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jeu

J’ai rencontré les âges clandestins il y a quelques années, de façon fortuite, à la plage, assis sur le sable.

Devant moi, un petit garçon de six ans environ construit avec application un château sous la surveillance flottante de son père (certains pères se reconnaîtront dans cette expérience).

Un second enfant s’approche timidement, ni trop près ni trop loin. Il aimerait manifestement participer, mais il n’ose pas. Un second papa s’approche et soumet au père du premier le projet que leurs deux enfants forment une équipe de constructeurs. Ce qui se met en place assez naturellement, avec un outillage conséquent et efficace : des pelles et des seaux.

Les deux pères regardent avec tendresse leurs deux bambins et, rapidement, comme un seul homme, ils se mettent à aider leurs enfants. Après quelques minutes d’un travail d’équipe assez coordonné, de façon progressive les deux enfants, dans une belle synchronicité, s’éloignent du chantier pour aller jouer au bord de l’eau.

Le plus remarquable (certains pères se reconnaîtront peut être dans cette expérience) est qu’aucun des deux adultes ne remarque leur départ, trop occupés à poursuivre les travaux : ils creusent des fossés, érigent des murailles, ils se congratulent et s’encouragent. Et cela dure suffisamment longtemps pour qu’une de leurs épouses vienne interrompre le chantier médiéval.

Je me rappelle le regard d’un des papas allant de son "associé" à sa femme, puis au château, puis à sa femme, puis… à son fils (réassociation ?). Depuis cette expérience, j’ai observé encore et encore, dans la rue, dans le métro (territoire au champ d’observation infini et sans cesse renouvelé), et bien sûr en séance avec mes patients. Progressivement, j’ai appris à communiquer avec ces âges clandestins.

Auteur: Dubos Bruno

Info: Extrait de l'article "Les âges clandestins"

[ retour à l'enfance ] [ plaisir retrouvé ] [ rapports humains ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

société

LA LOYAUTÉ, JE SAIS, C'ÉTAIT IL Y A LONGTEMPS, MAIS VOUS EN SOUVENEZ-VOUS ?
L'article de Der Spiegel révélant l'espionnage à grande échelle par les États-Unis des organes de décision des puissances européennes, leurs alliés les plus proches et les plus fidèles, rappelle étrangement l'attitude qui avait été celle de la banque d'investissement Goldman Sachs en 2008, tirant parti de la confiance que lui accordaient ses meilleurs clients pour leur vendre les produits financiers les plus avariés dont elle cherchait à se débarrasser.
La parole donnée, et la parole respectée, l'identification d'une personne - ou en l'occurrence, d'une nation - à ses engagements, la loyauté vis-à-vis de ses amis, et dans la mesure du possible vis-à-vis de chacun, sont indispensables à la vie en société : sans elles, c'est bien simple : le tissu social s'effrite, puis s'effondre sans espoir de retour.
Il est bien tard sans doute, mais il existe encore une chance ténue de restaurer la confiance trahie : interrompre immédiatement les pratiques condamnables, punir les responsables, et présenter des excuses sincères.
Lorsque Bradley Manning révéla le contenu des câbles du Département d'État expliquant aux diplomates américains que l'espionnage de la nation hôte faisait désormais partie de leurs attributions et de leurs devoirs, la traduction du soldat devant une cour martiale était loin de constituer la réponse appropriée. S'époumoner avec une véhémence allant toujours crescendo contre la traîtrise supposée du lanceur d'alerte Edward Snowden, constituerait une fois de plus une réponse parfaitement inappropriée et ferait, cette fois, désespérer de la capacité-même de cette nation à s'amender. Les pays européens trahis dans leur confiance devraient en tirer toutes les conséquences. Les justifications avancées seraient bien entendu qu'il existe des ennemis pires encore que de tels amis, mais la capacité-même à vivre en société, dont la parole donnée et la loyauté sont les piliers, constitue le dernier bastion : celui qui ne peut à aucun prix tomber.

Auteur: Jorion Paul

Info: 29 Juin 2013

[ guerre ] [ égoïsme ]

 

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instant de la mort

Des chercheurs ont découvert les mécanismes derrière la mystérieuse " onde de la mort " dans le cerveau, un phénomène survenant après une privation d'oxygène. Cette découverte importante ouvre de nouvelles perspectives pour la compréhension de la mort neuronale et de la réanimation.

En explorant les profondeurs de l'activité cérébrale au moment de la mort, des scientifiques de l'Institut du Cerveau ont fait une découverte significative. Pour la première fois, ils ont observé une onde spécifique, surnommée " l'onde de la mort ". Celle-ci survient lors d'une interruption prolongée de l'oxygénation du cerveau. Cet événement, loin de marquer une fin absolue, révèle en réalité une complexité insoupçonnée dans la dynamique neuronale entre la vie et la mort. Les résultats ont été publiés dans Neurobiology of Disease

La formation et le parcours de l'onde de la mort

Il est impossible de déterminer l'heure précise, à la seconde près, d'un décès. C'est un processus complexe, qui dure plusieurs minutes. Il existe des cas où même lorsque le processus a démarré, celui-ci peut s'interrompre et la personne revenir à la vie. 

L'arrêt de l'oxygénation du cerveau déclenche une série d'événements électriques. Initialement, une réduction drastique de l'activité électrique se produit, plongeant le cortex cérébral dans un silence électrique. Cependant, ce silence est brusquement interrompu par une onde de grande amplitude, initiée dans les couches profondes du cortex, comme un sursaut d'activité cérébrale. C'est sûrement cette onde que décrivent les personnes ayant fait une expérience de mort imminente, c'est-à-dire les personnes ayant survécu à un arrêt cardiorespiratoire. 

Cette " onde de la mort " se propage telle une vague à travers le cortex, portant en elle le potentiel d'une cessation totale de l'activité cérébrale. Mais, contrairement à ce que son nom suggère, cette onde ne signifie pas nécessairement une fin irréversible. Si le cerveau est réoxygéné à temps, une " onde de la réanimation " peut suivre, marquant le début d'une lente mais possible récupération des fonctions cérébrales.

(photo illustration) Et si l'onde de la mort expliquait les expériences de mort imminente. 

Quelles sont les implications de cette découverte ? 

Cette étude révèle que la mort neuronale est comme un processus graduel, potentiellement réversible, plutôt qu'un instant définitif. Elle met en lumière le rôle crucial des neurones pyramidaux de la couche 5 du néocortex, dont la dépolarisation marque le début de l'onde de la mort. 

Cette compréhension affine notre perception de la mort cérébrale, nous faisant comprendre qu'un électroencéphalogramme plat n'est pas forcément synonyme de mort définitive. Ces découvertes suggèrent que, sous certaines conditions, il est possible de restaurer les fonctions cérébrales, offrant ainsi de nouvelles voies pour le développement de traitements neuroprotecteurs. 

Ces avancées pourraient un jour transformer les pratiques de réanimation en cas d'arrêt cardiorespiratoire, réduisant les risques de séquelles neurologiques et ouvrant la porte à des interventions plus ciblées pour préserver les fonctions cérébrales essentielles.



 

Auteur: Internet

Info: https://www.futura-sciences.com/ janvier 2024

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

homme-animal

Langage des dauphins : ils parlent comme nous !
Après avoir analysé les échanges entre deux dauphins captifs, un chercheur russe affirme que les sons produits correspondent à des mots, assemblés en phrase. Et quand l'un des animaux parle, l'autre écoute sans l'interrompre.
Yana et Yasha, elle et lui, vivent dans un bassin de la réserve marine Karadag, à Théodosie, en Crimée, au bord de la mer Noire. Ce sont de "grands dauphins", Tursiops truncatus de leur nom latin, l'espèce qui a connu son heure de gloire à la fin des années 1960 grâce aux aventures de Flipper. Vyacheslav A. Ryabov, qui travaille sur la communication de ces cétacés depuis plusieurs années, vient de publier dans la revue St. Petersburg Polytechnical University Journal : Physics and Mathematics les résultats des analyses de leurs échanges sonores, ou plutôt ultrasonores.
La première originalité de ce travail est en effet de mesurer les échanges d'ultrasons à fréquences très élevées, jusqu'à plus de 200 kHz, bien au-delà de celles entendues par l'oreille humaine et loin aussi des gammes les plus fréquemment étudiées par les recherches sur la communication des cétacés et qui se situent plutôt vers les 20 kHz.
En élargissant ainsi la bande des fréquences analysées, Vyacheslav A. Ryabov a pu distinguer plusieurs types de productions sonores sur toute la gamme perceptible par les dauphins, de 6 ou 15 kHz jusqu'à 160 à 200 kHz. Il pense parvenir à faire la différence entre les émissions utilisées pour l'écholocation et celles servant à la communication, même quand les bandes de fréquences sont identiques. Ces émissions sont formées de séries d'impulsions, regroupées de façon complexe, par paquets et même par groupes de paquets. Ryabov a repéré des "impulsions non cohérentes", séparées par des délais bien plus courts (0,5 à 10 ms) que celles de l'écholocation.
Le langage des dauphins ressemblerait à celui des humains
Selon lui, ces impulsions seraient comme nos nos mots car elles diffèrent les unes des autres par leurs caractéristiques (amplitude, fréquence et délai entre chacune). Certains paquets, eux, ressemblent à des phrases, évoquant une syntaxe. L'analyse de ces séries montre, explique-t-il, une similitude avec le langage humain.
De plus, ces émissions sont produites lors d'interactions entre les deux dauphins, et non lors de la recherche de nourriture, et même quand ils sont tous deux immobiles. De plus, le chercheur note que ces productions sonores entre Yasha et Yana ne se chevauchent jamais. Comme si l'un écoutait l'autre poliment, sans lui couper la parole, et lui répondait ensuite. Pour communiquer, cependant, les dauphins utilisent une large gamme sonore et leurs phonèmes se distinguent par leurs caractéristiques spectrales.
Si l'hypothèse est vraie, l'étude du langage des dauphins est donc techniquement difficile. Elle exigerait des hydrophones sophistiqués, enregistrant sur un large spectre et analysant finement toutes les caractéristiques, à commencer par les minuscules variations de pression engendrées, et ce avec une résolution temporelle excellente, en deçà de la milliseconde. Voilà pourquoi, sans doute, malgré la certitude et de nombreuses preuves que les cétacés communiquent beaucoup entre eux (par exemple l'observation, récente, qu'ils semblent s'appeler par leur nom), nous ne connaissons aucun mot de leur langage...

Auteur: Goudet Jean-Luc Journaliste

Info: sept. 2016

[ zoologie ] [ éthologie ]

 

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final sans fin

Mesdames et messieurs nous avons été absolument ravis de passer ce bon moment avec vous et j'ai donc le plaisir de vous présenter à la guitare : Monsieur Piotr Idriss Lee... Au saxophone nous avons Mme Franzisca Brel. Les arrangement sont de Jean-Philippe Erbien (qui a remplacé au pied levé Jacques Edouard de la Petite Bouillotte, qui s'est fracturé le poignet et à qui nous souhautons un prompt rétablissement... )

À la section rythmique vous aurez reconnu notre bassiste aimé l'inspecteur Missaire... ainsi que notre batteur le comissaire Pecteur. Merci mille fois d'être venu si nombreux... toute notre reconnaissance aussi au staff technique, au personnel du bar, de la billetterie et des vestiaires... bon retour à la maison à tous.... portez-vous bien... soyez prudent sur la route... que la paix soit avec vous... et à bientôt allez ciao tout le monde...

C'est fini, on arrive au bout... oui, c'est l'épilogue... le point final... la conclusion... le terme. Oui, nous touchons au but... c'est le dénouement, la mort du spectacle... nous sommes à destination... voici la chute, la clôture, la coda, le couronnement, l'ultime déclin, le crépuscule, le terminus, l'extinction, c'est une cessation, une finition, c'est l'accomplissement, l'arrêt, la dernière borne, il nous faut clore, clôturer, conclure, couronner ce sujet, dénouer cette affaire, ce thème est épuisé, il faut l'expédier, le mener à bien, fignoler cette fermeture, y mettre la dernière main... la dernière main... 

C'est la fin, il nous faut conclure C'est fini, on arrive au bout... ça va s'interrompre.... On y est c'est vraiment fini oui, c'est l'épilogue le point final la conclusion le terme enfin... On y arrive nous touchons au but, c'est l'aboutissement... le dénouement, la fin du voyage, l'extrémité finale, l'ultime frontière, l'issue, la résolution, c'est là que tout va se terminer, s'arrêter, cesser.... couper, stopper, s'achever, s'éteindre, se tarir, s'estomper, s'escamoter... nous allons partir, nous tirer, caleter, nous carapater, appareiller, battre en retraite, vous brûler la politesse, débarrasser le plancher, décamper, décaniller, décarrer, dégager, déguerpir, déménager, déserter le paysage, détaler, émigrer, foutre le camps, filer à l'anglaise, lever le siège, mettre les bouts, mettre les voiles, prendre congé, prendre la poudre d'escampette, prendre le large, prendre nos cliques et nos claques, prendre nos jambes à notre cou, nous barrer, nous casser, nous cavaler, nous débiner, nous défiler, nous dérober, nous mettre en route, nous tailler, nous trisser, tirer notre révérence....

Tout va maintenant se dénouer, se régler, finir, finir, finir, finir, se dissiper, Nous allons compléter la chose, définitivement, y mettre la dernière main, couper court... tout est consommé ! ...... nous avons couronné le tout, cette pièce va décéder, disparaître, nous allons entonner son chant du départ, elle a épuisé ses dernières ressources, il faut expédier les ultimes affaires courantes, fermer ce dossier définitivement, tout sera mort, nous aurons parachevé cette oeuvre, nous allons la parfaire, nous allons partir, nous ne faisions que passer, comme toute chose il faut disparaître, périr, il faut rompre le cycle...........

En musique .......... voilà, voilà, voilà...

Maintenant que les musiciens s'en sont donné à coeur joie nous allons enfin pouvoir conclure cette magnifique fin différée.... qui va maintenant gentiment s'amenuiser, s'arrêter petit à petit, s'éteindre, s'évanouir, s'interrompre, se dénouer pour finalement passer, succomber de sa belle mort, se tarir, trépasser.... Elle va atteindre sa dernière borne, son aboutissement, voici venir le bout du bout, le confins des confins, l'extrême, frontière finale, l'ultime lisière, le jour dernier, le dernier sommeil, son dernier soupir, dernier souffle, sa disparition, la cessation du grand voyage, le plongeon définitif, nous voilà rendu, c'est le repos éternel, voici son tombeau, l'extrémité finale, Quel bilan, quel couronnement, quelle apothéose.....

Il faut que ça cesse, que ça cesse, que ça cesse, que ça cesse, que ça cesse, que ça cesse... allez COUCHé !... qu'on stoppe qu'on en finisse, allez, partez !, dégagez ! disparaissez, foutez le camp, caletez, dépeuplez moi ces notes, détruisez les, que cela se dissolve, allez, vite, et non pas une éclipse mais une disparition pure et simple, un effacement, un effondrement, allez, stop... et vite allez, stop, je vous en prie, je vous en supplie... bououhhhh oiiinnn... j'ai promis au public que c'était fini, qu'on était au bout du tunnel... s'il vous plait... que tout s'arrête, finisse pour de bon, qu'on ne laisse pas ceci décliner, agoniser tout ceci trop longtemps, il faut liquider le problème, prendre une décision, lui donner le coup de grâce... trouver son bourreau, c'est fastidieux, assommant, ennuyeux, lassant, moribond... mon Dieu, quelle décadence, quelle décomposition, décrépitude,... quelle détresse d'en arriver à ce pareille extrémités, quel sinistre râle... je suis fatigué... ah, enfin.... Cela semble s'arrêter pour de bon... chhuuuut, taisez-vous, je n'ai pas envie de post scriptum, de complément, addenda, apostille, postface et autres explications complémentaires... Je suis usé, vidé, vide, essoré mais tranquille, enfin dans la vacuité désertique du néant, détruit mais enfin tout s'est arrêté, le spectacle est complet, achevé... Nous en voici débarrassés, tout s'est dégarni, démeublé, dénudé, dépeuplé, dépouillé, désempli, quelle heureuse solitude, joie de l'inanimé, l'infréquenté, l'inhabité, l'inoccupé....

Voici le silence infini, perpétuel... le vide intégral, la parfaite vacuité, l'insondable perfection cosmique, le plein, désert, le rien dans sa plénitude, la profonde perpétuité, un espace complètement pur et vacant, ouvert.. ah quel souverain vacuum, le zéro à son summum, la nudité suprême, insondable abîme, pleine inconsistance, totale inexistence.... non-être.

Auteur: MG

Info: 2008, texte d'une création humoristico-musicale, non aboutie, qui consistait à extendre la plus possible la fin d'un spectacle sur scène. Le lien en début de texte conduit vers une pré-maquette musicale de la chose qui avec ce texte et les images peut être appréhendée comme un triple codage

[ excipit ] [ exagération ] [ synonymes ]

 

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taylorisme

Quoique Taylor ait baptisé son système "Organisation scientifique du travail", ce n’était pas un savant. Sa culture correspondait peut-être au baccalauréat, et encore ce n’est pas sûr. Il n’avait jamais fait d’études d’ingénieur. Ce n’était pas non plus un ouvrier à proprement parler, quoiqu’il ait travaillé en usine. Comment donc le définir ? C’était un contremaître, mais non pas de l’espèce de ceux qui sont venus de la classe ouvrière et qui en ont gardé le souvenir. C’était un contremaître du genre de ceux dont on trouve des types actuellement dans les syndicats professionnels de maîtrise et qui se croient nés pour servir de chiens de garde au patronat. Ce n’est ni par curiosité d’esprit, ni par besoin de logique qu’il a entrepris ses recherches. C’est son expérience de contremaître chien de garde qui l’a orienté dans toutes ses études et qui lui a servi d’inspiratrice pendant trente-cinq années de recherches patientes. C’est ainsi qu’il a donné à l’industrie, outre son idée fondamentale d’une nouvelle organisation des usines, une étude admirable sur le travail des tours à dégrossir.

Taylor était né dans une famille relativement riche et aurait pu vivre sans travailler, n’étaient les principes puritains de sa famille et de lui-même, qui ne lui permettaient pas de rester oisif. Il fit ses études dans un lycée, mais une maladie des yeux les lui fit interrompre à 18 ans. Une singulière fantaisie le poussa alors à entrer dans une usine où il fit un apprentissage d’ouvrier mécanicien. Mais le contact quotidien avec la classe ouvrière ne lui donna à aucun degré l’esprit ouvrier. Au contraire, il semble qu’il y ait pris conscience d’une manière plus aiguë de l’opposition de classe qui existait entre ses compagnons de travail et lui-même, jeune bourgeois, qui ne travaillait pas pour vivre, qui ne vivait pas de son salaire, et qui, connu de la direction, était traité en conséquence.

Après son apprentissage, à l’âge de 22 ans, il s’embaucha comme tourneur dans une petite usine de mécanique, et dès le premier jour il entra tout de suite en conflit avec ses camarades d’atelier qui lui firent comprendre qu’on lui casserait la figure s’il ne se conformait pas à la cadence générale du travail ; car à cette époque régnait le système du travail aux pièces organisé de telle manière que, dès que la cadence augmentait, on diminuait les tarifs. Les ouvriers avaient compris qu’il ne fallait pas augmenter la cadence pour que les tarifs ne diminuent pas ; de sorte que chaque fois qu’il entrait un nouvel ouvrier, on le prévenait d’avoir à ralentir sa cadence sous peine d’avoir la vie intenable.

Au bout de deux mois, Taylor est arrivé à devenir contremaître. En racontant cette histoire, il explique que le patron avait confiance en lui parce qu’il appartenait à une famille bourgeoise. Il ne dit pas comment le patron l’avait distingué si rapidement, puisque ses camarades l’empêchaient de travailler plus vite qu’eux, et on peut se demander s’il n’avait pas gagné sa confiance en lui racontant ce qui s’était dit entre ouvriers.

Quand il est devenu contremaître, les ouvriers lui ont dit : "On est bien content de t’avoir comme contremaître, puisque tu nous connais et que tu sais que si tu essaies de diminuer les tarifs on te rendra la vie impossible." À quoi Taylor répondit en substance : "Je suis maintenant de l’autre côté de la barricade, je ferai ce que je dois faire." Et en fait, ce jeune contremaître fit preuve d’une aptitude exceptionnelle pour faire augmenter la cadence et renvoyer les plus indociles.

Cette aptitude particulière le fit monter encore en grade jusqu’à devenir directeur de l’usine. Il avait alors vingt-quatre ans.

Une fois directeur, il a continué à être obsédé par cette unique préoccupation de pousser toujours davantage la cadence des ouvriers. Évidemment, ceux-ci se défendaient, et il en résultait que ses conflits avec les ouvriers allaient en s’aggravant. Il ne pouvait exploiter les ouvriers à sa guise parce qu’ils connaissaient mieux que lui les meilleures méthodes de travail. Il s’aperçut alors qu’il était gêné par deux obstacles : d’un côté il ignorait quel temps était indispensable pour réaliser chaque opération d’usinage et quels procédés étaient susceptibles de donner les meilleurs temps ; d’un autre côté, l’organisation de l’usine ne lui donnait pas le moyen de combattre efficacement la résistance passive des ouvriers. Il demanda alors à l’administrateur de l’entreprise l’autorisation d’installer un petit laboratoire pour faire des expériences sur les méthodes d’usinage. Ce fut l’origine d’un travail qui dura vingt-six ans et amena Taylor à la découverte des aciers rapides, de l’arrosage de l’outil, de nouvelles formes d’outil à dégrossir, et surtout il a découvert, aidé d’une équipe d’ingénieurs, des formules mathématiques donnant les rapports les plus économiques entre la profondeur de la passe, l’avance et la vitesse des tours ; et pour l’application de ces formules dans les ateliers, il a établi des règles à calcul permettant de trouver ces rapports dans tous les cas particuliers qui pouvaient se présenter.

Ces découvertes étaient les plus importantes à ses yeux parce qu’elles avaient un retentissement immédiat sur l’organisation des usines. Elles étaient toutes inspirées par son désir d’augmenter la cadence des ouvriers et par sa mauvaise humeur devant leur résistance. Son grand souci était d’éviter toute perte de temps dans le travail. Cela montre tout de suite quel était l’esprit du système. Et pendant vingt-six ans il a travaillé avec cette unique préoccupation. Il a conçu et organisé progressivement le bureau des méthodes avec les fiches de fabrication, le bureau des temps pour l’établissement du temps qu’il fallait pour chaque opération, la division du travail entre les chefs techniques et un système particulier de travail aux pièces avec prime.

[...]

La méthode de Taylor consiste essentiellement en ceci : d’abord, on étudie scientifiquement les meilleurs procédés à employer pour n’importe quel travail, même le travail de manœuvres (je ne parle pas de manœuvres spécialisés, mais de manœuvres proprement dits), même la manutention ou les travaux de ce genre ; ensuite, on étudie les temps par la décomposition de chaque travail en mouvements élémentaires qui se reproduisent dans des travaux très différents, d’après des combinaisons diverses ; et une fois mesuré le temps nécessaire à chaque mouvement élémentaire, on obtient facilement le temps nécessaire à des opérations très variées. Vous savez que la méthode de mesure des temps, c’est le chronométrage. Il est inutile d’insister là-dessus. Enfin, intervient la division du travail entre les chefs techniques. Avant Taylor, un contremaître faisait tout ; il s’occupait de tout. Actuellement, dans les usines, il y a plusieurs chefs pour un même atelier : il y a le contrôleur, il y a le contremaître, etc.

Auteur: Weil Simone

Info: "La condition ouvrière", Journal d'usine, éditions Gallimard, 2002, pages 310 à 314

[ biographie ] [ résumé ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

symbiose

Les cellules du corps se parlent du vieillissement

Les biologistes ont découvert que les mitochondries de différents tissus communiquent entre elles pour réparer les cellules blessées. Lorsque leur signal échoue, l’horloge biologique commence à ralentir.

Le vieillissement peut apparaitre comme un processus non régulé : au fil du temps, nos cellules et notre corps accumulent inévitablement des bosses et des bosses qui provoquent des dysfonctionnements, des échecs et finalement la mort. Cependant, en 1993, une découverte a bouleversé cette interprétation des événements. Les chercheurs ont trouvé une mutation dans un seul gène qui doublait la durée de vie d'un ver ; des travaux ultérieurs ont montré que des gènes apparentés, tous impliqués dans la réponse à l'insuline, sont des régulateurs clés du vieillissement chez une multitude d'animaux, depuis les vers et les mouches jusqu'aux humains. La découverte suggère que le vieillissement n’est pas un processus aléatoire – en fait, des gènes spécifiques le régulent – ​​ce qui ouvre la porte à des recherches plus approfondies sur la manière dont le vieillissement se déroule au niveau moléculaire.

Récemment, une série d’articles ont documenté une nouvelle voie biochimique qui régule le vieillissement, basée sur les signaux transmis entre les mitochondries, les organelles les plus connues comme la centrale électrique de la cellule. En travaillant avec des vers, les chercheurs ont découvert que les dommages causés aux mitochondries dans les cellules cérébrales déclenchaient une réponse de réparation qui était ensuite amplifiée, déclenchant des réactions similaires dans les mitochondries de tout le corps du ver. L'effet de cette activité de réparation prolonge la durée de vie de l'organisme : les vers dont les dommages mitochondriaux étaient rainsi éparés vivaient 50 % plus longtemps.

De plus, les cellules de la lignée germinale – les cellules qui produisent les ovules et les spermatozoïdes – étaient au cœur de ce système de communication anti-âge. C’est une découverte qui ajoute de nouvelles dimensions aux préoccupations en matière de fertilité impliquées lorsque les gens parlent du vieillissement et de leur " horloge biologique ". Certaines des découvertes ont été rapportées dans Science Advances et d’autres ont été publiées sur le serveur de prépublication scientifique biorxiv.org à l’automne.

La recherche s'appuie sur un ensemble de travaux récents suggérant que les mitochondries sont des organites sociaux qui peuvent communiquer entre elles même lorsqu'elles se trouvent dans des tissus différents. Essentiellement, les mitochondries fonctionnent comme des talkies-walkies cellulaires, envoyant des messages dans tout le corps qui influencent la survie et la durée de vie de l’organisme tout entier.

"Ce qui est important ici, c'est qu'en plus des programmes génétiques, il existe également un facteur très important pour réguler le vieillissement, à savoir la communication entre les tissus", a déclaré David Vilchez, qui étudie le vieillissement à l'Université de Cologne et n'a pas participé à l'étude. 

Le biologiste cellulaire Andrew Dillin a découvert il y a environ dix ans les premiers indices de cette nouvelle voie qui régule la durée de vie. Il était à la recherche de gènes prolongeant la vie des vers Caenorhabditis elegans lorsqu'il a découvert que les dommages génétiques aux mitochondries prolongeaient la vie des vers de 50 %.

C'était inattendu. Dillin avait supposé que des mitochondries défectueuses accéléreraient la mort plutôt que de prolonger la vie – après tout, les mitochondries sont essentielles au fonctionnement cellulaire. Pourtant, pour une raison ou une autre, le fait de perturber le bon fonctionnement des mitochondries obligeait les vers à vivre plus longtemps.

Plus intrigant était le fait que les mitochondries endommagées dans le système nerveux des vers semblaient être à l'origine de cet effet. "Cela montre vraiment que certaines mitochondries sont plus importantes que d'autres", a déclaré Dillin, qui est maintenant professeur à l'Université de Californie à Berkeley. "Les neurones dictent cela au reste de l'organisme, et c'était vraiment surprenant."

Au cours de la dernière décennie, le biologiste cellulaire Andrew Dillin a découvert les détails biochimiques d'une nouvelle voie qui régule le vieillissement, dans laquelle les mitochondries des cellules du corps communiquent sur la santé cellulaire.

Aujourd'hui, Dillin et son équipe ont élargi ces découvertes en découvrant de nouveaux détails sur la façon dont les mitochondries du cerveau communiquent avec les cellules du corps du ver pour prolonger la vie.

Tout d'abord, il fallait comprendre pourquoi des dommages causés aux mitochondries du cerveau pouvaient avoir un effet bénéfique sur l'organisme. Le processus de production d'énergie d'une mitochondrie nécessite une machinerie moléculaire extrêmement complexe comprenant des dizaines de parties protéiques différentes. Lorsque les choses tournent mal, par exemple lorsque certains composants sont manquants ou mal repliés, les mitochondries activent une réponse au stress, connue sous le nom de réponse protéique dépliée, qui délivre des enzymes de réparation pour aider les complexes à s'assembler correctement et à restaurer la fonction mitochondriale. De cette façon, la réponse protéique déployée maintient les cellules en bonne santé.

Dillin s’attendait à ce que ce processus se déroule uniquement à l’intérieur des neurones dont les mitochondries sont endommagées. Pourtant, il a observé que les cellules d’autres tissus du corps du ver activaient également des réponses de réparation même si leurs mitochondries étaient intactes.

C'est cette activité de réparation qui a permis aux vers de vivre plus longtemps. Comme si on emmenait régulièrement une voiture chez un mécanicien, la réponse protéique déployée semblait maintenir les cellules en bon état de fonctionnement et fonctionner comme un élément anti-âge. Ce qui restait mystérieux était la façon dont cette réponse protéique déployée était communiquée au reste de l’organisme.

Après quelques recherches, l'équipe de Dillin a découvert que les mitochondries des neurones stressés utilisaient des vésicules – des conteneurs en forme de bulles qui déplacent les matériaux autour de la cellule ou entre les cellules – pour transmettre un signal appelé Wnt au-delà des cellules nerveuses vers d'autres cellules du corps. Les biologistes savaient déjà que Wnt joue un rôle dans la configuration du corps au cours du développement embryonnaire précoce, au cours duquel il déclenche également des processus de réparation tels que la réponse protéique déployée. Pourtant, comment la signalisation Wnt, lorsqu’elle est activée chez un adulte, pourrait-elle éviter d’activer le programme embryonnaire ?

Dillin soupçonnait qu'il devait y avoir un autre signal avec lequel Wnt interagissait. Après d'autres travaux, les chercheurs ont découvert qu'un gène exprimé dans les mitochondries de la lignée germinale – et dans aucune autre mitochondrie – peut interrompre les processus de développement de Wnt. Ce résultat lui suggère que les cellules germinales jouent un rôle essentiel dans le relais du signal Wnt entre le système nerveux et les tissus du reste du corps.

"La lignée germinale est absolument essentielle pour cela", a déclaré Dillin. Il n’est cependant pas clair si les mitochondries germinales agissent comme des amplificateurs, recevant le signal des mitochondries du cerveau et le transmettant à d’autres tissus, ou si les tissus récepteurs " écoutent " les signaux provenant des deux sources.

Quoi qu’il en soit, la force du signal germinal régule la durée de vie de l’organisme, a déclaré Dillin. À mesure qu’un ver vieillit, la qualité de ses œufs ou de son sperme diminue – ce que nous appelons le tic-tac d’une horloge biologique. Ce déclin se reflète également dans la capacité changeante des cellules germinales à transmettre les signaux des mitochondries du cerveau, a-t-il suggéré. À mesure que le ver vieillit, sa lignée germinale transmet le signal de réparation moins efficacement et son corps décline également.

Les scientifiques ne savent pas encore si ces découvertes s’appliquent aux humains et à notre façon de vieillir. Pourtant, l’hypothèse a du sens d’un point de vue évolutif plus large, a déclaré Dillin. Tant que les cellules germinales sont saines, elles envoient des signaux favorables à la survie pour garantir que leur organisme hôte survit et se reproduit. Mais à mesure que la qualité des cellules germinales diminue, il n’y a aucune raison évolutive de continuer à prolonger la durée de vie ; du point de vue de l'évolution, la vie existe pour se reproduire.

Le fait que les mitochondries puissent communiquer entre elles peut sembler quelque peu alarmant, mais il existe une explication. Il y a longtemps, les mitochondries étaient des bactéries libres qui s’associaient à un autre type de cellules primitives pour travailler ensemble dans ce qui est devenu nos cellules complexes modernes. Ainsi, leur capacité à communiquer est probablement une relique de l’ancêtre bactérien libre des mitochondries.

"Cette petite chose qui existe à l'intérieur des cellules depuis des milliards d'années conserve toujours ses origines bactériennes", a déclaré Dillin. Et si ses recherches sur les vers se confirment dans des organismes plus complexes comme les humains, il est possible que vos mitochondries parlent en ce moment de votre âge. 



 

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Info: https://www.quantamagazine.org/, Viviane Callier, 8 janvier 2024

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neuroscience

La conscience est un continuum et les scientifiques commencent à le mesurer

Une nouvelle technique aide les anesthésiologistes à suivre les changements dans les états de conscience

Que signifie être conscient ? Les gens réfléchissent et écrivent sur cette question depuis des millénaires. Pourtant, de nombreux aspects de l’esprit conscient restent un mystère, notamment la manière de le mesurer et de l’ évaluer. Qu'est-ce qu'une unité de conscience ? Existe-t-il différents niveaux de conscience ? Qu'arrive-t-il à la conscience pendant le sommeil, le coma et l'anesthésie générale ?

En tant qu’anesthésiologistes, nous réfléchissons souvent à ces questions. Nous promettons chaque jour aux patients qu’ils seront déconnectés du monde extérieur et de leurs pensées intérieures pendant l’opération, qu’ils ne conserveront aucun souvenir de l’expérience et qu’ils ne ressentiront aucune douleur. Ainsi, l’anesthésie générale a permis d’énormes progrès médicaux, depuis les réparations vasculaires microscopiques jusqu’aux greffes d’organes solides.

En plus de leur impact considérable sur les soins cliniques, les anesthésiques sont devenus de puissants outils scientifiques pour sonder les questions relatives à la conscience. Ils nous permettent d’induire des changements profonds et réversibles dans les états de conscience et d’étudier les réponses cérébrales lors de ces transitions.

Mais l’un des défis auxquels sont confrontés les anesthésiologistes est de mesurer la transition d’un état à un autre. En effet, bon nombre des approches existantes interrompent ou perturbent ce que nous essayons d'étudier. Essentiellement, l’évaluation du système affecte le système. Dans les études sur la conscience humaine, déterminer si une personne est consciente peut éveiller la personne étudiée, ce qui perturbe cette évaluation même. Pour relever ce défi, nous avons adapté une approche simple que nous appelons la méthode respirer-squeeze. Cela nous offre un moyen d'étudier les changements de l'état de conscience sans les interrompre.

Pour comprendre cette approche, il est utile de considérer quelques enseignements issus d’études sur la conscience qui ont utilisé des anesthésiques. Depuis des décennies, les chercheurs utilisent l’électroencéphalographie (EEG) pour observer l’activité électrique dans le cerveau de personnes recevant divers anesthésiques. Ils peuvent ensuite analyser cette activité avec des lectures EEG pour caractériser les modèles spécifiques à divers anesthésiques, appelés signatures anesthésiques.

Ces recherches révèlent que la plupart des médicaments anesthésiques ralentissent les rythmes cérébraux et augmentent leur taille, effets qui altèrent la communication entre les régions du cerveau. Par exemple, une étude récente a révélé que le propofol, le médicament le plus couramment utilisé pour l’anesthésie générale, perturbe la façon dont les régions du cerveau travaillent généralement ensemble pour traiter les informations sensorielles.

La conscience, comme le révèlent cette recherche et d’autres, n’est pas simplement un système binaire – activé ou désactivé, conscient ou inconscient – ​​mais plutôt quelque chose qui peut englober un continuum de différents états qui impliquent différents types de fonctionnement du cerveau. Par exemple, la conscience peut être connectée à l'environnement par le biais de nos sens et de notre comportement (conscience connectée), comme lors de la plupart de nos heures d'éveil, ou déconnectée de notre environnement (conscience déconnectée), comme lorsque nous rêvons pendant le sommeil.

L’inconscience – comme lorsqu’une personne est dans le coma – est plus difficile à étudier que la conscience connectée ou déconnectée, mais elle est généralement comprise comme un état d’oubli, vide d’expérience subjective ou de mémoire. Lorsque nous préparons un patient à une intervention chirurgicale, nous ajustons les niveaux d’anesthésie pour le rendre inconscient. Lorsqu’une personne est sous anesthésie générale, elle vit un coma temporaire et réversible pendant lequel elle ne ressent aucune douleur et après quoi elle n’aura plus aucun souvenir de son intervention.

Comprendre les transitions entre ces états est essentiel pour garantir des niveaux adéquats d’anesthésie générale et pour éclairer les questions de recherche en anesthésiologie, sur la conscience, le sommeil et le coma. Pour mieux cartographier la transition hors de la conscience connectée, nous avons récemment adapté une nouvelle approche pour surveiller la capacité d'une personne à générer des comportements volontaires sans incitation externe.

Généralement, les chercheurs suivent le début de la sédation en émettant des commandes verbales et en enregistrant les réponses comportementales. Par exemple, un scientifique peut périodiquement demander à quelqu’un d’ouvrir les yeux ou d’appuyer sur un bouton tout en recevant une perfusion anesthésique. Une fois que la personne cesse de répondre à cette commande, le scientifique suppose qu’elle a perdu la conscience connectée.

Cette technique s’est avérée utile pour contraster l’esprit conscient connecté et déconnecté. Mais lorsqu’il s’agit de comprendre la transition entre ces états, il y a plusieurs inconvénients. D’une part, le signal auditif n’est pas standardisé : l’inflexion et le volume de la voix, ce qui est dit et la fréquence à laquelle il est répété varient d’une étude à l’autre et même au sein d’une même étude. Un problème plus fondamental est que ces commandes peuvent éveiller les gens lorsqu’ils dérivent vers un état de déconnexion. Cette limitation signifie que les chercheurs doivent souvent attendre plusieurs minutes entre l’émission de commandes verbales et l’évaluation de la réponse, ce qui ajoute de l’incertitude quant au moment exact de la transition.

Dans notre étude, nous souhaitions une approche plus sensible et précise pour mesurer le début de la sédation sans risquer de perturber la transition. Nous nous sommes donc tournés vers une méthode décrite pour la première fois en 2014 par des chercheurs sur le sommeil du Massachusetts General Hospital et de l’Université Johns Hopkins. Dans ce travail, les enquêteurs ont demandé aux participants de serrer une balle à chaque fois qu'ils inspiraient. Les chercheurs ont suivi les pressions de chaque personne à l'aide d'un dynamomètre, un outil pour mesurer la force de préhension, et d'un capteur électromyographique, qui mesure la réponse musculaire. De cette façon, ils ont pu suivre avec précision le processus d’endormissement sans le perturber.

Pour notre étude, nous avons formé 14 volontaires en bonne santé à cette même tâche et présenté l’exercice de respiration en pressant comme une sorte de méditation de pleine conscience. Nous avons demandé aux participants de se concentrer sur leur respiration et de serrer un dynamomètre portatif chaque fois qu'ils inspirent. Après quelques minutes d'entraînement pour chaque personne, nous avons placé un cathéter intraveineux dans son bras pour administrer le sédatif et installé des moniteurs de signes vitaux et un équipé d'un capuchon EEG à 64 canaux pour enregistrer les ondes cérébrales tout au long de l'expérience.

Tous les participants ont synchronisé de manière fiable leurs pressions avec leur respiration pendant une période de référence initiale sans aucune sédation. Ils ont ensuite reçu une perfusion lente de dexmédétomidine, un sédatif couramment utilisé dans les salles d'opération et les unités de soins intensifs. À mesure que les concentrations cérébrales de dexmédétomidine augmentaient, les participants manquaient parfois une pression ou la prenaient au mauvais moment. Finalement, ils ont complètement arrêté de serrer.

Après quelques tests supplémentaires, nous avons arrêté la perfusion de dexmédétomidine, permettant ainsi aux participants de se remettre de la sédation. À notre grand étonnement, après une période de 20 à 30 minutes, tout le monde s'est souvenu de la tâche et a commencé à serrer spontanément en synchronisation avec sa respiration, sans aucune incitation. Cela nous a permis d'analyser à la fois le moment du début et du décalage de la sédation et de les comparer avec des études antérieures utilisant des commandes verbales pour évaluer la conscience.

La tâche de respiration et de compression est donc clairement une approche plus sensible pour mesurer la transition hors de la conscience connectée. Les participants ont arrêté d'effectuer la tâche à des concentrations de dexmédétomidine inférieures à celles auxquelles les personnes avaient cessé de répondre aux signaux auditifs dans d'autres études, soulignant les effets excitants des signaux externes sur le système. Ces résultats peuvent également indiquer que la conscience connectée peut être décomposée en comportements générés en interne (comme se rappeler de serrer une balle pendant que vous inspirez) et en comportements provoqués de l'extérieur (comme répondre à des commandes verbales) avec des points de transition distincts - une idée qui affine notre compréhension du continuum de la conscience.

Des recherches antérieures ont caractérisé l'apparence du cerveau dans des états de conscience connectée et déconnectée. Nous savions donc généralement à quoi s'attendre des enregistrements EEG. Mais nous étions moins sûrs de la façon dont notre technique pourrait s’aligner sur la transition cérébrale entre les états de conscience. Nous avons découvert un schéma très clair de changements dans le cerveau lorsque les gens arrêtent de serrer le ballon. De plus, nous n’avons vu aucune preuve que la tâche de compression perturbe l’état de conscience des personnes. L'EEG a également révélé un calendrier beaucoup plus précis pour ce changement que les travaux antérieurs, identifiant la transition dans une période environ 10 fois plus courte que ce qui était possible avec les signaux auditifs - une fenêtre de cinq à six secondes au lieu des 30 secondes. - à un intervalle de 120 secondes qui était courant dans les travaux antérieurs.

Comme avantage supplémentaire, nous avons été ravis de découvrir que de nombreux participants à notre étude appréciaient la tâche de respiration pressée comme moyen de se concentrer sur l'apaisement de leur esprit et de leur corps. Pour cette raison, nous avons également mis en œuvre la méthode dans la pratique clinique, c’est-à-dire en dehors d’études soigneusement contrôlées, lors de l’induction d’une anesthésie générale lors d’interventions chirurgicales majeures, qui peuvent autrement être une expérience stressante pour les patients.

Nous nous appuyons désormais sur ce travail en analysant nos données EEG, ainsi que les données d'imagerie par résonance magnétique structurelle (IRM) de nos volontaires. Ces connaissances sur le passage d’une conscience connectée à une conscience déconnectée peuvent aider à éclairer les soins cliniques des patients nécessitant une anesthésie pour une intervention chirurgicale, ainsi que de ceux qui souffrent de troubles du sommeil ou de coma. Ces études nous mettent également au défi de nous attaquer aux aspects plus philosophiques de la conscience et pourraient ainsi éclairer la question fondamentale de ce que signifie être conscient.

Auteur: Internet

Info: 26 janv, 2024    Christian Guay et Emery Brown

[ réveillé ] [ assoupi ] [ entendement ] [ présence ]

 

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homme-animal

CAPACITÉS COGNITIVES DU DAUPHIN

Au-delà de leur physiologie cérébrale, les dauphins font preuve de capacités extrêmement rares dans le domaine animal. Comme les humains, les dauphins peuvent imiter, aussi bien sur le mode gestuel que sur le mode vocal, ce qui est soi est déjà exceptionnel. Si certains oiseaux peuvent imiter la voix, ils n’imitent pas les attitudes. Les singes, de leur côté, imitent les gestes et non les mots. Le dauphin est capable des deux. Les dauphins chassent les poissons et se nourrissent d’invertébrés, mais ils usent pour ce faire de techniques complexes et variables, acquises durant l’enfance grâce à l’éducation. L’usage des outils ne leur est pas inconnu : un exemple frappant de cette capacité est la façon dont deux dauphins captifs s’y sont pris pour extraire une murène cachée dans le creux d’un rocher à l’intérieur de leur bassin. L’un d’eux a d’abord attrapé un petit poisson scorpion très épineux, qui passait dans le secteur, et l’ayant saisi dans son rostre, s’en est servi comme d’un outil pour extraire la murène de sa cachette. S’exprimant à propos de leur intelligence, le Dr Louis M.Herman, Directeur du Kewalo Basin Marine Mammal Laboratory de l’Université d’Hawaii, note que les dauphins gardent en mémoire des événements totalement arbitraires, sans le moindre rapport avec leur environnement naturel et sans aucune incidence biologique quant à leur existence.

Recherches sur le langage des dauphins

Beaucoup d’humains trouvent intrigante l’idée de communiquer avec d’autres espèces. A cet égard, le dauphin constitue un sujet attractif, particulièrement dans le domaine du langage animal, du fait de ses capacités cognitives et de son haut degré de socialisation. Dès le début des années soixante, c’est le neurologue John Lilly qui, le premier, s’est intéressé aux vocalisations des cétacés. Les recherches de Lilly se poursuivirent durant toute une décennie, tout en devenant de moins en moins conventionnelles. Le savant alla même jusqu’à tester les effets du L.S.D. sur les émissions sonores des dauphins et dut finalement interrompre ses recherches en 1969, lorsque cinq de ses dauphins se suicidèrent en moins de deux semaines. Malheureusement, nombre de découvertes ou de déclarations de John Lilly sont franchement peu crédibles et ont jeté le discrédit sur l’ensemble des recherches dans le domaine du langage animal. De ce fait, ces recherches sont aujourd’hui rigoureusement contrôlées et très méticuleuses, de sorte que les assertions des scientifiques impliquées dans ce secteur restent désormais extrêmement réservées.

Louis Herman est sans doute l’un des plus importants chercheurs à mener des études sur la communication et les capacités cognitives des dauphins. Son instrument de travail privilégié est la création de langues artificielles, c’est-à-dire de langages simples crées pour l’expérience, permettant d’entamer des échanges avec les dauphins. Louis Herman a surtout concentré ses travaux sur le phénomène de la "compréhension" du langage bien plus que sur la "production" de langage, arguant que la compréhension est le premier signe d’une compétence linguistique chez les jeunes enfants et qu’elle peut être testée de façon rigoureuse. En outre, la structure grammaticale qui fonde les langages enseignés s’inspire le plus souvent de celle de l’anglais. Certains chercheurs ont noté qu’il aurait été mieux venu de s’inspirer davantage de langues à tons ou à flexions, comme le chinois, dont la logique aurait parue plus familière aux cétacés. Dans les travaux d’Herman, on a appris à deux dauphins, respectivement nommés Akeakamai (Ake) et Phoenix, deux langues artificielles. Phoenix a reçu l’enseignement d’un langage acoustique produit par un générateur de sons électroniques. Akeakamai, en revanche, a du apprendre un langage gestuel (version simplifiée du langage des sourds-muets), c’est-à-dire visuel. Les signaux de ces langues artificiels représentent des objets, des modificateurs d’objet (proche, loin, gros, petit, etc.) ou encore des actions. Ni les gestes ni les sons ne sont sensés représenter de façon analogique les objets ou les termes relationnels auxquels ils se réfèrent. Ces langages utilisent également une syntaxe, c’est-à-dire des règles de grammaire simples, ce qui signifie que l’ordre des mots influe sur le sens de la phrase. Phoenix a appris une grammaire classique, enchaînant les termes de gauche à droite (sujet-verbe-complément) alors que la grammaire enseignée à Ake allait dans l’autre sens et exigeait de sa part qu’elle voit l’ensemble du message avant d’en comprendre le sens correctement. Par exemple, dans le langage gestuel de Ake, la séquence des signaux PIPE-SURFBOARD-FETCH ("tuyau – planche à surf – apporter") indiquait l’ordre d’amener la planche de surf jusqu’au tuyau, alors que SURFBOARD-PIPE-FETCH ("planche-tuyau- rapporter") signifiait qu’il fallait, au contraire, amener le tuyau jusqu’ à la planche de surf. Phoenix et Ake ont ainsi appris environ 50 mots, lesquels, permutés l’un avec l’autre au sein de séquences courtes, leur permirent bientôt de se servir couramment de plus de mille phrases, chacune produisant une réponse neuve et non apprise.

Compte tenu de l’influence possible de la position dans l’espace des expérimentateurs sur l’expérimentation, les lieux d’apprentissage et les entraîneurs se voyaient changés de session en session. Dans le même temps, des observateurs "aveugles", qui ne connaissaient pas les ordres et ne voyaient pas les entraîneurs, notaient simplement le comportement des dauphins, afin de vérifier ensuite qu’il correspondait bien aux commandes annoncées. Les entraîneurs allaient jusqu’à porter des cagoules noires, afin de ne révéler aucune expression ou intention faciale et se tenaient immobiles, à l’exception des mains. Les dauphins se montrèrent capables de reconnaître les signaux du langage gestuels aussi bien lorsqu’il étaient filmés puis rediffusés sur un écran vidéo que lorsque ces mêmes signes étaient exécutés à l’air libre par l’entraîneur. Même le fait de ne montrer que des mains pâles sur un fond noir ou des taches de lumière blanche reproduisant la dynamique des mains, a largement suffi aux dauphins pour comprendre le message ! Il semble donc que les dauphins répondent davantage aux symboles abstraits du langage qu’à tout autre élément de la communication.

Par ailleurs, si les dauphins exécutent aisément les ordres qu’on leur donne par cette voie gestuelle, ils peuvent également répondre de façon correcte à la question de savoir si un objet précis est présent ou absent, en pressant le levier approprié (le clair pour PRESENT, le sombre pour ABSENT). Ceci démontre évidement leur faculté de "déplacement mental", qui consiste à manipuler l’image d’objets qui ne se trouvent pas dans les environs. Des expériences additionnelles ont conduit à préciser comment le dauphin conçoit l’étiquetage des objets, comment il les qualifie de son point de vue mental. "Nous avons constaté" nous apprend Louis Herman, "qu’au regard du dauphin, le signe CERCEAU n’est pas seulement le cerceau précis utilisé dans le cadre de cette expérience précise, c’est plutôt TOUT OBJET DE GRANDE TAILLE PERCE D’UN GRAND TROU AU MILIEU. Un seul concept général associe donc pour le dauphin les cerceaux ronds, carrés, grands et petits, flottants ou immergés, que l’on utilise généralement lors de la plupart des expériences". Parmi les choses que le Dr Herman estime n’avoir pu enseigner aux dauphins, il y a le concept du "non" en tant que modificateur logique. L’ordre de "sauter au-dessus d’une non-balle" indique en principe que le dauphin doit sauter au-dessus de n’importe quoi, sauf d’une balle ! Mais cela n’est pas compris, pas plus, affirme toujours Herman, que le concept de "grand" ou de "petit".

Communication naturelle chez les dauphins

On sait que les dauphins émettent de nombreux sifflements, de nature très diverse. La fonction de la plupart d’entre eux demeure toujours inconnue mais on peut affirmer aujourd’hui que la moitié d’entre eux au moins constitue des "signatures sifflées". Un tel signal se module dans une fourchette de 5 à 20 kilohertz et dure moins d’une seconde. Il se distingue des autres sifflements - et de la signature de tous les autres dauphins – par ses contours particuliers et ses variations de fréquences émises sur un temps donné, ainsi que le montrent les sonogrammes. Les jeunes développent leur propre signature sifflée entre l’âge de deux mois et d’un an. Ces sifflements resteront inchangés douze ans au moins et le plus souvent pour la durée entière de la vie de l’animal. Par ailleurs, au-delà de leur seule fonction nominative, certains des sifflements du dauphin apparaissent comme de fidèles reproductions de ceux de leurs compagnons et servent manifestement à interpeller les autres par leur nom. Lorsqu’ils sont encore très jeunes, les enfants mâles élaborent leur propre signature sifflée, qui ressemble fort à celle de leur mère. En revanche, les jeunes femelles doivent modifier les leurs, précisément pour se distinguer de leur mère.

Ces différences reflètent sans doute celles qui existent dans les modes de vie des femelles et des mâles. Puisque les filles élèvent leur propre enfant au sein du groupe maternel, un sifflement distinct est donc indispensable pour pouvoir distinguer la maman de la grand mère. La signature sifflée masculine, presque identique à celle de la mère, permet tout au contraire d’éviter l’inceste et la consanguinité. Le psychologue James Ralston et l’informaticien Humphrey Williams ont découvert que la signature sifflée pouvait véhiculer bien plus que la simple identité du dauphin qui l’émet. En comparant les sonogrammes des signatures sifflées durant les activités normales et lors de situations stressantes, ils découvrirent que la signature sifflée, tout en conservant sa configuration générale, pouvait changer en termes de tonalité et de durée et transmettre ainsi des informations sur l’état émotionnel de l’animal. Les modifications causé par cet état émotionnel sur les intonations de la signature varient en outre selon les individus. Les dauphins semblent donc utiliser les sifflement pour maintenir le contact lorsqu’ils se retrouvent entre eux ou lorsqu’ils rencontrent d’autres groupes, mais aussi, sans doute, pour coordonner leur activités collectives. Par exemple, des sifflements sont fréquemment entendus lorsque le groupe entier change de direction ou d’activité.

De son côté, Peter Tyack (Woods Hole Oceanographic Institute) a travaillé aux côtés de David Staelin, professeur d’ingénierie électronique au M.I.T., afin de développer un logiciel d’ordinateur capable de détecter les "matrices sonores" et les signaux répétitifs parmi le concert de couinements, piaulements et autres miaulements émis par les dauphins. Une recherche similaire est menée par l’Université de Singapore (Dolphin Study Group). Avec de tels outils, les chercheurs espèrent en apprendre davantage sur la fonction précise des sifflements.

Dauphins sociaux

Les observations menées sur des individus sauvages aussi bien qu’en captivité révèlent un très haut degré d’ordre social dans la société dauphin. Les femelles consacrent un an à leur grossesse et puis les trois années suivantes à élever leur enfant. Les jeunes s’éloignent en effet progressivement de leur mère dès leur troisième année, restant près d’elle jusqu’à six ou dix ans ! – et rejoignent alors un groupe mixte d’adolescents, au sein duquel ils demeurent plusieurs saisons. Parvenus à l’âge pleinement adulte, vers 15 ans en moyenne, les mâles ne reviennent plus que rarement au sein du "pod" natal. Cependant, à l’intérieur de ces groupes d’adolescents, des liens étroits se nouent entre garçons du même âge, qui peuvent persister la vie entière. Lorsque ces mâles vieillissent, ils ont tendance à s’associer à une bande de femelles afin d’y vivre une paisible retraite. Bien que les dauphins pratiquent bien volontiers la promiscuité sexuelle, les familles matriarcales constituent de fortes unités de base de la société dauphin. Lorsqu’une femelle donne naissance à son premier enfant, elle rejoint généralement le clan de sa propre mère et élève son delphineau en compagnie d’autres bébés, nés à la même saison. La naissance d’un nouveau-né donne d’ailleurs souvent lieu à des visites d’autres membres du groupe, mâles ou femelles, qui s’étaient séparés de leur mère depuis plusieurs années. Les chercheurs ont également observé des comportements de "baby-sitting", de vieilles femelles, des soeurs ou bien encore d’autres membres du groupe, voire même un ancien mâle prenant alors en charge la surveillance des petits. On a ainsi pu observer plusieurs dauphins en train de mettre en place une véritable "cour de récréation", les femelles se plaçant en U et les enfants jouant au milieu ! (D’après un texte du Dr Poorna Pal)

Moi, dauphin.

Mais qu’en est-il finalement de ce moi central au coeur de ce monde circulaire sans relief, sans couleurs constitué de pixels sonores ? C’est là que les difficultés deviennent insurmontables tant qu’un "contact" n’aura pas été vraiment établi par le dialogue car le "soi" lui-même, le "centre de la personne" est sans doute construit de façon profondément différente chez l’homme et chez le dauphin. H.Jerison parle carrément d’une "conscience collective". Les mouvements de groupe parfaitement coordonnés et quasi-simultanés, à l’image des bancs de poissons ou des troupeaux de gnous, que l’on observe régulièrement chez eux, suppose à l’évidence une pensée "homogène" au groupe, brusquement transformé en une "personne plurielle". On peut imaginer ce sentiment lors d’un concert de rock ou d’une manifestation, lorsqu’une foule entière se tend vers un même but mais ces attitudes-là sont grossières, globales, peu nuancées. Toute autre est la mise à l’unisson de deux, trois, cinq (les "gangs" de juvéniles mâles associés pour la vie) ou même de plusieurs centaines de dauphins ensemble (de formidables "lignes de front" pour la pêche, qui s’étendent sur des kilomètres) et là, bien sûr, nous avons un comportement qui traduit un contenu mental totalement inconnu de nous. On sait que lorsqu’un dauphin voit, tout le monde l’entend. En d’autres termes chaque fois qu’un membre du groupe focalise son faisceau de clicks sur une cible quelconque, l’écho lui revient mais également à tous ceux qui l’entourent. Imaginons que de la même manière, vous regardiez un beau paysage. La personne qui vous tournerait le dos et se tiendrait à l’arrière derrière vous pourrait le percevoir alors aussi bien que vous le faites. Cette vision commune, qui peut faire croire à de la télépathie, n’est pas sans conséquence sur le contenu mental de chaque dauphin du groupe, capable de fusionner son esprit à ceux des autres quand la nécessité s’en fait sentir. Ceci explique sans doute la formidable capacité d’empathie des dauphins mais aussi leur fidélité "jusqu’à la mort" quand il s’agit de suivre un compagnon qui s’échoue. Chez eux, on ne se sépare pas plus d’un ami en détresse qu’on ne se coupe le bras quand il est coincé dans une portière de métro ! En d’autres circonstances, bien sûr, le dauphin voyage seul et il "rassemble" alors sa conscience en un soi individualisé, qui porte un nom, fait des choix et s’intègre dans une lignée. Il en serait de même pour l’homme si les mots pouvaient faire surgir directement les images qu’ils désignent dans notre cerveau, sans passer par le filtre d’une symbolisation intermédiaire. Si quelqu’un me raconte sa journée, je dois d’abord déchiffrer ses mots, les traduire en image et ensuite me les "représenter". Notre système visuel étant indépendant de notre système auditif, un processus de transformation préalable est nécessaire à la prise de conscience du message. Au contraire, chez le dauphin, le système auditif est à la fois un moyen de communication et un moyen de cognition "constructiviste" (analyse sensorielle de l’environnement). La symbolisation n’est donc pas nécessaire aux transferts d’images, ce qui n’empêche nullement qu’elle puisse exister au niveau des concepts abstraits. Quant à cette conscience fusion-fission, cet "ego fluctuant à géométrie variable", ils préparent tout naturellement le dauphin à s’ouvrir à d’autres consciences que la sienne. D’où sans doute, son besoin de nous sonder, de nous comprendre et de nous "faire" comprendre. Un dauphin aime partager son cerveau avec d’autres, tandis que l’homme vit le plus souvent enfermé dans son crâne. Ces êtres-là ont décidément beaucoup à nous apprendre...

Auteur: Internet

Info: http://www.dauphinlibre.be/dauphins-cerveau-intelligence-et-conscience-exotiques

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