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oppression

Il faudrait d'abord étudier comment la colonisation travaille à déciviliser le colonisateur, à l'abrutir au sens propre du mot, à le dégrader, à le réveiller aux instincts enfouis, à la convoitise, à la violence, à la haine raciale, au relativisme moral, et montrer que, chaque fois qu'il y a au Vietnam une tête coupée et un oeil crevé et qu'en France on accepte, une fillette violée et qu'en France on accepte, un Malgache supplicié et qu'en France on accepte, il y a un acquis de la civilisation qui pèse de son poids mort, une régression universelle qui s'opère, une gangrène qui s'installe, un foyer d'infection qui s'étend et qu'au bout de tous ces traités violés, de tous ces mensonges propagés, de toutes ces expéditions punitives tolérées. De tous ces prisonniers ficelés et interrogés, de tous ces patriotes torturés, au bout de cet orgueil racial encouragé, de cette jactance étalée, il y a le poison instillé dans les veines de l'Europe, et le progrès lent, mais sûr, de l'ensauvagement du continent.

Auteur: Césaire Aimé

Info: Discours sur le colonialisme

[ colonialisme ]

 
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amitié

5 janvier 1940
Me suis découvert des affinités avec un jeune catalan, Jordi de son prénom, militant du POUM, sur le front de Madrid. Nous parlons Garcia Lorca, parlons Lope de Vega, jouons aux échecs. Il est polyglotte, d'une exquise finesse et lettré.
(...)
16 janvier 1940
Nous marchions lentement, en silence, sur la route glissante, sombre malgré la neige fraîchement tombée. En me laissant, il dit : "Je crois savoir que nous, les Espagnols, on nous fera quitter Mittersheim demain ..." Je sens que, tout comme moi, il regrette que notre amitié naissante doive être coupée si tôt. Je le suis des yeux, fine silhouette fantomatique bientôt dissoute dans la nuit où pas une lueur ne brille, lorsque je l'entends qui revient sur ses pas.
- Adios, companero, dit-il. Ah, tu connais ce vers de Byron ?
Let me, or happy or unhappy,
Learn to anticipate my immortality.
Nous nous sommes longuement étreints.
En notant ceci, je me rends soudain compte que je ne connais pas son nom de famille.

Auteur: Malaquais Jean

Info: Journal de guerre suivi de Journal du métèque 1939-1942

[ rencontre ] [ complicité ] [ séparation ]

 

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cauchemar

Une brume d’un bleu pastel délicat stagne, accumulée au fond des vertigineuses tranchées qui s’ouvrent entre les parois verticales et parallèles des hautes façades, comme coupées au couteau dans une unique matière d’un brun noir. Elle enveloppe dans une transparence veloutée le flot docile des voitures semblable à quelque migration d’insectes. Précédées par les pinceaux de leurs phares, eux-mêmes veloutés, elles viennent s’accumuler aux croisements, s’immobilisent, repartent, s’égrènent, s’immobilisent de nouveau dans une sorte d’irréel silence, comme si le grondement qui s’élève de l’énorme ville, uniforme, étale pour ainsi dire, recouvrait ou plutôt absorbait indistinctement les millions de bruits confondus dans une unique et formidable rumeur, vaguement inquiétante, déchirée de loin en loin par le sporadique hululement de sirènes (police, ambulances, pompiers ?), croissant, s’exaspérant, strident, décroissant, mourant. Comme des cris de folles, d’oiseaux exotiques, ou les cornes de navires en perdition. Comme si la ville elle-même criait. Comme si, par intervalles, l’étincelant et orgueilleux amoncellement de cubes et de tours agonisait sans fin dans une sorte de diamantine apothéose, relançait de moment en moment vers le ciel opaque de longs signaux d’alarme, d’angoisse.

Auteur: Simon Claude

Info: Le jardin des plantes

[ irréalité ] [ léviathan ] [ sonorité ] [ trafic ] [ obscurité ]

 
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Ajouté à la BD par Plouin

arme

L'épée du bourreau avait acquis une valeur symbolique et monétaire particulière. Elle était grande – longue en moyenne de plus d'un mètre et pesant environ trois kilos – et souvent très ornementée. Au milieu du seizième siècle, l'épée de combat classique, dont s'étaient servis les bourreaux au Moyen-Âge, avait en général été remplacée par une arme conçue exprès, avec un bout plat et non pointu, et une répartition des poids plus adaptée à l'usage exclusif de la décapitation. Beaucoup de ces épées ont survécu et elles témoignent de l'art et du soin exceptionnels qui présidèrent à leur création. Chaque épée avait une inscription unique, telle que "Par la justice, le pays prospérera et s'épanouira, dans l'anarchie il ne survivra pas", ou "Garde-toi des mauvais actes, sinon ton chemin mène à la potence", ou, plus bref, "Les seigneurs jugent, j'exécute". Plusieurs épées portent aussi des gravures de la balance de la justice, du Christ, ou de la Vierge et l'Enfant, ou de la potence, de la roue ou d'une tête coupée. Quelques dynasties de bourreaux inscrivaient les noms et les dates de chaque détenteur, et une famille faisait même une encoche sur l'épée pour chaque condamné ainsi exécuté.

Auteur: Harrington Joel F.

Info: L'honneur du bourreau

[ exécuteur ] [ historique ] [ sabre ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

érotisme

Marbre de Carrare. Esquisse des deux traits déclinants du slip sur le haut des cuisses. Mieux que si elle était carrément à poil. Impossible de ne pas évoquer, comme malgré soi, le petit chat qui dort à la jonction légère de ces lignes de lingerie. Cette putain de femelle est fabriquée pour attirer les queues aussi sûrement que l'aimant pour l'acier. Amplement charnelle. Carnée. Friande. Opale de chair pleine. Générosité du corps embouti d'une seule pièce de la tête aux pieds. Un temple moussu. Luxe de la peau. Ensemble de courbes planes, d'inflexions douces, chaînes de lentes spirales. S'allonger sur elle et le lui mettre doit vous laisser la sensation d'une descente en luge sur les contreforts lustrés. Elle est elle-même le centre d'une circonférence accomplie. Remplie. Bombée. Fait songer à un flux de vie bien portante. Aux images de toutes les bonnes choses de la volupté. Viande appétissante quand on a une faim de loup. Verre de vin moiré rubis fauve sur la nappe immaculée d'une table dressée en plein air au soleil qui rissole le liquide. Somnolence insouciante dans l'herbe fraîchement coupée, un brin d'érection qui se dessine à l'arrière-plan sur la corde des aigus...

Auteur: Calaferte Louis

Info: No man's land, 4e de couverture

[ littérature ] [ obsédé ] [ femmes-par-hommes ]

 

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classes sociales

La Russie est coupée en deux : la rupture est sensible depuis la réforme de Pierre le Grand, qui aboutit à créer une nouvelle noblesse. Pierre le Grand a réalisé ce dont, plus tard, Napoléon a rêvé, quand il imaginait la Légion d’honneur.

Le résultat est patent. Dostoïevski le rappelle régulièrement, depuis ses Carnets de la maison morte. Les gens du peuple éprouvent pour les privilégiés un sentiment qui prend souvent la figure de la haine. Les privilégiés, de leur côté, ne cessent, par patriotisme, de dire leur admiration pour le peuple, sans oublier pourtant le mépris qu’autrefois leur inspiraient les "puants".

Ce mépris est renforcé depuis que l’occidentalisation des élites leur donne l’impression de participer à la civilisation. Le moujik est un sauvage. Le moujik s’enivre abominablement.

Que le moujik vive dans une grande misère matérielle et spirituelle, Dostoïevski ne songe pas à le nier. Mais il croit fermement – a-t-il tort ? a-t-il raison ? – que le peuple, qui n’est pas un parangon de vertu, a gardé la conscience du bien et du mal, celle qu’on acquise Adam et Eve en mangeant le fruit de l’arbre. Il se persuade par ailleurs que la classe privilégiée est en train de perdre cette conscience. La licence en matière de mœurs est un signe.

Auteur: Backès Jean-Louis

Info: "Dostoïevski et la logique", YCMA-Press, Paris, 2021, pages 320-321

[ valeurs ] [ hiérarchie ] [ sagesse populaire ] [ bon sens ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

souk

Pour arriver chez moi, il fallait monter des rues et des rues mauresques, tortueuses, coupées de couloirs sombres sous la forêt des porte-à-faux moisis.
Devant les boutiques inégales, on côtoyait des tas de légumes aux couleurs tendres, des mannes d’oranges éclatantes, de pâles citrons et de tomates sanglantes. On passait dans la senteur des guirlandes légères de fleurs d’oranger ou de jasmin d’Arabie lavé de rose avec, au bout, des petits bouquets de fleurs rouges.
Il y avait des cafés maures avec des pots de romarin et des poissons rouges flottant dans des bocaux ronds sous des lanternes en papier, des gargoulettes où trempaient des bottes de lentisque.
À côté, c’étaient des gargotes saures avec des salades humides et des olives luisantes, des étalages de confiseurs arabes avec des sucres d’orge et des pâtisseries poivrées, des fumeries de kif où on jouait du flageolet.
On frôlait des Mauresques en pantalons lâches et en foulards gorge-de-pigeon ou vert Nil, des Espagnoles avec des roses de papier piquées dans leurs crinières noires.
On pouvait acheter de tout, on entendait tous les langages, tous les cris de la vie méditerranéenne, bruyante, toute en dehors, mêlée aux réticences et aux chuchotements de la vie maure.
Enfin, au fond d’une impasse, par une porte branlante, on entrait dans un patio frais, plein d’une ombre séculaire.

Auteur: Eberhardt Isabelle

Info: Pages d'Islam, Le mage

[ marché ] [ foire ]

 

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renaissance

Raphaël, Léonard et Michel-Ange furent, tous trois, élevés à l'ancienne école; leurs maîtres, presque aussi grands qu'eux, connaissaient la véritable mission de l'art et l'avaient remplie; imbus du vieil et profond esprit religieux, ils le communiquèrent à leurs disciples qui, se désaltérant, en même temps, aux vives sources de savoir qui jaillissaient de toutes parts, excitèrent l'admiration universelle. Dans son émerveillement, le monde crut que leur grandeur venait de leur nouvelle science, au lieu de l'attribuer aux anciens principes qui apportaient la vie. Et, depuis lors, on a essayé de produire des Michel-Ange et des Léonard, par l'enseignement aride des sciences et on s'est étonné qu'il n'en apparût pas, sans se rendre compte que ces nobles patriarches tenaient par leurs racines aux grands rochers des siècles passés, et que notre enseignement scientifique d'aujourd'hui consiste à arroser, avec assiduité, des arbres dont toutes les branches ont été coupées.
Et j'ai été généreux pour la science de la Renaissance en admettant que ces grands maîtres en ont profité, car ma conviction, partagée par beaucoup de ceux qui aiment Raphaël, est qu'il peignit mieux alors qu'il savait moins. Michel-Ange fut souvent entrainé dans une vaine et désagréable démonstration de ses connaissances anatomiques qui cache encore à beaucoup de gens son immense puissance; et Léonard gâcha tellement sa vie dans ses travaux d'ingénieur qu'il reste à peine un tableau portant son nom.

Auteur: Ruskin John

Info:

[ art pictural ]

 

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signes sonores

Pour nos ancêtres indigènes, et pour les nombreux peuples autochtones qui s'accrochent encore à leurs traditions orales, la langue est moins une possession humaine qu'une propriété de la terre animée elle-même, un pouvoir expressif et tellurique auquel nous participons tous, de même que les coyotes et les grillons. Chaque créature met en œuvre cette magie expressive à sa manière, l'abeille mellifère avec sa danse ondulatoire, tout comme l'otarie belliqueuse et harrumphante.

Ce pouvoir n'est pas non plus réservé aux seuls animaux. Le chuchotement des herbes non coupées à l'aube, le gémissement plaintif des troncs qui se frottent les uns aux autres dans les forêts profondes, ou le rire des feuilles de bouleau lorsque le vent s'engouffre dans leurs branches, tous ces sons sont porteurs d'une multitude de significations à plusieurs niveaux pour ceux qui les écoutent attentivement. Dans le nord-ouest du Pacifique, j'ai rencontré un homme qui avait appris le langage des conifères à aiguilles ; par une journée de brise, vous pouviez le conduire, les yeux bandés, dans n'importe quelle parcelle de la forêt côtière et le placer, toujours aveugle, sous un arbre particulier ; après quelques instants, il vous dirait, en écoutant, quelle espèce de pin, d'épicéa ou de sapin se trouvait au-dessus de lui (s'il se trouvait sous un sapin de Douglas ou un grand sapin, un épicéa de Sitka ou un cèdre rouge de l'Ouest). Ses oreilles s'accordaient, disait-il, aux différents dialectes des arbres.

Auteur: Abram David

Info: Becoming Animal: An Earthly Cosmology

[ nature ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

autodestruction

Perchée sur un éperon rocheux, au sommet d'une montagne escarpée qui domine la rive sud-ouest de la mer Morte, la forteresse de Massada devint le dernier bastion de la résistance des juifs sicaires, le symbole même de la rébellion. Masada résistait encore, alors que toutes les autres villes ou places fortes étaient tombées. Jérusalem avait été pris et rasé deux ans après le début de l'insurrection en 70. Masada resta imprenable jusqu'en 74. Abrités derrière ses murs, neuf cent soixante défenseurs repoussèrent les assauts d'une armée romaine estimée à quinze mille hommes. En dépit de sa résistance acharnée la situation de Massada, en avril 74, était devenue désespérée. Coupée de tout renfort, entièrement cernée par l'armée romaine, sa garnison n'était plus capable de supporter une attaque décisive. Après avoir bombardé la forteresse à l'aide de lourdes machines de siège, les Romains tracèrent une immense voie d'approche et, la nuit du 15 avril 74, se préparèrent à l'assaut final. Exhortés par Eléazar, commandant de la forteresse, les hommes tuèrent leurs femmes et leurs enfants. Dix hommes furent choisis pour tuer leurs compagnons. Puis ils tirèrent au sort celui d'entre eux qui égorgerait les neuf autres. Lorsqu'il eut accompli sa tâche, il mit le feu aux bâtiments encore debout et se suicida. Neuf cent soixante hommes, femmes et enfants périrent ainsi. Lorsque les Romains prirent Masada le lendemain matin, ils ne trouvèrent que des cadavres dans un monceau de ruines.
Deux femmes et cinq enfants réussirent à échapper au massacre en se cachant dans une citerne. Une des femmes témoigna de cette histoire, interrogée par des officiers romains...

Auteur: Flavius Josèphe Yosef Ben Matthias

Info:

[ historique ] [ judaïsme ]

 

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