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manie de l'ordre

Nous nous comportons tous comme le démon de Maxwell. Les organismes s'organisent. C'est dans l'expérience quotidienne que réside la raison pour laquelle les physiciens sérieux ont maintenu en vie cette fantaisie de bande dessinée plus de deux siècles. Nous trions le courrier, construisons des châteaux de sable, résolvons des puzzles, séparons le bon grain de l'ivraie, réarrangeons les pièces d'un jeu d'échecs, collectionnons les timbres, classons les livres par ordre alphabétique, créons des symétries, composons des sonnets et des sonates, et mettons de l'ordre dans nos chambres, et tout cela ne demande pas une grande énergie, pour autant que nous puissions faire preuve d'intelligence. Nous propageons de la structure (pas seulement nous, les humains, mais tous les êtres vivants). Nous perturbons la tendance à l'équilibre. Il serait absurde de tenter une comptabilité thermodynamique de ces processus, mais il n'est pas absurde de dire que nous réduisons l'entropie, morceau par morceau. Petit à petit. Le démon originel, qui perçoit une molécule à la fois, distingue le rapide du lent et actionne son petit portail, est parfois qualifié de "superintelligent", mais comparé à un organisme réel, il est un savant idiot. Non seulement les êtres vivants réduisent le désordre dans leur environnement, mais ils sont en eux-mêmes, avec leur squelette et leur chair, leurs vésicules et leurs membranes, leurs coquilles et leurs carapaces, leurs feuilles et leurs fleurs, leurs systèmes circulatoires et leurs voies métaboliques, des miracles de modèles et de structures. On a parfois l'impression que la lutte contre l'entropie constitue notre chimérique (quixotic)* objectif dans cet univers.

Auteur: Gleick James

Info: L'information : Une histoire, une théorie, un déluge, *vient de Don Quichotte

[ organisation ] [ obsession ] [ cycles éphémères ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

camouflage

Dans le milieu de la grande truanderie, Rosso Dagarella était ce qu'on appelle un lézard. Le lézard est un expert de la poudre aux yeux, de l'infiltration, de l'imposture. C'est un spécialiste de la mue, un champion de l'incognito, un virtuose du ni vu ni connu. Qu'on n'aille pas imaginer je ne sais quel cabotin qui aime se déguiser comme un pitre de carnaval : le lézard serait plutôt tout le contraire. Ce jour-là, Rosso Dagarella portait un vêtement assez commun, mais de bonne coupe, qui aurait pu habiller un bourgeois modeste ou un maître artisan. Tout son art tenait dans son sens du mimétisme : un lézard ne se cache pas, ne se masque pas, ne se livre pas à un stupide jeu d'acteur. Il sait juste adopter avec naturel les attitudes et les comportements de l'humanité ordinaire ; il se contente d'emprunter tous les gestes, tous les accents, toutes les allures, sans jamais appuyer ou surjouer. Il adhère simplement à la normalité des pigeons qu'il veut plumer et des limiers qu'il veut semer. La meilleure planque d'un lézard, c'est la cohue des marchés, c'est la ferveur des processions, c'est le tourbillon frôleur des bals. Il est toujours juste là où on ne le cherche pas, un peu à côté, presque sous vos yeux. Qu'il ait un cave à lessiver ou un ennemi à éviter, il le colle généralement de si près qu'il demeure inaperçu. Il rôde aux lisières de son entourage : dans la domesticité des amis du client, dans les buveurs qui trinquent avec ses hommes de main, dans les messagers qui portent son courrier. Il s'expose avec une insolence si tranquille qu'il reste toujours couvert.

Auteur: Jaworski Jean-Philippe

Info: Gagner la Guerre

[ espion ] [ normalité ] [ comédien ]

 

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témoignage

"Il était une fois un oiseau, mon Dieu" (Clarice Lispector)
Je suis le chardonneret jaune qui est venu à sa mangeoire une heure avant qu'elle meure. J'ai été la dernière chose qu'elle a vue : grande était donc ma responsabilité. Pourtant tout ce que j'ai fait a été de manger. Pendant huit longs mois d'hiver, les noires graines huileuses de tournesol étaient restées intactes - pas un seul de mon espèce, ou de toute autre espèce, ne s'était approché. C'était trop trop de travail. Même si nous en avions eu la force - mais nous ne l'avions pas, affamés comme nous l'étions -, nous n'étions pas d'humeur à croquer quoi que ce soit. Le matin du 22 avril, elle les a enlevées et a rempli le tube de la mangeoire avec des coeurs de graines de tournesol - des petits granules lustrés dont la dure coque extérieure avait été ôtée par une lointaine machine compliquée. Elle est rentrée à l'intérieur et a attendu. De ma branche je pouvais la voir faire les choses qu'elle aimait faire : elle a ramassé une serviette au sol, elle a rempli un formulaire de garde du courrier, elle a fait bouillir de l'eau, elle a regardé dans le vide. Elle m'a vu arriver. Son visage a tressailli, peut-être pas exactement de joie, c'était le jaillissement ordinaire de la vie. Il est vrai qu'il y avait une vitre entre nous. Mais je pouvais voir les graines de ses yeux et les coins relevés de sa bouche. J'ai mangé un coeur. J'ai tourné la tête. Elle me regardait comme si j'étais la dernière chose vivante sur la terre. Et comme je l'étais, j'ai continué à manger.

Auteur: Ruefle Mary

Info: "S'il vous plaît, lisez", in "My Private Property", p. 4 - ma traduction

[ animal ] [ derniers gestes ] [ face-à-face ]

 

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Ajouté à la BD par Benslama

maman débordée

Hier, j’ai eu une journée nerveusement épuisante ! Mon petit boubou avait mal dormi (je crois qu’une dent veut sortir)… donc nous aussi… c’est dur de commencer une journée déjà fatiguée… Mais il a "chouiné" toute la journée… Ma grande avait invité une copine et elles ont joué ensemble… je n’ai eu qu’à leur préparer des crêpes pour le goûter… ouf ! Mon petit grognon dormait...

J’ai bien sûr choisi ce jour pour ranger 2 mois de photos et faire des cd pour les grands parents… Comme bien entendu mon ordi n’a pas arrêté de bugger… et Gabriel de me tirer par la manche dès que je devais être devant mon écran…

Je n’ai pas arrêté de le gronder tout en me disant que ce n’était pas sa faute si je n’avais pas de patience… Tant bien que mal j’ai bouclé mon courrier (mon chéri a dû faire celui pour ses parents)… Franchement je suis incapable de me souvenir ce que j’ai bien pu écrire… j’ai peur qu’il ne s’agisse que d’un vrai charabia… je me rattraperai au téléphone…

La nuit à été encore rude… mais on est sorti prendre l’air, poster le courrier, faire quelques petits achats… le vent nous a fait un bien fou !

Mon mari devait aller faire des papiers en ville alors on en a profité pour bercer bébé. La bonne humeur est revenue… Un bon repas avec du saumon frais et du fenouil braisé… Des jeux et une bonne sieste…Je profite de ces instants de tranquillité pour écrire mon petit billet…Quand à la lecture… j’ai à peine pu lire un "Auprès de moi toujours"…Bonne journée… j’entends le café qui monte dans ma cafetière italienne !

Auteur: Internet

Info: Quand bébé fait ses dents ! L'Atelier de Ramettes, 18.2.2009

[ quenottes ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

dernières paroles

Je promets de se lever et de sortir de la maison tous les matins. Je vais aller voir mes parents puis faire une longue promenade. Je vais suivre les ordres du médecin pour les médicaments. Je promets de ne pas me blesser. Je promets de ne pas visiter des sites Web qui parlent de suicide. (1ère)
(...)
Lorsque vous croyez avoir un avenir, vous pensez en termes de générations et d'années. Si ce n'est pas le cas, vous vivez non pas au jour le jour, mais d'une minute à l'autre. Il est de loin préférable que vous vous souveniez de moi comme je le fus lors de mon apogée comme auteur de best-seller plutôt que de l'épave aux yeux fous revenue de Louisville... Chaque respiration devient difficile et pour moi faire face à l'anxiété peut être comparé une noyade en plein mer. Je sais que mes actions vont transférer une partie de cette douleur aux autres, ceux qui me aiment le plus. S'il vous plaît pardonnez-moi. (2ème)
(...)
Il y a des aspects de mon expérience à Louisville que je ne comprendrai jamais. Tout au fond, je soupçonne que aurez plus de réponses sur ceci que moi. Je ne suis jamais parvenue à dissiper cette conviction que j'ai été recrutée, et plus tard persécutée, par des forces plus puissantes que ce que je pouvais imaginer. Que ce soit la CIA ou une autre organisation, je ne le saurai jamais. Tant que je suis vivante, ces forces ne cesseront jamais de me harceler.
Quelques jours avant mon départ pour Louisville J'ai eu un profond pressentiment pour ma sécurité. J'ai senti tout à coup des menaces pour ma propre vie: le sentiment étrange que j'étais suivie dans les rues, la camionnette blanche garée devant ma maison, le courrier endommagé qui arrivait à ma boite postale. Je crois que mon séjour à l'hôpital Norton était une tentative du gouvernement pour me discréditer.(3e)

Auteur: Chang Iris

Info:

[ suicide ]

 

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déclaration d'amour

Non, je ne vous apprendrai pas à moins aimer, moi à qui vous devez de connaître ce qu'on appelle aimer ; votre amour, les marques que j'en reçois, la manière dont vous l'exprimez, tout ce que vous m'écrivez fait mon bonheur et enflamme mon amour. J'en avais bien besoin de bonheur, je suis plongée dans la tristesse, je tremble de rester ici... Cette poste de Plombières, à qui nous avons dit tant d'injures, arrive et m'apporte une lettre de vous, en voilà trois aujourd'hui ; voilà la quatrième que je vous écris, je vous en écrirai une cinquième par la poste. Vos lettres sont délicieuses, vous m'y dites quelquefois des injures et de celles qui m'affligent le plus, vous y doutez de mon amour, mais vous m'assurez du vôtre, la douceur d'être aimée adoucit même vos injustices ; vous finissez la lettre de votre courrier par me prier de vous apprendre à moins aimer. Vous le désirez donc, mais assurément, vous ne pouvez plus mal vous adresser. Désirez-vous que je vous aime avec toute la fureur, toute la folie, tout l'emportement dont je suis capable, montrez-moi toujours autant d'amour qu'il y en a dans quelques endroits de vos lettres. Vous ne pouvez vous imaginer combien elles m'enflamment et quel amour les marques de votre passion excitent dans mon coeur. Tous mes sentiments sont durables, tout fait des traces profondes dans mon âme... Croyez que vous avez toujours lu dans mon coeur, je veux toujours que vous y lisiez, que ne pouvez-vous voir à présent ce qui s'y passe, combien je vous adore, avec quelle impatience et quelle ardeur je désire de me rejoindre à vous ? Quand vous m'aimez, vous remplissez tous les sentiments de mon coeur, vous réalisez toutes mes chimères, je ne crois pas qu'il fût possible de trouver un coeur aussi tendre, aussi appliqué, aussi passionné que le vôtre ; mais il a souvent des disparates ; s'il n'en avait pas, je crois que je partirais ce soir à pied pour aller trouver, peut-être m'aimerez-vous également quelque jour et alors je ne désirerai plus rien...

Auteur: Châtelet Gabrielle Marquise

Info: à Jean-François de Saint-Lambert. Le 1er septembre 1748

[ correspondance ]

 

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big brother

Facebook a manipulé les émotions de ses utilisateurs pour une étude
Une recherche publiée récemment expliquant comment Facebook a manipulé des informations de près de 700'000 utilisateurs anglophones a suscité l'inquiétude d'internautes. Le réseau social voulait étudier "la contagion émotionnelle" dans les groupes d'utilisateurs.
Pendant une semaine, du 11 au 18 janvier 2012, Facebook et des scientifiques des Universités Cornell et de Californie à San Francisco ont utilisé le système d'algorithmes du réseau pour modifier le contenu des informations reçues par un groupe d'utilisateurs afin d'étudier l'impact sur leurs émotions.
La recherche a été publiée dans la revue scientifique américaine Comptes rendus de l'Académie nationale des sciences (PNAS), datée du 17 juin. Les auteurs cherchaient à savoir si le nombre de messages positifs ou négatifs lus par les utilisateurs influençait la teneur de ce qu'ils postaient eux-mêmes sur le site.
Ils ont constaté que les utilisateurs ciblés commençaient à utiliser davantage de mots négatifs ou positifs selon l'ampleur des contenus auxquels ils avaient été "exposés".
"Les états émotionnels sont communicatifs et peuvent se transmettre par un phénomène de contagion, conduisant les autres personnes à ressentir les mêmes émotions sans en être conscientes", écrivent les auteurs de cette recherche. Selon eux, "ces résultats montrent la réalité d'une contagion émotionnelle de masse via les réseaux sociaux."
L'étude suscite une attention grandissante sur la toile après des articles publiés samedi dans la revue en ligne Slate et sur les sites du magazine "The Atlantic" et de "Forbes".
Levée de boucliers
Certains internautes expriment "leur trouble profond" ou qualifient la méthode utilisée "d'alarmante" ou de "démoniaque". Susan Fiske de l'Université de Princeton, qui a édité la recherche, a indiqué à "The Atlantic" avoir contacté les auteurs pour leur faire part de ses préoccupations quant à leurs travaux.
Ils lui ont dit que les autorités de leurs universités avaient approuvé ces travaux "car Facebook, apparemment, manipule systématiquement le contenu des informations diffusées".
Interrogé par l'AFP, Facebook, plus grand réseau social avec plus d'un milliard d'utilisateurs, a rejeté ces accusations. "Cette recherche a été menée pendant seulement une semaine et aucune donnée utilisée n'était liée au compte d'une personne en particulier", indique une porte-parole, Isabel Hernandez, dans un courrier électronique.

Auteur: Internet

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[ pouvoir ] [ influence ]

 

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humour

D'abord, l'inspection de la boîte aux lettres. Je suis sur la pointe des pieds. J'éclaire l'intérieur et j'aperçois trois enveloppes. Il reçoit beaucoup de courrier pour quelqu'un qui n'a emménagé que depuis quelques jours. J'entrevois un pli officiel, peut-être d'une préfecture ou d'un ministère. Qu'est-ce que c'est ? Si j'arrive à savoir, je tiens ma revanche. Puisque tout le monde a vu sa tête avant moi, je vais découvrir son métier la première. Ensuite, à mon tour, je pourrai déclarer d'un air ingénu : "Ah bon ? Vous n'étiez pas au courant ?"
J'essaie d'éclairer au mieux mais l'enveloppe du dessus gêne la lecture. En me servant de ma lampe, juste à la bonne taille pour passer dans la fente, je dois pouvoir la repousser. Je glisse ma lumière le plus loin possible. Il manque encore quelques centimètres. Je la tiens du bout des doigts, je fais encore un petit effort. J'y suis presque et soudain : badaboum dans la boîte de Patatras ! La malédiction frappe encore. Ma lampe est tombée sur son courrier, allumée. D'un seul coup, sa boîte aux lettres ressemble à une petite maison de poupée éclairée. Alors là, on va mettre le salon, ici la cuisine, et la poupée Youpi entrera quand elle aura la clé. Non mais je déraille ! J'ai encore fait une ânerie. Il faut que je récupère ma lampe. Alors je passe les doigts - après tout, elle n'est pas si loin. Je dois pouvoir y arriver, j'ai les mains fines. Je force. Cette méchante poupée Youpi pourrait m'aider. Je me sens comme ces pauvres petits singes pris dans les pièges des braconniers avec leurs minuscules mimines qui ne veulent pas lâcher la cacahuète dans la noix de coco. Je touche la lampe, le bout de mon majeur l'effleure. Elle glisse. Retiens-là, poupée Youpi, ou je t'arrache la tête ! Je n'ai pas le choix, j'enfonce encore plus ma main. La paume est presque entièrement rentrée, mais la lampe m'échappe toujours. Il n'y aura pas de seconde chance, alors je pousse de toutes mes forces, quitte à me faire mal. Ça y est, je me suis broyé la main, mais la paume est passée. Maintenant, c'est le poignet qui souffre, le cerclage métallique de la fente me détruit la peau après m'avoir laminé la main. Tout à coup : le cauchemar, l'effroi. J'entends le grésillement de la gâche électrique de la porte de l'immeuble. Quelqu'un a fait le code et s'apprête à entrer. Il va me trouver comme une gourde suspendue à la boîte du voisin. Je sais maintenant ce qu'éprouve un lapin pris dans les phares d'un camion qui fonce.

Auteur: Legardinier Gilles

Info: Demain j'arrête !

[ littérature ] [ piège ]

 

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emploi du temps

L’été, à Iasnaïa Poliana, Lev Nikolaïevitch [Tolstoï] se lève entre dix heures et dix heures et demie. Après avoir fait sa toilette et revêtu toujours la même blouse noire, il boit son café et du thé en compagnie de sa femme. Il en boit à son content, sans se presser. S’il fait beau, le thé est servi en plein air, dans le jardin, entre les acacias, sous un grand tilleul à la vaste frondaison ; s’il pleut, la comtesse attend Lev Nikolaïevitch au salon.

Une fois terminé son thé, qu’il accompagne de deux œufs à la coque, Lev Nikolaïevitch descend dans son petit cabinet de travail aux murs entièrement couverts de rayonnages à livres de facture toute simple et se plonge dans son activité intellectuelle.

Il s’y consacre assidûment, sérieusement, jusqu’à trois heures et plus, après quoi il va travailler dans les champs s’il a quelque chose à y faire. ce n’est pas toujours le cas, car le comte ne travaille que pour les pauvres, les faibles, les veuves et les orphelins. S’il n’a rien à faire aux champs, Lev Nikolaïevitch prend un panier et s’en va en forêt ramasser des champignons, ce qui lui permet de passer quelques heures seul avec la nature et avec lui-même.

Il arrive qu’il consacre ce temps entre trois et six heures à un hôte de passage. Des personnes de connaissance ou totalement inconnues viennent parfois exprès de régions très lointaines de Russie ou de pays étrangers pour lui poser les questions les plus diverses sur la vie.

[...]

Lev Nikolaïevitch revient vers six heures et retrouve pour le repas sa nombreuse famille qui comprend dix enfants de tous âges, depuis son fils aîné de 26 ans à un nourrisson de deux mois. Il faut y ajouter les invités, les camarades des fils, les cousines et les amies des filles, les précepteurs, les gouvernantes et parfois des amis du comte et de la comtesse venus leur rendre visite. Une immense table traverse sur toute sa longueur la grande salle blanche de la vieille demeure familiale aux murs couverts de portraits d’ancêtres, qui résonne durant le repas de conversations joyeuses et bruyantes de tous les âges sur les sujets les plus divers.

Après le repas, Lev Nikolaïevitch trie et lit le volumineux courrier qui vient de lui être apporté de Toula : des lettres, des revues, des brochures et diverses correspondances en provenance du monde entier. Il est aidé dans cette tâche très fatigante par sa fille aînée Tatiana, qui souvent rédige aussi les réponses selon les instructions de son père.

Vers neuf heures, toute la famille, à l’exception des plus petits, qui vont se coucher, se réunit à nouveau dans la grande salle pour le thé du soir accompagné de fruits et se livre aux divertissements les plus variés. C’est tantôt la lecture à haute voix d’une œuvre littéraire [...], tantôt du chant [...].

Auteur: Répine Ilia

Info: "Le Comte Lev Nikolaïevitch Tolstoï. Souvenirs personnels", dans "Lettres à Tolstoï et à sa famille", trad. Laure Troubetzkoy, éditions Vendémiaire, 2021

[ organisation des journées ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

amphétamines

Pervitine, la drogue des nazis
En 1939, la pervitine était en libre-service en Allemagne. Tout le monde pouvait l’acheter, sous différentes formes, sous le nom de Pervitin. En cachet, en poudre, mais aussi dans du chocolat. En Allemagne, il existait déjà du chocolat au café, dans une petite boite ronde, mignonne et pratique. On raconte que les soldats de l’armée de l’air en consommaient beaucoup. Et puis, on décida d’y mettre ensuite de la pervitine. C’est le laboratoire Temmler qui produisait la drogue. L’idée était de concurrencer le Coca-cola qui était très présent en Allemagne. Les nazis et les Etats-Unis n'étaient pas super copains pendant la Seconde Guerre mondiale, alors on chercha une alternative bien allemande. Ce n’était pas (encore) considéré comme une drogue mais plutôt comme un énergisant, du coup tout le monde en prenait. La mère de famille fatiguée par ses gamins, l’ouvrier, le poète. Comme le guronsan, le redbull, l’ovomaltine ou le café, la pervitine trouvait des clients.
Les effets de la pervitine sont connus : coupe-faim, sensations d’euphorie et d’invulnérabilité. Ce qu’on aimait bien pendant la guerre. Le problème, c’est qu’on devient rapidement addict à la pervitime…
Une armée forte grâce à la pervitine
"L’idée était de transformer de simples soldats, marins et aviateurs, en pantins capables de performances surhumaines." Otto Rank, médecin militaire
En 1940, l’Allemagne décide de mettre les bouchées doubles. Elle veut conquérir l’Europe, et on peut quand même dire qu’elle s’en sort pas mal. Elle prend la Hollande, la Belgique, le Luxembourg et la France. Les soldats allemands sont comme des robots, ou transcendés. Ils marchent sans interruption jusqu’à 60 km par jour ou par nuit et peuvent passer plus de 72h sans dormir. Et pour cause, l’Allemagne a commandé plusieurs dizaines de millions de comprimés de pervitine avant de mener les grandes offensives (notamment contre la France). Les cachetons ont permis aux troupes allemandes de ne prendre aucun repos durant toute la durée de la campagne des Balkans au printemps 1941, soit 11 jours. Tout de même, ce n’est un secret pour personne, la presse en parle ouvertement. Mais n’oublions pas que l’armée est nombreuse, puissante et bien équipée également. J’veux dire, tu ne peux pas faire une guerre avec deux bolosses et trois junkys… Et la pervitine donne du courage, de la confiance et de l’énergie aux soldats, et aussi aux dirigeants qui travaillent sans relâche.
La drogue des nazis
A partir de 1941, le chef de la santé du Reich, Leonardo Conti estime que la Pervitine, c’est peut être un peu fort pour la ménagère, les adolescents et les hommes vieux. Alors la drogue n’est plus en vente libre, elle est délivrée seulement sous prescription pour les hommes. Sauf que les hommes sont tous (ou presque) à la guerre. Oui, on trouve légitime de continuer à distribuer la pervitine à des fins militaires. Faut dire que ça marche plutôt pas mal… On peut aussi se demander si cette nouvelle législation n’est pas tout simplement pour réserver la production de pervitine aux soldats. Plus ils en ont, plus la guerre avance. Tous les niveaux de l’armée ont droit à une distribution de Pervitine, et ils sont plus de 3 millions de soldats. Ça en fait des pilules.
En 1944, la drogue des soldats prend encore une autre ampleur. Il faut quelque chose de plus puissant, parce que la pervitine n’est plus suffisante. Qu’à cela ne tienne, on crée la D-IX. Il s’agit (accrochez-vous) de 5mg de cocaïne, 3mg de pervitine et 5mg d’Eukodal (antidouleur à base de morphine). Pour tester l’efficacité de ce cocktail de cheval, rien de tel que de faire des essais dans un camp de concentration. Ce sont les prisonniers de Sachsenhausen qui en sont victimes. Ils doivent porter des sacs de 20k sur 90 km sans s’arrêter et à allure plutôt vive.
Les effets pervers de la pervitine
La pervitine n’est pas sans danger. Les effets secondaires sont bien relous : vertiges, sueurs… Et peuvent aussi être graves : dépression, hallucinations. Des témoignages racontent que des soldats sont morts d’insuffisance cardiaque et d’autres se sont suicidés durant des phases psychotiques. Et évidemment, c’est addictif. Très addictif. Certains médecins se sont opposés à la prise systématique de pervitine par l’armée, mais les dirigeants ont refusé. C’est trop efficace et surtout, lorsqu’on prive les hommes de pervitine, ils font des crises de manque et ne sont plus capables de rien… En 1943, Heinrich Boell était sur le front et, avant de devenir un célèbre prix Nobel de littérature, il écrivait des lettres à ses parents en les suppliant de lui envoyer de la pervitine…
9 novembre 1939 : "C’est dur ici, et j’espère que vous comprendrez si je ne peux vous écrire qu’une fois tous les deux ou quatre jours dans les temps à venir. Aujourd’hui, je vous écris surtout pour vous demander du Pervitin (…). Je vous embrasse, Hein." Dans d’autres courriers, il explique que la pervitine le rend heureux pour quelques heures, le tient éveillé et que c’est plus efficace que des litres de café. Mais il lui en faut toujours plus, car lorsque les effets de la drogue nazie disparaissent, les soldats s’effondrent. Ils doivent dormir jusqu’à trois fois plus que la normale. En état de manque et face à la réalité de la guerre, les soldats tombent souvent en dépression et souffrent de graves psychoses…

Auteur: Gasc Marine

Info: décembre 2016

[ WW2 ]

 

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