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vision du monde

Le pessimisme de Léopardi est un pessimisme intégral, à la fois métaphysique, moral, social. Léopardi nie tout et désespère de tout. " Notre vie, à quoi est-elle bonne ? Seulement à la mépriser. " Mais surtout Leopardi a en horreur une société qui réserve ses faveurs à la médiocrité brutale ou rusée et qui vilipende les hommes supérieurs en raison de leur mérite. Son mépris de l'humanité va jusqu'au dédain des jugements de la postérité. Leopardi exprime cette idée que l'appel à la postérité ne doit pas consoler l'homme supérieur malheureux. " Une ombre irritée fut-elle jamais apaisée par des sanglots, flattée par des discours ou par les offrandes d'une vile multitude ? Les temps se précipitent vers le pire : et l'on aurait tort de confier à nos descendants corrompus l'honneur des âmes illustres et la suprême vengeance des malheureux. " Léopardi se moque des utopies sociologiques de bonheur collectif. " La société humaine contient naturellement mille principes et mille éléments contraires et incompatibles: et quant à faire cesser ces discordes, l'intelligence et la puissance de l'homme n'y sont jamais par-venues depuis le jour où naquit notre race illustre; et de nos temps, aucune loi ne le pourra, ni aucun journal, si sages et si influents qu'ils puissent être. " Le pessimisme social de Léopardi engendre sinon l'individualisme proprement dit, du moins une disposition à fuir la société et à se réfugier dans un stoïque et farouche isolement.

Auteur: Palante Georges

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[ personnalité ] [ résumé ] [ nihiliste ]

 
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évolution historique

Les justifications humaines se ramènent au slogan de Hegel : tout ce qui est réel est rationnel, tout ce qui est rationnel est réel. Et comme une justification statique ne suffisait plus à une époque où le cours de l’Histoire s’accélérait, Hegel dut introduire la dimension du temps dans la métaphysique ; il le fallait bien pour que celle-ci puisse valoriser les avatars d’un monde en constant changement. Le devenir de l’histoire c’est le devenir de l’esprit. Et l’esprit absolu au siècle du nationalisme et de l’armée, c’est comme par hasard l’État, prussien comme le philosophe : Berlin est sa Jérusalem céleste et son temple la faculté où il enseigne. La dialectique : la négation des contraires par le cours du temps et du discours est de nos jours le moyen le plus commode pour faire du chaos l’ordre. Le calendrier s’en charge : hier la thèse, aujourd’hui l’antithèse. Ce n’est qu’un mauvais moment à passer, demain – toujours demain – on rasera gratis. Ce sera la synthèse. La formule de Hegel vaut pour n'importe quel système politique qui veut donner au relatif toute la rigueur de l’absolu : pour l’idéologue réactionnaire qui voit dans l’état social l’image du divin, et pour l’idéologue progressiste qui divinise une société dont le mouvement est l’état. Dans la voie de Hegel le marxisme n’est que la conclusion d’une pensée toujours possédée par le démon de l’Absolu bien qu’elle n’ait plus d’au-delà.

Auteur: Charbonneau Bernard

Info: Dans "Je fus", R&N Éditions, 2021, pages 220-221

[ philosophie ] [ critique ] [ immanence ]

 

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christianisme

On y connaît que l’objet principal des Jésuites n’est pas proprement de corrompre les mœurs des chrétiens, ni aussi de les réformer ; mais de s’attirer tout le monde par une conduite accommodante. Qu’ainsi comme il y a des personnes de toutes sortes d’humeur, ils ont été obligés d’avoir des maximes de toute façon pour les satisfaire ; et parce qu’ils ont été par là engagés d’avoir des opinions contraires pour contenter tant d’humeurs contraires, il a fallu qu’ils aient changé la véritable règle des mœurs, qui est l’Evangile et la tradition, parce qu’elle conserve partout un même esprit, et qu’ils y aient substitué une autre qui fût souple, diverse, maniable à tout sens, et capable de toutes sortes de formes, et c’est ce qu’ils appellent la doctrine de la probabilité.

Cette doctrine consiste en ce point, qu’une opinion peut être suivie en sûreté de conscience, lorsqu’elle est soutenue par quatre docteurs graves, ou par trois, ou par deux, ou même par un seul, et qu’un docteur, étant consulté, peut donner un conseil tenu pour probable par d’autres, encore qu’ils croie certainement qu’il soit faux, quamvis ipse doctor ejusmodi sententiam speculative falsam esse certo sibi persuadet, comme dit Layman, jésuite, et qu’ainsi pouvant conseiller les deux opinions opposées, il agira prudemment de donner celle qui sera la plus agréable à celui qui le consulte : Si haec illi favorabilior seu exoptatior sit. 

Auteur: Nicole Pierre

Info: Avertissement sur les " Provinciales " de Blaise Pascal, éditions Gallimard, 1987, page 32

[ critique ] [ démagogie ] [ casuistique ] [ relativisme ] [ laxisme ]

 

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sociologie politique

Pourtant, la modernité n’est pas la fausse conscience des modernes, et nous devons prendre bien soin de reconnaître à la Constitution, comme à l’idée de Révolution, son efficacité propre. Loin d’avoir éliminé le travail de médiation, elle en permit l’accroissement. De même que l’idée de Révolution poussa les révolutionnaires à prendre des décisions irréversibles qu’ils n’auraient pas osées sans elle, la Constitution procura aux modernes l’audace de mobiliser les choses et les gens à une échelle qu’ils s’interdiraient sans elle. Cette modification d’échelle ne fut pas obtenue, comme ils le croient, par la séparation des humains et des non-humains, mais, au contraire, par l’amplification de leur brassage. Cet accroissement est à son tour facilité par l’idée d’une nature transcendante — pourvu qu’elle reste mobilisable —, par l’idée d’une société libre — pourvu qu’elle demeure transcendante — et par l’absence de toute divinité — pourvu que Dieu parle au cœur. A condition que leurs contraires demeurent à la fois présents et impensables, et que le travail de médiation multiplie les hybrides, ces trois idées permettent de capitaliser à grande échelle. Les modernes pensent qu’ils n’ont réussi une telle expansion que parce qu’ils ont séparé soigneusement la nature et la société (et mis Dieu entre parenthèses), alors qu’ils n’y parvinrent que parce qu’ils mélangèrent de beaucoup plus grandes masses d’humains et de non-humains, sans rien mettre entre parenthèses et sans s’interdire aucune combinaison ! La liaison du travail de purification et du travail de médiation les a engendrés mais ils n’attribuent qu’au premier les raisons de leur succès.

Auteur: Latour Bruno

Info: Nous n'avons jamais été modernes. Essai d'anthropologie symétrique. P 30

[ anthropologie diachronique ] [ triade ] [ Gaule ]

 

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indifférence

Un jour, une petite cabane située sur la plage, brûla. Dans cette cabane, autrefois, on rapportait le sel, on le faisait sécher et on le préparait à la vente. On ne sait pas si Ryôkan l’avait habitée mais voici ce qui arriva :
Dès que les villageois apprirent que la cabane à sel avait disparu dans les flammes, ils cherchèrent le responsable. Avisant le moine à l’aspect mystérieux, ils l’attrapèrent et décidèrent de le punir. Ils creusèrent un trou dans le sable, y jetèrent Ryôkan puis commencèrent à l’ensevelir. Ryôkan avait presque disparu sous le sable quand, bienheureusement, passa juste à ce moment-là, monsieur Ogoshi Chumin, le médecin des villageois, le médecin s’interposa en faveur de l’enseveli et pour les calmer leur offrit du saké et du poisson.
Puis il vint en aide à Ryôkan qui se dégageait comme si rien ne s’était passé, et le ramena chez lui pour le réconforter. Monsieur Ogoshi Chumin regardait silencieusement et respectueusement Ryôkan en se demandant : "Pourquoi n’a-t-il pas protesté? Pourquoi s’est-il laissé faire sans rien dire?"
Ryôkan dit :
 - Quand les gens sont persuadés d’avoir raison il est inutile d’essayer de les convaincre, même des arguments logiques sont inutiles. Ils n’écoutent pas. C’est pourquoi j’ai laissé faire.
- Oui, reconnut le médecin; Peut-être que Ryôkan, en suivant le cours des choses tel qu’il se présente, montre ici une grande sagesse, un véritable détachement. Parfois dans ce monde, plus on se débat, plus se produisent des faits contraires alors que si l’on laisse les événements aller selon leur courant, une meilleure direction apparaît.

Auteur: Ryokan Taïgu

Info: Contes zen : Ryôkan, le moine au coeur d'enfant, La cabane de sel

[ impassibilité ]

 
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querelle religieuse

En m’informant après de la doctrine des nouveaux Thomistes : Elle est bizarre, me dit-il. Ils sont d’accord avec les Jésuites d’admettre une grâce suffisante donnée à tous les hommes ; mais ils veulent néanmoins que les hommes n’agissent jamais avec cette seule grâce, et qu’il faille, pour les faire agir, que Dieu leur donne une grâce efficace qui détermine réellement leur volonté à l’action, et laquelle Dieu ne donne pas à tous. De sorte que, suivant cette doctrine, lui dis-je, cette grâce est suffisante sans l’être. Justement, me dit-il : car, si elle suffit, il n’en faut pas davantage pour agir ; et si elle ne suffit pas, elle n’est pas suffisante.

Mais, lui dis-je, quelle différence y a-t-il donc entre eux et les Jansénistes ? Ils diffèrent, me dit-il, en ce qu’au moins les Dominicains ont cela de bon qu’ils ne laissent pas de dire que tous les hommes ont la grâce suffisante. J’entends bien, répondis-je, mais ils le disent sans le penser, puisqu’ils ajoutent qu’il faut nécessairement, pour agir, avoir une grâce efficace, qui n’est pas donnée à tous : ainsi s’ils sont conformes aux Jésuites par un terme qui n’a pas de sens, ils leur sont contraires, et conformes aux Jansénistes dans la substance de la chose. Cela est vrai, dit-il. Comment donc, lui dis-je, les Jésuites sont-ils unis avec eux, et que ne les combattent-ils aussi bien que les Jansénistes, puisqu’ils auront toujours en eux de puissants adversaires, lesquels, soutenant la nécessité de la grâce efficace qui détermine, les empêcheront d’établir celle qu’ils veulent être seule suffisante ?

Les Dominicains sont trop puissants, me dit-il, et la Société des Jésuites est trop politique pour les choquer ouvertement. Elle se contente d’avoir gagné sur eux qu’ils admettent au moins le nom de grâce suffisante, quoiqu’ils l’entendent en un autre sens.

Auteur: Pascal Blaise

Info: Les " Provinciales ", Deuxième lettre, éditions Gallimard, 1987, pages 51-52

[ jansénisme ] [ sophisme ] [ intérêts temporels ] [ calculateurs ]

 

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division structurelle

Á un système qui lui-même, de sa propre pente, va essentiellement vers le leurre... vers l’erreur, vers quelque chose qui pointe dans le fait que cet organisme semble tout entier fait, non pour satisfaire le besoin, mais pour halluciner le besoin ...il convient que s’oppose un autre appareil. Et là je ne force pas la note, FREUD lui-même entend bien qu’il doit y avoir une sorte de distinction entre les appareils dont il avoue ne voir aucune trace dans ces supports anatomiques.

Il faut supposer un autre appareil qui vient là entrer en jeu pour exercer un principe, une instance de réalité qui se présentera comme essentiellement un principe de correction, de rappel à l’ordre. Le principe de réalité, c’est-à-dire tout ce à quoi doit, en fin de compte - le fonctionnement de l’appareil neuronique - son efficace, se présente comme un appareil qui va beaucoup plus loin dans le sens d’opposition que le simple contrôle. Il s’agit de la rectification et aussi bien d’ailleurs toute façon d’opérer ne sera que le détour de précaution, de retouche, de retenue dirai-je, pour caractériser essentiellement le mode sur lequel ce principe s’exerce et fonctionne.

Principe de retenue qui vient ici en somme pour corriger, compenser, fondamentalement s’opposer à ce qui paraît être la pente fondamentale de l’appareil psychique. Jamais personne, jamais aucun système possible de reconstitution de l’action humaine n’avait été aussi loin dans le caractère fondamentalement conflictuel, introduit à la base, au principe même de ce que comporte normalement l’affrontement d’un organisme qui semble en principe, après tout, disons-le, plutôt destiné à vivre. Et aucun n’avait poussé plus loin dans les présupposés, explications à donner de cet organisme dans le sens d’une inadéquation radicale pour autant que le dédoublement des systèmes se pose au principe, comme fait pour aller contre l’inadéquation foncière d’un des deux.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Séminaire VII, L'Ethique, 25 novembre 1959

[ antagonisme ] [ forces contraires ]

 
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responsabilité royale

Pierre le Cruel se conduit de plus en plus en tyran au sens détestable que lui donne le Moyen Âge, féru du Policraticus de Jean de Salisbury. Composé vers 1159 par ce secrétaire de Thomas Becket, fameux archevêque de Canterbury à qui sa longue opposition politique au roi d'Angleterre Henri II Plantagenêt avait fini par coûter la vie, en 1170, ce chef-d'œuvre de la philosophie politique médiévale décrit et dénonce le pouvoir tyrannique des souverains régnant par la contrainte et ouvre même la voie aux conditions de leur élimination physique : le Policraticus fonde ainsi toute l'intense réflexion du Moyen Âge occidental sur le tyrannicide. Certes, cédant sans doute à la même tendance de recul des idées démocratiques qui marque, en Occident, à la fin du XIIIe siècle et la première moitié du siècle suivant, la Monarchie castillane en pleine consolidation, sous le règne d'Alphonse XI (1312-1350), s'était dotée des moyens intellectuels de faire contre-feu à la doctrine de résistance au prince, notamment en déduisant du De regimine principum de Gilles de Rome, penseur tout aussi prestigieux mais plus récent, les principes contraires de l'inviolabilité du roi et de sa légitimité héréditaire. Mais, foncièrement, c'est à la construction de l'État moderne, tel que l'incarnait Alphonse XI, qu'oeuvre un tel renforcement de la pensée monarchiste, non pas à la justification de l'action autoritaire, violente et arbitraire d'un Pierre Ier de Castille. Au moment où s'ouvre le conflit armé auquel sera associé Du Guesclin, cela fait déjà bien longtemps que la réputation d'injustice de Pierre a mis à mal sa légitimité et préparé les justifications théoriques de sa déposition, qui font leur miel de toutes les réflexions récentes sur le "bien commun", le bon gouvernement et le tyrannicide. À cette justification théorique, Pedro Lopez de Ayala apportera d'ailleurs la contribution la plus éminente et la plus neuve, dans les lignes de son Libro rimado del Palacio, inspiré de Gilles de Rome et composé au plus fort de la lutte [...].

Auteur: Lassabatère Thierry

Info: Du Guesclin

[ historique ]

 

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tétralemme

Je propose une logique tétravalente, alternative à la logique binaire classique (vrai/faux). Elle  introduit quatre valeurs de vérité :

Vrai (V) : une proposition est vraie et correspond à la réalité.

Faux (F) : une proposition est fausse et ne correspond pas à la réalité.

Indéterminé (I) : il est impossible de déterminer si une proposition est vraie ou fausse avec les informations disponibles.

Contre-vrai (C) : une proposition est fausse mais semble vraie à première vue.

J'ai développé cette logique pour analyser des paradoxes logiques et des problèmes de langage et ai pu montrer que la logique tétravalente permet de résoudre des problèmes qui ne peuvent pas être résolus avec la logique binaire classique.

On a pu aussi voir quelques applications concrètes de cette logique tétravalente en sociologie :

- Analyse des identités sociales:
La logique tétravalente peut être utilisée pour analyser les identités sociales complexes et multidimensionnelles, en tenant compte des nuances et des contradictions. Par exemple, un individu peut s'identifier à la fois comme homme et femme, ou comme appartenant à plusieurs groupes ethniques ou religieux. La logique classique binaire ne permet pas de capturer cette complexité, tandis que la logique tétravalente offre des nuances supplémentaires pour comprendre les identités multiples et fluides.

- Etude des attitudes et des opinions: Les attitudes et les opinions des individus ne sont pas toujours binaires (pour ou contre). La logique tétravalente peut être utilisée pour analyser les nuances des opinions, en tenant compte de l'incertitude, de l'ambivalence et des opinions contradictoires. Par exemple, une personne peut être "plutôt d'accord" avec une affirmation, tout en ayant des réserves ou en reconnaissant des arguments contraires.

Analyse des interactions sociales: Les interactions sociales ne se limitent pas toujours à des situations de confrontation binaire (coopération/conflit). La logique tétravalente peut être utilisée pour analyser les interactions plus subtiles et nuancées, en tenant compte de la négociation, de la manipulation, de la résistance et d'autres formes de relations sociales complexes. 

 

Auteur: Tarski Alfred

Info: "Der Wahrheitsbegriff in den formalisierten Sprachen." Studia Philosophica 1, 1-26. 1936

[ phiosophie ]

 

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anonymat de masse

Supposons que la bombe ait été utilisée.

Il serait déplacé de parler encore ici d’ "acte". Le processus qui aboutirait à un tel fait compterait en fin de compte tant de médiations, il serait si peu transparent, il se composerait de tant d’étapes intermédiaires et ferait intervenir tant d’instances – sans qu’aucune ne soit plus décisive que les autres – que pour finir tout le monde aurait fait quelque chose mais personne n’aurait "fait" cela. En fin de compte, personne n’aurait rien fait.

Pour écarter tout risque d’un ultime sursaut de la conscience, on a construit des êtres sur lesquels rejeter la responsabilité, c’est-à-dire des machines à oracles, des consciences-automates électroniques [...]. [...]

Quand bien même il n’y aurait pas de robots, la complexité de l’organisation moderne à elle seule, le fait que cette chose monstrueuse soit le résultat d’un travail mille fois divisé et médiatisé, suffirait à en faciliter l’exécution. Cela semble paradoxal. Ce n’est pourtant pas un paradoxe parce que les innombrables procédures organisationnelles, en consommant beaucoup d’énergie, affaiblissent ou épuisent les énergies morales contraires, et remplissent ainsi une fonction analogue à celle des résistances électriques.

En outre, lorsqu’une organisation est au travail, l’idée d’une moralité de l’action est automatiquement remplacée par celle d’un parfait fonctionnement. [...] Chacun des innombrables travailleurs spécialisés intégrés au processus considérant exclusivement la tâche qu’il doit accomplir et n’étant lui-même considéré comme consciencieux que dans la mesure où il accomplit consciencieusement la tâche dont il est chargé, il n’y a pas pour lui matière à la moindre considération morale. Autrement dit, s’il n’y a pas là pour lui la moindre perspective d’immoralité, c’est parce qu’il n’a pas de "perspective" du tout. [...]

Et comme il ne sait pas comment sa tâche se combine avec celle des autres, il ne peut prendre conscience du fait que la somme des tâches spécialisées et consciencieusement accomplies pourrait se révéler une monstrueuse absence de conscience morale. [...]

Rien ne peut donc contrecarrer la production et l’utilisation de la bombe : ce sont le grand nombre des participants et la complexité de l’appareil qui empêchent d’empêcher.

Auteur: Anders Günther Stern

Info: Dans "L'obsolescence de l'homme", trad. de l'allemand par Christophe David, éditions Ivrea, Paris, 2002, pp. 272-274

[ responsabilité diluée ] [ ignorance ] [ totalitarisme ] [ pions ]

 

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