique d'un groupe de psychanalystes français très peu doués, objectivées et liés à la culture. Mais son attaque contre la "psychologie de l'ego" de praticiens comme Hartmann, Kris et Lbwenstein, ou le "behaviorisme " de Massermann, est toujours valable (Lacan, 1956a ; Wilden, 196Sa : 1-87). Et ceux qui s'y sont opposés avec tant de véhémence en France constatent aujourd'hui qu'ils ne peuvent rejeter ses analyses critiques des textes freudiens et s'appeler encore Freudiens. Mais si Lacann inspira une école française d'analyse qui se veut anti-institutionnelle, anti-psychiatrique et profondément critique à la fois à l'égard de "l'ajustement" de l'individu et de ceux que Marcuse nommait "révisionnistes néofreudiens", il n'a probablement pas fait plus pour les pratiques analytiques que ce qui a été réalisé par des thérapeutes comme Laing, Esterson et Cooper, au Royaume-Uni, et par des gens comme Ruesch, Bateson, Haley, Weakland ou Jackson, aux Etats-Unis.
De plus, la psychanalyse est un privilège socio-économique réservé aux personnes qui ont argent et loisirs pour se faire plaisir. La question de "la guérison" est en tout cas tout à fait débattable, et nous savons bien que la psychologie, la psychiatrie et la psychothérapie en général ont toujours été les véhicules des valeurs du statu quo (à l'exception extraordinaire de Wilhelm Reich, dont les théories ne correspondent malheureusement jamais au niveau élevé de son engagement social).
Et comme la plupart d'entre nous apprenons à vivre avec nos blocages, il est alors très peu probable que nous devions apprendre un jour apprendre à vivre avec les effets aliénants de notre société unidimensionnelle et technologique en ayant à nous préoccuper de psychanalyse ? En tout état de cause, personne, en quête d'une perspective véritablement critique, ne tentera de construire une théorie de l'homme et de la femme essentiellement basée sur la psychologie humaine, car le "discours scientifique" de la psychologie vise à nier ou à omettre le contenu socio-économique collectif à l'intérieur duquel les facteurs psychologiques jouent leur rôle.
J'essaierai de montrer plus loin que l'axiomatique fermeture de la plupart des psychanalystes dans la plénitude de ce contexte - et, je crois, dans sa primauté - génère des problèmes purement logiques dans la théorie, problèmes dont elle n'est pas, logiquement, équipée pour les surmonter. Ainsi, ce qui apparaît dans la théorie logico-mathématique de Bateson de la " double liaison " (chapitre V) comme une oscillation, apparaît nécessairement en psychanalyse, sous une forme ou une autre, comme une théorie de la répétition. Lacan, par exemple, fit appel à Kierkegaard (Repetition, 1843) pour étayer son interprétation de Freud, et pourtant si l'on regarde de près les écrits de Kierkegaard, en particulier les siens propres ou ceux également publiés en 1843, on découvre que la théorie entière dépend de l'incapacité de Kierkegaard à dépasser, de manière logique ou existentielle, les injonctions (doubles liens) paradoxales qu'il reçoit de son environnement familial et social. Par conséquent, le voilà condamné à osciller sans cesse entre un "soit" et un "ou". Ce qui apparaît dans la théorie de Bateson comme une réponse nécessaire aux injonctions émanant des rapports de pouvoir et de domination dans l'ordre social, et qui apparaît généralement dans la psychanalyse, et plus particulièrement chez Lacan, comme de la "compulsion itérative". Ainsi, soit la responsabilité est renvoyée à l'individu (par les "instincts" ou quelque autre métaphore de ces constructions biomécaniques), soit, comme chez Lacan, elle se transforme subtilement en une forme "d'ordre naturel des choses", via les paradoxes que le langage crée dans la condition humaine.
Contrairement à la théorie du double lien, les deux points de vue supposent une homogénéité dans la société qui n'existe tout simplement pas et servent à rationaliser les dominations en refusant de traiter la relation entre pouvoir, connaissance et oppression, ils ne voient pas la différence, dans la société, entre ce que Marcuse appela "répression" et "sur-répression". Malgré l'incompréhension de Marcuse à l'égard du Freud "clinique" - et malgré sa dépendance à la théorie bioénergétique des instincts - la distinction est importante. Peu de théoriciens américains, par exemple, envisageraient sérieusement le calvaire des minorités américaines dans leur lutte pour les droits socio-économiques élémentaires, simplement en termes de "compulsion itératives" telle une révolte contre le père (ou la mère).
Il m'est impossible de parler de Freud ou de Lacan sans utiliser les contributions que Bateson et Marcuse - de manières différentes et même mutuellement opposées - ont apportées à notre compréhension des relations humaines. Il faut d'une part traiter la perception de la psychanalyse et de la psychologie comme des rationalisations des valeurs de notre culture (l'oppression des femmes, en particulier), et d'autre part, montrer comment elles peuvent contribuer à une dévalorisation de ces valeurs. L'analyse de Bateson des relations de pouvoir par la double contrainte est, je crois, essentielle à la théorie sociale et psychologique, et je ne sais comment expliquer la théorie de l'imaginaire de Lacan sans elle. En tout cas, Freud décrit la relation entre l'ego et l'idéal de l'ego en des termes similaires à ceux d'une double liaison (double bind, dans The Ego and the I, Standard Edition, XIX, 34) : "Tu devrais être ainsi (comme ton père), mais tu ne dois pas être ainsi (comme ton père)."
Dans le monde contemporain de la contestation, il n'y a aucune réponse à la façon dont la psychanalyse est régulièrement - et nécessairement - remise en question, si le Freud dont nous parlons est le déterminant hydraulique, instinctif, électromagnétique et entropique que nous pensions tous connaître.
Il y a une réponse, cependant, si nous découvrons la perspective communicationnelle et linguistique derrière l'acceptation explicite ou implicite par Freud des principes mécanistes de la science physique et économique du XIXe siècle. Après tout, la psychanalyse est bien la "cure parlante", comme Lacan n'a jamais manqué d'insister dessus, et les pages des écrits de Freud s'intéressent avant tout au langage. Bien plus intéressante que la théorie de l'ego, de la personnalité et du surmoi, par exemple, est la conception que Freud a de l'inconscient et du rêve comme des scènes (Darstellungen) de distorsions (Entstellungen) et de (re)présentations (Vorstellungen). Mieux que coller à la préoccupation contemporaine pour les systèmes et les structures que la "psychologie de l'ego" de Freud, dans son premier modèle de processus primaires et secondaires. Plus significative que son déterminisme il y a sa théorie de la "surdétermination" du symptôme ou du rêve, qui est un concept proche de la redondance en théorie de l'information et de l'équifinalité en gestaltisme et biologie.
Si nous devons rejeter les principes mécanistes du principe du plaisir, nous pouvons encore découvrir le modèle sémiotique des niveaux de communication dans les premiers travaux de Freud. Plus utile que la "deuxième" théorie du symbolisme (dérivée de Stekel), qui assimile les icônes ou les images (analogues) aux symboles sexuels (Jones, Ferenczi, et al.), est la "première" ou théorie "dialectique", qui dépend de la condensation et du déplacement des signes (Zeichen). Le rêve doit être traduit de l'image en texte avant de pouvoir être interprété (par le rêveur), et la refoulement est, comme le disait Freud en 1896, "un échec de la traduction". De plus, aucune théorie actuelle de la mémoire n'est essentiellement différente de la métaphore originale de Freud sur le "traçage" de voies via les traces de mémoire dans le cerveau.Je reviendrai dans un instant sur une description plus précise de l'orientation sémiotique et linguistique de Freud. Le fait est que, sans le travail de Lacan, je doute que nous aurions découvert ce Freud - bien que l'analyse de Karl Pribram du Projet neuropsychologique pour une psychologie scientifique (1895) aille dans le sens d'une relecture de Freud au moins au niveau de la théorie de l'information et du feedback (Pribram, 1962).
Le problème avec Lacan, c'est qu'à première vue, ses écrits sont presque impossibles à comprendre. Ses Ecrits (1966) - et seul un Lacan pouvait avoir l'orgueil d'intituler son oeuvre simplement "Écrits" - titre peut-être plus à lire comme "discours de schizophrène" - ou comme de la poésie ou autres absurdités, selon vos préjugés et votre tendance au transfert positif ou négatif - que tout autre.
L'hermétisme de Lacan ne peut être excusé - pas plus que son attitude envers le lecteur, qui pourrait s'exprimer ainsi : "aime-le" ou "c'est à prendre ou à laisser". Mais bien que la destruction personnelle de la syntaxe française par Lacan le rende assez ardu même pour le lecteur français, il y a au moins une tradition intellectuelle suffisamment homogène à Paris qui fait que Lacan y est bien moins étranger qu'en Grande-Bretagne ou aux Etats Unis. La tradition phénoménologique, existentialiste et hégélienne-marxiste en France rend moins nécessaire d'expliquer ce que vous entendez par Hegel, ou Husserl, ou Heidegger, ou Kojéve, ou Sartre. Et la plupart des gens reconnaîtront de toute façon une idée, même si vous ne mentionnez pas la source, ou si vous citez ou paraphrasez sans référence, car ce genre de "plagiat" est généralement acceptable en France.
Fait assez significatif cependant, Lacan n'aurait pas pu réaliser son analyse de Freud sans l'influence de l'école de linguistique suisso-américano-russe représentée par Roman Jakobson, qui a longtemps témoigné de l'influence du formalisme russe et du linguistique structurel de Saussure aux Etats-Unis. Mais même cette influence est parvenue indirectement à Lacan. L'influence la plus importante sur Lacan fut celle de l'anthropologue structurel français Claude-Lévi-Strauss, qui rencontra et travailla avec Jakobson à la New School for Social Research de New York, en 1942-1945.

Lévi-Strauss tend à ne pas être très apprécié par les anthropologues américains et britanniques qui sont redevables à la tradition analytique et dite empiriste, ce qui en dit long sur lui. Il est à l'origine d'une nouvelle méthodologie et d'une épistémologie d'accompagnement en sciences humaines en France, généralement appelée "structuralisme". (Aujourd'hui, cependant, le terme désigne simplement une mode, un peu comme l'existentialisme.) Le structuralisme, dans le sens d'une méthodologie non empiriste, non atomiste, non positiviste des lois de la relation, est d'autre part complété par les avancées en théorie des systèmes généraux, en cybernétique non mécanique, en théorie de la communication et en études écologiques. Tant la nouvelle approche structurelle que la nouvelle approche systémique-cybernétique semblent parler en fait d'une véritable révolution épistémologique dans les sciences de la vie et les sciences sociales, dont nous entendrons beaucoup plus parler au cours de la prochaine décennie (si nous y survivons, bien sûr).
Lévi-Strauss chercha à utiliser les travaux des phonologues structuraux sur "l'opposition binaire" des phonèmes en tant que modèle pour l'analyse des mythes et des relations et échanges au sein des sociétés dites "primitives" - dont il a ensuite remis en question le supposé "primitivisme". Constatant qu'un nombre relativement faible d'"oppositions" entre "traits distinctifs" (graves/aigus, voix/silence, etc.) sont suffisants pour former l'infrastructure acoustique de toute langue connue, Lévi-Strauss tenta de découvrir des ensembles analogues d'oppositions dans les systèmes de parenté et dans les mythes. Ses travaux les plus récents se sont concentrés sur le mythe en tant que musique.
Avec tous ces machins douteux dans son approche, Lévi-Strauss a néanmoins introduit un type de signification dans l'étude du mythe - auparavant presque exclusivement axé sur le contenu plutôt que sur la forme - là où ça n'existait pas avant. Comme pour l'œuvre de Lacan - ou celle de Freud - le principal problème du structuralisme lévi-straussien ne réside pas dans la méthodologie, mais dans son application, c'est-à-dire dans les revendications universelles formulées en son nom.
Je reviendrai sur la critique plus détaillée du "structuralisme" dans les chapitres suivants. Pour l'instant, il suffira de donner un exemple bref et purement illustratif de l'utilisation par Lévi-Strauss du concept d'"opposition binaire" dans l'étude du mythe (Lévi-Strauss, 1958 : chap. 11).
Pour lui, le mythe est une représentation diachronique (succession dans le temps) d'un ensemble d'oppositions synchroniques (intemporelles). Il croit que la découverte de ces oppositions synchroniques est une déclaration sur la "structure fondamentale de l'esprit humain". Dans les chapitres suivants, j'analyserai et critiquerai le terme "opposition" - qui cache les catégories de "différence", "distinction", "opposition", "contradiction" et "paradoxe" . Je critiquerai également le concept de relations "binaires" " - qui dissimule toute une série de malentendus sur la communication analogique et numérique en général, et plus particulièrement sur "non", "négation", "exclusion", "zéro" et "moins un", ainsi que sur la relation entre "A" et "non-A". J'essaierai également de démontrer l'idée fausse que Lévi-Strauss se fait de la confusion entre "esprit", "cerveau" et "individu". Ceci est étroitement lié à la conception de Piaget de l'organisme comme "structure paradigmatique", et à l'incapacité, dans la plupart des travaux actuels en sciences de la vie et sciences sociales, de comprendre le problème logico-mathématique et existentiel des frontières et des niveaux dans les systèmes ouverts de communication et d'échange (systèmes impliquant ou simulant la vie ou "esprit", systèmes vivants et sociaux).

La méthode de lecture des mythes de Lévi-Strauss est entièrement nouvelle, simple à comprendre, globale et satisfaisante sur le plan esthétique. Il suggère de regarder le mythe comme on regarderait une partition d'orchestre dans laquelle les notes et les mesures à jouer en harmonie simultanée par différents instruments se sont mêlées à la cacophonie d'une succession linéaire. Ainsi, si nous représentons cette succession par les nombres 1, 2, 4, 7, 8, 2, 3, 4, 6, 8, 1, 4, 5, 7, nous pouvons rétablir la partition originale en mettant tous les nombres semblables ensemble en colonnes verticales :

112234444567788

Cette matrice est exactement ce que l'on peut construire dans l'analyse phonologique d'une phrase, où l'on peut montrer qu'une séquence linéaire de mots se construit sur une succession d'oppositions binaires entre des éléments acoustiques distinctifs.
Malheureusement pour ce que Lévi-Strauss considère comme la clé de voûte de sa méthode, l'analogie qu'il fait entre phonologie structurelle et mythe est fausse, alors que sa méthodologie est extrêmement fertile. Ce problème met en évidence la difficulté centrale de l'utilisation de l'œuvre de Lévi-Strauss et de Lacan. Il faut montrer que les sources supposées de leurs nouvelles contributions aux sciences sociales ne sont pas ce qu'elles pensent être ; il faut démontrer où et comment leurs points de vue servent une fonction idéologique répressive ; et il faut montrer l'inadéquation à la fois de nombreux axiomes de la méthode et de nombreuses applications supposées.

Sans développer une critique détaillée à ce stade, on peut dire d'emblée que c'est une erreur de traiter un système d'oppositions sans contexte entre caractéristiques acoustiques des "bits" des informations (traits caractéristiques) comme étant isomorphe avec un mythe, qui est un système avec un contexte. Le mythe est nécessairement contextuel parce qu'il manipule l'information afin d'organiser et de contrôler certains aspects d'un système social, et il ne peut donc être considéré comme isolé de cette totalité. Contrairement aux "mythemes" de Lévi-Strauss ("éléments constitutifs bruts" du mythe, par analogie avec le "phonème"), les phonèmes sont des bits d'information insignifiants et non significatifs. Les phonèmes et les oppositions phonémiques sont les outils d'analyse et d'articulation (dont la caractéristique fondamentale est la différence) dans un système dans lequel signification et sens sont en dehors de la structure phonémique. Mythemes' et oppositions' entre mythemes, au contraire, impliquent à la fois signification et sens : ils ont 'du contenu'. Lévi-Strauss traite le mythe comme s'il s'agissait d'une langue représentative sous la forme d'une grammaire sans contexte, ou traite les mythemes comme des "informations" au sens technique des systèmes quantitatifs fermés de la transmission des informations comme étudiés par Shannon et Weaver. La science de l'information concerne l'étude statistique des processus stochastiques et des chaînes de Markov (chapitre IX) - et Chomsky a démontré qu'aucun langage connu ne peut être correctement généré à partir d'une grammaire modelée sur ces processus. Il a également été démontré que le langage est un système d'un type logique supérieur à celui qui peut être généré par des algorithmes sans contexte (grammaires).

Bien que Lévi-Strauss parle du mytheme comme d'un caractère "supérieur" à tout élément similaire du langage, le modèle de l'opposition phonémique binaire reste ce qu'il considère comme le fondement scientifique de sa méthode. Ainsi le mytheme devient l'équivalent d'un outil d'articulation (un trait distinctif) employé par un système de signification d'un autre type logique (langage). Lorsque nous cherchons à découvrir ce qu'est cet autre système chez Lévi-Strauss, nous trouvons cette catégorie de "pensée mythique". Mais la pensée mythique est déjà définie sur la base des mythemes eux-mêmes. C'est un système d'articulation des oppositions par "une machine à supprimer le temps" (le mythe). Ce qui manque dans ce cercle, c'est le contexte réel et matériel dans lequel le mythe surgit et auquel il fait référence.
Cependant, Lévi-Strauss insistera sur le fait que sa méthodologie, contrairement au formalisme pur, est bien "contextuelle" (Lévi-Strauss, 1960a). Il se réfère constamment aux catégories de parenté, au contexte zoologique et botanique du mythe et aux caractéristiques des entités matérielles ("crues", "cuites", "pourries" et ainsi de suite). En réalité, cependant, toutes les "entités matérielles" et les "relations matérielles" qu'il emploie parviennent à cette analyse déjà définie, de façon tautologique, comme des catégories de pensée mythique. Par conséquent, le "contexte" qu'évoque Lévi-Strauss est invariablement le contexte des "idées" ou de "l'esprit", qu'il conçoit, comme Kant, comme étant un antécédent de l'organisation sociale, tant épistémologiquement qu'ontologiquement. Au sein de ce cadre idéaliste, il fait ensuite un saut rapide vers les catégories matérielles de la physique et de la chimie, qu'il évoque régulièrement comme le fondement ultime de ses catégories idéales.

Mais entre le contexte des idées et le contexte des atomes et des molécules (ou même celui du code génétique) il manque un niveau d'organisation unique mais énorme : le contexte socio-économique de la réalité humaine. Et ce niveau d'organisation contient un paramètre que l'on ne retrouve pas en physique, en biologie, en sciences de l'information, dans les langages, les idées, ou les mythes considérés comme systèmes d'opposition synchrones : la ponctuation du système par le pouvoir de certaines de ses parties à en exploiter les autres (en incluant la "nature" même). Toutes les idées, tous les électrons et "bits" d'information sont en effet égaux, aucun d'entre eux n'est différent des autres, et aucun groupe n'exploite les autres. Et alors que dans les systèmes qui n'impliquent pas l'exploitation sociale, les mythes peuvent à juste titre être considérés comme remplissant une fonction d'organisation "pure" ou "neutre", dans tous les autres systèmes, les mythes deviennent la propriété d'une classe, caste ou sexe. Un mythe qui est la propriété d'une classe est en fait une définition de l'idéologie. Le mythe cesse alors de servir la fonction neutre d'organisation pure et simple ; il sert de rationalisation d'une forme donnée d'organisation sociale.
L'étude structurelle du mythe est, comme Lévi-Strauss l'a souvent dit, une autre variante des mythes qu'il analyse. Comme eux, c'est un système d'oppositions binaires. Mais ce n'est pas une mécanique pour la suppression du temps, mais pour la suppression de l'histoire. Et puisque le "structuralisme" est effectivement la propriété d'une classe, nous pouvons donc l'identifier comme un système de rationalisation idéologique - ce qui n'est pas la même chose, de dire qu'il n'a aucune valeur.

L'analogie erronée de Lévi-Strauss entre un système sans contexte et un système contextuel - et donc tout l'édifice que les structuralistes ont érigé - provient d'une confusion entre langage et communication. D'une part, une telle confusion n'est possible que dans des théories ponctuées de façon à exclure la catégorie sociale objective de l'exploitation. D'autre part, elle dépend d'une unique isomorphie réelle, qui est ensuite utilisée pour réduire les différents niveaux d'organisation les uns par rapport aux autres : le fait que le langage, les systèmes de parenté, l'étude structurelle des mythes et la science de la phonologie soient des communications numériques (discontinues) au sujet de rapports analogues (continus). Une caractéristique unique de la communication numérique, à savoir qu'il s'agit d'un système de communication comportant limites et lacunes, est réifiée par l'argument structuraliste de sorte qu'il peut être appliqué sans distinction, comme catégorie ontologique implicite, à chaque niveau de complexité où apparaissent des "limites et des lacunes ". De telles formes numériques apparaissent nécessairement, comme instrument de communication, à tous les niveaux de complexité biologique et sociale. Par conséquent, l'argument réductionniste des structuralistes est grandement facilité. De plus, le fait que l'opposition binaire soit aussi une catégorie importante en physique classique (électromagnétisme par exemple) autorise les structuralistes à faire l'erreur épistémologique supplémentaire de confondre matière-énergie et information.

Auteur: Wilden Anthony

Info: Extrait de System and Structure (1972) sur http://www.haussite.net. Trad. Mg

[ anti structuralisme ] [ vingtième siècle ]

 
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