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neuroscience

On sait enfin pourquoi le cerveau consomme autant d'énergie

La faute a des petites pompes "cachées". 

Les scientifiques le savent: le cerveau humain est une véritable machine insatiable en énergie. Au total, il en engloutit jusqu'à 10 fois plus que le reste du corps. Et même lorsque nous nous reposons, 20% de notre consommation de carburant est directement utilisé pour son fonctionnement. Un phénomène inexpliqué sur lequel nombre de scientifiques se sont cassés les dents. Jusqu'à aujourd'hui.

Publiée dans la revue Science Advances, une nouvelle étude explique l'origine du processus. Un processus qui se déroule dans ce que l'on appelle les vésicules synaptiques.

Entre deux neurones se trouve une synapse, zone qui assure la transmission des informations entre ces deux cellules nerveuses. Quand un signal est envoyé d'un neurone à un autre, un groupe de vésicules aspire les neurotransmetteurs à l'intérieur du premier neurone, au bout de sa queue. Le message est ainsi bien enveloppé, comme une lettre prête à être postée.

L'information est ensuite amenée jusqu'au bord du neurone, où elles fusionne avec la membrane, avant de relâcher les neurotransmetteurs dans la fameuse synapse. Dans cette zone, les neurotransmetteurs finissent leur course en entrant en contact avec les récepteurs du deuxième neurone. Et hop! Le message est passé.

Facile direz-vous. Certes, mais tout ceci nécessite beaucoup d'énergie cérébrale, ont découvert les scientifiques. Et ce, que le cerveau soit pleinement actif ou non.

En effectuant plusieurs expériences sur les terminaisons nerveuses, les membres de l'étude ont observé le comportement de la synapse lorsqu'elle est active ou non. Résultat: même quand les terminaisons nerveuses ne sont pas stimulées, les vésicules synaptiques, elles, ont toujours besoin de carburant. La faute à une sorte de petite pompe "cachée" qui est notamment en charge de pousser les protons hors de la vésicule. Chargée de pousser les protons hors de la vésicule et d'aspirer ainsi les neurotransmetteurs elle ne semble jamais se reposer et a donc besoin d'un flux constant d'énergie. En fait, cette pompe "cachée" est responsable de la moitié de la consommation métabolique de la synapse au repos.

Selon les chercheurs, cela s'explique par le fait que cette pompe a tendance à avoir des fuites. Ainsi, les vésicules synaptiques déversent constamment des protons via leurs pompes, même si elles sont déjà pleines de neurotransmetteurs et si le neurone est inactif.

Étant donné le grand nombre de synapses dans le cerveau humain et la présence de centaines de vésicules synaptiques à chacune de ces terminaisons nerveuses, ce coût métabolique caché, qui consiste à conserver les synapses dans un état de "disponibilité", se fait au prix d'une importante dépense d'énergie présynaptique et de carburant, ce qui contribue probablement de manière significative aux exigences métaboliques du cerveau et à sa vulnérabilité métabolique", concluent les auteurs.

Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour déterminer comment les différents types de neurones peuvent être affectés par des charges métaboliques aussi élevées, car ils ne réagissent pas tous de la même manière.

Certains neurones du cerveau, par exemple, peuvent être plus vulnérables à la perte d'énergie, et comprendre pourquoi pourrait nous permettre de préserver ces messagers, même lorsqu'ils sont privés d'oxygène ou de sucre.

"Ces résultats nous aident à mieux comprendre pourquoi le cerveau humain est si vulnérable à l'interruption ou à l'affaiblissement de son approvisionnement en carburant", explique le biochimiste Timothy Ryan, de la clinique Weill Cornell Medicine à New York.

"Si nous avions un moyen de diminuer en toute sécurité cette fuite d'énergie et donc de ralentir le métabolisme cérébral, cela pourrait avoir un impact clinique très important." 

Auteur: Internet

Info: Science Advances, 3 déc 2021

[ cervelle énergivore ]

 

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neuro psychologie

Pourquoi notre cerveau nous pousse à détruire la planète et comment l’en empêcher.
A l’instar de "Biologie du Pouvoir" et de "La Nouvelle Grille", "Le Bug Humain" a pour ambition de trouver dans le fonctionnement même de notre cerveau des mécanismes qui expliquent nos comportements et nos choix à l’échelle individuelle et sociale et en quoi ces mêmes mécanismes sont responsables de notre déni devant la catastrophe écologique qui arrive à grands pas.
Mais contrairement à ses deux prédécesseurs, Le Bug Humain ne s’avance pas jusqu’à proposer une solution politique claire. Une frilosité que l’on regrettera.

Le constat est édifiant : L’humanité vit largement au dessus de ses moyens et ne semble pas prendre la réelle mesure des conséquences d’une telle surconsommation. A qui la faute ? Au striatum. Cette partie de notre cerveau a pour rôle de récompenser en dopamine des comportements qui favorisent la survie et la diffusion du patrimoine génétique : Se nourrir, avoir des relations sexuelles, le goût du moindre effort, l’utilité ou rang social et l’information. Si ces fonctions du striatum ont permises à l’Homo Sapiens de survivre et de croitre dans un environnement hostile et de rareté, il n’est plus adapté à nos sociétés d’abondance sécurisées. Il devient même dangereux quand il est confronté à des technologies telles que les réseaux sociaux. Car lorsque l’on publie ses photos de vacance sur Facebook ou qu’on se fend d’une réplique cinglante sur Twitter, nous donnons de l’importance aux likes et autres retweets qui vont répondre à la fois à notre besoin de reconnaissance sociale et à notre attirance vers le moindre effort puisque nous n’avons plus besoin d’agir en société ou au travail mais à cliquer sur quelques icônes pour nous situer socialement :

"Si vous obtenez moins de likes que ce que vous attendiez après avoir modifié votre profil, votre striatum s’éteint et votre estime de soi chute; si vous obtenez plus de likes que vous ne le prévoyiez, ce même striatum produit de violentes décharges de dopamine qui vous apporte une bouffée de bien-être. Cela se traduit par une mise à jour de votre estime de soi au sien de vos archives personnelles, lesquelles sont tenues par une zone de votre cerveau localisée deux centimètres en retrait de votre front. Cette zone cérébrale appelée cortex préfrontal ventromédian va en tirer des conclusions sur ce que vous valez à vos propres yeux. Si vous venez d’obtenir une récompense, [il] fait monter d’un cran votre estime de soi. Si vous avez reçu une punition, il la revoit à la baisse. Tout part de ce principe interne de recherche d’approbation par le striatum, une partie de nous-même qui nous enjoint constamment de faire face au jugement d’autrui, en quête de reconnaissance."

Pour autant, Le Bug Humain ne nous livre pas un déterminisme simpliste qui ferait du striatum tel qu’il est décrit le seul facteur déterminant de tous nos comportements. En prenant l’exemple de la prédominance des comportements altruistes chez les femmes par rapport aux hommes, Bohler illustre le concept de "conditionnement opérant". Si les femmes voient leurs comportements altruistes mieux récompensés par leur striatum c’est parce qu’elles ont appris à être altruistes. On leur a signifié dès leur plus jeune âge que le partage était une bonne chose. Le conditionnement socioculturel peut donc, dans une certaine mesure, orienter le système de récompense de notre cerveau.

S’il manque de témérité politique, Le Bug Humain a tout de même le mérite de vulgariser efficacement certaines connaissances et de nous alerter sur des problèmes intrinsèquement liés aux réseaux sociaux, au pouvoir et sur notre capacité à prendre conscience des conséquences de notre activité sur Terre tout en évitant les travers des déterminismes simplistes, qu’ils soient uniquement génétiques ou uniquement socioculturels.

Auteur: Internet

Info: A propos de Le Bug Humain de Sébastien Bohler (2019), Posted https://refractairejournal.noblogs.org 27/02/2019 by REFRACTAIRE

[ humains virus terrestres ] [ récompense ] [ motivation ]

 

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linguistique

Byzance tomba aux mains des Turcs tout en discutant du sexe des anges.

Le français achèvera de se décomposer dans l’illettrisme pendant que nous discuterons du sexe des mots.

La querelle actuelle découle de ce fait très simple qu’il n’existe pas en français de genre neutre comme en possèdent le grec, le latin et l’allemand. D’où ce résultat que, chez nous, quantité de noms, de fonctions, métiers et titres, sémantiquement neutres, sont grammaticalement féminins ou masculins. Leur genre n’a rien à voir avec le sexe de la personne qu’ils concernent, laquelle peut être un homme.

Homme, d’ailleurs, s’emploie tantôt en valeur neutre, quand il signifie l’espèce humaine, tantôt en valeur masculine quand il désigne le mâle. Confondre les deux relève d’une incompétence qui condamne à l’embrouillamini sur la féminisation du vocabulaire. Un humain de sexe masculin peut fort bien être une recrue, une vedette, une canaille, une fripouille ou une andouille.

De sexe féminin, il lui arrive d’être un mannequin, un tyran ou un génie. Le respect de la personne humaine est-il réservé aux femmes, et celui des droits de l’homme aux hommes ?

Absurde!

Ces féminins et masculins sont purement grammaticaux, nullement sexuels.

Certains mots sont précédés d’articles féminins ou masculins sans que ces genres impliquent que les qualités, charges ou talents correspondants appartiennent à un sexe plutôt qu’à l’autre. On dit: "Madame de Sévigné est un grand écrivain" et "Rémy de Goumont est une plume brillante". On dit le garde des Sceaux, même quand c’est une femme, et la sentinelle, qui est presque toujours un homme.

Tous ces termes sont, je le répète, sémantiquement neutres. Accoler à un substantif un article d’un genre opposé au sien ne le fait pas changer de sexe. Ce n’est qu’une banale faute d’accord.

Certains substantifs se féminisent tout naturellement: une pianiste, avocate, chanteuse, directrice, actrice, papesse, doctoresse. Mais une dame ministresse, proviseuse, médecine, gardienne des Sceaux, officière ou commandeuse de la Légion d’Honneur contrevient soit à la clarté, soit à l’esthétique, sans que remarquer cet inconvénient puisse être imputé à l’antiféminisme. Un ambassadeur est un ambassadeur, même quand c’est une femme. Il est aussi une excellence, même quand c’est un homme. L’usage est le maître suprême.

Une langue bouge de par le mariage de la logique et du tâtonnement, qu’accompagne en sourdine une mélodie originale. Le tout est fruit de la lenteur des siècles, non de l’opportunisme des politiques. L’Etat n’a aucune légitimité pour décider du vocabulaire et de la grammaire. Il tombe en outre dans l’abus de pouvoir quand il utilise l’école publique pour imposer ses oukases langagiers à toute une jeunesse.

J’ai entendu objecter: "Vaugelas, au XVIIe siècle, n’a-t-il pas édicté des normes dans ses remarques sur la langue française ?". Certes. Mais Vaugelas n’était pas ministre. Ce n’était qu’un auteur, dont chacun était libre de suivre ou non les avis. Il n’avait pas les moyens d’imposer ses lubies aux enfants. Il n’était pas Richelieu, lequel n’a jamais tranché personnellement de questions de langues.

Si notre gouvernement veut servir le français, il ferait mieux de veiller d’abord à ce qu’on l’enseigne en classe, ensuite à ce que l’audiovisuel public, placé sous sa coupe, n’accumule pas à longueur de soirées les faux sens, solécismes, impropriétés, barbarismes et cuirs qui, pénétrant dans le crâne des gosses, achèvent de rendre impossible la tâche des enseignants. La société française a progressé vers l’égalité des sexes dans tous les métiers, sauf le métier politique. Les coupables de cette honte croient s’amnistier (ils en ont l’habitude) en torturant la grammaire.

Ils ont trouvé le sésame démagogique de cette opération magique: faire avancer le féminin faute d’avoir fait avancer les femmes.

Auteur: Revel Jean-François

Info: Fin du siècle des ombres, Fayard, 1999

[ vocables sexués ]

 
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environnement

A la caisse d'un supermarché, une vieille dame choisit un sac en plastique pour ranger ses achats. La caissière lui reproche de ne pas se mettre à l'écologie et lui dit: - Votre génération ne comprend tout simplement pas le mouvement écologique. Seuls les jeunes vont payer pour la vieille génération qui a gaspillé toutes les ressources !...
La vieille femme s'excuse auprès de la caissière et explique : - Je suis désolée, il n'y avait pas de mouvement écologiste de mon temps.
Alors qu'elle quitte la caisse, la mine déconfite, la caissière ajoute : - Ce sont des gens comme vous qui ont ruiné toutes les ressources à nos dépens.
C'est vrai, vous ne considériez absolument pas la protection de l'environnement dans votre temps...
Alors, un peu énervée, la vieille dame fait observer, qu'à l'époque on retournait les bouteilles de verre consignées au magasin. Le magasin les renvoyait à l'usine pour être lavées, stérilisées et remplies à nouveau : Les bouteilles étaient recyclées, mais on ne connaissait pas le mouvement écologique. Elle ajoute :
De mon temps, on montait l'escalier à pied : on n'avait pas d'escaliers roulants et peu d'ascenseurs. On ne prenait pas sa voiture à chaque fois qu'il fallait se déplacer de deux rues. On marchait jusqu'à l'épicerie du coin. Mais, c'est vrai, on ne connaissait pas le mouvement écologiste.
On ne connaissait pas les couches jetables. On lavait les couches des bébés. On faisait sécher les vêtements dehors sur une corde. On avait un réveil qu'on remontait le soir. Dans la cuisine, on s'activait pour préparer les repas ; on ne disposait pas de tous ces gadgets électriques spécialisés pour tout préparer sans efforts et qui bouffent des watts autant qu'EDF en produit. Quand on emballait des éléments fragiles à envoyer par la poste, on utilisait comme rembourrage du papier journal ou de la ouate, dans des boîtes ayant déjà servi, pas des bulles en mousse de polystyrène ou en plastique. On n'avait pas de tondeuses à essence autopropulsées ou auto portées. On utilisait l'huile de coude pour tondre le gazon. On travaillait physiquement; on n'avait pas besoin d'aller dans un club de gym pour courir sur des tapis roulants qui fonctionnent à l'électricité. Mais, c'est vrai, on ne connaissait pas le mouvement écologiste. On buvait de l'eau à la fontaine quand on avait soif. On n'utilisait pas de tasses ou de bouteilles en plastique à jeter. On remplissait les stylos dans une bouteille d'encre au lieu d'acheter un nouveau stylo. On remplaçait les lames de rasoir au lieu de jeter le rasoir entier après quelques utilisations. Mais, c'est vrai, on ne connaissait pas le mouvement écologiste... Les gens prenaient le bus, le métro, le train et les enfants se rendaient à l'école à vélo ou à pied au lieu d'utiliser la voiture familiale et maman comme un service de taxi 24 H sur 24. Les enfants gardaient le même cartable durant plusieurs années, les cahiers continuaient d'une année sur l'autre, les crayons de couleurs, gommes, taille- crayon et autres accessoires duraient tant qu'ils pouvaient, pas un cartable tous les ans et des cahiers jetés fin juin, de nouveaux crayons et gommes avec un nouveau slogan à chaque rue. Mais, c'est vrai, on ne connaissait pas le mouvement écologique !... On n'avait qu'une prise de courant par pièce, et pas de bande multiprises pour alimenter toute la panoplie des accessoires électriques indispensables aux jeunes d'aujourd'hui.
ALORS VIENS PAS ME FAIRE CHIER AVEC TON MOUVEMENT ECOLOGISTE ! Tout ce qu'on regrette, c'est de ne pas avoir eu assez tôt la pilule, pour éviter d'engendrer la génération des jeunes cons comme vous, qui s'imagine avoir tout inventé, à commencer par le travail, qui ne savent pas écrire 10 lignes sans faire 20 fautes d'orthographe, qui n'ont jamais ouvert un bouquin autre que des bandes dessinées, qui ne savent pas qui a écrit le Boléro de Ravel... (et pensent même que c'est un grand couturier), qui ne savent pas mieux où passe le Danube quand on leur propose Vienne ou Athènes, etc. mais qui croient tout de même pouvoir donner des leçons aux autres,du haut de leur ignorance crasse ! MERDE à la fin !

Auteur: Internet

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[ évolution ] [ humour ]

 

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christianisme-protestantisme

En 1504, il [Erasme] avait publié pour la première fois un traité destiné à éclairer ceux qui, "faisant consister la religion en cérémonies et en observances judaïques de choses matérielles, négligeaient la véritable piété". C’était l’Enchiridion Militis Christiani, livre hardi qui contenait en substance tout le programme des réformes souhaitées par Érasme. […] Dans l’été de 1518, Érasme chargeait Froben de le publier à nouveau et composait pour cette réédition une longue préface dédiée à un abbé alsacien, Paul Volz. C’était un manifeste. Avec prudence, à son ordinaire, mais avec décision, Érasme y conduisait une opération fort adroite. Il couvrait Luther, tout à la fois, de son autorité et de sa modération. Il se gardait de nommer le fougueux Augustin ; mais dans un passage semé d’allusions, il s’instituait l’avocat d’une liberté de critique qu’il revendiquait et pour lui et, visiblement, pour Luther. "De même, voilà quelqu’un qui nous avertit : mieux vaut se fier à de bonnes actions qu’aux grâces octroyées par le pape. Veut-il dire qu’il condamne absolument ces grâces ? Non, mais qu’il leur préfère les voies que l’enseignement du Christ indique comme plus certaines." Traduction assez libre des opinions de Luther ; mais la manœuvre était pleine d’adresse. "Cet homme est de mes hommes, semblait dire l’humaniste en désignant le moine. C’est une tête chaude, sans doute ; mais écoutez : je vais vous présenter, à ma mode, ses griefs et ses objections ; quand il parlera par ma bouche, vous direz tout d’une voix : il a raison. Au reste, ses critiques, préface d’un programme complet de réforme et de rénovation. Ce programme, dès 1504, je l’ai présenté à la chrétienté. Je le lui présente à nouveau, en 1518, dans cette édition revue et corrigée de l’Enchiridion." Tactique habile, intelligente et souple. Elle montre jusqu’à l’évidence qu’en 1518, Érasme connaissait encore bien mal Luther.

Qui l’aurait pu d’ailleurs avertir de son erreur ? Un seul homme, Luther, en rendant publics des griefs qu’il n’avait confiés qu’à des amis choisis, dans des lettres privées. Mais cette révélation brutale, encore qu’elle fût fort dans son tempérament, Luther pour cent raisons ne pouvait la faire. C’eût été la rupture. Or Luther ne pouvait pas rompre avec Érasme. Seul, il n’aurait peut-être pas hésité à le faire. Il n’était pas, il n’était plus seul. Des hommes l’entouraient, des amis, des partisans, dévots à lui mais dévots à Érasme, incapables de jeter l’anathème sur l’un pour demeurer fidèles à l’autre. Des hommes l’entouraient, qui pesaient sur lui, l’amenaient doucement à faire le geste nécessaire, celui qu’il accomplit le 28 mars 1519 lorsqu’il rédigea, à l’adresse d’Érasme, une lettre, la première, pleine d’humilité et de soumission extérieure, très orgueilleuse au fond et très brutale : une mise en demeure ; avec ou contre moi ?

Mais Érasme non plus n’était pas libre. Pas libre de dire, sinon de voir, que Luther n’était pas un de ses tenants ; pas libre de dénoncer les fautes qu’il lui voyait commettre : énormes cependant, de son point de vue à lui. C’est que tout de suite, avec leur flair grossier, ses ennemis, entre lui et Luther, avaient noué un lien direct. Luther, un suivant ; qui sait, un prête-nom d’Érasme ? L’humaniste avait dû comprendre que dès lors, toute condamnation de Luther serait sa condamnation à lui ; un coup mortel porté à la cause même de la réforme humaniste, à sa cause... A tout prix, il fallait empêcher les moines haineux de rejeter Luther comme hérétique. A tout prix, il fallait protéger Luther, intercéder pour lui auprès des princes, des prélats, des grands esprits ; faire l’opinion et la rendre intangible. A tout prix enfin, il fallait peser sur Luther, obtenir de lui qu’il usât de prudence sans se laisser pousser à l’irréparable. Besogne énorme. Érasme s’y attela virilement, habilement. Ainsi s’établit entre deux hommes munis de viatiques empruntés, l’un à cette antiquité païenne dont Érasme se nourrissait avec délices et qui l’aidait sans doute à comprendre Jésus ; l’autre, à la doctrine paulinienne et à la tradition augustinienne — ainsi s’établit entre Luther, uniquement et passionnément chrétien, et Érasme, adepte infiniment intelligent d’une philosophie du Christ toute saturée de sagesse humaine, une sorte de compromis qui permettait l’action. Ainsi, dans l’opinion des lettrés, naquit ce préjugé si fort qu’il vit toujours : Luther ? le fils spirituel et l’émule d’Érasme — le réalisateur de ses velléités réformatrices.

Une équivoque. Une première équivoque.

Auteur: Febvre Lucien

Info: Un destin : Martin Luther, PUF, 1968, pages 85-86

[ affiliation ] [ malentendu ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

sport

Je suis passé devant un magasin où des télés diffusaient l'US Open. Pendant quinze secondes, j'ai cru que c'était un jeu vidéo tellement ça cognait. Aujourd'hui, le tennis, c'est un bras de fer, c'est hyper physique. La notion de finesse n'existe plus. Les gens disent que Federer joue en finesse. Non, Federer joue relâché, mais il ne joue pas en finesse. Il cogne au service, il fracasse en coup droit, il fracasse en revers, et de temps en temps il fait un slice ou une amortie quand il en a marre. Il n'y a plus cette notion de surprise. C'est à qui tapera le plus fort, à qui sera le plus résistant.
Mais alors c'est impressionnant, ça joue tellement bien, ça me fait halluciner. Il y a quelques semaines, on m'a demandé ce que je pensais du niveau. J'ai répondu : à mon meilleur, meilleur, meilleur niveau, contre Djokovic, je ne gagne pas un jeu. D'ailleurs, en Serbie, un journaliste a mal fait la traduction et a balancé l'interview en écrivant : "Noah a dit que s'il jouait Djokovic, Djokovic ne ferait pas un jeu." J'ai fait les titres des journaux télévisés en Serbie toute une journée !
Le bond en avant physique opéré ces dernières années vous surprend-il ?
Déjà, pendant la période Agassi-Sampras, je me demandais jusqu'où ils iraient. Là, ils jouent pareil, sauf qu'ils font dix centimètres et dix kilos de plus, et les mecs progressent encore. Nadal, au départ, c'était un joueur uniquement défensif, et maintenant il contre-attaque. Si tu joues court, il a un slice en revers magnifique. Techniquement, c'est fantastique. Les mecs continuent à évoluer, et ce n'est pas fini. Parce qu'il n'y a pas encore eu de Michael Jordan du tennis, un mec de 2,02 mètres, souple, avec le toucher et la puissance. Aujourd'hui, aux Etats-Unis, ces énergumènes vont direct au basket. Mais c'est ça, le tennis de demain. Et là, je pense que ça pourra de nouveau passer par le service-volée.
Y a-t-il un joueur qui vous fasse vibrer aujourd'hui ?
Dans une autre vie, je vais monter un circuit où on aura le droit de gueuler, d'insulter tout le monde, d'être comme on a envie d'être. On a tué le jeu en installant, il y a quinze ou vingt ans, une espèce de code de conduite parce qu'il ne fallait pas heurter les oreilles du jeune public américain qui ne pouvait pas entendre "fuck" ou "shit". Du coup, la génération qui est arrivée ensuite a appris le tennis avec ces règles qui ont tué l'âme du jeu.
Lorsque j'étais joueur, le public était plus proche de nous, plus concerné par notre jeu, parce qu'il nous connaissait, nous entendait gueuler. McEnroe a fait une carrière par ses gueulantes. Les gens aimaient le voir parce qu'ils se disaient : "Il va y avoir le bordel." McEnroe n'existerait pas aujourd'hui, il ne pourrait pas jouer.
Il y a deux ou trois ans, la finale du double messieurs avait lieu sur le Central, et la finale du double des légendes sur le court n° 1. Le Central était vide, le court n° 1 était bourré. Les gens voulaient voir McEnroe. Ça délirait. Il y avait de la vie. Le code de conduite a enlevé la vie. Aujourd'hui, tu ne connais pas la voix des joueurs, tu ne sais pas qui ils sont, quelle est leur personnalité. Pourtant ils en ont une. Djokovic, il ne demande qu'à déconner, mais ce n'est plus possible : il y a des flics partout qui te mettent des points de pénalité. Et le public a assimilé tout ça. Tu dis "merde" et tu te retrouves avec tout un stade qui siffle. Il faut du politiquement correct. Tout le monde pareil, c'est ça qui plaît aux diffuseurs américains comme CBS.
En France, le politiquement correct, en ce moment, c'est le "Hollande bashing". Vous aviez soutenu sa candidature pendant la campagne présidentielle. Un an plus tard, faites-vous partie des électeurs déçus ?
Déçu de quoi ? Je ne m'attendais pas à ce que, du jour au lendemain, tout le monde ait du boulot et se mette à danser Saga Africa. Hollande a été élu largement, et le lendemain de son élection les gens râlaient déjà. C'est la crise. Il faut qu'on se serre la ceinture et qu'on y aille tous ensemble. Sincèrement, je ne pense pas que la situation du pays soit la faute de Hollande. Personne ne pourrait faire mieux à sa place. Il arrive, le match est pourri, les balles sont pourries, le court est pourri, les arbitres sont corrompus, et le public a envie qu'il paume.

Auteur: Noah Yannick

Info:

[ évolution ] [ tennis ]

 

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foi chrétienne

Je suis bien contente de connaître le bon Dieu.

Je sais qu'il y a un être qui est infiniment au-dessus de tous les êtres, l'être suprême : c'est Dieu, je crois fermement son existence parce que c'est Dieu lui-même qui l'a révélée.

L'existence de Dieu me montre par la création du monde (sic). Je crois fermement qu'il y a un seul Dieu. Dieu est éternel, il a existé toujours ; avant qu'il a créé le ciel et la terre, il existait toujours seul, il n'a pas pu s'ennuyer parce qu'il était toujours heureux, il n'a jamais été créé, il n'a pas besoin de personne, mais il nous a créés par sa grande bonté pour nous partager son bonheur et sa gloire.

Dieu est un pur esprit, il n'a ni corps, ni figure, ni yeux, ni oreilles, ni bouche, ni bras, ni mains, nous ne pouvons pas le voir ni le toucher parce qu'il n'a point de corps. Je désire le voir et le toucher, mais je ne le peux pas parce qu'il n'a jamais de corps humain, mais j'espère que je verrai Dieu dans le ciel après ma mort. Je pense souvent en esprit que Dieu me suit partout. Dieu est partout, il nous voit pendant le jour comme pendant la nuit. Il nous est impossible de cacher à Dieu (sic). Dieu est tout-puissant, il fait tout ce qu'il veut, il a fait de rien le ciel et la terre. Les hommes ne peuvent pas créer. Dieu est infiniment bon, il nous a procuré tant de bienfaits, il nous donne chaque jour le pain et les aliments que nous mangeons, les vêtements qui nous couvrent, l'air que nous respirons et tout ce que nous avons, les fruits pour nous rafraîchir, les fleurs pour nous réjouir, les vaches, les bœufs, les porcs, les moutons pour nous nourrir.

Dieu nous protège et nous garde, il pense toujours à nous, il nous aime tendrement. J'aime tendrement aussi le bon Dieu. Dieu m'a donné une âme intelligente et immortelle faite à son image et qui doit un jour partager sa gloire dans le ciel. C'est mon âme qui peut penser à Dieu, c'est mon âme qui peut l'aimer, le remercier, le prier, Dieu a placé l'intelligence dans mon âme au-dessus de tous les animaux. La mer si grande, les fleurs si belles, les astres si brillants ne sont pas faits à l'image de Dieu, mon âme est donc plus précieuse et plus noble que tous les trésors de la terre et les beautés du firmament. Tout meurt dans la nature, les animaux, les plantes et les fleurs meurent, mon corps mourra, mais mon âme ne mourra jamais, mais elle vivra pour être toujours heureuse dans le ciel si je suis bien sage. Dieu infiniment bon m'a donné aussi de bons parents pour me soigner, de bonnes et dévouées maîtresses pour m'instruire; il m'a conduite à Larnay, où je suis si heureuse, il m'a donné encore des prêtres pour m'aider à me conduire dans le chemin du ciel, pour me confesser, me donner la sainte communion. Dieu est infiniment bon pour nous, il nous a envoyé son fils unique sur la terre pour nous sauver par sa naissance dans une pauvre étable, par sa vie de travail, par sa passion et sa mort sur la croix. Merci, mon Dieu, de vos bienfaits et de vos bontés pour moi, pauvre sourde-muette et aveugle, je veux être toujours reconnaissante envers Dieu et l'aimer de tout mon cœur par-dessus toutes choses. Dieu est infiniment miséricordieux, il aime à pardonner quand nous avons le regret de l'avoir offensé même véniellement ou gravement.

Dieu est infiniment juste, il récompense les bons et il punit les méchants. Dieu désire que nous allions tous au ciel à la condition que nous observions bien ses commandements. Dieu appelle les pécheurs à se convertir, mais beaucoup d'hommes méchants, orgueilleux, avares, gourmands, colères, impies, ne veulent pas se convertir, vont en enfer après leur mort par leur faute, ils sont très et toujours malheureux dans l'enfer parce qu'ils ne voient jamais Dieu, ils ne cessent jamais de souffrir dans l'enfer.

Mon plus grand bonheur est de connaître le bon Dieu, de l'aimer, de lui obéir et de le servir que d'avoir beaucoup d'or et de plaisirs. Mon Dieu, je veux bien profiter de vos bienfaits, de vos bontés et des souffrances et de la mort de Jésus-Christ, en passant mes années à vous aimer et à vous servir fidèlement toujours jusqu'à ma mort pour vous aimer encore pour toujours ensuite dans le ciel. Je le désire de tout mon cœur... Je suis très contente que le bon Dieu m'a fait sourde-muette et aveugle pour pouvoir vous connaître mieux. Je vous remercie de cette grâce que le monde ne connaît pas.

Auteur: Heurtin Marie

Info: 8 février 1904

[ handicap ] [ candeur ] [ innocence ] [ Éternel ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

épigénétique

AP : Nous allons à présent entrer dans la réalité elle-même. Si j’ai bien compris votre démarche générale, vous partez d’une interrogation sur la physique quantique et sur les énigmes qu’elle suggère, notamment quant au sens à attribuer à la matière. Puis, vous appliquerez à l’esprit ce que vous avez découvert à l’aide de la physique quantique.

ER : Oui, on peut résumer ainsi. Je m’appuie au départ sur deux mystères. Le premier, c’est celui de la conscience ; le second est celui de la physique quantique. Quand vous grattez un peu, vous voyez rapidement que l’interprétation officielle du "quantique" est bancale, it doesn’t fit. Il y a quelque chose qui ne va pas, et c’est la raison pour laquelle il y a eu de nombreuses interprétations de la théorie. J’aperçois sur votre bureau Le réel voilé de Bernard d’Espagnat, qui propose une interprétation. L’Ecole de Copenhague en propose une autre, et ainsi de suite : il existe de nombreuses interprétations, plus ou moins sérieuses. Je crois en tout cas que toutes souffrent d’une béance quelque part. Aucune n’est pleinement satisfaisante. Aucune, d’ailleurs, n’emporte le consensus franc et massif de la communauté scientifique. On n’a, au mieux, qu’un consensus mou ; qui peut varier au fil du temps. Pendant longtemps ce fut l’interprétation de Bohr (dite l’Ecole de Copenhague) qui régna. Une interprétation due à Hugh Everett, dite "des mondes multiples", a rallié les suffrages des cosmologistes et des astrophysiciens. Il semble qu’aujourd’hui une théorie, dite "de la décohérence", gagne du terrain ; jusqu’à ce qu’elle soit à sont tour supplantée par une autre. Nous avons des phénomènes de mode. C’est l’indice qu’il y a un malaise persistant. Ce dernier est loin d’avoir disparu.

Mon point de départ a été de me dire : si la réalité est psychophysique, s’il y a une strate de la réalité qu’on peut appeler le psychisme, qui serait le ferment qui conduit dans certaines conditions à la conscience, la fonction biologique sensori-motrice me montre alors qu’il y a une interface, un dialogue possible entre ces deux strates (que je suppose – c’est mon hypothèse fondamentale – non réductibles l’une à l’autre). Elle me montre qu’entre la dimension matérielle et la dimension psychique, il y a comme un double-crochet qui permet ce dialogue. Réfléchissons à ce que cela implique : ça veut dire que dans la matière, il y a un petit crochet qui dépasse. Ce crochet lui permet de dialoguer avec une altérité qui, puisqu’elle est psychique, n’est plus matérielle. Alors, de deux choses l’une : soit la physique n’a pas trouvé cette interface, elle nous ne pourrons pas aller plus loin tant que ce sera le cas. Soit elle l’a trouvée. Dans ce cas, cette interface se distingue par ses propriétés singulières. Singulières car… pas tout-à-fait matérielles ! Ces propriétés seront qualitativement différentes des propriétés usuelles de la matière, qui sont purement physico-physiques. A mon humble avis, nous sommes dans ce deuxième cas depuis que la physique est devenue quantique. Et c’est justement cela qui pose problème, parce que les physiciens n’ont pas compris. Ils sont prisonniers de leur paradigme matérialiste. Ils ne reconnaissent que le physico-physique, alors qu’il existe aussi le psycho-physique. S’ils ont trouvé cette interface, ils sont comme la poule qui a trouvé un couteau, ils sont face à de l’ininterprétable. Face à de l’inintelligible. Faute du référentiel conceptuel adéquat. Le référentiel matérialiste, trop étroit, crée des problèmes conceptuels quand on veut l’appliquer au psycho-physique. C’est inévitable.

Ensuite, il me fallait donner un contenu au psychisme et le caractériser dans sa singularité. C’est pourquoi je l’ai décrit comme "endo-causal". Contrairement au déterminisme, qui est objectif (et qui est exo-causal dans ma terminologie), l’endo-causalité est de l’ordre de la subjectivité. C’est un contenu privé, comme la privacy of mind des anglo-saxons. Elle est inaccessible à un observateur extérieur.

AP : Inaccessible à une description à la troisième personne.

ER : Exactement. Le contenu privé s’éprouve, il est exclusif à la première personne, au sujet lui-même. La seule traduction phénoménologique de l’endo-causalité – qui est une capacité de choix – est une rupture du déterminisme ; ça s’appelle aussi l’aléatoire. Je cherchais donc l’interface dans les phénomènes inintelligibles (ininterprétables) pour la physique quantique, prisonnière qu’elle est de son paradigme matérialiste. Et, simultanément, là où il y a de l’aléatoire vrai (non lié à notre ingorance). Cela m’amène à la réduction du paquet d’onde ainsi qu’aux sauts et transitions quantiques.

AP : D’accord ; pour être très clair, je me permets de vous citer à nouveau : il faut, dites-vous, "allouer à toute particule élémentaire un certain degré de psychisme." Cet énoncé est très fort, mais assez étonnant : ce que vous dites, en somme, c’est qu’une particule ne contient pas que de la matière, qu’elle contient une certaine forme de psychisme, de subjectivité, et l’ensemble de la matière et de la subjectivité, vous appelez cela "psychomatière". Cela permettrait d’expliquer le comportement des particules à l’aide d’une causalité de type subjectif, d’une "endo-causalité" immanente à chaque particule.

ER : Oui, et je comprend que cela puisse surprendre, voire choquer. Je prends la comparaison (ou la métaphore) de l’œuf dur sans sa coquille : vous ne voyez de lui que l’albumine coagulée. Mais à l’intérieur, il y a autre chose. Il a le jaune d’œuf ; mais il est indécelable. De même le ’psi’ est indécelable. Pourquoi ? Parce qu’il est latent la plupart du temps (dans l’état matière). Etre indécelable ne signifie pas être inexistant : prenez l’exemple du neutrino. Pas moins de 66 milliards d’entre eux traversent chaque seconde chaque cm² de notre peau. Heureusement pour nous, comme ils n’interagissent pas, ils sont sans effet – ils sont donc indécelables ! De la même manière, le ’psi’ en général n’interfère pas : tout se passe comme s’il n’existait pas.



 

Auteur: Ransford Emmanuel

Info: Sur actu-philosophia, interview de Thibaut Gress, 7.1 2010

[ résonance ] [ determinisme vs indeterminisme ] [ panpsychisme ] [ dualité sur-atomique ]

 

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protestantisme

Un homme du tempérament de Luther, s’il ouvre un livre : il n’y lit qu’une pensée, la sienne. Il n’apprend rien qu’il ne porte en lui. Un mot, une phrase, un raisonnement le frappent. Il s’en empare. Il le laisse descendre en lui, profond, plus profond, jusqu’à ce que, par-dessous les surfaces, il aille toucher quelque point secret, ignoré jusqu’alors du lecteur lui-même, et d’où, brusquement, jaillit une source vive — une source qui dormait, attendant l’appel et le choc du sourcier : mais les eaux étaient là, et leur force contenue. N’ayons donc point scrupule à négliger ici tout un monde de recherches patientes et méritoires. Ne retenons qu’un fait, parmi tant d’autres.

Luther, semble-t-il, a peu étudié à Erfurt les grands systèmes scolastiques du XIIIe siècle. Le thomisme en particulier paraît lui être demeuré étranger : rien d’étonnant, et s’il l’avait connu, il n’en aurait tiré qu’un profit violemment négatif. Ce qu’il a lu, en dehors de quelques mystiques et, notamment, de Tauler (dont on nous dit d’ailleurs, qu’il le comprit mal et qu’il en dénatura la pensée sans scrupule : entendons qu’il en fit librement son profit, sans se soucier de savoir si ses interprétations s’accordaient, ou non, avec la doctrine du disciple d’Eckhart ; il lui suffisait qu’elles rentrassent dans les cadres de sa spéculation à lui, Luther) — ce qu’il lisait, c’était surtout le Commentaire sur les Sentences du nominaliste Gabriel Biel († 1495), l’introducteur principal de l’occamisme en Allemagne, le "roi des théologiens"... tout au moins de Tübingen, l’ami de Jean Trithème et de Geiler de Kaisersberg. Vieilli, Luther se vantera de savoir encore par cœur des pages entières du célèbre docteur.

Or que trouvait Luther dans les écrits de Biel, lorsqu’il les relisait avec l’ardent souci d’y découvrir une solution aux difficultés dont il ne savait sortir ? Deux théories, entre beaucoup, et qui, lorsqu’on les énonce à la suite l’une de l’autre, paraissent contradictoires : ce n’est pas le lieu ici, ni le moment d’exposer comment, pour qui connaît même sommairement la pensée d’Occam, cette contradiction s’évanouit. Biel prétendait d’abord que, les suites du péché originel s’étant fait sentir surtout dans les régions basses, sur les puissances inférieures de l’âme humaine, la raison et la volonté demeurent, au contraire, à peu près telles qu’avant la faute — l’homme pouvant, par les seules forces de sa nature, observer la loi et accomplir les œuvres prescrites sinon "selon l’intention du législateur", du moins suivant "la substance du fait". Et ensuite que, par ces seules et mêmes forces, la volonté humaine étant capable de suivre le commandement de la droite raison, l’homme peut aimer Dieu par-dessus toutes choses. Cet acte d’amour suprême et total crée en lui une disposition suffisante pour qu’il puisse obtenir, tout pécheur qu’il soit, la grâce sanctifiante et la rémission des péchés.

Seulement, en même temps et puisqu’il rattachait sa pensée à celle d’Occam, Biel réservait les droits de la Toute-Puissance divine. Droits absolus, sans bornes ni limitations, étendus jusqu’à l’arbitraire. Et, par exemple, enseignait le théologien de Tübingen, du vouloir divin et de lui seul, les lois morales tiraient sens et valeur. Les péchés étaient péchés et non pas bonnes actions, parce que Dieu le voulait ainsi. Dieu voudrait le contraire, le contraire serait ; le vol, l’adultère, la haine de Dieu même deviendraient des actions méritoires. Dieu n’a donc, en l’homme, à punir ou à récompenser ni fautes propres ni mérites personnels. Les bonnes actions, pour qu’elles obtiennent récompense, il faut seulement que Dieu les accepte. Et il les accepte quand il lui plaît, comme il lui plaît, s’il lui plaît, pour des raisons qui échappent à la raison des hommes. Conclusion : la prédestination inconditionnelle et imprévisible...

Ainsi avait professé, ainsi professait toujours après sa mort, par ses livres et par ses disciples, Gabriel Biel le révéré. Qu’on se représente maintenant, en face de ces ouvrages, soumis à ces doctrines, ce Luther ardent, épris d’absolu, inquiet par ailleurs et tourmenté, qui cherchait partout à étancher son ardente soif de piété, mais à se délivrer également de ses scrupules et de ses angoisses. On lui disait, avec Biel : Efforce-toi. Tu le peux. Dans le plan humain, l’homme, par ses seules forces naturelles, par le jeu de sa volonté et de sa raison peut accomplir la loi ; il peut parvenir, finalement, à aimer Dieu par-dessus toutes choses. — Et Luther s’efforçait. Il faisait le possible, selon sa nature, et l’impossible, pour que naisse en lui cette dispositio ultimata et sufficiens de congruo ad gratiae infusionem dont parle Biel en son langage. En vain. Et quand, après tous ses efforts, son âme anxieuse de certitude ne trouvait point d’apaisement ; quand la paix implorée, la paix libératrice ne descendait point en lui — on devine quel sentiment d’amère impuissance et de vrai désespoir le laissait prostré devant un Dieu muet — comme un prisonnier au pied d’un mur sans fin...

Peu à peu, dans sa tête qui s’égarait, d’autres pensées surgissaient. Les bonnes actions pour qu’elles fussent méritoires, Biel l’enseignait : il faut simplement, et il suffit, que Dieu les accepte. Était-ce donc que Dieu n’acceptait point ses bonnes actions à lui ? qu’il le rejetait au nombre des réprouvés par un décret incompréhensible et irrévocable de sa volonté ? Ah ! comment savoir et quelle atroce angoisse naissait d’un tel doute !

Ainsi la doctrine dont on le nourrissait, cette doctrine des gabriélistes issue de l’occamisme et dont Denifle le premier a marqué avec force et vigueur l’influence tenace et persistante sur Luther   — cette doctrine qui, tour à tour, exaltait le pouvoir de la volonté humaine puis l’humiliait en ricanant devant l’insondable Toute-Puissance de Dieu : elle ne tendait les forces d’espérance du moine que pour les mieux briser, et le laisser pantelant, dans l’impuissance tragique de sa débilité.

Auteur: Febvre Lucien

Info: Un destin : Martin Luther, PUF, 1968, pages 25 à 27

[ origines ] [ inspirateur ]

 

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déresponsabilisation industrielle

Un documentaire consacré aux désastres de Tchernobyl et de Fukushima a été présenté par Arte le 26 avril dernier, lançant une pernicieuse invitation à "vivre avec" la contamination radioactive, "défi" que prétendent, en ces jours sombres, relever les missionnaires de l’accommodation à la vie en zones contaminées par la radioactivité.



L’"Initiative de Dialogue pour la réhabilitation des conditions de vie après l’accident de Fukushima", présentée dans ce film, a été pilotée par de supposés, et néanmoins dangereux experts à l’œuvre à Tchernobyl hier, à Fukushima aujourd’hui, et en France demain.



[...] Un des principaux objectifs − atteint − de ces programmes, a été d’évincer du terrain de Tchernobyl les initiatives de protection sanitaire développées par des médecins et des physiciens après l’accident de la centrale, et de ne pas ralentir, en conséquence, la détérioration continue de la santé des populations, faute d’apporter une véritable prophylaxie.



Les faits de traîtrise de Gilles Hériard-Dubreuil à l’encontre des spécialistes de santé du Belarus ne semblent toutefois pas avoir dissuadé la députée européenne Europe Écologie-Les Verts Michèle Rivasi et l’avocate Corinne Lepage, "antinucléaires" déclarées, de collaborer avec ce dernier, de le nommer "secrétaire" et "expert qualifié" de leur association européenne Nuclear Transparency Watch, qu’elles ont créée et qu’elles président depuis 2013, appelant à rien moins qu’"une implication systématique des citoyens et de la société civile dans la préparation et la réponse aux situations d’urgence nucléaire en Europe", situations dont on aura suffisamment compris qu’elles ne tarderont plus à "survenir".



[...] 



Voici leurs cinq recettes, qui, pour être bien concoctées, n’en sont pas moins empoisonnées de cette mort qui enverra les gens moisir à plat.



1. Inciter chacun à rester vivre dans les zones contaminées, tout en "optimisant" son exposition à la radioactivité à proportion du coût économique et social de sa protection. Ainsi, maximisent-ils le nombre de personnes contraintes de suivre un protocole de contrôle et de mesure permettant de survivre dans la contamination à moindre coût. À défaut de les soigner.



2. Considérer la réalité radioactive comme un problème psychologique. Il s’agit de transformer une réalité scientifique et sociale – la contamination radioactive et ses dégâts –, en phénomène faisant l’objet d’un "ressenti" individuel, lui-même tributaire de l’état mental, ou psychologique, de chacun.



Le rapport à la radioactivité ne relèverait ainsi que d’une gestion personnalisée de l’angoisse. À dire d’experts, ce ne serait alors plus la situation de contamination qui serait irrationnelle, mais la perception qu’on en aurait.



3. Recourir à un jargon d’"authenticité", pontifiant et illusoirement concret dans lequel les appels à l’autonomie, à la dignité, à la communauté et à l’humain ne font qu’emprunter à la théologie de pâles reflets de transcendance, afin de mieux assujettir l’individu au fonctionnement, ici du tout radioactif, ailleurs du tout sécurisé.



Or, conforter les gens dans le délire selon lequel ils sont des sujets autonomes dans la "gestion de leur contamination", alors qu’ils savent bien qu’il leur est seulement impossible de ne pas se plier aux rapports techno-sociaux dont ils sont prisonniers, c’est vouer à l’échec toute possibilité d’échappée.



On conditionne les populations à la cogestion du désastre, en les encourageant à stimuler, et a minima à simuler, les réflexes et les comportements induits par les modifications du monde environnant. Cette recherche de l’adaptation parfaite passe par l’intériorisation de toutes les formes de pressions que la contamination radioactive fait naître.



4. Promouvoir la résilience, nouvel horizon de l’homme adaptable, censé ne compter que sur lui-même et ses insondables capacités de "rebond". Au nom d’un relativisme pragmatique, d’un primat de "la vie quotidienne", ces médiateurs du désastre insufflent la défiance, voire la décrédibilisation, des connaissances scientifiques les moins contestables, distillent le doute et propagent l’ignorance sur les effets sanitaires de l’exposition durable aux dites "faibles doses" de rayonnement ionisant, tout en déplorant "la montée de la défiance des populations vis-à-vis des différentes sortes d’autorités."



Résilience aidant, c’est à nous qu’ils assignent ensuite la tâche de recoller les morceaux de ce qu’ils contribuent à détruire. Ils préconisent de remplacer les normes de protection par de simples recommandations destinées à faciliter l’action des individus. "Les gens passent ainsi de la résignation à la créativité", s’enthousiasme Jacques Lochard.



Ainsi, chacun n’aurait plus qu’à mobiliser ses propres réserves de résistance à l’irrésistible et devenir "partie prenante" de sa propre irradiation. On reconnaît là le choix de l’État japonais : maintenir les populations sur place et diminuer d’autant, à court terme du moins, le coût d’un accident nucléaire.



5. Banaliser la radioactivité, cet obstacle que l’on apprend à contourner au quotidien dans la recherche de "solutions" immédiates, ponctuelles et individuelles. La radioactivité ne poserait alors problème que dans la seule mesure où les pratiques de vie des habitants les amèneraient à la "croiser" sur le chemin de l’école, du travail, ou de la promenade.



Au Japon, se mène désormais une chasse quotidienne aux hotspots de contamination radioactive, réduits à des incidents facilement résolus en grattant le sol et en stockant la terre dans des sacs poubelle, ou en installant des rideaux de plomb aux fenêtres des chambres d’enfants afin d’"éviter la contamination venant de la forêt."



[...] 



Ces aménageurs de la vie mutilée, relayés par Arte et tant d’autres représentants d’instances étatiques ou associatives, telles que Nuclear Transparency Watch de Mmes Rivasi et Lepage, et M. Hériard-Dubreuil, défendent haut et fort l’irrationalité selon laquelle il existerait un entre-deux de la contamination, où l’exposition au rayonnement ne serait dangereuse qu’en principe, mais s’avèrerait inoffensive dans la réalité. Véritable irrationalité, cette extrême violence du "vivre avec" est une insulte aux survivants.



Il s’agirait donc d’endiguer l’horreur de la contamination en la coulant dans les formes pseudo-rationnelles d’un "tous ensemble, nous vaincrons la radioactivité" ? C’est à quoi se vouent ces prêcheurs de soumission en expliquant, sans foi ni loi, qu’on peut échapper au danger en s’y confrontant, qu’on peut gratter la terre, mais en croisant les doigts.



[...] Proclamant qu’il faut "gérer" sa peur, ils prétendent réduire à néant toute possibilité de mise en cause de la déraison nucléaire, enjoignant à chacun d’en tirer au contraire parti, plutôt que de se hasarder à en rechercher les responsables.



Il fallait dire ce qu’est l’objectif de ces rédempteurs du "vivre avec", qui n’en paieront pas le prix, eux qui ont choisi d’emplir les hôpitaux de malades plutôt que de rendre inhabitées des terres inhabitables.

Auteur: Internet

Info: 3 août 2016, https://sciences-critiques.fr/tchernobyl-fukushima-les-amenageurs-de-la-vie-mutilee/

[ sacrifice différé ] [ minimisation des conséquences ] [ propagande cynique ]

 
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