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inquiétude diffuse

Mais que veille-t-elle, cette âme inquiète pour ne pas pouvoir s’abandonner au repos ? Quel désir au-delà du désir se rappelle ainsi à elle ? Soudain vous êtes éveillés en pleine nuit, pour rien. Pas envie de lire ni de faire l’amour, et plus vous cherchez la manne réparatrice du sommeil, plus elle semble se détacher de vous. Vous avez peur comme des écoliers d’être épuisés demain alors que vous êtes seulement dans la fatigue de vivre. Peu d’insomnies en temps de guerre ou dans les affres de la passion (des nuits blanches, oui), ni dans l’extrême tristesse d’un deuil ou d’une épreuve, non l’insomnie appartient plutôt à l’entre-vie, ces moments où l’on n’habite pas sa propre existence sans pouvoir pour autant se déprendre du "souci de soi". Est-ce le souvenir d’une terreur ancienne ? Là, seul dans la nuit, je retrouve ce face-à-face dont tout, dans la vie quotidienne, me détourne. […] L’insomnie est faite de cette solitude : c’est notre veille d’être vivant, loin de ces loyautés multiples auxquelles nous obéissons depuis l’enfance.

Auteur: Dufourmantelle Anne

Info: Dans "En cas d'amour", pages 151-152

[ lucidité ] [ autres règles ] [ explication ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

deuil

D'Honoré, je garde l'image d'un conteur. Quand il vous saluait, il s'inclinait légèrement, en vous demandant droit dans les yeux : " Tu vas bien ? " Honoré adorait raconter des histoires, et c'était toujours passionnant. D'ailleurs, il lui arrivait toujours des choses incroyables, comme sa découverte d'un dessin de Raymond Queneau dans une benne à papiers. Il aimait les histoires, mais aussi l'Histoire. Il adorait détourner les images célèbres, de tableaux, de films ou de pubs. Dans l'univers d'Honoré, les gargouilles de Notre-Dame portent des masques à gaz, les panneaux autoroutiers posent des questions philosophiques, Chaplin et son Kid deviennent des racailles de cité, les gorilles jouent de la guitare électrique, et les grands noms de la littérature sont des rébus. À l'heure de la palette graphique et de Google Images, Honoré faisait de la résistance esthétique. Il dessinait toujours à l'ancienne, sur une table d'architecte des années cinquante, au milieu d'une multitude de boîtes à chaussures remplies de photos découpées dans les journaux, où il allait puiser son inspiration. Honoré m'aidait à prendre du recul pour mieux comprendre le monde.

Auteur: Fischetti Antonio

Info: Même pas morts. Suite au massacre de Charlie Hebdo

[ hommage ] [ épitaphe ]

 

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hommes-femmes

L'histoire de notre ménage se confondait avec l'histoire de nos disputes : nous nous tenions mutuellement rigueur d'une mésentente continue, et chacun portait le deuil d'un amour que nous avions rêvé au lieu de le vivre. En va-t-il ainsi de tous les amoureux dont on jalouse les étreintes en public, et dont l'imperceptible succession vous laisse croire les amours plus durables que le vôtre ? Pourquoi Dieu permet-il la lente désunion de ceux dont il a permis la rencontre et l'intimité ? On assure que le temps, qui étouffe les affections superficielles, ne cesse de ranimer les plus profondes. [...] Et à la manière de certains divorcés qui cohabitent après leur divorce, nous demeurions enlacés par la longue tristesse de ne point réussir à nous entendre.

[...] Il vient dans un ménage une époque où chacun des époux n'a plus la faculté, qu'il voudrait détenir toujours, de réserver à l'autre le meilleur de soi, que l'accoutumance anéantit lentement à votre insu : une richesse affective en vous ne reste disponible qu'au profit de l'étrangère qui l'exhume pour votre effroi.

Auteur: Guillet Christian

Info: Dans "Au nom du père", pages 138-139

[ couple ] [ banalité quotidienne ] [ fantasme-réalité ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

hétérosexualité féminine

On ne saurait trop insister sur l’immense effort psychique, intellectuel et affectif qu’une femme doit faire pour trouver l’autre sexe comme objet érotique. [...] Si déjà la découverte de son vagin invisible demande à la femme un immense effort sensoriel, spéculatif et intellectuel, le passage à l’ordre symbolique en même temps qu’à un objet sexuel d’un autre sexe que celui de l’objet maternel primordial représente une élaboration gigantesque dans laquelle une femme investit un potentiel psychique supérieur à celui exigé du sexe mâle. Lorsque ce processus s’accomplit favorablement, l’éveil précoce des petites filles, leurs performances intellectuelles souvent plus brillantes à l’âge scolaire, la maturité féminine permanente en sont le témoignage. Elles se paient cependant par cette propension à célébrer sans cesse le deuil problématique de l’objet perdu... pas si perdu que ça, et qui reste lancinant dans la "crypte" de l’aisance et de la maturité féminines. A moins qu’une introjection massive de l’idéal ne parvienne à satisfaire, en même temps, le narcissisme avec son versant négatif et l’aspiration à être présente sur l’arène où se joue le pouvoir du monde.

Auteur: Kristeva Julia

Info: Dans "Soleil noir", éditions Gallimard, 1987, pages 40-41

[ femmes-par-femmes ] [ femmes-hommes ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

détachement

Dans l'art de perdre, il n'est pas dur de passer maître.
Tant de choses semblent si pleines d'envie
d'être perdues que leur perte n'est pas un désastre.

Perds chaque jour quelque chose.
L'affolement de perdre tes clés, accepte-le,
et l'heure gâchée qui suit.
Dans l'art de perdre, il n'est pas dur de passer maître.

Puis entraîne-toi, va plus vite,
Il faut étendre tes pertes: aux endroits, aux noms,
aux lieux où tu fis le projet d'aller.
Rien là qui soit un désastre.

J'ai perdu la montre de ma mère.
La dernière ou l'avant-dernière de trois maisons aimées: partie!
Dans l'art de perdre, il n'est pas dur de passer maître.

J'ai perdu deux villes, de jolies villes.
Et, plus vastes, des royaumes que j'avais,
deux rivières, tout un pays.
Ils me manquent, mais il n'y eut pas là de désastre.

Même en te perdant (la voix qui plaisante, un geste que j'aime), je n'aurai pas menti.
A l'évidence, oui, dans l'art de perdre, il n'est pas trop dur d'être maître, même si il y a là
comme (écris-le !), comme un désastre.

Auteur: Bishop Elizabeth

Info: "Un art"

[ allègement ] [ deuil ] [ destruction ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

deuil

Arrêtez les horloges, coupez le téléphone,

Jetez un os au chien pour faire taire ses aboiements,

Faites taire les pianos et, au son d'un tambour voilé,

Sortez le cercueil, qu'avance le cortège endeuillé.



Que les avions tournoyant dans les airs gémissent 

Et tracent sur le ciel le message : Il est mort.

Nouez des rubans de crêpe au cou blanc des pigeons des squares,

Et que les mains des gendarmes soient gantées de coton noir.



Il était mon Nord, mon Sud, mon Est et mon Ouest,

Ma semaine de labeur et mon dimanche de sieste,

Mon midi, mon minuit, ma langue, ma chanson;

Je croyais que l'amour durerait à jamais: je sais à présent que non.



Eteignez les étoiles; elles ne sont pas conviées à la veille.

Remballez la lune et démontez le soleil,

Videz l'océan et balayez les forêts;

Car plus rien de bon ne saura désormais advenir .

Auteur: Auden Wystan Hugh

Info: Funeral Blue

[ poème ] [ déclamation ]

 

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déclaration d'amour

J'ai presque peur, en vérité,

Tant je sens ma vie enlacée

À la radieuse pensée

Qui m'a pris l'âme l'autre été,



Tant votre image, à jamais chère,

Habite en ce coeur tout à vous,

Mon cœur uniquement jaloux

De vous aimer et de vous plaire ;



Et je tremble, pardonnez-moi

D'aussi franchement vous le dire,

À penser qu'un mot, un sourire

De vous est désormais ma loi,



Et qu'il vous suffirait d'un geste.

D'une parole ou d'un clin d'oeil,

Pour mettre tout mon être en deuil

De son illusion céleste.



Mais plutôt je ne veux vous voir,

L'avenir dût-il m'être sombre

Et fécond en peines sans nombre,

Qu'à travers un immense espoir,



Plongé dans ce bonheur suprême

De me dire encore et toujours,

En dépit des mornes retours,

Que je vous aime, que je t'aime !

Auteur: Verlaine Paul

Info: la bonne chanson et autres poèmes (1870, 318 p.)

[ passion ] [ romantisme ] [ dimension sacrificielle ]

 

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remords

- Peur de vous ? Non, pas une seconde ! Peur de mourir ? Pas davantage. Il y a cinq ans que je n'ai peur que d'une seule chose... que la mort m'oublie !
- Taré ! Cracha Stanislas avec dégout.
Steinberg prit une profonde respiration avant de s'expliquer.
- Voyez-vous, monsieur de Saint Avril, hier était un anniversaire pour moi. Ma femme et mes deux enfants sont morts voilà exactement cinq ans. Une plaque de verglas dans un virage, cela a fait vingt lignes dans le journal et un abîme dans mon existence. J'ai cinquante-huit ans à présent et depuis, vous me croirez ou pas, je survis, je végète. Je fais croire que j'existe, c'est de l'illusion. Je ne suis qu'une ombre, incapable de vivre le deuil de mes fils et de ma femme. Je donne des conseils à mes patients, je les aide, les soutiens, les bouscule... mais moi... je suis impuissant à régler mon propre drame. Je n'arrive pas... je ne veux pas apaiser ce deuil... Je... Je ne pense pas que vous puissiez comprendre... Juste ceci... la voiture... c'est moi qui conduisais... !

Auteur: Ben Kemoun Hubert

Info: Les hasards sont assassins

[ deuil ] [ responsabilité ] [ famille ]

 

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événements urbains

Transformer les Parisiens en patinants hallucinés sur des plans de glace fabriqués à coups d’eau glycolée n’a rien de plus sorcier que d’en faire des baigneurs virtuels dans le béton des berges de la Seine ou des participants hébétés de Nuits Blanches. Dans tous les cas, il ne s’agit jamais que d’orchestrer du mieux possible un travail du deuil heureux, celui de la réalité citadine de naguère, avec ses aventures non programmées (et d’ailleurs plus ou moins agréables) et de fugitifs moments de socialité qui ne s’appelaient pas ainsi parce que personne ne savait encore qu’il s’agissait de cela. Plus la ville disparaît de manière irrémédiable, et plus elle se couvre de petits théâtres de consolation où l’on peut faire tout ce que l’on n’avait encore jamais fait : disposer son transat en bordure d’atoll, pique-niquer sur un trottoir comme si c’était de l’herbe, skier sur le parvis de la Défense, bronzer sur des rives inexistantes sous des soleils conceptuels, aller là-bas vivre ensemble au pays qui te ressemble, etc. ; sans quitter notre ordinateur, nos parts de marché, nos maladies de science-fiction et notre stock d’anxiolytiques.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 4", Les Belles Lettres, Paris, 2010, pages 1565-1566

[ déréalisation ] [ échappatoires imaginaires ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

art pictural

Plus que toute autre forme artistique, la photographie requiert d’être froid et dépassionné. (…)

Le traumatisme et la souffrance sont les fondements de l’art. J’y crois. Mais confronté à la tragédie, un peintre spécialisé dans les fresques ou dans les aquarelles peut vivre ce moment en être humain et redevenir artiste après. Face à la mort d’un être cher, un sculpteur ou un portraitiste peut d’abord souffrir, faire son deuil, guérir – puis créer. La plupart des artistes traversent l’existence de cette manière. Ils peuvent avoir des réactions normales face aux vicissitudes de l’expérience humaine. Ils peuvent traverser le monde avec compassion et camaraderie.

Ils peuvent créer plus tard. En dehors, ailleurs, au-delà.

Mais la photo est immédiate. Elle n’offre pas le luxe du temps. Confronté au sang, à la mort ou au changement, un photographe n’a pas d’autre choix que de saisir son appareil. L’artiste vient en premier, l’être humain en second. La photo est la captation neutre des événements, la chronique du sublime comme de l’effroyable. La nécessité veut que ce travail soit effectué sans émotion, sans attache, sans amour.

Auteur: Abby Geni

Info: Farallon Islands

[ distanciation ] [ froideur ]

 

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Ajouté à la BD par miguel