beaux-arts
Même si tous les historiens de l'art ne sont pas d'accord, on peut voir dans le regard de Lautrec une grande empathie pour les prostituées. Il ne s'intéresse pas seulement aux corps nus et suggestifs, mais montre surtout les moments de vie entre filles, quand le client n'est pas là. On les voit manger ensemble au réfectoire, discuter tranquillement entre elles, faire une partie de cartes. D'un côté, les corps au travail, jouant leur rôle de séduction, de l'autre des corps au repos, relâchés ou en train de se préparer pour l'arrivée du client. L'atmosphère est souvent tranquille et douce, parfois morose et lugubre. L'artiste était un habitué de quelques maisons closes dans le quartier de l'Opéra, celle de la rue des Moulins en particulier, et on sait qu'il était autorisé à faire partie du quotidien des filles.
D'autres peintres, comme Munch ou Picasso dans certaines toiles, ont ce même regard empathique. Dans Mélancolie ou La femme au fichu, Picasso représente une prostituée de la prison Saint-Lazare (que l'on reconnaît au bonnet qu'elle porte) et nous fait sentir toute la solitude de la jeune femme aux traits émaciés, au corps recroquevillé sur lui-même. Munch quant à lui, dans Noël au bordel, propose la vision étonnante d'une maison de tolérance à l'atmosphère presque familiale et douillette, avec le sapin en arrière-plan et cette femme qui lit, une cigarette à la main. Dans L'Allée, il donne à voir une très jeune fille, dont le corps nu est livré en pâture à ces bourgeois habillés et portant haut-de-forme qui l'entourent - comme si l'aisance matérielle leur donnait le droit d'en détourner la vertu.
Auteur:
Pludermacher Isolde
Années: 19?? - 20??
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: F
Profession et précisions: conservatrice peinture au Musée d'Orsay
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Entretien, in l'Objet d'Art hors-série 91, Splendeurs et misères, images de la prostitution, 1850-1910, de L'Objet d'Art
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art pictural
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chair-esprit
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ode urbaine
Comme je recherchais du précis du parfait pour ma cité
Tout à coup surgit comment mais bien sûr ! son nom d’origine !
Ah ! vraiment j’ai compris aujourd’hui tout ce qu’il pouvait y avoir dans un nom comme plénitude liquide débridée comme musicalité autonome,
J’ai compris que c’était ce mot ancien qui convenait à ma cité
Parce que c’est un mot nidifiant dans son nid de superbes baies marines,
Qu’il est riche qu’il est tout entouré d’une doublure de voiles de voiliers de vapeurs que c’est une île de seize milles en longueur à socle compact,
Qu’elle a des rues innombrables pleines de monde de hautes structures de fer poutrelles graciles et solides qui montent en légèreté dans les hauteurs claires du ciel,
Que les marées y sont amples vives ah ! comme je les aime au coucher du soleil,
Que les courants marins coulent en tous sens qu’il y a des îlots flanqués de plus grandes îles des hauteurs des villas,
Des mâts à n’en plus finir des vapeurs côtiers tout blancs des barges des ferries des vapeurs tout noirs aux formes agréables,
Et les rues du centre-ville les maisons des affréteurs les maisons de commerce des armateurs des coutiers les rues autour du fleuve,
Ls immigrants qui n’arrêtent pas de débarquer quinze à vingt mille la semaine,
Les chariots de marchandises la masculinité de la race des conducteurs les marines visages hâlés,
Le ciel estival avec le soleil brillant au milieu et les nuages qui passent très haut,
Les neiges hivernales les clochettes des traîneaux la glace qu’on brise dans le fleuve et dont les blocs suivent dans les deux sens le courant de la marée,
Les ouvriers de la cité les maîtres bien bâtis visage ouvert qui vous regardent droit dans les yeux,
La cohue sur les trottoirs, les véhicules dans Broadway, les femmes, les boutiques, les spectacles,
Un million de personnes – quelle liberté magnifique dans les manières – quelles voix dégagées – quelle hospitalité – ce sont les jeunes gens les plus courageux les plus amicaux que je connaisse,
Ah ! cité où l’eau partout étincelle dans l’échange la hâte, cité aux clochers et aux mâts,
Cité douillettement au creux de ses baies ma cité !
Auteur:
Whitman Walt
Années: 1819 - 1892
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: poète
Continent – Pays: Amérique du nord - Usa
Info:
Dans "Feuilles d'herbe", Mannahatta, traduction Jacques Darras, éditions Gallimard, 2002, page 623
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poème
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activité trépidante
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diversité
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Manhattan
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enthousiasme
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romantisme
Ils s'embrassaient toujours, sans un mot. Mais les lèvres et les langues allaient avoir rempli leur rôle. Elles s'irritaient, s'exaspéraient de ne pouvoir plus. Michel engloutissait sauvagement la petite bouche, qui prenait des initiatives de plus en plus ardentes. Les mains du garçon, qui palpaient au hasard, devenaient sèches et rudes, la main gauche, passée sous le bras de la jeune fille, avait pris indiscutablement possession de son sein. Jusque-là, ils étaient demeurés côté à côté, et leurs jambes n'avaient point pris part aux étreintes. Il enfourcha Anne-Marie, elle fut presque aussitôt à demi-renversée sous lui. Il commença à l'éperonner et les baisers acquéraient une saveur rugueuse. Il comprit que sa main active par-dessus la légère étoffe venait d'électriser la pointe érigée des seins. La main flatta le beau décolleté, puis s'enfonça dans l'émouvant sillon, et rapidement, avidement, connut les contours, le poids des deux seins, connut les petits mamelons surexcités. Anne-Marie, les yeux fermés, s'abandonnait sous lui, passive, mais sa bouche vivait pour tout son corps.
La main, changeant de champ clos, remonta très amoureusement la belle jambe, s'arrêta un peu aux jolis genoux ronds, s'engagea, plus tendrement encore, sous la robe blanche. Un vide merveilleux, angoissant, sacré se faisait tout d'un coup en lui, il retenait encore son dernier geste. Anne-Marie ne bougeait point, comme protégée par ses paupières closes. La main avançait de nouveau, en pleine félicité. Tout à coup elle bascula, glissant sur la peau satinée et fraîche, vers le creux dont elle venait de percevoir la chaleur et qui l'appelait, les doigts sur la peau si fine, si douillette, si enfantine, la soie du dernier obstacle. Le corps de la jeune fille, sous lui, eut un raidissement de défense.
-Mon petit...non...mon petit
Le bout des doigts crispés se coulait sous l'étoffe. Plus de peau : un contact électrisant, c'était le nid. La jeune fille lui saisit le poignet.
-Anne-Marie mon cœur.
-Mon petit... je ne veux pas.
Elle se débattait, ils luttaient. Il s'était arraché de sa bouche et de sa poitrine. Mais il ne lâchait pas prise. Ses deux mains fourrageaient furieusement sous la robe, s'enfonçaient par-dessous la soie dans une braise fondante. Ses doigts s'agrippaient aux hanches, tiraient sur le petit voile élastique, qui résistait encore, qui ne résistait plus. Ses narines sifflaient avec précipitation.
-Non...non...
Ses yeux, qu'il ne pouvait commander d'avantage, virent un instant la robe troussée sur les cuisses épanouies, la tache épaisse et sombre qu'il venait de dénuder, au milieu des claires étoffes que la main de la jaune fille, aussitôt, parvint à rabattre un peu.
-Michou !
-Pas pour moi. Pour toi, pour toi, ma douce.
Sous la robe saccagée, les mains du petit faune pesaient aux deux plus délicats replis de ce corps ferme et printanier. Les cuisses mollissaient, elles consentaient, elles se séparèrent lentement, en livrant leur fond de mousse, et la main fut aussitôt dans le but ouvert et glissant qui l'attendait.
Anne-Marie avait rouvert tout grands ses yeux, elle les mit bien droit dans ceux de Michel. Elle était en train de dompter sa pudeur, de lui donner sans honte tous ses secrets de femelle. Il l'adora. Sa main devint soudainement fervente, intelligente, se multipliant. Anne-Marie ne ferma les yeux que sous l'étincelle, se multipliant. Anne-Marie ne ferma les yeux que sous l'étincelle. Elle les rouvrit aussitôt.
Ils s'enlacèrent longuement.
-Mon garçon.
-Ma fille !
Il l'enveloppait de ses deux bras.
-Allons chez moi...
-Oui, allons-y tout de suite.
Par une des portes latérales du parc, l'hôtel était tout proche. Anne-Marie, qui avait déjà retrouvé sa prêtresse, semblait le conduire par sa petite main. Il était assez mal assuré sur ses jambes, ivre de priapisme, chaque regard sur les formes d'Anne-Marie le contractait jusqu'au fond du ventre...
Ce qu'il connaissait déjà, ce qu'il allait connaître...
-C'est une très jolie chambre, dit-elle. Les temps du Modern-House sont bien révolus !
Il eut encore assez de volonté pour lui faire les honneurs de son logis, c'est à dire de l'armoire où s'empilaient les manuscrits, les cahiers du journal. "concours : combien de fois votre nom y est-il inscrit ? Ne cherchez pas au-dessous de trois mille." Il lui montra les quatre ou cinq lettres qu'il avait d'elle. Il ne put tenir plus de cinq minutes. Cela suffisait ; elle ne dirait pas qu'il s'était comporté en houzard. Ils savaient bien l'un et l'autre pourquoi ils étaient ici. Les persiennes étaient demeurées baissées. Il ferma les rideaux et attaqua Anne-Marie debout, en faisant glisser les épaulettes de sa robe.
-Laissez-moi faire toute seule, lui dit-elle à l'oreille. Tournez la tête, ça ne sera pas long. Mais restez bien la tête tournée.
-Vous avez un paravent.
Il fut à la salle de bains, se mit nu en un tournemain, jetant ses vêtements en boule sur le dallage, passa une robe de chambre. Il revint à pas de loups, se coucha à plat ventre sur le lit, la face dans son oreiller. Il entendait les mouvements légers d'Anne-Marie qui se mettait nue elle aussi pour l'amour. Il n'avait jamais vécu plus admirable minute, la première minute de sa vie dont il eût pu désirer qu'elle devînt éternelle. Il apprenait le bonheur. Il entendait Anne-Marie marcher sur la pointe de ses petits pieds, aller à l'armoire. Il n'aurait pas dû hésiter hier, en craignant une faute de goût, à lui acheter ce déshabiller rose qu'elle aurait trouvé maintenant... Rien ne pouvait plus faire qu'Anne-Marie ne fût pas à lui. Quelle que fût plus tard sa destinée, Anne-Marie y aurait sa place pour toujours, il aurait su amener dans ses bras cette fille exquise. Elle s'approche. Elle est là. Déjà, d'un de ses mouvements vifs, elle s'est étendue sur le lit.
-Quel luxe de robes de chambres, murmurait-elle en riant.
Il en avait heureusement acheté deux à la fois. Elle portait la plus simple. Anne-Marie était là, couchée près de lui. Il n'avait plus rien à attendre. Il n'appartenait plus qu'à lui-même, à son inspiration, à son adresse que ses désirs fussent exaucés.
Il reprit sa bouche sans violence. Il explora très doucement, sous la robe, son corps ; il savait qu'il était nu et libre, mais il voulait se convaincre encore d'une telle merveille. Aussi doucement, il écarta les pans, retira les manches. La voici toute entière, au milieu de la soie sombre, ses seins, son ventre, ses flancs, ses jambes, l'odeur subitement déployée d'Anne-Marie toute nue, et cette grande tache brune qui revient ici à sa place, perd cette obsédante, bestialité des nuits et de tout à l'heure. C'est la forme de ses seins ronds, plus saillants, plus vigoureux qu'on aurait pu croire, vrais seins de femme, combien plus émouvants d'être ainsi ; ce sont les roses et les mauves de leurs pointes, c'est le grain de sa peau, sur son ventre, au bord de sa toison. La voilà : pure, pleine, fine, parfaite et charmante. Elle a le corps de son visage, elle a la chair de son âme. Va, tu peux l'embrasser. Tu n'en verras pas d'autre comme elle.
C'est à ton tour maintenant. On a beau l'avoir fait sans y penser, devant dix filles, c'est encore un étrange pas, et un bizarre coup de tenaille, lorsqu'on dénoue sa ceinture pour la première fois devant la bien-aimée. Vas-y comme elle, sans honte. Elle n'en a jamais tant vu. Eh, oui ! Mais elle aussi, elle a son érotisme, avec ses curiosités, ses imaginations. Tu peux te montrer, franc et dressé. Elle doit bien du reste savoir à quoi s'en tenir. Tu es ce que tu es. Tu es son petit mâle bien vivant et bien aimant.
Allons, vas-y, mon bonhomme, mon brave petit bandeur. Mais oui, c'est pour toi qu'elle ouvre ses cuisses, ta chère, ton idole, ton inaccessible, ton oiseau blanc, ta Finette, ta petite fille des brouillards, ta pervenche de la pureté, ses longues et rondes cuisses, et dans leur ombre, la bête brune, et cette bouche qui a envie de toi. C'est à perdre la tête. Et pourtant, il n'a jamais été plus nécessaire dz la garder. Le bonheur n'est pas si aisé ! Tes doigts pour écarter, là, délicatement. Les doigts en même temps que les yeux. Une si longue faim assouvie. La dernière nudité que tu découvres. Cette image qui ne mourra qu'avec toi : ta fille, les yeux clos, sans un mouvement de défense, offrant son sexe ouvert. Allons, avance, viens t'y mettre. Bien sûr que c'est émouvant. Tout ton sang qui est aspiré, tes bras qui te lâchent, toute sa vigueur qui reflue vers ton vit... Tu l'effleures. Ta mignonne... Ce brusque frisson de tout son corps. Le même frisson sur vous deux. Ta pointe est introduite. Rrâhh !... Tu sautes, tu as tout lâché. Dans l'état où vous vous êtes mis c'était fatal.
Voilà comment tu as joui pour la première fois de ton Anne-Marie : en sacrant au fond de ton ventre. N'y pense pas, ce n'est rien. Maintenant, tu peux faire l'amour. Tu n'as pas faibli. Avec ce que tu vois et ce que tu caresses ! Suce ses seins, suce ses seins ! Reprends-la vite, ne casse pas le rythme, tu sais déjà que c'est désastreux. Caresse-la bien, à l'endroit qu'il faut. Comme elle t'aide, la bonne petite, vaillante, chaude et pleine d’instinct ! Tu enfonces, tu es tout fier. Mais oui. Mais oui, mon gars, elle est ta maîtresse. Son petit visage est douloureux. Tu veux ne pas lui faire plus mal. Tu veux d'abord qu'elle ait sa part. Alors n'appuie pas, tu es assez loin. Comme elle te serre ! Ah ! Quel plaisir. Et maintenant la grande cadence. Et toujours caresse, caresse. La crampe de tes doigts ? Tant pis pour eux. Vois son ventre, vois sa croupe. Elle se soulève, elle part. Tiens bon, surtout ! Arrivez ensemble ! C'est autrement important que d'aimer les mêmes poètes, tu la fais partir avec ta force pour le vrai voyage. C'est autre chose que tout à l'heure, voilà son bras sur sa figure, voilà son gémissement qui monte, tu peux jouir petit homme, voilà son cri !
-Mon cœur, mon bijou, ma vie, ma petite belle !
Ils étaient retombés bouche à bouche.
Auteur:
Rebatet Lucien
Années: 1903 - 1972
Epoque – Courant religieux: Récent et Libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Europe - France
Info:
les deux étendards (1952, 1312 p., Gallimard) p. 1191, 1192, 1193, 1194
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ébats
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passion
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naissance d'un couple
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