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ouverture

Il y a une fissure dans ma vision, dans mon corps, dans mes délires, une fissure immuable, et la folie fera sans cesse des aller retour, aller retour. Les livres sont noyés, les pages se plissent ; le lit grince ; chaque pyramide de perfection est anéantie sous la poussée du sang. Les efforts que je fais pour délimiter, ciseler, séparer, simplifier, sont idiots. Je dois me laisser couler dans plusieurs directions à la fois. J’ai appris au moins une chose importante : réfléchir, oui, mais pas trop, de façon à ne pas dresser un barrage aux événements avant qu’ils ne se produisent, à ne pas gêner le mouvement de la vie par trop de critique préalable.

Auteur: Nin Anaïs

Info: Journal de l’Amour

[ éparpillement ]

 

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analyste-analysant

Evitons de lui faire immédiatement part de ce que nous avons deviné parfois très vite, ou de lui communiquer tout ce que nous croyons avoir deviné. Réfléchissons longuement avant de décider du moment où il conviendra de lui faire connaître nos constructions, attendons l’instant propice qui n’est pas toujours facile à déterminer. En règle générale, nous attendons, pour lui communiquer notre construction, nos explications, que le patient soit lui-même si prêt de les saisir qu’il ne lui reste plus qu’un pas à faire, celui de la synthèse décisive. Si nous procédions autrement, si nous lui jetions à la tête, avant qu’il y ait été préparé, nos interprétations, celles-ci resteraient inefficaces ou provoqueraient une violence explosion de résistance qui gênerait ou compromettrait la continuation du travail.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Dans "Abrégé de psychanalyse", trad. Anne Berman, Presses Universitaires de France, 1949, page 46

[ kaïros ] [ enquête policière ] [ énigme ]

 

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pollution

L’ennui avec la plupart des moyens de transport, songea-t-il, c’est quand certains ne valent pas le dérangement. Sur Terre (lorsque Terre il y avait encore, avant qu’on ne la démolisse pour laisser place à une nouvelle déviation hyperspatiale) le problème s’était posé avec les voitures : les inconvénients engendrés par l’extraction de quantités de pâte collante et noire du sous-sol où elle reposait tranquillement sans gêner personne, aux seules fins de la convertir en goudron pour recouvrir le terrain, le convertir en fumée pour emplir l’air et finalement déverser le reste dans l’océan, semblaient de loin dépasser l’avantage de pouvoir se rendre plus rapidement d’un point à un autre, surtout lorsque (conséquence prévisible de cet état de choses) votre point d’arrivée était devenu fort semblable à celui de départ, c’est-à-dire : recouvert de goudron, rempli de fumée, et cruellement dépourvu de poisson.

Auteur: Adams Douglas

Info: H2G2 - Le Dernier Restaurant avant la Fin du Monde

[ bêtise ] [ imprévoyance ] [ pétrole ]

 
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remaniement stylistique

Il y a une petite tragédie qui se joue en ce moment à propos de Women, et je préférerais que tu gardes le silence le plus total là-dessus. Comme tu le sais, j’ai l’habitude de dire à John de ne pas se gêner et de corriger mes fautes de grammaire, mais cette fois il est allé trop loin. J’aurais dû lire les épreuves du bouquin plus attentivement mais je suis paresseux. Mais lorsque le bouquin est sorti je l’ai lu. Merde mon pote ! Je crois qu’il pense que je ne sais pas écrire. Il a balancé des merdes dedans. Par exemple j’aime bien dire "dit-il" ou "dit-elle" et ça me suffit amplement. Mais il en a remplacé un paquet par des "rétorqua-t-il", "dit-il joyeusement", "Je haussai les épaules", "elle avait l’air vexée". Et ça ne s’arrête plus, merde. Il y a même un endroit dans le livre où une femme avait une robe verte et il lui a mis une robe bleue. Au moins il ne lui a pas changé les organes sexuels !

Auteur: Bukowski Charles

Info: Lettre à Gerard Locklin, 15 mars 1979

[ éditeur-écrivain ] [ lissage éditorial ]

 

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tennis business

Accusé de faire beaucoup trop de " fric ", Roger Federer est dans une sacrée tourmente

Quand l’information a été divulguée fin janvier par le magazine suisse Ktipp, elle n’a pas forcément fait le tour du monde. Il faut dire que l’on attaque pas le Maestro, considéré dans son pays comme le roi du tennis mais aussi du business. 

C’est tout cela qu’évoque très bien nos confrères du Parisien qui ont consacré un bel article concernant ce que l’on peut appeler l’affaire " On ", du nom de la marque de chaussures de sport dont Roger Federer est actionnaire.

En effet, il semblerait que les dirigeants de On, qui font fabriquer les chaussures de tennis de Federer au Vietnam, ne se gêneraient pas au niveau de la marge. Selon Ktipp, elles seraient achetées 18,89 euros chez le fournisseur pour être vendues près de 200 euros. 

Une marge considérable qui a ému quelques ONG et qui serait bien plus élevée que ce qui se pratique en général même chez les géants comme Nike ou Adidas qui sont connus pour avoir la main lourde.

Certains observateurs sont donc surpris par cette stratégie un peu trop lucrative menée par Roger Federer et ses associés. Les autres, ceux qui connaissent un peu mieux le Suisse, n’ont pas sauté de leur chaise. Business is business…

De son côté, la marque a décidé de ne pas commenter pour l’instant cette affaire.



 



 

Auteur: Internet

Info: https://www.welovetennis.fr/ - Jean Muller,  mercredi 14 février

[ profit exagéré ]

 

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vieillards

Pourtant, quand il réfléchissait à sa condition actuelle, le vieil homme était saisi du sentiment d'avoir été injustement condamné à la réclusion à perpétuité, pour une chose sur laquelle il n'avait aucune emprise. Le crime qu'il expiait ici était simplement d'être devenu vieux et improductif, aussi obsolète que le Minitel, aussi utile qu'un flacon de shampoing dans une prise d'otages. Ce que la communauté attendait des encombrants de sa génération, c'était qu'ils eussent la sagesse élémentaire de se retirer de la circulation et de se mettre sur une voie de garage, où ils ne gêneraient personne... De se ranger pudiquement et sans esclandre, si ce n’était pas trop leur demander et tant qu’ils conservaient un peu de dignité, à l’abri des regards. On épargnait le triste spectacle des vieux aux plus jeunes, comme on regroupait autrefois les ladres dans des léproseries. Ils étaient la poussière qu'on dissimulait sous le tapis, les scories et l'écume laissées sur le bord du monde par une société en ébullition permanente. Telle était la norme et, depuis toujours, Martial se pliait à ce que toutes les normes, les règles, les lois, exigeaient de lui. Martial Chaînard aurait été du genre à continuer de traverser les routes par les passages piétons après une apocalypse nucléaire. Il était comme ça. C'était quelqu'un d’accommodant, la docilité incarnée, et il avait longtemps cru qu'on l'appréciait pour cela, pour sa faculté à épouser la forme des moules, à se fondre dans le décor sans faire de vagues.

Auteur: Soulier Frédéric

Info: Epilogue

[ rejetés ] [ exclus ]

 

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moi-sujet

Au premier instant de répit, dès que je n'ai plus besoin de surveiller ma marche, pour éviter des véhicules ou ne pas gêner les passants, dès que je n'ai plus à parler au premier venu, ni la pénible obligation de franchir une porte toute proche - alors je pars de nouveau sur les eaux du rêve, comme un bateau de papier à bouts pointus, et je retourne une nouvelle fois à l'illusion languissante qui avait bercé ma vague conscience du matin naissant, au son des carrioles qui légumisent.

C'est alors, au beau milieu de la vie, que le rêve déploie ses vastes cinémas. Je descends une rue irréelle de la Ville Basse, et la réalité des vies qui n'existent pas m'enveloppe tendrement le front d'un chiffon blanc de fausses réminiscences. Je suis navigateur, sur une mer ignorée de moi-même. J'ai triomphé de tout, là où je ne suis jamais allé. Et c'est une brise nouvelle que cette somnolence dans laquelle je peux avancer, penché en avant pour cette marche sur l'impossible.

Chacun de nous a son propre alcool. Je trouve assez d'alcool dans le fait d'exister. Ivre de me sentir, j'erre et marche bien droit. Si c'est l'heure, je reviens à mon bureau, comme tout le monde. Si ce n'est pas l'heure encore, je vais jusqu'au fleuve pour regarder le fleuve, comme tout le monde. Je suis pareil. Et derrière tout cela, il y a mon ciel, où je me constelle en cachette et où je possède mon infini.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info: Le livre de l'intranquillité

[ refuge intérieur ]

 

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intellectualisme non pragmatique

Barthes n'a évidemment pas tort d'opposer Voltaire, Pascal et Rousseau : il est lui-même auprès de ces derniers. Du côté du signe, de l'expérience intime, de la nostalgie de l'être ; et le travail du langage est chargé de réaliser les desseins de l'histoire. Le marxisme vient culminer et s'abolir dans le dévoilement heideggerien. On ne peut s'étonner si les tenants de cette philosophie supportent mal ce que l'on désignerait, par opposition à l'ontologie, comme philosophie de la vérité. Voltaire est essentiellement du côté de l'énoncé, de la proposition, du vrai, non du côté des mots et de la sémantique. La philosophie du sens ou la philosophie se moque du langage se moque de la science et se soucie de l'être. La philosophie de la vérité se moque de l'être et se préoccupe de la science. L'une est sans doute capable de penser la littérature, de ne pas préférer à tout le texte. Une semblable dichotomie est, à coup sûr, grossière. Mais Barthes commentant Voltaire en vérifie les alternatives principales. Si la vérité est, comme le veut Poe, dans la consistance, (celui qui ne supporte pas la consistance se ferme à une éthique de la vérité, il lâche le mot, la proposition, l'idée, dès qu'ils "prennent" et passent à l'état de solide, de "stéréotypé"). Ce n'est pas Voltaire que gênerait le stéréotype de la vérité. Il la répéterait plutôt à la manière d'un slogan. On ne saurait abuser du langage en ce sens. Aussi l'anathème dont il frappe Voltaire engage-t'il Barthes gravement, et avec Barthes notre époque ostensiblement anti-voltairienne, parfois jusqu'à la caricature. Il vaut mieux ne pas lire Candide, de peur de se reconnaître en Pangloss.

Auteur: Dagen Jean

Info: En réaction, 20 ans plus tard, aux commentaires de Barthes dans sa préface au "Romans et contes" de Voltaire. https://www.persee.fr/doc/litts_0563-9751_1984_num_9_1_1273

[ vacherie ] [ prestige du parisianisme ] [ France ]

 

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pré-singularité

Pour échapper aux régulations sur l’IA, une entreprise veut créer un État en pleine mer

Une entreprise veut créer des plateformes en mer pour entraîner des intelligences artificielles, sans respecter aucune loi. La société veut que ces plateformes soient habitées par des mercenaires et des militaires et qu’elles deviennent des États-nations indépendants.

Vous n’aimez pas les régulations ? Allez vous installer dans les eaux internationales ! Si l’idée peut paraître farfelue, c’est cependant ce que propose, très sérieusement, l’entreprise Del Complex. Cette dernière a présenté le 30 octobre 2023 dans un long thread sur X (anciennement Twitter) un gigantesque projet, censé répondre aux problèmes de l’humanité : le BlueSea Fronter Compute Cluster (ou BSFCC).

Sous couvert de sécurité, le décret présidentiel sur l’IA de Biden et l’IA Act de l’Union européenne visent à centraliser leur pouvoir ", assène Del Complex dès l’introduction de son message. " La solution se trouve en mer. Les BSFCC ne sont pas seulement des plateformes informatiques basées sur des barges, mais des États-nations souverains. " Si le projet semble tellement démesuré qu’il pourrait prêter à sourire, il pourrait bien voir le jour et parvenir, comme il le veut, à échapper à toutes régulations internationales.

Des plateformes installées en eaux internationales pour entraîner des IA sans limites

Del Complex se vante d’être une " société de réalité alternative ", spécialisée dans l’intelligence artificielle, dont le but est de développer une IA générale qui pourrait être implantée dans le cerveau humain grâce à des prothèses neuronales. Pour parvenir à ce but, l’entreprise a besoin de beaucoup de puissance de calcul, mais surtout, d’une législation qui lui permettrait de faire ce qu’elle veut — ce qui n’est pas vraiment le cas.

Del Complex explique, dans la page dédiée au projet, être farouchement opposé aux tentatives actuelles de régulation de l’IA par différents états. Selon l’entreprise, elles " ralentissent le rythme de l’innovation ", et elles " interfèrent également avec le don cosmique de l’humanité " qu’est l’IA.

Alors, pour échapper à " la réglementation draconienne de l’IA ", Del Complex a imaginé son plan de BSFCC. " Libérés de toute surveillance réglementaire, les BlueSea Frontier Compute Clusters offrent des opportunités inégalées pour former et déployer la prochaine génération de modèles d’IA à grande échelle. "

Concrètement, Del Complex veut déployer des plateformes maritimes, équipées de nombreux ordinateurs et d’une énorme puissance de calcul, dans les eaux internationales. Installées à cet endroit, les plateformes n’auraient pas besoin de respecter les différentes réglementations sur l’IA, selon Del Complex. L’entreprise indique ainsi qu’elles ne seront " pas gênées par les règles juridiques conventionnelles ", et que les plateformes pourront " accéder à des documents autrement restreints, qu’il s’agisse de documents protégés par des droits d’auteur, de documents d’entreprise ou de documents confidentiels ".

Les plateformes seraient, d’après l’entreprise, libres de faire ce qu’elles veulent — et elles pourraient également devenir des États souverains, car elles posséderaient un territoire défini, un gouvernement (on imagine que ce gouvernement serait de fait l’entreprise), une population permanente et la capacité à entrer en relation avec d’autres États. Dans les faits, on ne sait pas si les plateformes pourraient complètement être considérées comme des entités à part entière, étant donné que Del Complex est une entreprise américaine, et que les plateformes sont des navires, qui doivent battre pavillon (être affilié à un pays).

Ces considérations ne semblent cependant pas gêner Del Complex. L’entreprise précise aussi que ces plateformes / États-nations seraient habitées par " une population permanente de militaires venant de nations alliées, et de personnels de Xio Sky Security Solutions ", une entreprise de mercenaires.

Des plateformes équipées de laboratoires pour entraîner des intelligences artificielles sur des données habituellement interdites, le tout pour créer des implants neuronaux, naviguant dans les eaux internationales et habitées par des militaires et des mercenaires… tout cela vous parait trop gros pour être vrai ? Pourtant, c’est exactement la dystopie que Del Complex veut construire.

L’entreprise ne voit cependant pas le problème. " Alors que certaines entités internationales pourraient percevoir le BSFCC comme une méthode pour contourner les lois, notre mission est ancrée dans le progrès et l’innovation ", explique-t-elle. " Alors que le monde délibère sur l’avenir de la réglementation de l’IA, Del Complex invite les visionnaires à embarquer pour un voyage vers la prochaine frontière de l’innovation de l’IA, avec le BlueSea Frontier Compute Cluster. " Reste à voir si le projet verra vraiment le jour — et si les organisations internationales laisseront vraiment de nouveaux États-nations peuplés de militaires se créer au milieu de l’océan.

Auteur: Internet

Info: https://www.numerama.com/ Aurore Gayte, novembre 2023

[ incubateurs ] [ libertariens ]

 

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homme-animal

La signification des meuglements des vaches, et autres histoires animales surprenantes
Vous pensez bien connaître les animaux? Pourtant les scientifiques qui les étudient leur découvrent régulièrement de nouvelles habiletés, intelligences et savoir-être étonnants.

C'est ce que raconte la journaliste spécialiste des sciences Aline Richard Zivohlava dans son ouvrage "Dans la peau des bêtes", paru en mai aux éditions Plon. Elle se glisse dans la peau de différents animaux pour un récit à la première personne. Nous en publions ci-dessous des extraits. Le titre et les intertitres sont de la rédaction de Slate.

Les corbeaux clairvoyants
L’histoire des Corneilles noires de la ville de Sendai, au Japon, a fait le tour du monde. À des branches de noyer plantés le long des routes pendaient de savoureuses noix, mais elles étaient, dans leurs coques vertes, inaccessibles à nos becs. C’est alors que mes congénères ont appris le code de la route. Au feu rouge, l’oiseau dépose sa noix devant la voiture, qui l’écrase au feu vert, et dont les fragments sont récupérés au feu rouge suivant. Malin, non? Et même carrément intelligent.

Les recherches scientifiques de ces dernières années ont révélé des capacités insoupçonnées chez les corvidés, en particulier dans le domaine de la cognition. Certains de nos savoir-faire avaient pourtant été remarqués dans le passé, mais vous n’aviez pas su les analyser… Vous rappelez-vous d’Ésope, le fabuliste qui a commis "Le Corbeau et le Renard", que nous critiquions tout à l’heure? Nous lui avons volontiers pardonné son écart puisqu’il a rendu hommage à l’ingéniosité de la corneille dans la comptine suivante: "La Corneille ayant soif, trouva par hasard une cruche où il y avait un peu d’eau; mais comme la cruche était trop profonde, elle n’y pouvait atteindre pour se désaltérer. Elle essaya d’abord de rompre la cruche avec son bec; mais n’en pouvant venir à bout, elle s’avisa d’y jeter plusieurs petits cailloux, qui firent monter l’eau jusqu’au bord de la cruche. Alors elle but tout à son aise."

Deux douzaines de siècles plus tard, en 2014, cette fable a été reproduite dans un laboratoire de l’université d’Auckland, en Nouvelle-Zélande. Des chercheurs ont voulu savoir si différents corvidés –Corbeaux calédoniens, Corbeaux freux et Geais des chênes– se montraient aussi clairvoyants que l’oiseau du fabuliste. Expérience réussie: soit deux tubes de verre, un large et un étroit, reliés entre eux par un mécanisme de vases communicants et à moitié remplis d’eau. Dans le premier, un morceau de liège flotte, agrémenté d’un morceau de viande. Tube trop étroit pour y plonger le bec. Les oiseaux ont dû trouver un moyen d’atteindre la nourriture: ils ont jeté des petits cailloux dans le tube large ne contenant pas le morceau de viande, pour faire monter l’eau dans le second tube étroit, et récupérer la récompense. C’est ce que l’on appelle effectuer une relation de cause à effet. Incroyable, quand on sait que, soumis au même test, les petits humains ne le réussissent que vers l’âge de 7 ans.

Les corbeaux sont capables de se priver dans l’immédiat pour une meilleure récompense dans le futur, une opération cognitive complexe.

La conclusion semble couler de source: des corbeaux aussi intelligents que vous, à l’âge de raison des petits humains! Mais au risque de décevoir mes congénères, je n’irai pas jusque-là. Rien ne prouve en effet que les mécanismes mentaux mis en jeu soient les mêmes pour nos deux espèces. Et la faculté spontanée de raisonner dans l’abstrait par le biais d’un processus d’association n’est pas forcément équivalente à ce que vous, humains, entendez généralement par "intelligence".

Il fallait en savoir plus. Les scientifiques qui nous étudient ont d’abord observé nos capacités cognitives liées à la vie en société. Tout comme vous, les corvidés activent leurs neurones pour améliorer leur cadre de vie, interagir avec leurs semblables, obtenir le meilleur pour eux-mêmes et leurs proches… La gestion de la nourriture est un enjeu majeur pour tout être vivant, et, pour nous autres corbeaux, l’occasion d’exercer notre mémoire et même de se projeter dans l’avenir. Des chercheurs britanniques ont par exemple montré que des geais, qui ont l’habitude de cacher leur nourriture, étaient capables de "classer" leurs aliments en fonction du temps écoulé avant la consommation: ils déterraient d’abord les caches de vers de terre, très appréciés mais périssables, avant celles des cacahuètes, moins goûteuses mais plus durables.

Les corbeaux sont aussi capables de se priver dans l’immédiat pour une meilleure récompense dans le futur, une opération cognitive complexe que vous pensiez réservée aux humains et aux grands singes. Une expérience menée en 2017 à l’université de Lund, en Suède, sur des corbeaux dressés consistait à leur faire choisir une friandise à dévorer tout de suite, ou bien un outil permettant d’ouvrir une boîte contenant une friandise plus grosse, au prix de quinze minutes d’efforts. La plupart des corbeaux ont choisi l’outil. Cela suggère la capacité de contrôle de soi et celle d’anticipation.

S’alimenter, c’est aussi coopérer mais parfois se fâcher quand un comportement est jugé incorrect. Dans une expérimentation menée dans un laboratoire à Vienne, des grands corbeaux ont su s’allier en tirant de concert deux bouts de ficelle pour récupérer deux parts de fromage: si l’un des oiseaux n’avait pas joué le jeu, aucun des deux n’aurait pu en profiter. Mais, dans une autre série d’expériences, il est arrivé qu’un des oiseaux ruse pour s’approprier tout le fromage. L’autre a alors refusé de coopérer plus avant avec le tricheur.

Les poulpes farceurs
Ces dernières années, nombre de nos capacités cognitives ont été découvertes par les scientifiques qui nous observent. Par exemple, notre dextérité au maniement des outils, faculté que l’on pensait réservée aux animaux "supérieurs". En 2009, quatre pieuvres de l’espèce Amphioctopus marginatus, habitantes des eaux chaudes de l’ouest du Pacifique, ont été filmées en train de manipuler des coquilles de noix de coco pour s’en faire une armure de protection contre les prédateurs, puis se balader, ainsi équipées, sur le plancher marin. La vidéo a intéressé les chercheurs…

Et enchanté le grand public: sans être encore aussi populaires que ceux consacrés aux chatons mignons, les films de poulpes malins font les beaux jours de votre Internet. Sur YouTube, 3 millions de vidéos sont disponibles! C’est ainsi que les humains ont pu découvrir les talents d’Inky, notre maître-poulpe de l’évasion. Cantonné dans son aquarium de Nouvelle-Zélande, Inky a profité de l’inattention d’un gardien qui n’avait pas bien fermé son réceptacle pour déverrouiller le dispositif, glisser au sol, et emprunter un tuyau d’un diamètre de 15 centimètres (!) se déversant dans l’océan Pacifique.

Stratégie, adaptation, innovation… Autant de qualités qui marquent, pour le moins, une belle intelligence des situations.Nous sommes aussi capables d’apprendre par observation et de manipuler des règles logiques: facultés d’autant plus étonnantes que nous n’avons pas eu de parents pour nous les enseigner. Des chercheurs ont installé des pieuvres devant un labyrinthe, elles ont su s’orienter en observant des congénères, puis en fonction d’indices visuels mis à leur disposition. Dans une autre expérience, on nous a placées devant cinq portes fermées, chacune marquée d’un symbole. Il fallait trouver celle donnant accès à un crabe, friandise que nous apprécions parmi toutes. Nous avons réussi à repérer la bonne porte, et appris à reconnaître son symbole même quand les scientifiques le changeaient de place. Et nous sommes capables de retenir plusieurs jours ces informations apprises, signe d’une bonne mémoire.

De même, nous jouons: un comportement évolué, peu commun chez les invertébrés. Sarah Zylinski, biologiste à l’université de Leeds, au Royaume-Uni, a observé un poulpe de l’espèce Octopus bimaculoides se livrer au jeu du chat et de la souris avec un crabe. En pleine mer, plusieurs plongeurs qui nous observaient ont eu la surprise de voir un tentacule taquin tenter de leur retirer leur masque à oxygène… En captivité, nous jonglons dans l’aquarium avec les petits cubes en plastique que vous nous envoyez. Et ne croyez pas que nous ne savons pas qui vous êtes.

En 2010, à l’aquarium de Seattle, aux États-Unis, deux membres de l’équipe soignante se sont livrés au jeu bien connu du "bad cop-good cop": l’un nous nourrissait avec douceur, l’autre nous touchait avec un bâton piquant. Après deux semaines, racontent les scientifiques qui ont organisé cette expérience, les huit pieuvres de l’aquarium se comportaient différemment avec l’un et l’autre, habillé pourtant du même uniforme.

En captivité, nous savons parfaitement vous faire passer des messages. La chercheuse de Leeds rapporte que des seiches, impatientes d’être nourries, aspergeaient d’eau leur gardien s’il tardait. Et, dans un parc zoologique en Allemagne, un poulpe est monté sur le bord de son aquarium pour inonder un spot dont la lumière devait le gêner.

La science n’a pas fini de dévoiler tout ce qu’il y a d’extraordinaire en nous. En avril 2017, un article scientifique, fort technique puisqu’il a été publié dans la revue Cell (dédiée à la biologie moléculaire et cellulaire), a suggéré que nous évoluions différemment de presque tous les êtres vivants de la planète: certains d’entre nous sont en effet capables de modifier à plusieurs reprises leur séquence d’ARN (acide ribonucléique, l’autre "molécule du vivant" avec l’ADN) et de l’éditer, pour mieux s’adapter à notre environnement. S’ensuivent, par exemple, des modifications de notre cerveau pour pouvoir prospérer dans des eaux aux températures différentes. Bien pratique en cette période de changements climatiques! Ludovic vous l’avait bien dit: nous sommes de véritables extraterrestres du fond des mers.

Les vaches communiquantes
La vache a ses sens en éveil. À l’inverse de ce que certains stupides imaginent, un regard bovin est un regard expert: une vision à 330 degrés, sans bouger la tête, qu’en dites-vous? Il est vrai que nous sommes plutôt myopes, et distinguons bien mieux les tendres pousses dans le pré qu’un véhicule arrivant au loin. Mais notre ouïe très fine y pallie. Les vaches distinguent les ultrasons (jusqu’à 35.000 hertz), tout comme les basses fréquences et les très faibles volumes sonores. Et puis, il y a notre odorat. C’est notre sens premier, il nous distingue et organise notre vie sociale. Les odeurs disent notre âge, nos besoins sexuels, notre place dans la hiérarchie du troupeau, notre niveau de stress. On se renifle et on se lèche entre vaches, et on approche nos mufles des humains à l’approche: il s’agit de flairer l’éleveur, le vétérinaire que l’on connaît, et de s’inquiéter de la présence d’un intrus à l’odeur inconnue.

En 2015, en Suisse, des chercheurs de l’École polytechnique de Zurich se sont livrés à une analyse acoustique de troupeaux pour tenter de comprendre ce que les vaches se disent. Lors des naissances de nos veaux et cela durant trois à quatre semaines, nous parlons à nos petits le mufle à moitié fermé pour produire un son grave. Et à l’inverse, quand on nous les retire, nous produisons un meuglement dans les fréquences hautes. De même, les veaux nous appellent plutôt dans les aigus.

De l’avis des scientifiques et des professionnels, fermiers et éleveurs qui nous côtoient, notre cri d’espèce, émis jusqu’à une cinquantaine de fois dans la journée, exprime une grande variété de situations et d’états: faim, soif, chaud, froid, souffrance, désir, appels…

Quant à vous, on dirait que nos "meuh" vous fascinent. Vous tentez parfois de nous imiter, bizarre! des humains qui singent les vaches! Mais vous n’êtes même pas fichus de vous entendre sur le son à produire… "Meuh" en France ; "moo" chez les Anglo-Saxons; "muh" pour les Allemands et les Danois; et "mō" du côté du Japon. Un plaisantin est même allé jusqu’à fabriquer ce qu’il a appelé une "boîte à meuh" pour faire rire ses semblables, on se demande vraiment pourquoi. Laquelle boîte a au moins eu une utilité: le docteur Lucien Moatti l’a calibrée pour le dépistage néonatal de la surdité des bébés humains. Si l’enfant tourne la tête au son de la vache, c’est qu’il entend bien…

Auteur: Internet

Info: Slate, Aline Richard, 30 mai 2019

[ anecdotes ]

 

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