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pensée de la Renaissance

Or, ce philhellénisme des " Renaissants " soulève un gros problème. Celui-là précisément qu’Etienne Gilson posait quand il montrait Erasme s’affligeant de voir autour de lui tant de Grecs et si peu de chrétiens, s’indignant contre la mise en comparaison, impie, d’Aristote et du Christ – et contre la corruption par l’esprit hellénique de cette sagesse chrétienne dont saint Paul disait qu’elle avait convaincu de folie la sagesse du monde. [...]

La philosophie grecque, écrivait-il [Gentile], c’est "la pensée se voyant hors d’elle-même – il pensiero che si vede fuori di se – et se voyant ainsi soit comme Nature, dans son médiat sensible, soit comme Idée. Mais l’idée n’est pas [pour les Grecs] l’acte de la pensée qui pense ; c’est une chose sur quoi la pensée se fixe et qu’elle présuppose comme vérité éternelle, comme raison éternelle de toute réalité et de la connaissance même, parallèle aux vicissitudes des choses ; dans l’une et l’autre hypothèse, cette idée est une réalité qui est elle-même ce qu’elle est, indépendamment des relations que la pensée entretient avec elle, quand elle la connaît."

Conception tragique – note Gentile – "la plus douloureuse de toutes celles que l’âme humaine peut formuler sur son existence propre dans le monde", puisque cette âme vit de vérité ou – si l’on veut – de sa foi dans l’existence réelle de ce qu’elle pense et affirme ; or, dans la conception grecque, la vérité, la véritable vérité, celle qui existe vraiment, n’est pas dans l’âme de l’homme ; elle est en dehors de l’homme que travaille, comme dans le mythe platonicien d’Eros, un immense désir de saisir, d’étreindre sa véritable essence – mais elle échappe à ses prises. Elle reste étrangère au réel, comme inaccessible dans son immuable perfection.

Et comme conséquence – la Science, cette science dont la Logique d’Aristote analyse merveilleusement les conditions, cette Science n’est pas la nôtre, le savoir acquis par l’homme, l’instrument de connaissance et de domination forgé par l’intelligence active et conquérante. Ce n’est pas cette science qui se fait et se refait continuellement à travers l’histoire ; c’est une science qui découle de principes immédiats, renfermant en eux, parfaitement liés, tous les concepts dont la réunion constitue le connaissable ; c’est une science qui n’évolue pas, qui ne croît ni ne décroît, et qui exclut l’Histoire – puisque, dès l’origine et à tout jamais, elle est identique à elle-même dans son absolue perfection.

Or le christianisme, à bien voir, s’inscrivait en faux contre de telles conceptions. En faisant descendre Dieu dans l’homme et l’homme dans le monde, il restituait à l’homme toute sa pleine valeur ; il installait Dieu dans la créature qu’il rendait ainsi participante à la nature divine. Dieu même se faisait homme, subissant toutes les misères humaines jusque à la dernière : la mort. L’amour n’était plus, comme dans le mythe platonicien, une contemplation avide de l’incommunicable ; il était travail même de l’homme, se forgeant lui-même perpétuellement ; il n’était plus la célébration extatique d’un monde qui est, mais la célébration ouvrière d’un monde que forge et reforge l’homme, cet homme qui est bien moins intelligence et savoir qu’amour et volonté ; cet homme créateur de sa vérité à lui – d’une vérité qui se confond avec le bien et qui, loin d’être extérieure à nous, se fait nôtre quand nous la cherchons d’un cœur pur et d’une volonté bonne, avec sincérité, avec ingénuité. Grande transformation ; l’homme n’est plus spectateur ; il est agent.

Auteur: Febvre Lucien

Info: "Le problème de l'incroyance au 16e siècle", éditions Albin Michel, Paris, 1968, pages 345-347

[ paradigmes ] [ antiquité grecque ] [ incompatibles ]

 

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quaternaire

Les quatre éléments - terre, eau, air, feu - constituant les modes fondamentaux de la manifestation sensible sont presque partout - excepté dans le monde moderne et rationaliste - empreints d'une pureté inviolable (...)

Quelques remarques s'imposent en ce qui concerne les 4 éléments : ces derniers n'ont évidemment rien à voir avec ce que l'on désigne par le même terme dans la chimie moderne ; comme nous l'avons déjà dit, les "éléments" au sens traditionnel représentent les modes de manifestation sous lesquels la substance dont le monde est créé se communique à nos cinq sens : ce sont respectivement les modes solide, liquide, volatile et igné (...) les quatre éléments sont donc les modes les plus simples dans l'ordre cosmique. Transposés dans le microcosme humain, ils sont aussi l'image la plus simple de notre âme qui, en tant que telle, est insaisissables, mais dont les caractéristiques fondamentales peuvent être comparées aux quatre éléments.

C'est bien dans cette perspective que Saint François d'Assise glorifie Dieu pour les quatre éléments, l'un après l'autre, dans son fameux "Cantique du Soleil".

En ce qui concerne l'eau, il écrit : "Loué sois-tu, mon Seigneur, pour Sœur Eau, qui est fort utile et humble, et précieuse et chaste" (Laudato si, o Signore, per sor acqua, la quale é molto utile ed umile e preziosa e casta).

On pourrait prendre ce verset pour une simple allégorie poétique, mais en fait le sens en est beaucoup plus profond : l'humilité et la chasteté décrivent la qualité de l'eau, qui, dans une rivière, épouse n'importe quelle forme, sans rien perdre pour autant de sa pureté, Là aussi se trouve une image de l'âme, qui peut recevoir toutes sortes d'impressions et se plier à toutes les formes, tout en demeurant fidèle à son essence propre et indivise. "L'âme humaine ressemble à l'eau", a pu dire Goethe, reprenant ainsi une analogie que l'on rencontre aussi bien dans les Écritures sacrées du Proche-Orient que dans celle de l'Extrême-Orient. L'âme ressemble à l'eau, tout comme l'esprit est comparable au vent ou à l'air

(...)

Les mythes selon lesquels toute chose fut créée à partir d'une mer originelle trouvent un écho dans ce verset coranique : "Nous (Dieu) avons créé toute chose vivant à partir de l'eau." L'allégorie biblique de l'Esprit de Dieu planant sur les eaux trouve son équivalent dans le symbole hindou de Hamsa, le cygne divin qui fait éclore l’œuf d'or du cosmos en nageant sur l'océan primordial. En définitive, chacune de ces représentations allégoriques se retrouve dans le Coran, lorsqu'il est dit qu'au commencement le Trône de Dieu reposait sur les eaux.

La fleur de lotus ouverte, siège des divinités de l'Inde, est elle aussi un "trône de Dieu" flottant sur l'eau de la materia prima, ou sur l'eau des possibilités principielles. Ce symbole, que l'Inde a transmis à la mythologie et à l'art bouddhiques, nous ramène de l'eau en tant qu'image de la substance primordiale du monde, à l'eau en tant que reflet de l'âme. Le lotus du Bouddha ou du Boddhisatwa, en effet, s’élève au dessus des eaux de l'âme, tout comme l'esprit illuminé par la connaissance se libère de l'existence passive. L'eau représente ici quelque chose qui doit être bénéfique, car en elle se trouve enracinée la fleur dont le calice renferme le "précieux joyau" de Boddhi, l'Esprit divin. Le Bouddha est lui-même cet Esprit, étant le "Joyau dans le Lotus".

Auteur: Burckhardt Titus

Info: Miroir de l'intellect, pp. 46-49

[ syncrétisme ] [ pérennialisme ] [ historique ] [ aqua simplex ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

animal domestique

Oscar, le petit chat, arrive devant la chambre 313. La porte est ouverte, il entre. Mme K. est allongée paisiblement sur son lit et respire doucement. Autour d'elle, les photos de ses petits-enfants et une de son mariage. Malgré ces souvenirs, elle est seule. Oscar saute sur le lit, renifle l'air et marque une pause, histoire de considérer la situation. Sans plus hésiter, il fait alors deux tours sur lui-même pour se lover contre Mme K. Une heure passe. Oscar attend. Une infirmière entre, vérifie l'état de la malade et note la présence d'Oscar. Préoccupée, elle sort et commence à passer des coups de téléphone. La famille arrive, le prêtre est appelé pour les derniers sacrements. Le matou ne bouge toujours pas. Le petit-fils de Mme K. demande alors :" Mais que fait le chat ici ?* Sa mère, maîtrisant ses larmes, lui répond : " Il est là pour aider grand-mère à arriver au paradis... * Trente minutes plus tard, Mme K. pousse son dernier soupir. Oscar se lève, sort à pas de velours, sans que personne ne le remarque..."
Oscar, présente la particularité incroyable d'identifier les patients dont la mort est imminente. La prestigieuse revue médicale américaine The New England Journal of Medicine, dans son dernier numéro, loin de ses articles austères, a choisi de publier l'histoire vraie et touchante d'un petit chat pas comme les autres. Recueilli dans une unité pour malades d'Alzheimer à Rhode Island aux États-Unis, il présente la particularité incroyable d'identifier les patients dont la mort est imminente et de se blottir alors contre eux pour leur apporter un ultime réconfort. Il s'intéresse à chaque patient, mais ne s'installe sur leur lit que lorsque le moment fatal est arrivé. Le docteur David Dosa, gériatre à l'hôpital Rhode Island de Providence, travaillant dans cette unité, décrit avec précision dans le New England comment ce chat a transformé les pratiques de fin de vie, en prévoyant les décès, permettant d'organiser l'appel aux familles et les derniers offices religieux. "Un indicateur quasi certain"
L'animal, âgé de deux ans, tigré et blanc, a été adopté par le personnel de l'unité de soins spécialisés dans la maladie d'Alzheimer situé au troisième étage. Selon David Dosa, Oscar fait des rondes régulières, observe les patients, les renifle avant de passer son chemin ou de s'installer pour un dernier câlin. Il lui est arrivé d'accompagner jusqu'à leur ultime demeure des mourants qui, faute de famille, seraient morts tout seul.
Ses prévisions se sont révélées jusqu'à présent si exactes que, dès qu'il se blottit contre un patient, les soignants contactent les proches. "Personne ne meurt au troisième étage sans avoir reçu la visite d'Oscar, écrit David Dosa. Sa seule présence au chevet d'un patient est perçue par les médecins et les soignants comme un indicateur quasi certain d'un décès imminent." Jusqu'ici, il a supervisé la mort de plus de 25 pensionnaires, selon David Dosa, qui a précisé de ne pas pouvoir fournir d'explication aux capacités divinatoires du chat. Oscar a-t-il des dons particuliers ? Cette histoire permet de méditer en tout cas sur l'impact des animaux de compagnie dans certaines structures destinées aux personnes âgées.
Les chats, animaux particulièrement affectueux, pourraient jouer un rôle de réconfort pour ces malades atteints d'Alzheimer que la démence éloigne du monde rationnel. L'agence d'hospitalisation locale, en tout cas, a pris la mesure du rôle d'Oscar puisqu'elle a fait graver ces quelques mots sur le mur du service : "Cette plaque récompense Oscar le chat pour ses soins dignement compassionnels."

Auteur: Internet

Info: N.O.T. lundi 30 juillet 2007

[ sixième sens ] [ 6e sens ]

 

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chemin initiatique

L’homme guidé jusqu’à ce point sur le chemin de l’amour contemplera les belles choses dans leur succession et leur ordre exact ; il atteindra le terme suprême de l’amour et soudain il verra une certaine beauté qui par nature est merveilleuse, celle-là même, Socrate, qui était le but de tous ses efforts jusque là, une beauté qui tout d’abord est éternelle, qui ne connaît ni la naissance, ni la mort, ni la croissance ni le déclin, qui ensuite n’est pas belle par un côté et laide par un autre, qui n’est ni belle en ce temps-ci et laide en ce temps-là, ni belle sous tel rapport et laide sous tel autre, ni belle ici et laide ailleurs, en tant que belle pour certains et laide pour d’autres. Et cette beauté ne lui apparaîtra pas comme un visage, ni comme des mains ou rien d’autre qui appartienne au corps, ni non plus comme un discours ni comme une connaissance ; elle ne sera pas non plus située dans quelque chose d’extérieur, par exemple dans un être vivant, dans la terre, dans le ciel ou dans n’importe quoi d’autre. Non, elle lui apparaîtra en elle-même et par elle-même, éternellement jointe à elle-même par l’unicité de sa forme, et toutes les autres choses qui sont belles participent de cette beauté de telle manière que la naissance ou la destruction des autres réalités ne l’accroît ni ne la diminue, elle, en rien, et ne produit aucun effet sur elle. Quand, à partir de ce qui est ici-bas, on s’élève grâce à l’amour bien compris des jeunes gens, et qu’on commence d’apercevoir cette beauté-là, on n’est pas loin de toucher au but. Suivre, en effet, la voie véritable de l’amour, ou y être conduit par un autre, c’est partir, pour commencer, des beautés de ce monde pour aller vers cette beauté-là, s’élever toujours, comme par échelons, en passant d’un seul beau corps à deux, puis de deux à tous, puis des beaux corps aux belles actions, puis des actions aux belles sciences, jusqu’à ce que des sciences on en vienne enfin à cette science qui n’est autre que la science du beau, pour connaître enfin la beauté en elle-même.

Tel est dans la vie, mon cher Socrate, me dit l’Etrangère de Mantinée, le moment digne entre tous d’être vécu : celui où l’on contemple la beauté en elle-même. Si tu la vois un jour, elle te paraîtra sans rapport avec la richesse et la parure, avec les beaux enfants et les jeunes gens dont la vue te trouble à présent et te fait accepter, à toi et à bien d’autres, pourvu que vous voyez vos bien-aimés et ne cessiez d’être en leur compagnie, de ne manger ni de boire, si la chose est possible, et de ne plus rien faire que les regarder et que rester près d’eux. Qu’éprouverait donc, à notre avis, un homme qui pourrait voir le beau en lui-même, simple, pur, sans mélange, étranger à l’infection des chairs humaines, des couleurs, de tout fatras mortel, et qui serait en mesure de contempler la beauté divine en elle-même, dans l’unicité de sa forme ? Crois-tu que la vie d’un homme soit banale, quand il a les yeux fixés là-haut, contemple cette beauté par le moyen qu’il faut, et vit en union avec elle ? Ne penses-tu pas, dit-elle, qu’alors seulement, quand il verra la beauté par l’organe qui la rend visible, il pourra enfanter non point des simulacres de vertu, car il ne s’attache pas à un simulacre, mais une vertu véritable, car il s’attache à la vérité ?

Auteur: Platon

Info: Discours attribué à Diotime dans "Le Banquet" de Platon, trad. Paul Vicaire, Les Belles-Lettres, Paris, 1989, 211 a - 212 a

[ révélation ] [ apophatique ]

 

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évolution fantasmée

Mes ancêtres étaient des charognards poilus au front bas qui perforaient les crânes et les os des charognes jonchant les rivages pour sucer leur cervelle en voie de décomposition. Ils l’ont fait pendant des millions d’années en utilisant les mêmes bifaces de silice, sans comprendre pourquoi et dans quel but ils vivaient ainsi : c’était simplement leur instinct, comme celui qui pousse les oiseaux à nidifier et les castors à construire des digues. Ils ne dédaignaient pas de s’entre-dévorer.

Puis le Démon de l’esprit qui descendit sur terre entra en eux et leur apprit la magie des mots. Le troupeau de singes devint l’humanité et entreprit sa vertigineuse ascension sur l’échelle du langage. Et voici que je me tiens sur la crête de l’histoire d’où je vois que son point culminant est dépassé.

Je suis né au moment où la dernière bataille pour l’âme de l’humanité était déjà perdue. Mais j’ai entendu son écho et vu ses éclairs d’adieu. J’ai parcouru des manuels soviétiques poussiéreux qui annonçaient que l’URSS avait libéré l’homme et lui avait permis d’aller dans l’espace. Bien sûr, même dans mon enfance, je comprenais que c’était un mensonge, mais la vérité s’y trouvait aussi. Il était aussi difficile de séparer le mensonge de la vérité que de séparer des métastases cancéreuses des cellules saines.

Si je ne me trompe pas, j’ai commencé à y réfléchir lorsque je n’avais que dix ans. Pour les vacances scolaires, on m’envoyait chez grand-mère qui vivait dans un village près d’Orel. Elle habitait une vieille isba qui ne différait des habitations du XVe siècle que par la présence d’une ampoule de 100 watts brillant sous le plafond, et que la vieille appelait ironiquement "l’ampoule d’Ilitch". Il est probable qu’elle pensait à Brejnev, et non à Lénine, mais je ne voyais pas de grande différence entre ces deux défunts illustres. En revanche, je comprenais parfaitement ce que représentait "l’ampoule d’Ilitch".

(…)

Ceux qui ont longtemps feuilleté de vieux magazines savent que chaque époque a son propre avenir, une sorte de futur antérieur de la grammaire française : les gens du passé se projettent dans l’infini, en ligne droite, en traçant une tangente à travers leur temps vers l’éternité.

(…)

Ce futur n’arrive jamais car l’humanité avance vers son lendemain selon une trajectoire complexe et peu compréhensible dont aucun mathématicien en sciences sociales ne peut anticiper les tournants.

(…)

Mes descendants – pas les miens personnellement, mais ceux de mon espèce – seront des traders poilus au front bas qui, à partir de claviers tous identiques, vont creuser des swaps de crédits et de défauts le long des rives de fleuves économiques en voie d’assèchement. Ils le feront sans comprendre le moins du monde pourquoi et dans quel but ils agissent ainsi. Ils suivront simplement les impulsions de leur instinct, comme les araignées dévorent les mouches. Et lorsqu’ils auront mangé toutes les mouches, ils se remettront à s’entre-dévorer. C’est ainsi, à proprement parler, que l’histoire a commencé, et c’est ainsi qu’elle se terminera.

Une nouvelle ère d’obscurité est devant nous. Il n’y aura même pas de Dieu chrétien équivoque, mais uniquement des pieuvres transnationales planquées dans les eaux noires qui brasseront de leurs tentacules médiatiques toute la saleté humaine pour sécuriser leur pouvoir. Elles conduiront l’homme à un tel degré de turpitude qu’il sera techniquement impossible à la pitié divine de s’exercer à son égard, et la terre brûlera alors de nouveau, dans un feu qui sera bien plus éclatant et horrible que tout ce qui a été vu dans le passé.

Auteur: Pelevine Viktor

Info: Dieux et mécanismes

[ stagnation ] [ apocalypse ] [ modernité ]

 

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duodécimal

Le nombre douze est extraordinairement passionnant. De par sa souplesse intrinsèque - divisible par 1, 2, 3, 4, 6 et 12 - il correspond, entre autres, aux notes de l'échelle musicale chromatique occidentale. Celle-ci contenant le septénaire de la gamme diatonique, superposé à une gamme pentatonique "off" pour les spécialistes.
Il doit exister quelque part une théorie qui présente cette dernière comme l'échelle musicale humaine - de par son naturel et sa construction en quintes verticales superposées -, alors que la gamme diatonique chère à Bach serait une expression divine, plus riche, qui non seulement contient (ou englobe), la gamme pentatonique... et semble le faire depuis une autre dimension. Un peu comme en cosmologie la matière noire parait enclore (ou enserrer) notre univers visible.

Plus jeune je m'étais amusé à pousser une gamberge un peu dans cette direction, en prenant pour exemple le thème "All Blues" de Miles, au nom prédestiné, ce qui m'avait permis d'inclure le rythme dans le raisonnement. J'en avais produit une conférence qui s'intitulait "Miles Davis, les modes et le symbolisme 7", avant laquelle nous avions joué All Blues en quartette.

Voici les notes que j'en ai conservé

Bonjour, je vais vous parler aujourd'hui de la comparaison d'un thème de Miles (All Blues) avec les modes grecs, et aussi une structure initiatique, probablement issue de la tradition juive, utilisée de nos jours par le new-âge (dans les "dialogue avec l'ange" par exemple). Cette structure nous parle du monde créé et du monde créateur avec l'homme pour point central d'un monde créé en miroir avec un monde créateur. Ange, miroir de l'animal, archange du végétal et Dieu du minéral. Voyez plutôt. On pourrait aussi parler d'ordre d'apparition.

minéral . végétal . animal . homme . ange . archange . Dieu

L'homme, au milieu, est le lien, le pont. (cf "nos cousins l'ange et le singe" de G. Lichtenberg).

On sait que les 7 modes diatoniques - modes grecs - sont souvent classés, dans les cours de musique théorique, par la logique du plus majeur au plus mineur. Modes qu'il faut "entendre" bien sûr, littéralement dans tous les sens du terme.

LYDIEN IONIEN MIXOLYDIEN DORIEN AEOLIEN PHRYGIEN LOCRIEN (mode)

# . . b . bb . bbb . bbbb . bbbbb (armure)

sol . do . fa . sib . mib . lab . réb (tonalité)

En réalité il est beaucoup plus cohérent de les disposer diatoniquement comme ci-dessous, majeurs et mineurs mélangés. Les modes étant en miroir, le dorien étant le mode parfait et récurrent qui commence (et englobe, en quelque sorte) les autres. On retrouve ainsi, au centre, le mode myxolydien (avec son triton et son instabilité, selon les préceptes des théoriciens.) Donc, en superposant avec le schéma précédent on arrive à ceci...

dorien . phrygien . lydien . mixoldien . aeolien . locrien . ionien

minéral . végétal . animal . homme . ange . archange . Dieu

Le thème de Miles "All Blues", avec ce titre qui évoque les problèmes de tous les hommes, possède, dans sa structure, une confluence architecturale étonnante avec la trinité que constituent ces pôles :
1) Le mode Dorien/Dieu
2) L'harmonie sur le mode Mixolydien/Homme
3) La structure rythmique de six mesures de 12/8, ce rythme étant le plus souple, le plus naturel et universel connu.

Essayons de le visualiser un peu mieux Ce thème ALL BLUES

Tonalité et Harmonie

Mélodie . . . . . Harmonie . . . . . . . . Rythme
Ré dorien . . . Sol mixolydien . . . . . 12/8

1 . . . . 2 . . . 3 . . . 4 . . . . 5 . . . 6 . . . 7 . . . 8 . . . 9 . . . 10 . . .11 . . 12 . . . (1)
| .. . .. . | .. . ... . . | . .. . .. . . | . . . . . . . . | .. . . . . .. | . . . . . ... |. ...
RE . . . . . . MI . . . FA . . . . . . SOL . . . . . . LA . . . . . . SI .. . DO . . . . . . (RE)

La mélodie est sur le mode dorien (attracteur 1) .. Matière, Dieu
La tonalité générale sur le mode mixolydien (attracteur 2) Homme
Rythme en 12/8 . . . . . Structure globale, base douze, qui semble tout contenir.


Merci pour votre attention

.

Auteur: MG

Info: Résumé d'une conférence donnée en 2001 à l'EJMA Lausanne

[ sept ] [ spéculation ] [ ésotérisme ] [ base douze ] [ énantiomérie chirale ]

 

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histoire

En 1900 de l’ère chrétienne, il y avait en Europe deux sortes d’États : les monarchies de droit divin et les démocraties. Les premières, moribondes, ne faisaient que se survivre. Quant aux démocraties, elles étaient déjà discréditées. D’abord, parce qu’elles n’étaient en fait que des oligarchies financières ; ensuite, parce que la caste des politiciens censée représenter "le peuple" s’était parfaitement déshonorée par sa malhonnêteté et sa cupidité. La Première Guerre mondiale ne fit que précipiter le déclin des deux régimes.

Ce fut à la faveur de cette guerre qu’eut lieu, en 1917, la Grande Régression Bureaucratique Russe. A cette régression est attaché le nom de Lénine.

En fait, Lénine était ce que, dans toutes les langues du monde, on appelle un traître. Fils de bourgeois, comme tous les théoriciens marxistes, il avait, dès le début de la guerre, prêché la désertion, la fraternisation avec l’envahisseur, et soutenu que le seul ennemi véritable des Russes était le gouvernement russe.

Or ce gouvernement tomba, en février 1917, et fut remplacé par un gouvernement bourgeois libéral. Si ce dernier s’était maintenu, la Russie serait sans doute devenue rapidement un pays moderne, relativement prospère.

Il n’en fut pas ainsi parce que la bourgeoisie était trop faible et le peuple trop arriéré. L’armée était désorganisée. Dans les campagnes, les paysans massacraient, par familles entières, les grands propriétaires fonciers, pour leur prendre la terre. Dans les grandes villes, la réalité du pouvoir appartenait aux Soviets, ramassis de déserteurs et d’ouvriers absentéistes. Ce fut la dictature des imbéciles.

L’astuce de Lénine fut de miser à fond sur toutes les forces de dispersion. Il encouragea les paysans dans leurs génocides, et les Soviets dans leur anarchisme primaire. Il flatta grossièrement les masses, affaiblit tant qu’il put le gouvernement bourgeois par une critique systématique, destructive et stérile, en un mot il fit tout pour devenir populaire.

Le moment venu, il réunit le Congrès des Soviets. Pendant que les pauvres dupes de délégués du peuple discutaient sans fin sur des questions de théorie, Lénine lançait à l’assaut du pouvoir sa petite équipe de révolutionnaires professionnels.

Après ce coup d’État qui faisait de lui le souverain absolu de la Russie nouvelle, il lui fallait lutter contre les forces mêmes qui l’y avaient porté. C’est ce qu’il fit.

Pour obtenir la paix avec les Allemands, Lénine leur abandonne l’Ukraine. Sacrifice inutile, car la paix ne vient pas. Les exactions des paysans ont déjà provoqué le début de la guerre civile, laquelle se complique d’interventions étrangères. Ce n’est plus l’Empire qui est menacé, ce n’est plus la terre russe : c’est le petit noyau des bureaucrates marxistes. Cette fois, Lénine fera la guerre...

Mais pour faire la guerre, il faut refaire l’armée : pour refaire l’armée, il faut revenir au bon vieux militarisme, - et pour cela il faut anéantir les Soviets.

Sous les ordres de Lénine, Trotsky se charge de cette réaction. En deux ans, grâce à lui, l’armée russe reprend l’habitude du garde-à-vous, du demi-tour à droite et de l’obéissance passive. Les Soviets sont dissous, et aussitôt remplacés par les commissaires politiques, fonctionnaires dévoués au Parti, payés par le Parti, qui doivent tout au Parti, c’est-à-dire au petit groupe d’oligarques dont Lénine est le chef. [...]

Dès 1920, la clique de Lénine a gagné la guerre civile, et le pouvoir prolétarien a disparu à jamais. L’année suivante, les marins de Cronstadt se soulèveront, une fois encore, aux cris de "Vive les Soviets ; à bas le communisme !" Mais cette insurrection sera vite réprimée. Le socialisme est mort, bien mort. Ce nom ne servira plus qu’à désigner le stade suprême de l’impérialisme, c’est-à-dire la concentration de tous les capitaux aux mains de l’État-trust, de l’État-monopole, et le règne idéalisé de la bureaucratie.

Auteur: Gripari Pierre

Info: Dans "La vie, la mort et la résurrection de Socrate-Marie-Gripotard", éditions de la Table Ronde, 1968, pages 46 à 48

[ chronologie ]

 

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dieux ouraniens

Les légendes nordiques désignent les Ases comme les "enfants d’Odin", le Très Haut et Père de tous les dieux et demi-dieux, ce qui est à rapprocher des "fils de Dieu", désignation attribué aux enfants de Seth et d’Hénoch par la Bible. D’après Jean-Louis Bernard, ces "dieux" recteurs et civilisateurs venus du Grand Nord et qualifiés de "géants" furent les transmetteurs d’un dépôt hyperboréen, conservé et transmis ensuite de générations en générations lors de l’Âge d’Argent par leurs descendants Atlanto-hyperboréens dans la zone d’influence atlantique et par les Veilleurs hyperboréens dénommés Ases dans la zone trans-caucasienne. Dans le même ordre d’idées, Joseph Karst faisait remarquer que, dans le terme arménien définissant les demi-dieux, Diutz-Azn, l’expression Azn ou Azean signifiait les Ases, les Arméniens, la "race ou progéniture de Dieu". Il ajoutait un peu plus loin que le terme Olympioi désignait primitivement des "génies de l’éther" et qu’ils ne furent "qu’accidentellement et secondairement localisés à la montagne ou au groupe de montagnes appelées Olympe". Pour lui ces "Dieux Olympe" avaient originellement représenté le Grand Esprit ou "Souffle animateur" des Arméniens qui est à combiner avec le nom divin Elohim chez les Cananéens, heloim correspondant comme vocable hittito-précananéen, au holym-pe pelasgique, qui équivaudrait à l’arménien hollmen, hollumn auquel il faut substituer l’ancien terme pelasgique holum-pe, "le ciel, l’ether, l’atmosphère", d’où "dérivent les Olympioi des Hellènes", ce terme étant selon lui "nettement arménoïde". Il est bien connu que les peuples nordiques vénéraient des piliers symbolisant l’axe terre-ciel qu’ils appelaient "Ases" et sur lesquels reposaient la voûte céleste, ce qui fait par ailleurs écho au mythe d’Atlas, célèbre titan de la mythologie grecque à propos duquel nous reviendrons lorsque nous aborderons l’hypothèse "atlante" et l’identification des fils d’Atlas aux Ases et aux Pélasges. Le pilier central que les anciens scandinaves plaçaient au centre de leurs habitations sous la forme d’un gros étui de bois symbolisait à lui seul les colonnes de l’univers. Cette désignation n’a rien de hasardeux lorsque l’on songe que la fonction primitive des dieux de la mythologie scandinave était d’assurer le maintien des lois cosmiques. Le terme Ases au pluriel signifie précisément "colonnes du monde", désignation qui n’est pas sans nous rappeler les Aqtabs et autres "Piliers de la Sagesse" que nous avions identifiés comme les "êtres divins", hypostases des Rois d’Edom assumant les fonctions célestes de "garde cosmique" qui seront ensuite attribuées à nos tours et dont la finalité première est d’assurer le lien entre la Terre et le Ciel. Par ailleurs, la tradition juive, lorsqu’elle mentionne les Tsadiks dans le Zohar, attribue à ces Sages cachés qui s’élèvent comme "le cèdre du Liban", le statut de "fondements du monde" et Rabbi Juda proclamait que "la Tradition enseigne que le monde repose sur sept piliers". Le cèdre du Liban est en outre "le plus haut des arbres, et tout est assis à son ombre, de même que le juste est le plus élevé de tous les hommes, et tous s’assoient sous sa protection" (...)
On retrouve par ailleurs la même idée dans la mythologie scandinave lorsqu’il est question des Ases, les "dieux-piliers" qui soutiennent le monde. Robert de Largerie suggérait qu’au Caucase aurait survécu un culte des Ases dont on raconte qu’ils furent les dieux instructeurs de l’humanité établis primitivement au nord planétaire, Ases dont le souvenir est resté gravé jusque dans les noms russes de lieux bien spécifiques de la toponymie sacrée : Azgorod, Azabad ou bien encore dans l’abdrazique, ancienne langue du Caucase attribuée aux Ases qui, selon les légendes locales, résidaient au pied de l’Elbrouz il y a fort longtemps. La tradition germano-scandinave l’atteste aussi puisque, selon la légende, les Ases gagnèrent l’Asie lorsque le froid boréal les refoula vers des contrées plus clémentes. Pierre Gordon pensait par ailleurs qu’en Asie mineure et dans le Caucase, les traditions diluviennes locales faisaient état de divers détails directement empruntés aux traditions théocratiques du paléolithique.

Auteur: Anonyme

Info: Dans "Les magiciens du nouveau siècle"

[ étymologie ] [ mythologie comparée ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

ésotérisme

La sémiotique est le domaine des signes et des sens. La sémantique est le domaine de la signification ou du Sens. Le modèle de structure sphérique absolue d’Abellio (SAS) a une valeur heuristique considérable. C’est un invariant universel à tous les niveaux de réalité, C’est plus qu’un hologramme, c’est un holon.

Le modèle de Structure Absolue Sphérique (SAS) qui illustre la logique de double contradiction croisée d’Abellio est intrinsèque à la Réalité dans tous ses aspects. La résonance sémantique vasculaire montre que cette SAS joue comme un oscillateur harmonique du niveau physique le plus fondamental jusqu’au niveau psychologique le plus subtil.

Le corps humain est l’instrument le plus complexe de notre univers. Il peut donc détecter des phénomènes et des événements non détectables par les technologies les plus complexes utilisées actuellement. Il détecte les phénomènes et les noumènes. - En tant qu’hologramme de l’univers il entre en résonance avec tous les phénomènes matériels de cet univers. - En tant qu’holon il entre en résonance avec ce qui est matière et antimatière, avec ce qui est espace et temps, avec ce qui est local et non local. - Autrement dit le plus complexe peut mesurer le moins complexe alors que le moins complexe ne peut mesurer le plus complexe.

Le corps humain qui est de l’ordre du fini ou local peut aussi entrer en résonance avec l’infini ou non local, ce qui suggère que l’homme est la mesure de tout, du Tout et du Non Tout, de l’Être et du Non Être. Cette structuration dynamique sphérique du corps humain corroborée par la résonance sémantique vasculaire permet de détecter des phénomènes au niveau quantique ou énergétique, au niveau subquantique ou spirituel, au niveau métaquantique ou divin. Chaque processus a un spectrogramme ou code-barres spécifique.

Le corps humain détecte non seulement les phénomènes mais aussi les noumènes. Sa structure complexe entre en résonance avec l’esprit et le divin qui est le centre de chaque atome. Le métabolisme de l’ontogénèse récapitule celui de la cosmogénèse et de la théogénèse. La résonance sémantique vasculaire détecte non seulement les états stationnaires ou stases mais aussi les transitions entre stases ou ek-stases selon la terminologie d’Abellio. On voit ainsi que la "substantiation" ou passage du Néant au métaquantique est le lieu de la différentiation entre local et non local. Le passage du métaquantique au subquantique est le lieu de la différentiation entre espace et temps. Le passage du subquantique au quantique est le lieu de la différentiation entre matière et antimatière.

La conjugaison de phase entre matière et antimatière constitue l’Intersubjectivité ou Nous transcendantal dont le code-barres est équivalent vibratoire de Bande de Moebius. On a eu la surprise de voir qu’à l’autre extrémité de ce métabolisme énergétique, au niveau de la transsubstantiation ou Néant, l’intensification ou inversion 2π de ce Néant redonnait L’intersubjectivité qui est équivalent vibratoire de la Présence ou la Grâce des chrétiens.

On est donc bordé par la Présence des deux bords. On peut l’aborder par le Néant ou par la Matière. Chaque abordage est une intensification ou inversion d’inversion de l’étape précédente. En résumé, la SAS par son plan équatorial exprime le plan sémiotique, énergétique ou quantique. L’axe vertical de la SAS exprime le plan sémantique ou subquantique. Le centre de la SAS exprime le plan métaquantique ou divin. L’inversion d’inversion du Centre de la SAS ou Divin donne le Néant ou Ain-Soph ou Urgrund ou Déité de Dieu où le Centre est partout et la circonférence nulle part. Une inversion d’inversion du Néant redonne l’Intersubjectivité ou Nous transcendantal. Aux plans "mondains" quantique, subquantique et métaquantique de la SAS, la résonance sémantique permet d’ajouter les plans "extra-mondains" néantique et holonique. Le plan holonique réalise la communion entre le mondain et l’extra-mondain. Les corps humains actuels expriment de la difficulté à métaboliser l’ensemble de ces différents plans.

Auteur: Ratte Jean

Info: Rencontres Raymond Abellio 2011 à Seix. Résumé de La Structure Absolue Sphérique (SAS) à tous les niveaux en tant qu’Oscillateur Harmonique.

[ holarchie ] [ anthropocentrisme ] [ bio-sémantique ] [ définition ] [ théorie du tout ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

dictateur

Mes parents avaient des opinions très arrêtées sur Adolf Hitler. Pour avoir tous deux vécu la guerre - outre que le frère de mon père a été tué dans les convois de l'Atlantique -, ils pensaient qu'il était l'incarnation du Mal. Mais je me rappelle m'être demandé, alors que je n'étais pourtant encore qu'un enfant, comment, si Hitler était le Démon dans un corps d'homme, il avait pu obtenir de tant de personnes qu'elles obéissent à ses ordres. C'est d'une certaine façon une question à laquelle je n'ai cessé de penser depuis, et c'est à elle que je tâche de répondre dans cet ouvrage.
Adolf Hitler était, à première vue, le dirigeant le plus improbable pour un État sophistiqué au coeur de l'Europe. Il était incapable d'entretenir des relations amicales normales ou d'accepter un débat intellectuel : rempli de haine et de préjugés, dépourvu de toute aptitude à aimer, c'était avant tout un homme "seul". Il était, indubitablement, "en tant qu'être humain, lamentable". Et pourtant, il joua un rôle déterminant dans trois des décisions les plus dévastatrices jamais prises : celle d'envahir la Pologne - qui conduisit à la Seconde Guerre mondiale -, celle d'envahir l'Union soviétique et enfin celle d'assassiner les Juifs.
Cependant Hitler ne fut pas à lui seul l'auteur de toute cette horreur, et à côté de ses nombreuses insuffisances personnelles, il possédait à n'en point douter de grands pouvoirs de persuasion. "Toute ma vie, dit-il en 1942 en une formule marquante, se résume dans mes efforts incessants pour persuader autrui." Et j'ai pour ma part rencontré bien des personnes ayant vécu cette période qui m'ont confirmé ce jugement. Quand je les pressais de me dire ce qu'elles trouvaient de si convaincant dans une personnalité tellement étrange, elles me citaient une myriade d'éléments tels que les circonstances de l'époque, leurs peurs, leurs espoirs, etc. Mais elles étaient également nombreuses à évoquer simplement le puissant attrait qu'Hitler exerçait sur elles - un phénomène qui fut bien souvent imputé à son "charisme".
Mais qu'est-ce exactement que le "charisme" ? Le terme provient d'une racine grecque signifiant une grâce ou une faveur octroyée par une divinité, mais le "charisme", dans l'acception que nous donnons aujourd'hui à ce mot, n'est pas un don "divin", il est "axiologiquement neutre" - bons et méchants peuvent le posséder à la même enseigne. La signification originaire implique également que le charisme est une qualité absolue qui existe - ou n'existe pas - dans un individu spécifique. Mais la séduction charismatique d'Hitler n'était pas universelle. Elle n'existait que dans l'espace entre lui et les sentiments de son auditoire. Quand deux personnes rencontraient Hitler en même temps, il pouvait arriver que l'une le trouve charismatique, mais que la seconde le prenne pour un fou.
Notre compréhension moderne du concept de "charisme" commence avec les travaux du sociologue allemand Max Weber qui écrivit des pages célèbres sur la "domination charismatique" au tournant du siècle dernier. Sans doute le fit-il bien avant qu'Hitler ne devienne chancelier du Reich, mais ses réflexions sont toujours très pertinentes pour quiconque s'intéresse à l'étude du nazisme en général et d'Hitler en particulier. Là où la contribution de Weber est capitale, c'est en ce qu'il examine la "domination charismatique" comme un type particulier d'exercice du pouvoir - plutôt que comme une qualité personnelle qu'une pop-star peut posséder au même titre qu'un homme politique. Pour Weber, le chef "charismatique" doit posséder un fort élément "missionnaire" et il est plus proche d'une figure quasi religieuse que d'un homme d'État démocratique ordinaire. Les partisans d'un tel chef recherchent autre chose qu'une amélioration matérielle de leur sort - bénéficier d'impôts moins élevés ou d'un meilleur système de santé -, car ils poursuivent un but plus général, presque spirituel, de rédemption et de salut. Il est difficile, dans des structures bureaucratiques normales, de voir émerger un chef "charismatique", poussé en avant par le sens qu'il a de sa destinée personnelle. Hitler, selon cette définition, est l'archétype du "chef charismatique".

Auteur: Rees Laurence

Info: Adolf Hitler, la séduction du diable

[ charme ] [ autorité ]

 

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