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rémanence

- Prenant d'avance le contre-pied de tous ses avatars, le premier romantisme annonçait que "l'idée de la poésie" serait "la prose" (selon la phrase qu'aime citer Philippe Lacoue-Labarthe). Cette annonce ne vaut-t-elle pas encore aujourd'hui ? Le goût de la poésie pour les objets partiels, son fétichisme formel lui font périodiquement toucher sa limite : est-ce qu'ils ne l'invitent pas ainsi à une sorte d'autodépassement, c'est-à-dire de "prosaïsation" ?



- Non seulement l'annonce romantique de la "prose" vaut encore aujourd'hui, mais il est certain que nous sommes plus que naguère sous son injonction, ou, si l'on préfère, devant son invite (comme on dirait en langue d'ordinateur, "à l'invite POE.SIE\>, entrez cd PRO\SE...").

Auteur: Nancy Jean-Luc

Info: "Compter avec la poésie", in "Revue de littérature générale", éd. P.O.L., p. 246

[ littérature ] [ informatique ] [ citation ] [ modes d'écriture ]

 

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doute

Je sais que cela a l'air idiot. Mais quand, film après film, on vous a prié de vous arrêter, les blessures restent profondes : "Nous faudra-t-il voir encore des films d'Ingmar Bergman ! Si vous entrez dans la salle, bouchez-vous le nez !" Et, à propos de La Nuit des forains, quelqu'un écrivait : "Je refuse de procéder à l'examen oculaire des derniers vomissements de monsieur Bergman." Des phrases telles que celle-là, on les reçoit en pleine figure au cours des années où on est le plus sensible - avant d'être sûr de soi. Souvent, il m'arrivait de penser qu'ils avaient peut-être raison. Et j'éprouvais une profonde angoisse à l'idée que ce que j'étais en train de faire ne valait peut-être rien.

Auteur: Bergman Ingmar

Info: Entretien paru dans les "Cahiers du cinéma", n°203, août 1968 - cité dans "Passage du cinéma", éd. Ansedonia, p. 241

[ critique cinématographique ] [ citations ] [ dégoût ] [ oeuvre dénigrée ]

 

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diariste

Les deux tentations du mémorialiste sont la frime et la langueur. Frime : envol de duchesses, "le président me dit alors", chalet à Saint-Moritz, simplicité patriarcale de Claudel. Langueur : la mort prochaine, brièveté (ou désespérante lenteur) des jours, modestie de la tâche accomplie, vanitas vanitatum... La frime est une manière de politesse. Barthes disait qu'entre la pose et la posture on trouve vite l'imposture. Oui, mais un peu de pose flatte le lecteur. On ne l'invite pas dans une gargote. On ne sollicite pas sa curiosité (ou sa compassion) pour un personnage minable. Mon ambassade à Londres. Gide au piano. Entrez dans une confidence de grand risque, écoutez les chuchotements d'état, les allusions d'amour. Le mémorialiste, en se flattant, flatte son lecteur.

Auteur: Nourissier François

Info: À défaut de génie, nrf Gallimard 2000 p.168

[ journal ] [ commérage ] [ notoriété ] [ superficialité ]

 

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gravitation

L'horizon, la frontière de la région de l'espace-temps d'où il n'est pas possible de s'échapper, se comporte plutôt comme une membrane que l'on ne peut traverser que dans un sens, tout autour du trou noir : les objets, comme des astronautes imprudents, peuvent tomber dans le trou noir, mais rien ne pourra jamais ressortir de ce même trou noir en en franchissant l'horizon (Rappelons que l'horizon est la trajectoire dans l'espace-temps de la lumière qui tente de s'échapper du trou noir et que rien ne peut se mouvoir plus vite que la lumière.) On pourrait très bien dire de cet horizon ce que le poète Dante disait à propos de l'Enfer : "Vous qui entrez ici, perdez toute espérance." Toute chose ou toute personne tombée à travers l'horizon atteindra bientôt la région de densité infinie et la fin des temps.

Auteur: Hawking Stephen

Info: Une brève histoire du temps, du Big Bang aux trous noirs

[ astronomie ]

 

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ciel nocturne

On entend les étoiles :

Dans l'giron,
Du Patron,
On y danse, on y danse,
Dans l'giron
Du Patron,
On y danse tous en rond.

- Là, voyons, Mam'zell' la Lune,
Ne gardons pas ainsi rancune ;
Entrez en danse et vous aurez
Un collier de soleils dorés.

- Mon Dieu, c'est à vous bien honnête,
Pour une pauvre Cendrillon ;
Mais, me suffit le médaillon
Que m'a donné ma soeur planète.

- Fi ! votre Terre est un suppôt
De la Pensée ! Entrez en fête ;
Pour sûr, vous tournerez la tête
Aux astres les plus comme il faut.

- Merci, merci, j' n'ai que ma mie,
Juste que je l'entends gémir !

- Vous vous trompez, c'est le soupir
Des universelles chimie !

- Mauvaises langues, taisez-vous !
Je dois veiller. Tas de traînées,
Allez courir vos guilledous !

- Va donc, rosière enfarinée !
Hé ! Notre-Dame des gens soûls,
Des filous et des loups-garous !
Metteuse en rut des vieux matous !
Coucou !

Exeunt les étoiles. Silence et Lune. On entend.

Sous l'plafond
Sans fond,
On y danse, on y danse,
Sous l'plafond
Sans fond,
On y danse tous en rond.

Auteur: Laforgue Jules

Info: "Complainte de cette bonne Lune", in "Les Complaintes"

[ tentation ] [ saynète ] [ décadent ] [ poème ] [ cosmique ] [ farandole ]

 

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futur

Au cours des siècles, selon les civilisations, la science, la religion et l'art se sont disputés la première place. En occident, longtemps, la religion a prédominé, entravant l'art et la science. Puis une époque est arrivée où la religion a décliné et c'est la science qui a pris le dessus. Maintenant, on peut dire que l'avenir appartient aux artistes, oui, de plus en plus tout le monde les aime, les applaudit, et c'est à travers les artistes, les musiciens, les poètes, les peintres, les sculpteurs que le ciel veut maintenant se manifester. Pour quelle raison? Pour l'homme rien n'est plus essentiel que l'art. Cela remonte à l'enfance de l'humanité. Et d'ailleurs quelles sont les premières manifestations de l'enfant? Il ne s'occupe ni de philosophie, ni de science, ni de morale, mais il est un artiste, il fait des mimiques, il crie. Les mauvaises langues disent qu'il pleure. Mais non, moi je rétablis les choses et je dis qu'il est en train de chanter, du moins il s'exerce, en attendant que son larynx et ses poumons soient au point! Et puis, regardez comment il danse dès qu'il parvient à peine à se tenir sur ses jambes, comment il dessine et peint avant même d'avoir appris à lire et à écrire. Donnez-lui des cubes ou du sable, et voilà des maisons et des châteaux, il devient architecte.
L'histoire de l'humanité a d'abord été marquée par l'art. La religion a pris ensuite la prépondérance, puis la science a réussi à s'imposer. Mais de nouveau, dans l'avenir, c'est l'art, je le répète, qui aura la prépondérance. Pourquoi l'art? Pourquoi pas la religion ou la science?
Depuis des siècles, la religion, ou plutôt les représentants de la religion, n'ont pas été vraiment à la hauteur de leur tâche, abandonnant les buts spirituels pour des buts matériels: l'autorité, le prestige, le pouvoir, l'argent. Au lieu d'enseigner aux hommes la vraie foi, ils leur ont enseigné le fanatisme; au lieu de les libérer ils n'ont trop souvent cherché qu'à les asservir et les exploiter. Jésus disait aux pharisiens et aux scribes: malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites, parce que vous fermez aux hommes le royaume des cieux; vous n'y entrez pas vous-mêmes et vous n'y laissez pas entrer ceux qui veulent entrer. Ce reproche est valable pour la majorité du clergé de toutes les religions. C'est pourquoi de plus en plus les humains quittent les églises et les temples. Quant à la science, elle s'oriente vers des recherches tellement poussées qu'elle est devenue une affaire de spécialistes. Même s'ils voient l’intérêt des découvertes scientifiques, la plupart des gens ne peuvent pas vraiment les comprendre et en faire leur centre d’intérêt. Seul l'art peut maintenant toucher véritablement les humains et les éveiller à la vraie vie. Cela n'est pas qu'on n'ait aucune critique à faire concernant les formes qu'il a prises aujourd'hui, au contraire, on peut même dire qu'il est loin de ce que les initiés entendent par le mot art, c'est-à-dire une activité qui réunit la véritable science et la véritable religion. Mais c'est l'art qui sauvera le monde, un art conscient, éclairé par les vérités de la sagesse et de l'amour. Dans l'avenir, c'est aux artistes que l'on donnera la première place, car le véritable artiste est à la fois un prêtre, un philosophe et un savant. Oui, car le rôle de l'artiste, c'est de réaliser dans le plan physique ce que l'intelligence conçoit comme vrai, ce que le cœur sent comme bon, afin que le monde supérieur, le monde de l'esprit, puisse descendre s'incarner dans la matière.

Auteur: Aïvanhov Omraam Mikhaël

Info: Création artistique et création spirituelle.

[ beaux-arts ] [ triade ] [ réflexion ] [ supputation ]

 

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geek

Ils en ont attrapé un autre aujourd'hui, c'est partout dans les journaux. "Un adolescent arrêté dans un scandale de crime informatique", "Hacker arrêté après une falsification bancaire" ...
Putains les gars. Ils sont tous pareils.
Mais n'avez-vous jamais, dans votre psychologie à trois balle de techno cerveau des années 50, jeté un oeil derrière les yeux du pirate ? Ne vous êtes vous jamais demandé ce qui l'a fait cliquer, quelles forces l'ont façonné, ce qui peut l'avoir moulé?
Je suis un hacker, entrez dans mon monde...
Le mien est un monde qui commence avec l'école... Je suis plus intelligent que la plupart des autres enfants, cette merde qu'ils nous enseignent m'ennuie ...
Putain de mauvais élève. Tous les mêmes.
Je suis au lycée ou au collège. J'ai écouté les enseignants expliquer pour la quinzième fois comment réduire une fraction. Je comprends très bien. "Non, madame Smith, je ne montre pas mon travail, je le fais dans ma tête..."
Putain. Il a probablement copié. Ils sont tous pareils.
J'ai fait une découverte aujourd'hui. J'ai trouvé un ordinateur. Attendez une seconde, c'est cool. Il fait ce que je veux. S'il fait une erreur, c'est parce que j'ai merdé. Pas parce qu'il ne m'aime pas... Ou se sent menacé par moi.. Ou pense que je suis un âne intelligent.. Ou que je n'aime pas l'enseignement et suis à la mauvaise place...
Putain de gamin. Tout ce qu'il fait c'est de jouer à des jeux. Tous pareils.
Et puis c'est arrivé... une porte s'est ouverte vers un monde... surgissant via la ligne téléphonique comme l'héroïne au travers des veines d'un toxicomane, pulsion électronique envoyée, quête du refuge des incompétences au jour le jour... Une planche de salut est trouvée. "C'est ça ... c'est à ça que j'appartiens..." Je connais tout le monde ici... même si je ne les ai jamais rencontrés, n'ai jamais parlé avec eux, peut-être jamais en entendu parler... Je vous connais tous ...
Putain de môme. Encore vissé à sa ligne téléphonique. Tous pareils ...
Tu parles qu'on est tous les mêmes... A l'école on nous a alimentés à la cuillère avec de la nourriture pour bébé alors qu'on avait de l'appétit pour du steak... les morceaux de viande que vous avez laissé passer à travers étaient pré-mâchés et sans saveur. Nous avons été dominés par les sadiques, ou ignorés par les apathiques. Les rares qui avaient quelque chose à enseigner nous trouvaient disposés, mais ces profs là sont comme des gouttes d'eau dans le désert.
C'est notre monde maintenant... monde de l'électron et du commutateur, de la beauté du baud. Nous faisons usage d'un service déjà existant sans payer pour ce qui pourrait être bon marché si ce n'était pas exploité par des gloutons profiteurs, et vous nous nommez criminels. Nous explorons... et vous nous nommez malfaiteurs. Nous cherchons le savoir... et vous nous appelez criminels. Nous existons sans couleur de peau, sans nationalité, sans dénomination religieuse... et vous nous appelez criminels. Vous construisez des bombes atomiques, vous faites des guerres, vous tuez, trichez, nous mentez et essayez de nous faire croire que c'est pour notre propre bien, bref nous sommes des criminels.
Oui, je suis un criminel. Mon crime est d'être plein de curiosité. Mon crime est de juger les gens par ce qu'ils disent et pensent, pas par ce à quoi ils ressemblent. Mon crime est d'être plus malin que vous, quelque chose que vous ne me pardonnerez jamais.
Je suis un pirate, et ceci est mon manifeste. Vous pouvez arrêter cette personne là, mais vous ne pouvez pas nous arrêter tous... après tout, nous sommes tous les mêmes.

Auteur: Loyd Blankenship

Info: Le Manifeste du Hacker, 8 janvier 1986. Sous le pseude de : Le Mentor

[ liberté ] [ refuge ] [ Internet ]

 

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coït rectal

La vérité se cache au fond du cul. Un vit dans un cul fonctionne comme la flèche sur un test de détecteur de mensonges. Le cul ne sait pas mentir, il en est incapable : il a mal, physiquement mal, si on ment. La chatte, au contraire, peut mentir à la simple entrée en scène d’un chibre, elle ne s’en prive jamais. Les chattes sont faites pour tromper les hommes, avec leur tendre rosée accueillante et leurs propriétaires enragées.

Par le cul, la pénétration est plus profonde, plus intime ; elle suit le fil du rasoir. La voie qui traverse mes entrailles pour me conduire tout droit à Dieu est libre, elle a été dégagée.

" …une incursion chez le Démon puis retour au Seigneur… " Norman Mailer

Ceci est l’arrière-fond d’une histoire d’amour. Une histoire de second trou, pour être tout à fait exacte. L’amour depuis l’intérieur de mon derrière. Colette affirme qu’on ne peut écrire sur l’amour tant qu’on est sous son troublant empire, comme si seul l’amour perdu avait des résonances. Ce grand amour m’a donné une vue sur cour, décrite avec l’œil de mon derrière. Voici un livre où le recto est bref, et le verso est tout. Mon cerveau a été ébranlé avec mes entrailles.

Avoir un vit dans son cul donne vraiment son centre à une femme. De passive, la réceptivité devient active. Il ne reste plus qu’à agir. Son vit transperce mon yang – mon désir de savoir, de contrôler, de comprendre et d’analyser – et fait remonter à la surface mon yin – mon ouverture, ma vulnérabilité. Je ne peux pas y arriver toute seule, par volonté. Je dois être forcée. En me baisant, il me renvoie à ma féminité. Quand on est une femme libérée, c’est le seul moyen d’y revenir et de garder sa dignité. A quatre pattes, le cul dressé, je n’ai d’autre choix que de succomber et de m’affoler. Voilà comment je puis avoir une expérience que mon intellect ne me permettrait jamais. Voilà simplement comment ma libération s’est manifestée. Mais, pour n’importe quelle femme rationnelle, l’émancipation par la porte basse ne devrait jamais être un choix. Cela peut seulement arriver comme un cadeau. Une surprise. Une grosse surprise.

Cette histoire raconte comment je suis venue à connaître – et parfois à comprendre – des termes se rapportant à la quête spirituelle. Sur leur sens et sur leur pouvoir, la sodomie m’en appris davantage que n’importe quel autre enregistrement.

Le sexe anal est pour moi un événement littéraire. Les mots se sont d’abord mis à couler pendant même qu’il était enfoui au fond de mon cul. Son stylographe sur mon papier. Son marqueur sur mon buvard. Sa fusée sur ma lune. C’est amusant où l’on trouve l’inspiration.

L’enculade est le grand acte anti-romantique – à moins que, bien sûr, comme moi, votre idée de la romance ne commence à genoux, la tête enfouie dans un oreiller. La poésie, les fleurs, et les promesses "jusqu’à ce que la mort nous sépare" n’ont guère place dans l’arrière-pays. La pénétration anale implique le tranchant de la vérité, et non les doux replis de la sentimentalité propre à l’amour romantique. Mais l’enculerie est plus intime que la copulation. Vous risquez de montrer votre merde, au propre comme au figuré. Vous accueillez un homme dans vos entrailles – votre espace le plus profond, l’espace que vous avez appris, toute votre vie, à ignorer, à cacher, à taire – et votre conscience s’éveille.

L’humiliation est le plus grand de mes démons mais, quand mon œil de bronze est enfoncé, je découvre que mes craintes sont infondées. C’est grâce à cette reddition sensuelle, ce chemin interdit, que je me suis trouvée, que j’ai trouvée ma voix, mon esprit, mon courage… Et mes bêlements de vieille bique ! Ces pages sont la vérité sur la beauté de la soumission. Le pouvoir de la soumission. Pour moi, voyez-vous, j’ai découvert par hasard la grande farce cosmique, l’ironie suprême de Dieu.

Entrez par la sortie. Le Paradis vous y attend.

Auteur: Bentley Tony

Info: Ma reddition : Une confession érotique

[ anus ] [ véniel ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

manipulation des masses

La mise en scène de la "démocratie technique", consistant à réunir des experts et des contre-experts sous les yeux d’un public considéré comme ignare, à éduquer, ne dupe plus grand-monde. Mais au moins cela donne-t-il du travail aux sociologues et aux agences de communication. 

Au sein du "comité d’expertise et de suivi de la démarche d’information et de consultation" de l’Andra siège Michel Callon "directeur de recherche, professeur de sociologie à l’école des Mines", nous dit le site de l’agence. Complétons ce CV minimaliste.

Callon s’est fait connaître comme théoricien de la "démocratie technique" avec un livre paru en 2001. Agir dans un Monde Incertain, Essai sur la démocratie technique, co-écrit avec Lascoumes et Barthes, expose les concepts qui, en quelques années, ont colonisé les institutions scientifiques et politiques. Ce livre enjolive le risque en "incertitude", les conflits politiques en "controverses socio-techniques", et propose une nouvelle façon de résoudre ceux-ci par des "forums hybrides" - pseudo espaces ouverts dans lesquels se réunissent experts, politiques et "profanes" pour mettre en œuvre une "démocratie dialogique" et trouver un compromis sur les sciences et les technologies.

Mode d'emploi : n'entrez pas dans la confrontation directe, tâchez d' "organiser, maîtriser les débordements sans vouloir pour autant les empêcher." Multipliez les débats publics. Admirez le résultat avec ce cas concret : "Le nucléaire qui en sortira sera socialement, politiquement et même techniquement complètement différent du nucléaire qui aurait été décidé en dehors des forums hybrides. Parler "du" nucléaire en général n'a aucun sens. Jouer au jeu de ceux qui sont pour et de ceux qui sont contre est encore plus inepte." Ce miracle qui transforme votre problème-nucléaire en solution-nucléaire s'appelle une forfaiture.

Il n'y a pas plus de "démocratie technique" que de "science citoyenne" ou de roue carrée : la démocratie est la participation de tous aux choix politiques, quand la technique est l'affaire des spécialistes. Ayant vendu les sciences humaines à "l’innovation", Callon et ses semblables ne recommandent jamais d’introduire le politique dans le technique, ni de rappeler aux scientifiques leur responsabilité sociale. Leur solution au contraire consiste à imposer la logique technicienne au corps social, à encourager chacun à faire valoir son expertise. Ce ne sont pas les technologies qui doivent être soumises à la décision démocratique, mais les individus politiques que l’on contraint à endosser l’éthos technocrate. La "démocratie technique", c'est la négation du politique. Et un aveu : la technologie étant la poursuite de la politique par d’autres moyens, seul un simulacre de démocratie peut tenter de maintenir l’illusion d’une participation de tous aux choix collectifs.

Agir dans un monde incertain est devenu la bible des décideurs. La chimère politique de la "démocratie technique", bricolée par des experts pour vendre leurs services à une démocratie "en crise", a créé un fromage pour des chercheurs en sciences sociales, sociologues des "usages" et de l’acceptabilité, et autres fourgueurs de "procédures de dialogue avec le peuple" clés en main. Cette chimère a contaminé le monde social et la nuée d’associations citoyennistes prêtes à se jeter sur n’importe quel dispositif leur donnant de l’importance et des financements. Et qui collaborent sans ciller aux manipulations de la "citoyenneté technique", de l’"expertise profane", de la "co-construction" de nécrotechnologies "citoyennes"

Magali Bicaïs a passé plusieurs années dans un laboratoire R&D (Recherche et développement) de France Telecom. Selon elle, "l’acceptabilité sociale est associée aux nouvelles technologies, car elles transforment nos manières de vivre. On parle d’acceptabilité sociale quand on travaille sur une technologie susceptible d’avoir des conséquences sur l’organisation sociale elle-même. Avec les techniques d’acceptabilité, on a franchi un nouveau pas : il s’agit d’anticiper ce qui peut être toléré. La question n’est plus celle des besoins ni des envies, mais de savoir ce que les consommateurs, ou les citoyens, ne vont pas supporter". (revue Z, n°1, printemps 2009).

Les sociologues des usages (chargés de l’acceptabilité des nouvelles technologies) employés par France Telecom R&D ont eux-mêmes donné leur recette : "Faire participer, c’est faire accepter", disent-ils. Participer, c'est accepter, par un effet mécanique de connivence et de coopération qui aboutit toujours au plus petit dénominateur commun. Vous faire participer aux pseudo-débats de la CNDP, c’est vous faire accepter l’enfouissement des déchets nucléaires.

En outre, en participant à ces mascarades, vous aidez décideurs et communicants à peaufiner leurs argumentaires pour mieux étouffer la contestation. Voyez vous-mêmes : "Un défi majeur pour les porteurs de projet est de pourvoir identifier les opposants pour trouver un interlocuteur privilégié avec qui négocier. (…) C’est à travers une grille d’analyse des systèmes d’acteurs que les décideurs peuvent caractériser les opposants et leur mode d’intervention afin de définir une réponse adaptée à chacune de leurs interrogations, voire de les impliquer dans le projet in fine." ("De l’acceptabilité à l’adhésion", projet universitaire réalisé pour la Fabrique de la Cité)

Auteur: PMO Pièces et main-d'oeuvre

Info: https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/electronucle_aire-.pdf

[ technocritique ] [ repolitisation ] [ participative ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

analyse holistique

Un type de raisonnement que l'AI ne peut remplacer

L'ingénieur en logiciel et philosophe William J. Littlefield II fait remarquer dans un essai récent qu'il existe trois types de raisonnement. Dont deux d'entre eux que nous avons probablement tous appris à l'école : le raisonnement déductif et inductif. Les ordinateurs peuvent très bien faire les deux.

Le raisonnement déductif : Les chiens sont des chiens. Tuffy est un chien. Tuffy est donc un chien.

Les premiers ordinateurs, dit Littlefield, utilisaient généralement le raisonnement déductif (qu'il considère comme un raisonnement "descendant"). Ce qui permet à de puissants ordinateurs de battre les humains à des jeux comme les échecs et le Go en calculant beaucoup plus de mouvements logiques à la fois qu'un humain ne peut le faire.

Le raisonnement inductif, en revanche, est un raisonnement "ascendant", qui va d'une série de faits pertinents à une conclusion, par exemple :

Un club a organisé 60 compétitions de natation, 20 dans chaque lieu ci-dessous :

Lorsque le Club organise des compétitions de natation à Sandy Point, nous obtenons en moyenne 80 % de votes d'approbation.

Lorsque le Club organise des compétitions de natation à Stony Point, nous obtenons en moyenne 60 % des suffrages.

Lorsque le Club organise des compétitions de natation à Rocky Point, nous obtenons une approbation moyenne de 40 %.

Conclusion : Les membres du club préfèrent les plages de sable fin aux autres types de plages.

Ici aussi l'avènement de nouvelles méthodes comme les réseaux neuronaux a permis à de puissants ordinateurs d'assembler une grande quantité d'information afin de permettre un tel raisonnement inductif (Big Data).

Cependant, le Flop IBM de Watson en médecine (supposée aider à soigner le cancer on vit l'AI incapable de discerner les infos pertinentes dans une grande masse de données) suggère que dans les situations où - contrairement aux échecs - il n'y a pas vraiment de "règles", les machines ont beaucoup de difficulté à décider quelles données choisir. Peut-être qu'un jour une encore plus grande masse de données résoudra ce problème. Nous verrons bien.

Mais, selon Littlefield, le troisième type de raisonnement, le raisonnement abductif, fonctionne un peu différemment :

"Contrairement à l'induction ou à la déduction, où nous commençons par des cas pour tirer des conclusions sur une règle, ou vice versa, avec l'abduction, nous générons une hypothèse pour expliquer la relation entre une situation et une règle. De façon plus concise, dans le raisonnement abductif, nous faisons une supposition éclairée." William J. Littlefield II, "La compétence humaine que l'IA ne peut remplacer"

Le raisonnement abductif, décrit à l'origine par un philosophe américain Charles Sanders Peirce (1839-1914), est parfois appelé "inférence vers la meilleure explication", comme dans l'exemple qui suit :

"Un matin, vous entrez dans la cuisine et trouvez une assiette et une tasse sur la table, avec de la chapelure et une noix de beurre dessus, le tout accompagné d'un pot de confiture, un paquet de sucre et un carton vide de lait. Vous en concluez que l'un de vos colocataires s'est levé la nuit pour se préparer une collation de minuit et qu'il était trop fatigué pour débarrasser la table. C'est ce qui, à votre avis, explique le mieux la scène à laquelle vous êtes confronté. Certes, il se peut que quelqu'un ait cambriolé la maison et ait pris le temps de manger un morceau pendant sur le tas, ou qu'un colocataire ait arrangé les choses sur la table sans prendre de collation de minuit, mais juste pour vous faire croire que quelqu'un a pris une collation de minuit. Mais ces hypothèses vous semblent présenter des explications beaucoup plus fantaisistes des données que celle à laquelle vous faites référence." Igor Douven, "Abduction" à l'Encyclopédie Stanford de Philosophie

Notez que la conclusion n'est pas une déduction stricte qu'il n'y a pas non plus suffisamment de preuves pour une induction. Nous choisissons simplement l'explication la plus simple qui tient compte de tous les faits, en gardant à l'esprit la possibilité que de nouvelles preuves nous obligent à reconsidérer notre opinion.

Pourquoi les ordinateurs ne peuvent-ils pas faire ça ? Littlefield dit qu'ils resteraient coincés dans une boucle sans fin :

Une part de ce qui rend l'enlèvement difficile, c'est que nous devons déduire certaines hypothèses probables à partir d'un ensemble vraiment infini d'explications....

"La raison pour laquelle c'est important, c'est que lorsque nous sommes confrontés à des problèmes complexes, une partie de la façon dont nous les résolvons consiste à bricoler. Nous jouons en essayant plusieurs approches, en gardant notre propre système de valeurs fluide pendant que nous cherchons des solutions potentielles. Plus précisément, nous générons des hypothèses. Où 'un ordinateur peut être coincé dans une boucle sans fin, itérant sur des explications infinies, nous utilisons nos systèmes de valeurs pour déduire rapidement quelles explications sont à la fois valables et probables. Peirce savait que le raisonnement abductif était au cœur de la façon dont nous nous attaquons à de nouveaux problèmes ; il pensait en particulier que c'était la façon dont les scientifiques découvrent les choses. Ils observent des phénomènes inattendus et génèrent des hypothèses qui expliquent pourquoi ils se produisent." William J. Littlefield II, "La compétence humaine que l'IA ne peut remplacer"

En d'autres termes, le raisonnement abductif n'est pas à proprement parler une forme de calcul, mais plutôt une supposition éclairée - une évaluation des probabilités fondée sur l'expérience. Il joue un rôle important dans la création d'hypothèses dans les sciences :

"Par exemple, un élève peut avoir remarqué que le pain semble se moisir plus rapidement dans la boîte à pain que dans le réfrigérateur. Le raisonnement abductif amène le jeune chercheur à supposer que la température détermine le taux de croissance des moisissures, comme l'hypothèse qui correspondrait le mieux aux données probantes, si elle est vraie.
Ce processus de raisonnement abductif est vrai qu'il s'agisse d'une expérience scolaire ou d'une thèse de troisième cycle sur l'astrophysique avancée. La pensée abductive permet aux chercheurs de maximiser leur temps et leurs ressources en se concentrant sur une ligne d'expérimentation réaliste.
L'enlèvement est considéré comme le point de départ du processus de recherche, donnant une explication rationnelle, permettant au raisonnement déductif de dicter le plan expérimental exact." Maryn Shuttleworth, "Abductive Reasining" Chez Explorable.com

Comme on peut le voir, le raisonnement abductif fait appel à une certaine créativité parce que l'hypothèse suggérée doit être développée comme une idée et non seulement additionnée à partir d'informations existantes. Et la créativité n'est pas quelque chose que les ordinateurs font vraiment.

C'est l'une des raisons invoquées par le philosophe Jay Richards dans The Human Advantage : L'avenir du travail américain à l'ère des machines intelligentes, comme quoi l'IA ne mettra pas la plupart des humains au chômage. Au contraire, elle changera la nature des emplois, généralement en récompensant la créativité, la flexibilité et une variété d'autres caractéristiques qui ne peuvent être calculées ou automatisées.

Auteur: Internet

Info: https://mindmatters.ai/2019/10/a-type-of-reasoning-ai-cant-replace/, 10 Oct. 2019

[ optimisme ] [ informatique ]

 
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Ajouté à la BD par miguel