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structure psychologique

Observez la structure de nos obsessionnels. Ce que l’on appelle effet de surmoi, veut dire quoi ? Cela veut dire qu’ils s’infligent toutes sortes de tâches particulièrement dures, éprouvantes, qu’ils les réussissent d’ailleurs, qu’ils les réussissent d’autant plus facilement que c’est ce qu’ils désirent faire – mais là, ils réussissent très, très brillamment, au nom de quoi ils auraient bien droit à de petites vacances pendant lesquelles on ferait ce qu’on voudrait, d’où la dialectique bien connue du travail et des vacances. Chez l’obsessionnel, le travail est puissant, étant fait pour libérer le temps de la grande voile qui sera celui des vacances – et le passage des vacances se révèle habituellement à peu près perdu. Pourquoi ? Parce que ce dont il s’agissait, c’était d’obtenir la permission de l’Autre. Or l’autre – je parle maintenant de l’autre en fait, de l’autre qui existe – n’a absolument rien à faire avec toute cette dialectique, pour la simple raison que l’autre réel est bien trop occupé avec son propre Autre, et n’a aucune raison de remplir cette mission de donner à l’exploit de l’obsessionnel sa petite couronne, à savoir ce qui serait justement la réalisation de son désir, en tant que ce désir n’a rien à faire avec le terrain sur lequel le sujet a démontré toutes ses capacités. [...]

Il y a dans l’exploit de l’obsessionnel quelque chose qui reste toujours irrémédiablement fictif, pour la raison que la mort, je veux dire là où est le véritable danger, ne réside pas dans l’adversaire qu’il a l’air de défier, mais tout à fait ailleurs. Il est justement du côté de ce témoin invisible, de cet Autre qui est là comme le spectateur, celui qui compte les coups, et va dire du sujet – Décidément [...] c’est un rude lapin ! On retrouve cette exclamation, cette façon d’accuser le coup, comme implicite, latente, souhaitée, dans toute la dialectique de l’exploit. [...] Ce que l’obsessionnel veut avant tout maintenir sans en avoir l’air, en ayant l’air de viser autre chose, c’est cet Autre où les choses s’articulent en termes de signifiant.

[...] La visée essentielle, il est certain que c’est le maintien de l’Autre.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Dans le "Séminaire, Livre V", "Les formations de l'inconscient (1957-1958)", éditions du Seuil, 1998, pages 418-419

[ description ] [ accent comique ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

économie de marchés

Il faut abandonner l’idée reçue que nous avons d’une société d’abondance comme d’une société dans laquelle tous les besoins matériels (et culturels) sont aisément satisfaits, car cette idée fait abstraction de toute logique sociale. Et il faut rejoindre l’idée reprise par Marshall Sahlins dans son article sur la "première société d’abondance", selon laquelle ce sont nos sociétés industrielles et productivistes, au contraire de certaines sociétés primitives, qui sont dominées par la rareté, par l’obsession de rareté caractéristique de l’économie de marché.

Plus on produit, plus on souligne, au sein même de la profusion, l’éloignement irrémédiable du terme final que serait l’abondance - définie comme l’équilibre de la production humaine et des finalités humaines.

Puisque ce qui est satisfait dans une société de croissance, et de plus en plus satisfait au fur et à mesure que croît la productivité, ce sont les besoins mêmes de l’ordre de production, et non les "besoins" de l’homme, sur la méconnaissance desquels repose au contraire tout le système, il est clair que l’abondance recule indéfiniment : mieux – elle est irrémédiablement niée au profit du règne organisé de la rareté (la pénurie structurelle).

Pour Sahlins, c’étaient les chasseurs-collecteurs (tribus nomades primitives d’Australie, du Kalahari, etc.) qui connaissaient l’abondance véritable malgré leur "pauvreté". Les primitifs n’y possèdent rien en propre, ils ne sont pas obsédés par leurs objets, qu’ils jettent à mesure pour mieux se déplacer. Pas d’appareil de production ni de "travail" : ils chassent et cueillent "à loisir", pourrait-on dire, et partagent tout entre eux.

Leur prodigalité est totale : ils consomment tout d’emblée, pas de calcul économique, pas de stocks. Le chasseur-collecteur n’a rien de l’Homo œconomicus d’invention bourgeoise. Il ne connaît pas les fondements de l’Économie Politique. Il reste même toujours en deçà des énergies humaines, des ressources naturelles et des possibilités économiques effectives. Il dort beaucoup. Il a confiance – et c’est cela qui marque son système économique – en la richesse des ressources naturelles, alors que notre système est marqué (et de plus en plus avec le perfectionnement technique) par le désespoir face à l’insuffisance des moyens humains, par une angoisse radicale et catastrophique qui est l’effet profond de l’économie de marche et la concurrence généralisée.

Auteur: Baudrillard Jean

Info: La société de consommation, pp. 90-91

[ déséquilibre ] [ bêtise structurelle ] [ anthropologie ] [ comparaison ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

christianisme

La supériorité pratique des grandes religions chrétiennes, c'est qu'elles doraient pas la pilule. Elles essayaient pas d'étourdir, elles cherchaient pas l'électeur, elles sentaient pas le besoin de plaire, elles tortillaient pas du panier. Elles saisissaient l'Homme au berceau et lui cassaient le morceau d'autor. Elles le rancardaient sans ambages :

"Toi petit putricule informe, tu seras jamais qu'une ordure ... de naissance tu n'es que merde ... est-ce que tu m'entends ? ... c'est l'évidence même, c'est le principe de tout ! Cependant, peut-être ... peut-être ... en y regardant de tout près ... que t'as encore une petite chance de te faire un peu pardonner d'être comme ça tellement immonde, excrémentiel, incroyable ... c'est de faire bonne mine à toutes les peines, épreuves, misères et tortures de ta brève ou longue existence. Dans la parfaite humilité ... La vie, vache, n'est qu'une âpre épreuve ! T'essoufle pas ! Cherche pas midi à quatorze heures ! Sauve ton âme, c'est déjà joli ! Peut-être qu'à la fin du calvaire, si t'es extrêmement régulier, un héros, de "fermer ta gueule", tu claboteras dans les principes ... mais c'est pas certain ... un petit poil moins putride à la crevaison qu'en naissant ... et quand tu verseras dans la nuit plus respirable qu'à l'aurore ... mais te monte pas la bourriche ! C'est bien tout ! ... fais gaffe ! Spécule pas sur des grandes choses ! Pour un étron c'est le maximum ! ..."

Ça ! c'était sérieusement causé ! Par des vrais pères de l'Église ! Qui connaissaient leur ustensile ! qui se miroitaient pas d'illusions !

La grande prétention au bonheur, voilà l'énorme imposture ! C'est elle qui complique toute la vie ! Qui rend les gens si venimeux, crapules, imbuvables. Y a pas de bonheur dans l'existence, y a que des malheurs plus ou moins grands, plus ou moins tardifs, éclatants, secrets, différés, sournois ...

"C'est avec les gens heureux qu'on fait les meilleurs damnés."

Le principe du diable tient bon. Il avait raison comme toujours en braquant l'Homme sur la matière. Ça n'a pas traîné. En deux siècles, tout fou d'orgueil, dilaté par la mécanique, il est devenu impossible. Tel nous le voyons aujourd'hui, hagard, saturé, ivrogne d'alcool, de gazoline, défiant, prétentieux, l'univers avec un pouvoir en secondes ! Éberlué, démesuré, irrémédiable, mouton et taureau mélangé, hyène aussi. Charmant. Le moindre obstrué trou du cul, se voit Jupiter dans la glace. Voilà le grand miracle moderne. Une faculté gigantesque, cosmique. L'envie tient la planète en rage, en tétanos, en surfusion. Le contraire de ce qu'on voulait arrive forcément. Tout créateur au premier mot se trouve à présent écrasé de haines, concassé, vaporisé. Le monde entier tourne critique, donc effroyablement médiocre. Critique collective, torve, larbine, bouchée, esclave absolue.

Auteur: Céline Louis-Ferdinand

Info: Mea Culpa (1936)

[ misanthropie ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

christianisme

La supériorité pratique des grandes religions chrétiennes, c'est qu'elles doraient pas la pilule. Elles essayaient pas d'étourdir, elles cherchaient pas l'électeur, elles sentaient pas le besoin de plaire, elles tortillaient pas du panier. Elles saisissaient l'Homme au berceau et lui cassaient le morceau d'autor. Elles le rancardaient sans ambages :

" Toi petit putricule informe, tu seras jamais qu'une ordure ... de naissance tu n'es que merde ... est-ce que tu m'entends ? ... c'est l'évidence même, c'est le principe de tout ! Cependant, peut-être ... peut-être ... en y regardant de tout près ... que t'as encore une petite chance de te faire un peu pardonner d'être comme ça tellement immonde, excrémentiel, incroyable ... c'est de faire bonne mine à toutes les peines, épreuves, misères et tortures de ta brève ou longue existence. Dans la parfaite humilité ... La vie, vache, n'est qu'une âpre épreuve ! T'essoufle pas ! Cherche pas midi à quatorze heures ! Sauve ton âme, c'est déjà joli ! Peut-être qu'à la fin du calvaire, si t'es extrêmement régulier, un héros, de " fermer ta gueule ", tu claboteras dans les principes ... mais c'est pas certain ... un petit poil moins putride à la crevaison qu'en naissant ... et quand tu verseras dans la nuit plus respirable qu'à l'aurore ... mais te monte pas la bourriche ! C'est bien tout ! ... fais gaffe ! Spécule pas sur des grandes choses ! Pour un étron c'est le maximum !  ... "

Ça ! c'était sérieusement causé ! Par des vrais pères de l'Église ! Qui connaissaient leur ustensile ! qui se miroitaient pas d'illusions !

La grande prétention au bonheur, voilà l'énorme imposture ! C'est elle qui complique toute la vie ! Qui rend les gens si venimeux, crapules, imbuvables. Y a pas de bonheur dans l'existence, y a que des malheurs plus ou moins grands, plus ou moins tardifs, éclatants, secrets, différés, sournois ...

" C'est avec les gens heureux qu'on fait les meilleurs damnés. "

Le principe du diable tient bon. Il avait raison comme toujours en braquant l'Homme sur la matière. Ça n'a pas traîné. En deux siècles, tout fou d'orgueil, dilaté par la mécanique, il est devenu impossible. Tel nous le voyons aujourd'hui, hagard, saturé, ivrogne d'alcool, de gazoline, défiant, prétentieux, l'univers avec un pouvoir en secondes ! Éberlué, démesuré, irrémédiable, mouton et taureau mélangé, hyène aussi. Charmant. Le moindre obstrué trou du cul, se voit Jupiter dans la glace. Voilà le grand miracle moderne. Une faculté gigantesque, cosmique. L'envie tient la planète en rage, en tétanos, en surfusion. Le contraire de ce qu'on voulait arrive forcément. Tout créateur au premier mot se trouve à présent écrasé de haines,  concassé, vaporisé. Le monde entier tourne critique, donc effroyablement médiocre. Critique collective, torve, larbine, bouchée, esclave absolue.

Auteur: Céline Louis-Ferdinand

Info: Mea Culpa (1936)

[ sincère ] [ démystifiant ] [ désillusionnant ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

consensus mou

Il faudrait ne jamais débattre. Le débat, comme le reste, dans notre univers d’intransitivité galopante, a perdu son complément d’objet. On débat avant de se demander de quoi : l’important est de se rassembler. Le débat est devenu une manie solitaire qu’on pratique à dix, à cinquante, à cent, un stéréotype célibataire en même temps que grégaire, une façon d’être ensemble, un magma d’entregloses qui permet de se consoler sans cesse de jamais atteindre, seul, à rien de magistral. Il faudrait ne jamais débattre ; ou, si l’on y tient vraiment, ne débattre que de la nécessité de faire des débats. Se demander à l’infini, jusqu’à épuisement, quelle est l’idéologie du débat en soi et de sa nécessité jamais remise en cause ; et comment il se fait que le réel multiple dont le débat prétend débattre s’efface au rythme même où il est débattu. Mais aucun débat ne peut s’élaborer sur une telle question, car c’est précisément cette évaporation du réel qui est le véritable but impensé de tout débat. On convoque les grands problèmes et on les dissout au fur et à mesure qu’on les mouline dans la machines de la communication. Et plus il y a de débat, moins il y a de réel. Il ne reste, à la fin, que le mirage d’un champ de bataille où s’étale l’illusion bavarde et perpétuelle que l’on pourrait déchiffrer le monde en le débattant ; ou, du moins, qu’on le pourra peut-être au prochain débat. C’est de cette illusion-là dont se nourrit le débatteur. Pourquoi faut-il débattre ? Tout argument dont on débat est supposé faible, par définition, puisqu’il peut être démoli ou entamé par un autre argument. Toute pensée que l’on est obligée de soutenir mérite de s’écrouler. Et d’ailleurs la véritable pensée, la pensée magistrale, ne commence que là où le débat s’achève (ou devient silencieux). Or, il n’y a que le magistral qui compte, parce qu’il ouvre à la pleine connaissance de la réalité humaine, et il n’est jamais obtenu en frottant l’une contre l’autre des idées hétéroclites comme, dans les contes orientaux, on frotte des babouches pour en faire sortir des génies. Une nouvelle pensée, une pensée magistrale du monde ne peut pas être discutée, pesée tranquillement, soupesée entre gens de bonne compagnie, amendée, corrigée, nuancée, tripotée, faisandée de pour et de contre jusqu’à ce qu’elle ressemble à une motion de compromis dans une assemblée syndicale ou à la misérable synthèse terminale d’un congrès du parti socialiste. Toute proposition originale est menacée dans le débat, par ce qui peut lui arriver de pire : un protocole d’accord. Une nouvelle pensée du monde peut et doit être assénée comme un dissentiment irrémédiable, comme une incompatibilité d’humeur. Il ne faut pas argumenter, il faut trancher dans le vif. Penser, c’est présenter la fracture.

Auteur: Muray Philippe

Info:

[ opium du peuple ] [ mise en scène démocratique ]

 

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confusion

Il est pensif, sans doute, mais cela n'a rien d'exceptionnel chez lui, car c'est un homme qui aime penser méthodiquement, lucidement, en distinguant finement les concepts qu'il manie avec une compétence de vrai professionnel. D'un certain point de vue, ce qui le laisse aujourd'hui pensif, c'est le fait d'être pensif, car sa réflexion vient d'aborder un thème qui lui semble globalement inadéquat, ou plutôt qui lui paraît invalidé par la réticence foncière dont il fait montre à l'égard des idées claires et précises ; un léger malaise commence en fait à l'atteindre, il serait préférable de l'apaiser. Le thème en question est l'amour. Il ne fait pas de doute qu'il éprouve un vif intérêt pour une jeune femme qui, au dire des experts, est amoureuse - leur avis se fonde sur des signes manifestes. Or lui est tout à fait certain que son intérêt aussi vif qu'indubitable relève d'une variante de l'amitié, de la participation, de la collaboration affective - c'est là un terme qu'il trouve très satisfaisant - mais qu'il est absolument étranger à l'amour. Il a cependant l'impression que la jeune femme, chez qui il ne nie pas un certain prestige tant physique que moral, a tendance à proposer une interprétation peu claire, inadéquate, insuffisamment et injustement réfléchie de leur relation. La chose l'embarrase, car il ne fait aucun doute par ailleurs qu'il considère sous un jour sincèrement favorable la présence de la jeune femme dans sa vie. Mais aussi, par respect pour sa propre probité mentale, il ne peut accepter que la jeune femme, d'un caractère sans doute un peu irréfléchi, ait le sentiment d'être plus ou moins au seuil d'une relation, ou encore qu'elle lui prête des pensées peu claires et puisse imaginer, par exemple, qu'il n'instaure pas une rigoureuse frontière lexicale entre "violente affection" et "amour". Il est on ne peut plus conscient de ne pas être amoureux, de n'avoir aucune disposition pour une relation privée, et de ne pouvoir envisager une telle chose dans un futur concevable. Sa position lui semble claire, honnête, explicite. Il ne comprend pas pourquoi la jeune femme a tant de peine à saisir des propos si lucides, pourquoi elle reste interloquée devant sa proposition de relation non relationnelle, sans amour mais affectueuse, chaude mais détachée, ce qui lui semble à lui une suggestion claire et utile. Il ne nie pas, d'un autre côté, que l'amour de la jeune femme le flatte énormément, et si la jeune femme abandonnait de tels sentiments, cela serait de sa part un signe d'inconstance ; et il lui serait difficile d'être l'ami de quelqu'un d'inconstant et de peu clair. A ce point de sa réflexion, le voilà de nouveau pensif. Il a l'impression d'être tombé dans un piège tendu par le "peu clair", l'anxiété qui commence à le ronger ne cessera que lorsqu'il en sera totalement, irrémédiablement sorti.

Auteur: Manganelli Giorgio

Info: "TRENTE HUIT" - In "Centurie", éd. Christian Bourgois, p. 71, trad. par J.B. Para - un des cent "mini romans-fleuves qui composent ce livre

[ logique ] [ catastrophe ] [ entêtement ] [ gamberge ] [ femmes-hommes ]

 
Mis dans la chaine
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Ajouté à la BD par Benslama

captation technologique

Conformément à l’aphorisme de Ludwig Wittgenstein que je cite abondamment dans cette étude, selon lequel "le monde est l’ensemble des faits et non des choses", la structure du monde ainsi que d’un langage correctement – non pathologiquement – institué, et partant celle du réel se situant à leur interface est d’être relationnelle. Suivant notre perspective moniste, le cerveau humain inscrit dans un semblable écrin reçoit son plein oxygène de cette structure relationnelle dans laquelle il doit impérativement évoluer sous peine de dépérir. Le cadre circonscrivant les écrans est établi au prix de quatre coups de ciseaux qui le délimitent, et le désarriment du réel en constituant un pseudo-réel appauvri de substitution. Pseudo-réel appauvri : on imagine bien la destructivité d’une semblable chose, d’où l’interaction intersubjective a totalement disparu, quand on a compris que seule l’intersubjectivité effective contribue à l’institution et la vascularisation du sujet.

D’où provient donc une telle fascination pour les images, et pis encore, pour les images animées, véritable trou noir qui aspire irrémédiablement le sujet fragile ? Le problème provient des conditions de notre inscription au sein du monde, sous le sceau de notre finitude, dont l’horizon ultime est une certitude lancinante : celle de notre propre mort. Dans ce cadre, notre cerveau est soumis à un stress cognitif permanent lié à la profusion d’informations chaotiques qu’il reçoit du monde, en permanence et sans aucun répit. Pour y faire face, il ne cesse d’analyser, de classer, d’évaluer et de comparer les informations reçues avec celles déjà connues, en cherchant à établir des vecteurs de causalité qui permettraient d’anticiper les différents types de finalités éventuellement présentes en leur sein. Tout ceci est effectué à l’aune d’une grille référentielle simple mais constante : ceci ou cela va-t-il vers l’accroissement de mon être, donc vers la vie, ou vers une atteinte à ma propre vitalité, psychique, physique, affective, etc… donc vers la mort, ou au moins une logique mortifère ? Ce stress cognitif est épuisant et cherche en permanence un répit quel qu’il soit. L’image, et bien plus encore l’image animée, comporte en elle-même des inférences causales préétablies par le peintre, le photographe, le cinéaste, qui l’orientent téléologiquement a priori, sous le surplomb de l’intentionnalité du geste artistique initial. Le spectateur est existentiellement à l’abri du surgissement de tout événement chaotique relevant de la constitution naturelle du sens causal, dont l’établissement dans la vie réelle relève toujours d’une construction a posteriori. Ceci ligote le spectateur dans sa dimension de sujet en le livrant à une irrémédiable passivité dont on peut certes retenir le bénéfice d’un mimétisme cathartique pour un sujet déjà correctement institué, mais dont la destructivité pour un sujet fragile ou incomplètement advenu à lui-même est incalculable. La raison en est double : pour que la catharsis puisse s’établir, en premier lieu, il faut que l’identification à soi-même soit rendue possible par un soi déjà constitué dans sa quasi plénitude ; par ailleurs, la représentation (re-présentation) est toujours arrimée à un référent initial et premier dans l’ordre de l’expérience, en raison d’une simple évidence : le monde nous précède fondamentalement, chronologiquement et ontologiquement. Si la représentation se trouve en situation de précéder le référent initial, les polarités cognitives s’inversent de façon extrêmement destructrice, le monde devenant une représentation de la représentation : doublement éloigné dans l’ordre de l’absence, où les conditions initiales permettant l’émergence du sujet – la triade fondamentale Je-Tu-Il – sont condamnées à une indistinction létale.

Enfin, last but not least, la caractéristique essentielle à retenir de l’art comme élément constituant sans lequel il disparaîtrait en tant que tel, est qu’il repose sur l’éviction de toute forme d’intersubjectivité réelle comme je l’ai signalé plus haut, le spectateur étant consigné à une indépassable passivité réceptive. Les diverses tentatives contemporaines pour briser cet effet de structure se signalent surtout par le fait qu’elles démontrent son intangibilité, sous peine de condamner l’art à l’insignifiance d’une gesticulation dépourvue de propos, du fait de l’effraction du réel en son sein.

J’en conclus qu’il est impératif de supprimer toute forme d’écran, quelle qu’en soit la nature, dans l’entourage des personnes atteintes de troubles autistiques sévères. J’ai pu vérifier, durant mon travail avec Raphaël, à quel point leur influence était délétère sur les progrès de son développement subjectal, en régression nette par rapport aux séances précédentes si par malheur il avait visionné quelque film : il était à nouveau sujet à des écholalies et des comportements erratiques à nouveau difficilement maîtrisables, nécessitant un effort supplémentaire conséquent de notre part à lui et à moi pour récupérer le terrain ainsi perdu.

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme, pages 44-46

[ parodie désubjectivante ] [ dangers ]

 

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décès

Mourir n'est plus ce qu'il était !
Intensiviste à l'Hôpital Saint-Luc et président du Comité du don d'organes et de tissus du CHUM, le Dr Pierre Aslanian considère son travail comme très valorisant, car il contribue à l'effort collectif de sauver des vies.
"Dans les années 50, l'arrêt définitif du coeur constituait le seul critère de la mort. Ce n'est plus le cas aujourd'hui", déclare le Dr Pierre Aslanian, intensiviste à l'Hôpital Saint-Luc et président du Comité du don d'organes et de tissus du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM). "Depuis l'introduction du concept de mort cérébrale, soit l'arrêt complet et définitif de toute activité du cerveau, par un comité de la Harvard Medical School en 1968, c'est l'état du cerveau qui fait pencher la balance."
La peau du patient est rosée et chaude, son coeur bat, même son thorax se soulève à un rythme régulier, puisque sa respiration est maintenue artificiellement par un appareil et, pourtant, le patient est bel et bien mort. Pour confirmer la mort cérébrale, deux médecins indépendants de l'équipe de prélèvement et de transplantation ont reproduit divers tests cliniques selon un protocole bien défini. "D'abord, il faut connaître l'étiologie du dommage au cerveau, indique Pierre Aslanian. Sans la cause, on ne peut pas conclure à une mort cérébrale. Il faut aussi s'assurer qu'il n'y a aucun facteur confondant comme des sédatifs en circulation dans le sang au moment où l'on effectue les tests."
Concrètement, pour évaluer l'état et l'évolution d'un patient, les médecins disposent d'échelles internationales standardisées, comme l'échelle de coma Glasgow et le protocole de diagnostic du décès neurologique (DDN) de Transplant Québec, grâce auxquelles on peut mesurer notamment la réponse motrice à la douleur et les réflexes du tronc cérébral, la partie inférieure du cerveau responsable de la conscience. L'absence de réflexe respiratoire est validée par un test d'apnée. En cas de doute ou s'il y a présence de facteurs confondants, le DDN doit être établi par un examen complémentaire, par exemple une angiographie cérébrale qui permet d'objectiver l'arrêt de la circulation sanguine encéphalique. Le diagnostic est sans équivoque. L'absence de circulation intracrânienne entraîne une destruction totale et irréversible du cerveau.
"La souffrance d'une famille ébranlée par la mort brutale d'un proche l'empêche souvent de comprendre ce qui se passe exactement, souligne le Dr Aslanian. Les médecins doivent bien expliquer que les organes sont maintenus en fonction de manière artificielle, mais que le patient ne peut pas se réveiller d'un décès neurologique. Son cerveau est mort !"
Toutes les semaines, l'intensiviste, qui possède 20 ans de pratique à l'unité des soins intensifs du centre hospitalier, est confronté à cette dure réalité. Cela est d'autant plus difficile que parfois le patient en état de mort cérébrale peut avoir des réflexes spinaux, mentionne le Dr Aslanian. "On le pince et il y a un mouvement, mais celui-ci n'est pas provoqué par le cerveau. Ce sont les nerfs périphériques reliés à la moelle épinière qui en sont responsables." Le professeur de clinique de la Faculté de médecine de l'Université de Montréal donne régulièrement à l'intention des infirmières et résidents en médecine du CHUM des ateliers sur ce qu'est la mort cérébrale. "Pour offrir l'option du don d'organes aux familles, il faut d'abord savoir reconnaître les donneurs potentiels, signale-t-il. Malheureusement, encore de nos jours, environ 20 % des donneurs potentiels ne le sont pas dans les hôpitaux du Québec."
L'histoire de la mort
Longtemps on a déterminé la mort d'une personne par un acte rudimentaire. Le croquemort se contentait de mordre le gros orteil du défunt pour vérifier qu'il avait réellement trépassé. L'absence de réaction de sa part confirmait définitivement son état. Jusqu'aux années 50, les médecins tâtaient le pouls et cherchaient à voir si de la condensation se formait sur un miroir placé près de la bouche et du nez. La présence ou l'absence de battements du coeur décidait du classement définitif du patient du côté des morts ou des vivants. Puis, avec la venue de la ventilation mécanique qui maintient artificiellement la respiration, on commence à suspendre l'instant de la mort. En 1968, la mort cardiovasculaire cède la place au concept de mort cérébrale, soit "la perte irrémédiable de toutes les fonctions de l'ensemble du cerveau, du tronc cérébral et des deux hémisphères", comme la définit pour la première fois le comité de l'Université Harvard.
"Le premier article scientifique sur la question présenté à la communauté médicale a été publié dans une revue neurologique française en 1959. Les médecins y décrivaient le dommage cérébral important associé à un coma profond duquel les patients ne se réveillaient pas. C'est de cette publication qu'est né le concept de mort cérébrale que les experts de Harvard ont fait connaître internationalement", raconte le Dr Aslanian en précisant que cette époque correspond aussi aux débuts de la transplantation d'organes.
"La notion du décès neurologique a complètement changé notre rapport à la mort", estime le Dr Aslanian. Bien reçu et adopté par divers organismes à l'échelle de la planète, le DDN a néanmoins été contesté sans succès à plusieurs reprises devant les tribunaux américains. "Une commission présidentielle relative aux problèmes bioéthiques et aux aspects biomédicaux en recherche a voulu en 1981 légiférer pour une définition encore plus claire du DDN", rappelle l'intensiviste. En 1995, l'Académie américaine de neurologie constate pour sa part que beaucoup de médecins retiennent des critères différents et insiste pour standardiser les pratiques.
"Même si l'on reconnaît l'intérêt d'uniformiser les façons de faire, les politiques de déclaration de mort cérébrale varient non seulement d'un pays à l'autre, mais aussi d'un État à l'autre", note Pierre Aslanian. Au Canada, en France, en Angleterre et aux États-Unis, le DDN est fait conformément aux pratiques médicales reconnues. Mais il y a certaines nuances. Ainsi, en France, le recours à l'électroencéphalogramme ou à l'angiographie est obligatoire pour attester le caractère irréversible de l'arrêt des fonctions cérébrales. Chez nous et chez nos voisins du Sud, ces tests auxiliaires sont réalisés seulement en cas de doute ou lorsque l'examen clinique ne peut être effectué.
Et puis, il y a les exceptions comme le Japon, où il se pratique très peu de transplantations à partir de donneurs cadavériques. Car, dans l'empire du Soleil-Levant, un grand malaise persiste quant au concept de mort cérébrale.

Auteur: http://www.techno-science.net/

Info: 19.04.2016

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nord-sud

Les "élites" autoproclamées de Davos ont peur. Très peur. Lors des réunions du Forum économique mondial de cette semaine, le maître à penser Klaus Schwab - affichant son numéro de méchant de James Bond - n'a cessé de répéter un impératif catégorique : nous avons besoin de "coopération dans un monde fragmenté".

Bien que son diagnostic de la "fragmentation la plus critique" dans laquelle le monde est aujourd'hui embourbé soit, comme on pouvait s'y attendre, sombre, Herr Schwab maintient que "l'esprit de Davos est positif" et qu'au final, nous pourrons tous vivre heureux dans une "économie verte et durable".

Ce que Davos a su faire cette semaine, c'est inonder l'opinion publique de nouveaux mantras. Il y a le "nouveau système" qui, compte tenu de l'échec lamentable de la grande réinitialisation tant vantée, ressemble maintenant à une mise à jour hâtive du système d'exploitation actuel, qui a été ébranlé.

Davos a besoin de nouveau matériel, de nouvelles compétences en programmation, voire d'un nouveau virus. Pourtant, pour l'instant, tout ce qui est disponible est une "polycrise" ou, en langage de Davos, un "ensemble de risques mondiaux liés entre eux et dont les effets s'aggravent". 

En clair : une parfaite tempête.

Les insupportables raseurs de l'île "Diviser pour régner" du nord de l'Europe viennent de découvrir que la "géopolitique", hélas, n'est jamais vraiment entrée dans le pénible tunnel de la "fin de l'histoire" : à leur grande surprise, elle est maintenant centrée - à nouveau - sur le Heartland, comme elle le fut pendant la majeure partie de l'histoire connue.

Ils se plaignent d'une géopolitique "menaçante", synonyme de Russie-Chine, l'Iran en plus.

Mais la cerise sur le gâteau alpin, c'est l'arrogance/la stupidité qui révèle le jeu : la City de Londres et ses vassaux sont livides parce que le "monde créé par Davos" s'effondre rapidement.

Davos n'a pas " inventé " le monde, si ce n'est son propre simulacre.

Davos n'a jamais rien compris, car ces "élites" ont toujours été occupées à faire l'éloge de l'Empire du Chaos et de ses "aventures" meurtrières dans le Sud.

Non seulement Davos n'a pas su prévoir toutes les crises économiques majeures récentes, mais surtout la "tempête parfaite" actuelle, liée à la désindustrialisation de l'Occident collectif engendrée par le néolibéralisme.

Et, bien sûr, Davos n'a aucune idée de la véritable remise à zéro qui tend à aller vers la multipolarité. 

Des leaders d'opinion autoproclamés sont occupés à "redécouvrir" qu'un siècle plus tard La Montagne magique de Thomas Mann se déroule à Davos - "avec pour toile de fond une maladie mortelle et une guerre mondiale imminente".

Eh bien, de nos jours, la "maladie" - arme entièrement bio-institutionnalisée - n'est pas vraiment mortelle en soi. Et la "guerre mondiale imminente" est de fait activement encouragée par une cabale de néo-cons et autres néolibéraux américains : un État profond non élu, non responsable, bipartisan et même pas soumis à une idéologie. Le criminel de guerre centenaire Henry Kissinger ne l'a toujours pas compris.

Le panel de Davos sur la démondialisation a multiplié les non-séquences, mais le ministre hongrois des affaires étrangères, Peter Szijjarto, a au moins apporté une dose de réalité.

Quant au vice-premier ministre chinois Liu He, avec sa vaste connaissance de la finance, de la science et de la technologie, il a au moins été très utile pour définir les cinq grandes lignes directrices de Pékin pour l'avenir prévisible - au-delà de la sinophobie impériale habituelle.

La Chine se concentrera sur l'expansion de la demande intérieure, le maintien de chaînes industrielles et d'approvisionnement "fluides", le "développement sain du secteur privé", l'approfondissement de la réforme des entreprises d'État et la recherche d'"investissements étrangers attrayants".

Résistance russe, précipice américain 

Emmanuel Todd n'était pas à Davos. Mais c'est l'anthropologue, historien, démographe et analyste géopolitique français qui a fini par hérisser toutes les plumes supposément compétentes de l'Occident collectif ces derniers jours avec un objet anthropologique fascinant : une interview basée sur la réalité.

Todd s'est entretenu avec Le Figaro - journal de prédilection de l'establishment et de la haute bourgeoisie française. L'interview a été publiée vendredi dernier à la page 22, entre les proverbiales tirades russophobes et avec une mention extrêmement brève en bas de la première page. Il fallait donc que les gens fassent des efforts pour la trouver.   

Todd a plaisanté en disant qu'il avait l'image - absurde - d'un "rebelle destroy" en France, alors qu'au Japon, il est respecté, qu'il fait l'objet d'articles dans les médias grand public et que ses livres sont publiés avec grand succès, y compris le dernier (plus de 100 000 exemplaires vendus) : "La troisième guerre mondiale a déjà commencé".

Il est significatif que ce best-seller japonais n'existe pas en français, étant donné que toute l'industrie de l'édition basée à Paris suit la ligne de l'UE et de l'OTAN sur l'Ukraine.

Le fait que Todd ait raison sur plusieurs points est un petit miracle dans le paysage intellectuel européen actuel, d'une myopie abyssale (il existe d'autres analystes, notamment en Italie et en Allemagne, mais ils ont bien moins de poids que Todd).

Voici le résumé des thème principaux abordés par Todd.

- Une nouvelle guerre mondiale est en cours : En "passant d'une guerre territoriale limitée à un affrontement économique mondial, entre l'Occident collectif d'un côté et la Russie liée à la Chine de l'autre, cette guerre est devenue une guerre mondiale".

- Selon Todd, le Kremlin a commis une erreur en calculant qu'une société ukrainienne décomposée s'effondrerait immédiatement. Bien entendu, il n'explique pas en détail comment l'Ukraine a été militarisée à outrance par l'alliance militaire de l'OTAN.

- Todd a raison lorsqu'il souligne que l'Allemagne et la France sont devenues des partenaires mineurs de l'OTAN et n'étaient pas au courant de ce qui se tramait en Ukraine sur le plan militaire : "Ils ne savaient pas même que les Américains, les Britanniques et les Polonais pouvaient permettre à l'Ukraine de mener une guerre prolongée. L'axe fondamental de l'OTAN est désormais Washington-Londres-Varsovie-Kiev".

- La principale révélation de Todd est meurtrière : "La résistance de l'économie russe conduit le système impérial américain vers le précipice. Personne n'avait prévu que l'économie russe tiendrait face à la 'puissance économique' de l'OTAN".

- Conséquence, "les contrôles monétaires et financiers américains sur le monde peuvent s'effondrer, et avec eux la possibilité pour les USA de financer pour rien leur énorme déficit commercial".

- "C'est pourquoi nous sommes dans une guerre sans fin, dans un affrontement dont la conclusion est l'effondrement de l'un ou l'autre." 

- Sur la Chine, Todd pourrait faire penser à une version plus féroce de celle de Liu He à Davos : "C'est le dilemme fondamental de l'économie américaine : elle ne peut pas faire face à la concurrence chinoise sans importer une main-d'œuvre chinoise qualifiée."

- Quant à l'économie russe, "elle accepte les règles du marché, mais avec un rôle important de l'État, et elle garde la flexibilité de former des ingénieurs qui permettent des adaptations, industrielles et militaires."

- Tout cela nous amène, une fois de plus, à la globalisation, d'une manière que les tables rondes de Davos ont été incapables de comprendre : "Nous avons tellement délocalisé notre activité industrielle que nous ne savons pas si notre production de guerre peut être soutenue".

- Dans une interprétation plus érudite de ce sophisme du "choc des civilisations", Todd s'intéresse au soft power et arrive à une conclusion surprenante : "Sur 75 % de la planète, l'organisation de la parentalité était de type patrilinéaire*, et c'est pourquoi nous pouvons identifier une forte compréhension de la position russe. Pour le collectif non-occidental, la Russie affirme un conservatisme moral rassurant."

- Ainsi, ce que Moscou a réussi à faire, c'est de "se repositionner comme l'archétype d'une grande puissance, non seulement "anticolonialiste" mais aussi patrilinéaire et conservatrice en termes de mœurs traditionnelles."

Sur la base de tout ce qui précède, Todd brise le mythe vendu par les "élites" de l'UE/OTAN - Davos inclus - selon lequel la Russie est "isolée", en soulignant comment les votes à l'ONU et le sentiment général à travers le Sud global caractérisent la guerre, "décrite par les médias grand public comme un conflit de valeurs politiques, en fait, à un niveau plus profond, comme un conflit de valeurs anthropologiques."      

Entre lumière et obscurité

Se pourrait-il que la Russie - aux côtés du vrai Quad, tel que je l'ai défini (avec la Chine, l'Inde et l'Iran) - l'emporte sur le terrain des enjeux anthropologiques ?  

Le vrai Quad a tout ce qu'il faut pour s'épanouir en un nouveau foyer interculturel d'espoir dans un "monde fragmenté".

Mélangez la Chine confucéenne (non dualiste, sans divinité transcendante, mais avec le Tao qui coule à travers tout) avec la Russie (chrétienne orthodoxe, vénérant la divine Sophia) ; l'Inde polythéiste (roue de la renaissance, loi du karma) ; et l'Iran chiite (islam précédé par le zoroastrisme, l'éternelle bataille cosmique entre la Lumière et les Ténèbres).

Cette unité dans la diversité est certainement plus attrayante, et plus édifiante, que l'axe de la guerre éternelle.

Le monde en tirera-t-il une leçon ? Ou, pour citer Hegel - "ce que nous apprenons de l'histoire, c'est que personne n'apprend de l'histoire" - sommes-nous irrémédiablement condamnés ?

Auteur: Escobar Pepe

Info: https://www.presstv.ir, 18 janvier 2023, *système de filiation dans lequel chacun relève du lignage de son père

[ ukraine 2023 ] [ point chaud ] [ inertie patriarcale ]

 

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Dauphins : cerveau, conscience et intelligence

Les scientifiques rassemblés à San Diego, Californie, à l'occasion du Congrès annuel de l'Association Américaine pour l'Avancement de la Science, en ce mois de février 2010, ont conclu que le dauphin était un mammifère aussi évolué et intelligent que l’humain. Pour confirmer leurs assertions, ils se fondent notamment sur le développement phénoménal de son lobe frontal, siège de la pensée consciente et sur sa capacité que partagent seulement les grands singes et les éléphants de se reconnaître dans un miroir.

Ils insistent aussi sur le fait que le dauphin Tursiops Truncatus, (mais que sait-on des autres cétacés, de leur langage, de leurs cultures si riches et si variées?.) dispose du plus gros cerveau du monde, après celui de l’Homme, selon la théorie du coefficient encéphalique. Méfiance : celle-ci ne tient cependant pas compte des circonvolutions du cortex, largement plus nombreuses chez le cachalot ou d'autres cétacés que chez l'Homme. A la seule aune de ce coefficient, le singe Saïmiri nous dépasserait tous !

Par ailleurs, le carburant du cerveau, c’est le glucose, et à ce niveau, Dauphins et Humains partagent un métabolisme quasiment identique. De telles capacités cognitives, selon les scientifiques de San Diego où, rappelons-le, se trouve également le principal centre de dressage des dauphins militaires aux USA – pose un grave problème éthique quant à la détention forcée en delphinarium de ces remarquables cétacés. Ce point a été évoqué.

Notons que la sur-évolution des cétacés, un espèce née trente millions d'années avant JC, alors que nous ne totalisons au compteur que 160.000 ans en tant qu'Homo Sapiens, selon les dernières données de Pascal Picq, ne se situe pas seulement au niveau de la pensée consciente.

I. L’INTELLIGENCE DES DAUPHINS EN QUESTION

A quel niveau, la barre ?

De vigoureux débats ont régulièrement lieu à propos de l’intelligence du dauphin, où se retrouvent et s’opposent globalement trois opinions : Il y a ceux qui mettent la barre très haut. Ils pensent - peut-être à raison – que les dauphins sont dotés de pouvoirs paranormaux, et transcendent de très loin toutes nos possibilités mentales. Par exemple, pour Jim Nollman, la pensée cachalot étant produite par un cerveau cinq fois plus puissant que le nôtre est forcément cinq fois plus complexe et donc inaccessible à notre compréhension.

Sur un mode nettement moins rationnel et plus égoïste, la mouvance New Age tend à considérer les dauphins comme des extraterrestres arrivant de Sirius pour apporter un message au Monde et servir aux progrès des Hommes. C’est de cette mouvance, malheureusement, qu’est issue la mode des Dolphin Assisted Therapy (DAT) et l’on peut donc craindre que ces idéologies ne servent avant tout à favoriser l’expansion de ce marché.

Il y a ceux qui mettent la barre très bas. Et ceux-là très clairement, ont reçu pour mission de justifier les captures pour les delphinariums ou les massacres des baleines. On lira ainsi avec stupéfaction certaines études réductrices qui ramènent le cerveau du cétacé aux dimensions de celui du hérisson ou tendent à prétendre que les baleines ne sont finalement que de gros "bovidés de la mer", stupides, indolentes et presque insensibles. De même, toute la galaxie de chercheurs et vétérinaires vendus à l’industrie du delphinarium déclarera d’une seule voix que l’intelligence du dauphin ne dépasse guère celle du chien.

Et il y a ceux qui tentent de faire la part des choses... Et notamment d’aborder de manière objective une série de d’études scientifiques ou d’observations de terrain convergentes. En regroupant ces recherches, en les collationnant, en les mettant en perspectives, il devient alors très difficile de croire que les cétacés puissent n’être que des "toutous marins"…

Le frein de l’anthropocentrisme

La disqualification systématique des compétences cognitives des cétacés n’est pourtant pas le fait de seuls baleiniers ou des "dolphin trainers". Certains cétologues et associations (Anne Collet, Greenpeace) adoptent cette position, affirment-ils, par souci d’objectivité. En fait, il semble surtout qu’une sorte de terreur sacrée les saisisse devant l’effondrement de l’un des derniers dogmes inexpugnables du canon scientifique : "l’Homme, mesure de toutes choses, image de Dieu sur terre, est seul doté de conscience et de langage".

"En traçant une limite stricte entre l’Homme et la Bête" ajoute Keith Thomas, "le but principal de nos théoriciens modernes était surtout de justifier la chasse, la domestication, l’ingestion de la chair d’un animal mort, la vivisection – qui devint une pratique scientifique courante dès le 19 ème siècle - et l’extermination à large échelle de la vermine et des prédateurs".

On trouve un peu partout – mais surtout dans le monde de l’édition francophone – de pitoyables gesticulations mentales visant à dénigrer, chaque fois que faire se peut, toute contestation de cette vérité première, aussi évidente que la course du soleil autour de la terre. Innombrables sont les études qui nient que la guenon Washoe, le bonobo Kanzi ou le perroquet Alex puissent parlent de vrais langages. Un article récent allait même jusqu’à contester la notion de "conscience de soi" chez l’animal non-humain et le fait que les expériences de reconnaissance face au miroir puissent avoir valeur de preuve en ce domaine.

Bref, pour beaucoup d’humanistes de la vieille école, la prééminence de l’être humain sur le plan de l’intellect est un dogme, une conviction d’ordre affectif presque désespérée, et non pas une certitude scientifique. L’anthropocentrisme qui fonde toute notre vision du monde nous rend, semble-t-il, incapable d’appréhender la possibilité d’une conscience autre, "exotique" selon le mot de H.Jerison, mais parfaitement complète, aboutie et auto-réflexive.

Pourtant, insiste Donald Griffin : "Il n’est pas plus anthropomorphique, au sens strict du terme, de postuler l’existence d’expériences mentales chez d’autres espèces animales, que de comparer leurs structures osseuses, leurs systèmes nerveux ou leurs anticorps avec ceux des humains".

TECHNOLOGIE ET INTELLIGENCE

Cerveau vaste et puissant que celui du dauphin, certes. Mais encore ? Qu’en fait-il ? C’est là l’ultime argument massue de notre dernier carré d’humanistes qui, très expressément, maintient la confusion entre Intelligence et Technologie. Or nous savons – nous ne pouvons plus nier – que d’autres types d’intelligences existent. On se reportera notamment au passionnant ouvrage de Marc Hauser "Wild Minds : what animals really think" (Allen Lane éditions, Penguin Press, London 2000) qui définit en termes clairs la notion "d’outillage mental". Même si de grands paramètres restent communs à la plupart des espèces psychiquement évoluées, dit en substance l’auteur (règle de la conservation des objets, cartes mentales pour s’orienter, capacité de numériser les choses, etc.), à chaque environnement correspond néanmoins une vision du monde, un mode de pensée propre, qui permet à l’individu de survivre au mieux.

Les écureuils sont capables de garder à l’esprit des cartes mentales d’une précision hallucinante, fondée sur des images géométriques. Les baleines chassent avec des rideaux de bulles, dont le réglage demande une grande concentration et une puissance de calcul peu commune. Les orques et les dauphins ne produisent rien, c’est vrai mais ils sont là depuis des millions d’années, ne détruisent pas leur biotope, vivent en belle harmonie, n’abandonnent pas leurs blessés, ne se font pas la guerre entre eux et dominaient tous les océans jusqu’à ce que l’Homme vienne pour les détruire. Toutes vertus généralement qualifiées de "sens moral" et qui révèlent un très haut degré de compréhension du monde.

Il en est de même pour l’être humain : technicien jusqu’au bout des doigts, champion incontesté de la manipulation d’objets et de chaînes de pensées, adepte des lignes droites, de la course et de la vitesse, il vit dans un monde à gravité forte qui le maintient au sol et lui donne de l’environnement une vision bidimensionnelle.

L’imprégnation génétique de nos modes de conscience est forte : nous avons gardé de nos ancêtres la structure sociale fission-fusion mâtinée de monogamie, la protection de nos "frontières" est toujours assurée, comme chez les autres chimpanzés, par des groupes de jeunes mâles familialement associés (frères, cousins puis soldats se battant pour la Mère Patrie), notre goût pour la science, le savoir et les découvertes n’est qu’une forme sublimée de la néophilie presque maladive que partagent tous les grands primates, et notre passion pour les jardins, les parcs, les pelouses bien dégagés et les "beaux paysages" vient de ce que ceux-ci évoquent la savane primitive, dont les grands espaces partiellement arborés nous permettaient autrefois de nous cacher aisément puis de courir sur la proie...

Mais bien sûr, l’homme est incapable de bondir de branche en branche en calculant son saut au plus juste, il est incapable de rassembler un banc de poissons diffus rien qu’en usant de sons, incapable de tuer un buffle à l’affût en ne se servant que de son corps comme arme, etc.

Ce n’est certes pas pour nous un titre de gloire que d’être les plus violents, les plus cruels, les plus astucieux, les plus carnivores, mais surtout les plus habiles et donc les plus polluants de tous les grands hominoïdes ayant jamais vécu sur cette planète, et cela du seul fait que nous n’avons pas su ou pas voulu renoncer à nos outils mentaux primordiaux ni à nos règles primitives.

Au-delà de nos chefs-d’oeuvre intellectuels – dont nous sommes les seuls à percevoir la beauté – et de nos créations architecturales si calamiteuses au niveau de l’environnement, la fureur primitive des chimpanzés est toujours bien en nous, chevillée dans nos moindres gestes et dans tous nos désirs : plus que jamais, le pouvoir et le sexe restent au centre des rêves de tous les mâles de la tribu...

De la Relativité Restreinte d’Einstein à la Bombe d’Hiroshima

Une dernière question se pose souvent à propos de l’intelligence des cétacés : représente-t-elle ou non un enjeu important dans le cadre de leur protection ?

Là encore, certaines associations s’indignent que l’on puisse faire une différence entre la tortue luth, le tamarin doré, le cachalot ou le panda. Toutes ces espèces ne sont-elles pas également menacées et leur situation dramatique ne justifie-t-elle pas une action de conservation d’intensité égale ? Ne sont-elles pas toutes des "animaux" qu’il convient de protéger ? Cette vision spéciste met une fois encore tous les animaux dans le même sac, et le primate humain dans un autre…

Par ailleurs, force est de reconnaître que l’intelligence prodigieuse des cétacés met un autre argument dans la balance : en préservant les dauphins et baleines, nous nous donnons une dernière chance d’entrer en communication avec une autre espèce intelligente. Il est de même pour les éléphants ou les grands singes mais le développement cognitif des cétacés semblent avoir atteint un tel degré que les contacts avec eux pourraient atteindre au niveau de vrais échanges culturels.

Les seuls animaux à disposer d’un outil de communication relativement similaire au nôtre c’est à dire transmis sur un mode syntaxique de nature vocale – sont en effet les cétacés. On pourrait certainement communiquer par certains signes et infra-sons avec les éléphants, par certains gestes-symboles et mimiques avec les chimpanzés libres, mais ces échanges ne fourniraient sans doute que des informations simples, du fait de notre incapacité à nous immerger complètement dans la subtilité de ces comportements non-verbaux. Tout autre serait un dialogue avec des dauphins libres qui sont, comme nous, de grands adeptes du "vocal labeling", de la désignation des choses par des sons, de l’organisation de ces sons en chaînes grammaticalement organisées et de la création de sons nouveaux pour désigner de nouveaux objets.

Cette possibilité, inouïe et jamais advenue dans l’histoire humaine, est pour nous l’un des principaux enjeux de la conservation des "peuples de la mer" véritables nations cétacéennes dont nous ne devinerons sans doute que très lentement les limites du prodigieux univers mental. Une telle révolution risque bien d’amener d’extraordinaires changements dans notre vision du monde.

Il n’est d’ailleurs pas impossible que notre pensée technologique nous rende irrémédiablement aveugle à certaines formes de réalité ou fermé à certains modes de fonctionnement de la conscience. Comme l’affirme Jim Nollman, il se peut en effet que les cachalots soient capables d’opérations mentales inaccessibles à notre compréhension.

Il se peut que leur cerveau prodigieusement développé les rende à même de percevoir, mettons, cinq ou six des onze dimensions fondamentales de l’univers (Lire à ce propos : "L’Univers élégant" de Brian Greene, Robert Laffont éditeur) plutôt que les quatre que nous percevons ? Quel aspect peut avoir l’océan et le ciel sous un regard de cette sorte ?

Si nous ne leur parlons pas, impossible à savoir.

On imagine la piètre idée qu’ont pu se faire les premiers colons anglais de ces yogis immobiles qu’ils découvraient au fond d’une grotte en train de méditer... Se doutaient-ils seulement à quoi ces vieux anachorètes pouvaient passer leur temps ? Avaient-ils la moindre idée du contenu des Upanishads ou des Shiva Sutras, la moindre idée de ce que pouvait signifier le verbe "méditer" pour ces gens et pour cette culture ?

Les baleines bleues, les cachalots, les cétacés les plus secrets des grands fonds (zyphius, mésoplodon) sont-ils, de la même manière, des sages aux pensées insondables nageant aux frontières d’autres réalités… et que nous chassons pour leur viande ?

On se souvient aussi du mépris profond que l’Occident manifestait jusqu’il y a peu aux peuples primitifs. Les Aborigènes d’Australie vivaient nus, n’avaient que peu d’outils et se contentaient de chasser. Stupides ? Eh bien non ! La surprise fut totale lorsque enfin, on pris la peine de pénétrer la complexité inouïe de leurs mythes, de leurs traditions non-écrites et de leur univers mental... notions quasi inaccessible à la compréhension cartésienne d’un homme "civilisé".

Auteur: Internet

Info: http://www.dauphinlibre.be/dauphins-cerveau-intelligence-et-conscience-exotiques

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