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Diable

Ce nom, lourdement connoté d’un folklore plus ou moins caricatural et infantile accompagné d’une riche iconographie qui voile ce qu’elle veut représenter, désigne la destructivité des structures logiques du langage dévoyées dans un processus sans sujet qui porte atteinte de ce fait au déploiement harmonieux de la psyché en en pervertissant les établissements relationnels.

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme

[ défini ] [ psychanalyse ] [ chaos ]

 
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inconscience

L’amour. L’amour. L’âââmoûûûr . Ils n’ont que ça en tête, en langue, aux yeux, au fion. L’amour est à la fois la question et la solution. L’alpha et l’oméga. La réponse universelle. La guérison de tous les maux…Comme si l’amour ne portait pas sa part d’ombre, son ambivalence, sa haine cachée, sa destructivité dévorante…Comme s’il était autre qu’un affect. Comme si tout affect, de par son essentielle labilité, n’était pas essentiellement suspect. Comme si, enfin, comme si surtout, la pensée n’existait pas. Il est vrai que la pensée est distance, et le concept froid…

Auteur: Declerck Patrick

Info: Dans " Le sang nouveau est arrivé"

[ passion destructrice ] [ illusion ] [ observateur extérieur ]

 
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destructivité

Il n’y a qu’une différence quantitative entre les guerres, faites par des armées professionnelles dans des espaces limités, et des guerres dirigées contre des populations entières à l’échelle de tout le globe ; entre l’utilisation des inventions techniques dans le but de libérer le monde de la misère, ou au contraire dans le but de la conquérir et de causer des souffrances ; entre le fait que des milliers de personnes sont massacrées dans des combats et que des millions sont scientifiquement exterminées avec l’aide de médecins et d’ingénieurs ; entre le fait que des exilés peuvent trouver refuge en traversant une frontière, ou qu’ils sont pourchassés tout autour de la terre ; entre le fait que des gens sont naturellement ignorants et le fait qu’ils sont rendus ignorants par une action quotidienne d’information et de divertissement. 

Auteur: Marcuse Herbert

Info: Dans "Eros et civilisation", trad. de l'anglais par Jean-Guy Nény et Boris Fraenkel, éditions de Minuit, Paris, 1963, page 95

[ guerre totale ] [ conflit permanent ]

 

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autonomination

Lorsque le linguiste Ferdinand de Saussure (1857-1913) écrit : "Est je qui dit je", par delà la définition formelle du sujet grammatical linguistique, il commet une fondamentale erreur ontologique, voire logique – si l’on veut bien admettre un postulat essentiel que je formule, selon lequel la logique n’est pas qu’un pur cadre formel hors sol. Cette erreur (onto)logique, qui voue le sujet à une insularité autoréférentielle tautologique vide de tout contenu, est le témoin d’un assèchement formaliste des structures du langage et d’un déraillement épistémologique et relationnel gravissime. Saussure cristallise ce faisant en cette seule formule l’état général de l’époque dans laquelle il s’inscrit, caractérisée par une morbidité relationnelle, spirituelle et sociale envahissante, morbidité qui trouvera sa pleine expression en 1914, au lendemain de sa mort. Sa destructivité n’a pas fini d’étendre son emprise plus d’un siècle après.

L’énoncé correct est : "Est Je qui a été institué par Tu".

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme

[ solipsisme ] [ sécularisation ] [ individualisme ]

 

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attitude borderline

[Dans la pratique de la psychiatrie infantile, un enfant paraît particulièrement vivant, charmant, créatif.] Néanmoins, à l’arrière-plan, il y a une dépression ou une sorte de paralysie ou d’impuissance qui, à la maison, est la symptomatologie principale, ce qui dénote qu’il y a quelque chose qui ne va pas quelque part du point de vue de la mère.
Il a fallu plusieurs années pour réaliser que ces enfants me divertissaient, tout comme ils avaient le sentiment qu’il fallait qu’ils divertissent leur mère pour prendre soin de l’humeur dépressive de celle-ci. Ils prenaient soin de ma dépression […] ou l’empêchaient d’advenir, en m’attendant, ils faisaient des dessins charmants et coloriés ou même écrivaient des poèmes pour que je les ajoute à ma collection. Je me suis souvent laissé prendre avant de réaliser finalement que les enfants étaient malades et me montraient une organisation de faux-Self […].
[En contrepartie] la mère devait supporter la haine qui fait partie du sentiment qu’a l’enfant d’être exploité et d’avoir perdu son identité. [Chez le garçon, ce sentiment se traduit par la régression.] Dans tous les cas il y a une organisation du faux-Self : c’est le mieux que puisse faire l’enfant pour garder le contact avec une mère susceptible de souffrir d’humeur dépressive. […]
Ces enfants sont toujours en train d’essayer de parvenir au point de départ ; quand finalement ils l’atteignent, c’est-à-dire quand ils atteignent le lieu où la mère n’est pas déprimée, ils sont toujours épuisés et ont besoin de repos si bien qu’ils ne peuvent pas en venir à leur vie à eux. […]
Pour ces enfants, s’accomplir c’est parvenir à réparer quelque chose qui ne va pas chez la mère et, par conséquent, cela ne les avance personnellement à rien. […] Dans l’analyse de ces enfants, il est nécessaire de parvenir à quelque chose de nouveau, qui est la destructivité dans la réalité psychique interne, la destructivité qui appartient effectivement à l’enfant et non pas à la mère.

Auteur: Winnicott Donald W. Woods

Info: Dans "La crainte de l'effondrement" page 190

[ étiologie ] [ faux moi ] [ état-limite ] [ épuisement psychique ] [ mère-enfant ]

 

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traumatisme transgénérationnel

Lors de cette expérience*, des souris venant de mettre bas ont été aléatoirement séparées de leur progéniture chaque jour durant trois heures consécutives au cours desquelles elles étaient soumises à diverses maltraitances. Elles étaient ensuite rendues à leurs souriceaux jusqu’au lendemain, où le protocole reprenait, mais à un horaire imprévisible et chaque jour différent. Il a été constaté chez les souriceaux des mères ainsi traumatisées une profonde modification des comportements sociaux se manifestant par des altérations des fonctions cognitives impliquant la mémoire, une inaptitude manifeste aux interactions avec leurs congénères et une tendance dépressive marquée, repérable par une perte de vitalité et de réactivité face à des situations de stress provoquées. Les mâles de ce premier groupe d’individus ont été ensuite mis en contact avec un groupe de femelles élevées dans des conditions normales non traumatiques, avec lesquelles ils ont engendré une deuxième génération, élevée elle aussi normalement, à distance des géniteurs traumatisés. Or les mêmes troubles comportementaux ont été observés, non seulement chez les individus de la deuxième génération, mais également jusqu’à la troisième génération au moins. Isabelle Mansuy et son équipe ont mis en évidence au sein des cellules cérébrales des souris soumises au protocole expérimental des altérations épigénétiques induites par le stress traumatique subi qui se retrouvaient également dans les cellules germinales (l’étude a porté uniquement sur des spermatozoïdes pour des raisons d’ordre pratique). Ils ont établi que l’exposition à un environnement traumatisant conduit à une modification de la méthylation de l’ADN, à une perturbation de la structure des protéines histones et à la prolifération de fragments d’ARN non codant dans de nombreuses cellules du cerveau, trois facteurs qui auraient pour conséquence de modifier l’expression et l’activité de certains gènes. Leur étude a établi que si ces gènes sont impliqués dans le contrôle du comportement, par exemple dans le contrôle des émotions, la présence de ces facteurs inhibants provoquerait une perturbation de ces émotions.Il est fondamental de considérer ici que la cause des perturbations comportementales observées s’accompagnant d’une signature épigénétique incontestable est une expérience existentielle vécue et qu’il n’y a pas à proprement parler d’inversion de la chaîne causale mais de prolongement de sa destructivité aux générations suivantes

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme, pages 46-47, * expérience menée ces dernières années par Isabelle Mansuy, neurogénéticienne et son équipe de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Zürich

[ expérimentation scientifique ]

 

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troubles psychologiques

Nous avons vu que dans le cas de l’autisme l’invasion par le champ maternel se fait par défaut de consistance du champ paternel, mécaniquement en quelque sorte. Le garçon se noie dans cette emprise fusionnelle. Dans le cas de l’anorexie, l’emprise maternelle est sous le mode actif de l’abus, par confiscation symbolique phallique. L’envahissement maternel dans les deux ordres respectivement féminin et masculin de l’inscription corporelle et de l’institution symbolique occulte le vis-à-vis paternel qui seul permet, par le modèle référentiel de possibilité de placement relationnel correct qu’il représente, l’indispensable et vital établissement de la jeune fille dans sa féminité. N’ayant à proprement parler plus de "place", elle s’efface dans l’ordre spécifique – constituant - de sa présence au monde : l’ordre corporel, non sans avoir préalablement tenté de lutter sur le terrain symbolique du père usurpé par la mère, terrain dont le lieu spécifique structurel est le langage et l’intellection (i.e. l’ordre re-présentatif) : la quasi-totalité des jeunes filles concernées par l’anorexie présentent un profil intellectuel brillant. Cette contre-rotation effectuée dans un premier temps précédent les troubles alimentaires est extrêmement destructive et conduit de fait la jeune fille à s’établir dans une schize intime qui vient disjoindre son unité corps-esprit. C’est dans ce sens qu'on pourrait éventuellement ranger l'anorexie mentale du côté des psychoses, à ceci près qu'il ne s'agit pas d'une disjonction psychique mais que le point de fracturation du sujet s'établit à la jonction corps-esprit. L’anorexie serait donc un trouble réactionnel de l'identification face à une mère abusive, où là encore l'évanescence du père serait en cause. Ce qui en ferait ainsi le pendant structurel féminin de l'autisme. Alors que l’autisme est un trouble de l’établissement de l’être au monde spécifiquement masculin - sa destructivité s’exprime au niveau de l’institution du sujet masculin tout juste avant la cristallisation subjectale, donc typiquement au moment de l’apprentissage du langage, vers deux ans, par un défaut d’émergence, ou au pire une régression -, l’anorexie est un trouble de l’établissement de l’être au monde spécifiquement féminin : sa destructivité s’exprime au niveau de la constitution du sujet féminin dans sa complétude corporelle – il est donc logique que ce trouble trouve une expression post pubertaire. En résumant, l’autisme s’attaque à l’ordre de l’institution (du sujet), l’anorexie s’attaque à l’ordre de la constitution (corporelle).

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme, page 50

[ sexuation ] [ parallélisme ] [ origines ]

 
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discours scientifique

Ce qui est désigné par ce fossé irréductible qui sépare les structures du langage du monde auquel elles renvoient est l’impossibilité ontologique pour un langage quel qu’il soit de renfermer au sein de sa structure le monde en soi, autrement dit de dire tout du monde, en établissant une identité entre l’attelage signifiant-signifié et le référent (entre le mot et la chose pour faire court). Cela règle définitivement le fantasme immémorial et infantile qui n’est que l’expression d’un nihilisme masqué, de réaliser l’impossible coalescence entre l’absolu de l’en-soi et sa diffraction représentative, forcément plurielle et relative, puisque par essence la représentation n’est pas la chose, en tant qu’elle signale (re-présente) une absence. Seules les mathématiques, dont la structure signifiante a été immédiatement repérée par Pythagore comme un cas limite au sein duquel la formulation ne se distingue pas du référent désigné et ne forme qu’un avec lui, ont pu être investies de la propriété bien étrange de permettre d’échapper à l’incertain, au relatif, au transitoire et au corruptible : à la mort, donc, c’est-à-dire – et notre époque en tire le vin amer chaque jour davantage – à la vie. Cette propriété se paye au prix d’un formalisme asséchant – c’est-à-dire au prix d’un réel contenu différentiel - dans la mesure où les mathématiques se caractérisent essentiellement par des notations certes diffractées et multiples, mais en dernier ressort tautologiques [Cette caractéristique tautologique a cependant été depuis mise à mal par le théorème d’incomplétude de Kurt Gödel qui interdit depuis sa démonstration de pouvoir créditer les mathématiques d’une autoréférentialité absolue. Autrement dit, il faut postuler obligatoirement, pour pouvoir les fonder, une extériorité aux mathématiques, ce qui n’est que reculer pour mieux sauter et les renvoie elles aussi au niveau de leur fondement à la question de l’origine.]. Le vertige ontologique propre à la période moderne caractérisée par sa soumission à la Mathesis universalis de Descartes, est porteur de cette profonde envie d’en finir avec la finitude, la souffrance, l’altérité, le différentiel, la mort, en un mot la vie. Cette mathématisation à outrance du monde moderne et contemporain portée par une techno-science envahissante a voulu, de gré ou de force faire passer le réel sous les fourches caudines de cette propriété qu’ont les mathématiques d’assurer la coalescence entre la représentation et l’objet – au prix que l’on sait. Il est d’ailleurs fort intéressant de remarquer comme je l’esquissais plus haut que cette fascination pour l’identité langage/monde réimporte subrepticement et de la manière la plus inattendue aux frontières les plus extrêmes de la rationalité le fantasme archaïque présubjectal et infantile de la fusion matricielle initiale. Or les structures du réel ont la propriété de résister tenacement aux tentatives de viol qu’une rationalité ivre d’elle-même – rationalisme serait plus pertinent - prétend leur faire subir : le référent situé dans l’en-soi appartient au domaine de l’être, de l’incontournable vérité de l’être, de ce qui précède fondamentalement, de ce qui donc relève ontologiquement de la question de l’Origine. Le seul moyen de le contourner est de l’ignorer et de prétendre qu’il n’existe pas. Il en résulte alors un désarrimage radical de l’attelage signifiant-signifié vis-à-vis du référent qui seul est l’intangible garant de la vitalité du langage. Celui-ci dès lors se nécrose, et la structure amputée signifiant-signifié qui subsiste fait boucle sur elle-même, le signifié involutif et pathologique assumant une fonction pseudo-référentielle. Il en résulte une évanescence du réel, consécutive à l’évanescence référentielle. La destructivité sur l’en-soi du monde qui en résulte est effrayante. On comprend à présent aisément à quel point le postulat moniste initial de ma proposition est validé : quand une traction est exercée sur les instances représentatives du langage dans le sens de leur assèchement formaliste, c’est le monde en soi qui en face mécaniquement s’effondre et envahit l’ordre symbolique du fait de la torsion de la médiane nouménale qui en résulte, provoquant son déplacement (hachures). On peut remarquer au passage que l’augmentation du taux de prévalence de l’autisme s’explique ici passivement, et donne une justification suffisante à l’exonération de toute culpabilisation des parents d’enfants atteints de ce trouble : une personne présentant certaines fragilités la prédisposant éventuellement à l’emprise de l’autisme, mais qui y aurait échappé en d’autres temps, s’y trouve ici fatalement vouée du fait de ce déplacement (silhouette). Car l’évanescence référentielle provoque mécaniquement l’évanescence du père (P grisé), en raison du fait que ce qui est absenté n’est plus repris en charge dans l’ordre de la représentation.

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme, pages 61-62

[ émancipation imaginaire ] [ auto-institution fantasmatique ] [ conséquences ]

 
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captation technologique

Conformément à l’aphorisme de Ludwig Wittgenstein que je cite abondamment dans cette étude, selon lequel "le monde est l’ensemble des faits et non des choses", la structure du monde ainsi que d’un langage correctement – non pathologiquement – institué, et partant celle du réel se situant à leur interface est d’être relationnelle. Suivant notre perspective moniste, le cerveau humain inscrit dans un semblable écrin reçoit son plein oxygène de cette structure relationnelle dans laquelle il doit impérativement évoluer sous peine de dépérir. Le cadre circonscrivant les écrans est établi au prix de quatre coups de ciseaux qui le délimitent, et le désarriment du réel en constituant un pseudo-réel appauvri de substitution. Pseudo-réel appauvri : on imagine bien la destructivité d’une semblable chose, d’où l’interaction intersubjective a totalement disparu, quand on a compris que seule l’intersubjectivité effective contribue à l’institution et la vascularisation du sujet.

D’où provient donc une telle fascination pour les images, et pis encore, pour les images animées, véritable trou noir qui aspire irrémédiablement le sujet fragile ? Le problème provient des conditions de notre inscription au sein du monde, sous le sceau de notre finitude, dont l’horizon ultime est une certitude lancinante : celle de notre propre mort. Dans ce cadre, notre cerveau est soumis à un stress cognitif permanent lié à la profusion d’informations chaotiques qu’il reçoit du monde, en permanence et sans aucun répit. Pour y faire face, il ne cesse d’analyser, de classer, d’évaluer et de comparer les informations reçues avec celles déjà connues, en cherchant à établir des vecteurs de causalité qui permettraient d’anticiper les différents types de finalités éventuellement présentes en leur sein. Tout ceci est effectué à l’aune d’une grille référentielle simple mais constante : ceci ou cela va-t-il vers l’accroissement de mon être, donc vers la vie, ou vers une atteinte à ma propre vitalité, psychique, physique, affective, etc… donc vers la mort, ou au moins une logique mortifère ? Ce stress cognitif est épuisant et cherche en permanence un répit quel qu’il soit. L’image, et bien plus encore l’image animée, comporte en elle-même des inférences causales préétablies par le peintre, le photographe, le cinéaste, qui l’orientent téléologiquement a priori, sous le surplomb de l’intentionnalité du geste artistique initial. Le spectateur est existentiellement à l’abri du surgissement de tout événement chaotique relevant de la constitution naturelle du sens causal, dont l’établissement dans la vie réelle relève toujours d’une construction a posteriori. Ceci ligote le spectateur dans sa dimension de sujet en le livrant à une irrémédiable passivité dont on peut certes retenir le bénéfice d’un mimétisme cathartique pour un sujet déjà correctement institué, mais dont la destructivité pour un sujet fragile ou incomplètement advenu à lui-même est incalculable. La raison en est double : pour que la catharsis puisse s’établir, en premier lieu, il faut que l’identification à soi-même soit rendue possible par un soi déjà constitué dans sa quasi plénitude ; par ailleurs, la représentation (re-présentation) est toujours arrimée à un référent initial et premier dans l’ordre de l’expérience, en raison d’une simple évidence : le monde nous précède fondamentalement, chronologiquement et ontologiquement. Si la représentation se trouve en situation de précéder le référent initial, les polarités cognitives s’inversent de façon extrêmement destructrice, le monde devenant une représentation de la représentation : doublement éloigné dans l’ordre de l’absence, où les conditions initiales permettant l’émergence du sujet – la triade fondamentale Je-Tu-Il – sont condamnées à une indistinction létale.

Enfin, last but not least, la caractéristique essentielle à retenir de l’art comme élément constituant sans lequel il disparaîtrait en tant que tel, est qu’il repose sur l’éviction de toute forme d’intersubjectivité réelle comme je l’ai signalé plus haut, le spectateur étant consigné à une indépassable passivité réceptive. Les diverses tentatives contemporaines pour briser cet effet de structure se signalent surtout par le fait qu’elles démontrent son intangibilité, sous peine de condamner l’art à l’insignifiance d’une gesticulation dépourvue de propos, du fait de l’effraction du réel en son sein.

J’en conclus qu’il est impératif de supprimer toute forme d’écran, quelle qu’en soit la nature, dans l’entourage des personnes atteintes de troubles autistiques sévères. J’ai pu vérifier, durant mon travail avec Raphaël, à quel point leur influence était délétère sur les progrès de son développement subjectal, en régression nette par rapport aux séances précédentes si par malheur il avait visionné quelque film : il était à nouveau sujet à des écholalies et des comportements erratiques à nouveau difficilement maîtrisables, nécessitant un effort supplémentaire conséquent de notre part à lui et à moi pour récupérer le terrain ainsi perdu.

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme, pages 44-46

[ parodie désubjectivante ] [ dangers ]

 

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prestige intellectuel

Le génie verbal de Lacan n'a pas d'héritier
Une intelligence hors du commun et une curiosité intellectuelle hardie servies par l'élégance de la formulation ne suffisent pas à faire du psychanalyste français le successeur obligé de Freud.

Il serait vain de nier l'importance de Lacan pour la pensée française. Je dis bien la pensée, et non seulement la psychanalyse, tant il est vrai que l'influence de Lacan a débordé le domaine qui était le sien. Il en allait de même, dira-t-on, de l'œuvre de Freud dont Lacan n'a cessé de se réclamer, au point de faire de son "retour à Freud" un des mots d'ordre de son œuvre. Et, à la réflexion, il n'y a rien là d'étonnant: la prise en compte des phénomènes inconscients, ou, si l'on préfère, de l'irrationnel, appartient à une manière de voir qui balaie, bien plus que les seuls problèmes psychiques individuels, une grande partie des phénomènes de société.

La psychopathologie de la vie quotidienne concerne tous et chacun. Pour autant, il est loin d'être sûr que ce parallèle entre l'œuvre du fondateur de la psychanalyse et celle de son descendant français soit justifié. Freud appartient à la grande lignée des anthropologues rationalistes, de ceux qui ont pensé, comme Œdipe, qu'on pouvait, qu'il fallait même, résoudre l'énigme du sphinx, que c'était en tout cas la gloire de l'humanité d'y travailler. Son esprit était un esprit des Lumières, animé par la conviction que la rigueur intellectuelle pouvait se mettre au service d'une compréhension de l'humain, jusque dans ses aspects les plus aberrants, et que la clarté ainsi gagnée pouvait servir à contrecarrer, parfois, la part, toujours si envahissante, de la destructivité. Il y a, en même temps qu'une volonté de comprendre, une visée éthique sous-jacente à l'œuvre freudienne, celle du médecin et philosophe auquel, en effet, rien de ce qui est humain n'avait à rester étranger.

Combien différente la visée lacanienne! A relire les Autres Ecrits que son gendre, Jacques-Alain Miller, a recueillis en un volume publié à l'occasion du centenaire de sa naissance et du vingtième anniversaire de sa mort, ce qui frappe peut-être le plus est le ton de mépris qui se dégage de ces textes. Mépris pour le lecteur, mépris pour les psychanalystes, mépris, en un mot, pour tous ceux qui ne sont pas lacaniens, qui ne jouent pas, du moins, le jeu de se dire lacaniens.

Freud, qui pourtant n'avait jamais été lent à dénoncer ce qu'il ressentait comme des déviations ou des perversions de sa théorie, argumentait toujours sa position: il expliquait en quoi le déviant lui paraissait dévier, et justifiait sa condamnation. Lacan, lui, se sert plus volontiers du sarcasme. Quand il argumente, c'est en se fondant sur une conceptualité qui n'est jamais exposée dans le respect des règles de la discussion intellectuelle et surtout sur un langage dont le maniérisme et l'obscurité, destinés, paraît-il, à décourager les intrus, servent à couvrir les impasses d'une pensée qui perd de plus en plus le sens des réalités. La virtuosité avec laquelle Lacan utilise le français confine au charlatanisme.

Pourquoi a-t-il donc tant séduit? J'y verrai pour ma part trois raisons, au moins. La première est le brio d'une intelligence hors du commun. Lacan avait des capacités d'abstraction, de logique et de théorisation exceptionnelles. La deuxième est la place qu'il a occupée dans les sciences humaines de son temps. Sa curiosité intellectuelle passionnée l'a conduit à savoir placer la psychanalyse à un carrefour où la linguistique (Saussure, Jakobson), l'anthropologie (Lévi-Strauss) et la philosophie (Heidegger), puis les mathématiques se rencontraient pour déployer le substrat d'un structuralisme généralisé qui avait toute la séduction d'un système explicatif universel.

La troisième enfin est son style. Que Lacan ait eu le sens de la formule est un euphémisme. Ses jeux de mots ont parfois du génie. Parler de l'hainamoration par exemple permet de cerner, en un mot-valise, un phénomène aussi remarquable que paradoxal. Surtout, son style volontiers elliptique semble ressaisir en très peu de termes une matière parfois infiniment complexe. C'est le cas de ses formules les plus célèbres: "L'inconscient est structuré comme un langage", notamment. Comment résister à l'élégance d'une telle définition, qui semble de surcroît s'autoriser de tout ce que Freud a écrit sur le Witz. Or c'est précisément là que se situe la faille. Car l'élégance, si elle confirme l'économie des moyens, recouvre en vérité des abîmes. Lacan, sous prétexte qu'une analyse est surtout une affaire de parole entre deux êtres, dont l'un exprime en effet son inconscient en parlant, ramène cet inconscient à ces seuls mots. Il aplatit autrement dit la chose sur son véhicule. Encore pourrait-on argumenter qu'en effet l'inconscient, c'est-à-dire l'ensemble des représentations que nous avons refoulées, s'organise en fonction des exclusions que notre parole opère à chaque moment. Mais le Ça, le Es, le fonds sauvage et incontrôlé dont Freud dit qu'il n'est fait que de pulsions qui cherchent à se décharger, en quoi serait-il structuré, pis même structuré comme un langage? Quel langage? Une telle idée n'a guère de sens.

Il n'y a pas à regretter Lacan. L'inexistence de tout héritage psychanalytique lacanien le prouve: ses formules ont fait mouche, certes, mais elles sont restées stériles. Les lacaniens n'ont fait qu'ânonner tant bien que mal la leçon de leur maître, sans faire avancer d'un pas la compréhension des pathologies psychiques caractéristiques de notre temps (celles des borderline, des cas limites notamment). Si un "retour à Freud" est toujours d'actualité, il n'a nul besoin de la médiation de Lacan.

Auteur: Jackson John Edwin

Info: https://www.letemps.ch. A l'occasion de la sortie de "Autres Ecrits". Seuil, 609 pages. Mai 2001

[ Gaule ] [ réputation littéraire ] [ vacherie ]

 
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