narcisse
Il arrive qu’on ressente parfois de brusques appels de solitude. Même la vie amoureuse engendre à l’improviste de brusques appétits paniques de solitude. C’est l’envie de se retrouver seul, de faire des gestes sans témoin. C’est l’envie de relâcher les traits, d’ôter son visage. À vrai dire, c’est quelquefois simplement l’envie de prendre un bain ou de se couper les ongles. Ce sont des convoitises d’ermite d’une heure ou deux. C’est l’envie de se laver le cœur dans le silence. De se chuchoter à soi-même dans le silence sa paresse et son vide et de se savonner soi-même comme un ancien bébé.
Auteur:
Quignard Pascal
Années: 1948 - 20??
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
La nuit et le silence
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retrait
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doute
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pause détente
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corps-esprit
Celui qui ne considère que la signification extérieure ou littérale en l’isolant de l’ensemble, est un matérialiste (hashwî), et celui qui ne considère que la signification intérieure en l’isolant de l’ensemble, est un pseudo-mystique (bâtinî), mais celui qui allie les deux significations est parfait. C’est en ce sens que le Prophète a dit : "Le Coran est comme une muraille surmontée d’une tour de guet, il a un extérieur et un intérieur." Ou peut être est-ce 'Alî qui a dit cette parole car le lignage de celle-ci s’arrête à lui. Ce que je veux montrer, c’est que Moïse avait vu dans l’ordre d’ôter ses deux sandales, un ordre de se dépouiller des deux mondes, aussi obéit-il à ce commandement, extérieurement en retirant ses sandales et, intérieurement en rejetant les mondes. Le véritable rapport est celui-ci : il faut aller et venir, passer de l’un à l’autre, de la formule extérieure au secret intérieur.
Auteur:
Al-Alawi Ahmad
Années: 1869 – 1934
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: cheik soufi
Continent – Pays: Afrique – Algérie
Info:
In : Un saint soufi du XXe siècle : Le Cheikh Ahmad Al-Alawî de Martin Lings, pp. 200-201
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unicité
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spiritualité
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cosmétique miraculeux
Du bout des doigts, Marguerite appliqua une touche de crème sur la paume de sa main ; l’odeur de forêt humide et d’herbe des marais se fit plus forte. Marguerite commença alors à enduire de crème son front et ses joues.
La crème s’étalait aisément, et – sembla-t-il à Marguerite – s’évaporait aussitôt. Après quelques frictions, Marguerite se regarda de nouveau, et partit d’un rire fou, irrépressible.
Ses sourcils, affilés au bout en fines pointes, s’épaississaient en arcs noirs d’une régularité parfaite, au-dessus de ses yeux dont l’iris vert avait pris un vif éclat. La mince ride qui, depuis octobre, c’est-à-dire depuis la disparition du Maître, coupait verticalement la racine de son nez était complètement effacée. Les ombres jaunes qui ternissaient ses tempes, ainsi que les pattes d’oie qui ridaient imperceptiblement le coin de ses yeux, s’étaient également effacées. Une teinte rose uniforme colorait ses joues, son front était devenu blanc et pur, et ses cheveux, artificiellement bouclés par le coiffeur, s’étaient dénoués.
Dans la glace, la Marguerite de trente ans était contemplée par une jeune femme de vingt ans, à la souple chevelure noire naturellement ondulée, qui riait sans retenue en montrant toutes ses dents.
Réprimant enfin son rire, Marguerite, d’un geste vif, se débarrassa de son peignoir, puisa largement dans le pot la légère crème grasse et en enduisit énergiquement son corps nu. Aussitôt, celui-ci devint rose et chaud. En même temps se dissipa, comme si on venait d’ôter une aiguille de son cerveau, la douleur lancinante qui avait enserré ses tempes toue la soirée, depuis la rencontre de l’inconnu dans le jardin Alexandrovski ; les muscles de ses bras et de ses jambes s’affermirent, et enfin, le corps de Marguerite perdit toute pesanteur.
Auteur:
Boulgakov Mikhaïl
Années: 1891 - 1940
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain, médecin
Continent – Pays: Europe - Russie
Info:
Dans "Le Maître et Marguerite", trad. Claude Ligny, Editions Laffont, Paris, 1968, page 326
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rajeunissement
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fantastique
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