Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits. Recherche mots ou phrases tous azimuts. Aussi outil de précision sémantique et de réflexion communautaire. Voir la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats !!!!..... Lire la suite >>
Résultat(s): 56
Temps de recherche: 0.0655s

insularité

L’île est un capteur dans l’univers qui l’entoure. Je veux dire par là qu’on n’a pas besoin de savoir, parce qu’on perçoit. De là-haut, par exemple, je les vois, les officiers des navires qui repèrent ma lumière. Je touche les radars qui signalent ma présence aux navigateurs. J’entends les cris des hirondelles qui mettent le cap sur ce rocher pour y passer la nuit pendant leur migration. Je parviens à capter parfaitement Radio Malte, qui diffuse le bulletin des déplacements de bateaux transportant des désespérés d’Afrique du Nord. Avoir la vision d’ensemble : voilà ce que signifie pour moi la perception pélagique du monde. A Berlin, on ne peut pas le comprendre, ni même à Rome ou à Paris, parce que la culture est une culture de terre ferme. On n’y a pas de visionnaires, on n’y a que des analystes dans leurs fichus bureaux d’étude.

Auteur: Rumiz Paolo

Info: Le phare, voyage immobile, p 89

[ surplomb ] [ espace ]

 

Commentaires: 0

perte de signification

Tout "tourne rond" dans la machine, mais la machine ne sait pas pourquoi elle tourne. Les travailleurs jouissent d’un bien-être incomparable, et ils ne sont pas heureux parce qu’ils se sentent paradoxalement privés à la fois de l’être, c’est-à-dire de la conscience d’exister réellement et du bien, c’est-à-dire des vertus – un élan, une discipline, un amour – qui, en donnant un sens et un but à la destinée, nourrissent cette conscience.

Un élan, j’entends le goût et l’attachement à l’activité professionnelle. Le travail le mieux rémunéré et le moins pénible reste une charge s’il ne comporte pas cet élément de spontanéité et de gratuité qu’apporte la vocation à ce travail. [...] dans une société normale, il ne devrait pas y avoir de métier sur lequel le travailleur ne projette pas ce désir de se réaliser dans une œuvre extérieure, qui compte parmi les besoins essentiels de l’être humain.

Auteur: Thibon Gustave

Info: Dans "L'équilibre et l'harmonie", Librairie Arthème, Fayard, 1976, page 38

[ aliénation ] [ morcellement ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

états limites

Il arrive que nous prenions des pré-psychotiques en analyse, et nous savons ce que cela donne - cela donne des psychotiques. […]

Ne touchons-nous pas là dans notre expérience même, et sans avoir à le chercher plus loin, à ce qui est au cœur des motifs d’entrée dans la psychose ? C’est ce qui peut se proposer de plus ardu à un home, et à quoi son être dans le monde ne l’affronte pas si souvent – c’est ce qu’on appelle prendre la parole, j’entends la sienne, tout le contraire dire oui, oui à celle du voisin. Cela ne s’exprime pas forcément en mots. La clinique montre que c’est justement à ce moment-là, si on sait le repérer à des niveaux très divers, que la psychose se déclare.

Quelque fois il s'agit d'une très petite tâche de prise de parole, alors que le sujet vivait jusque-là dans son cocon, comme une mite.

Auteur: Lacan Jacques

Info: Dans le "Séminaire, Livre III", "Les psychoses", éditions du Seuil, 1981, page 397

[ psychanalyse ] [ conter-indication ] [ élément déclencheur ] [ symbolisation impossible ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

couvent

Il ne fait pas encore jour. De ma cellule j’entends des voix, et les ritournelles séculaires, offrandes à un ciel latin et banal. Plus tôt dans la nuit, des pas se précipitaient vers l’Eglise. Les matines ! Et pourtant Dieu lui-même assisterait-il à sa propre célébration que je ne descendrais point dans un froid pareil ! Mais, de toute manière, il doit exister, sinon ces sacrifices de créatures de chair, secouant leur paresse pour l’adorer, seraient d’une telle insanité que la raison ne pourrait en supporter la pensée. Les preuves de la théologie sont futiles comparées à ce surmenage qui rend perplexe l’incroyant, et l’oblige à attribuer un sens et une utilité à tant d’efforts. A moins qu’il ne se résigne à une perspective esthétique sur ces insomnies voulues et qu’il ne voie dans la vanité de ces veilles l’aventures la plus gigantesque entreprise vers une Beauté de non-sens et d’effroi… La splendeur d’une prière qui ne s’adresse à personne !

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Dans "Précis de décomposition" in Œuvres, éditions Gallimard, 1995, page 703

[ athéisme ] [ absurdité ] [ témoin externe ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

misanthrope

Je vais être franc : je n’aime pas la plupart des gens – ils me fatiguent, me pompent l’air, me sortent par les yeux, me détroussent, me mentent, me baisent, me trompent, me donnent des leçons, m’insultent, m’adorent ; mais surtout ils parlent parlent PARLENT jusqu’à ce que je me sente comme un chat fourré par un éléphant. Disons juste que j’en retire aucun plaisir, à la longue ces choses-là me font du mal. Dans les usines et les abattoirs, les gens n’ont pas le temps de parler, et rien que pour ça je souhaiterais remercier la bonté de mes patrons pleins aux as. J’entends jamais leurs voix même quand ils me foutent à la porte, et de tous les fils de pute que vous avez rencontrés je suis sans doute celui qui démissionne et qu’on débarque le plus ; mais j’entends jamais leurs voix ; c’est noble et délicat c’est courtois, je mets juste les voiles et ne pense même pas à tirer sur quelqu’un depuis un toit.

Auteur: Bukowski Charles

Info: Dans "Sur l'écriture", lettre à Henry Miller, 16 août 1945

[ usure ] [ casse-pieds ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

habitudes

La routine est le seul style de vie à ma portée. Par routine, j’entends un petit répertoire d’activités tranquilles, les unes agréables les autres obligatoires. Le secret, pour leur conférer l’apparence du bonheur, est de rendre les contraintes plaisantes et d’éviter que les plaisirs ne deviennent contraignants — car si on a tout à gagner à joindre le plaisir aux premières, on perd beaucoup à mettre de l’obligation dans les seconds. En somme, la routine à laquelle je me plie ressemble à cette sagesse petite-bourgeoise prônée par Montaigne visant une existence "sans miracle ni extravagance". Rien n’égale en charme, à mes yeux, le train paisible de l’amour, de l’écriture, de la lecture et autres agréments, auquel je me laisse aller sans réserve ni vergogne. — Mais alors, me dira-t-on, que faites-vous de l’aventure ? De la lutte ? Hélas ! L’une demande une curiosité et l’autre une vitalité que je n’ai pas. Les chasseurs de nouveaux horizons me rasent. Les rebelles me lassent. La vraie vie est ailleurs ? Qu’ils y aillent. Mon utopie est ici, entre la plage, ma chambre, ma bibliothèque. Et c’est un territoire que je défendrai manu militari.

Auteur: Schiffter Frédéric

Info: Journées perdues

[ éloge ] [ familiarité des jours ] [ simplicité ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

nord-sud

L’intervention de Zelensky au festival cannois va de soi si vous regardez ça sous l’angle de ce qu’on appelle "la mise en scène" : un mauvais acteur, un comédien professionnel, sous l’œil d’autres professionnels de leurs propres professions.

Je crois que j’avais dû dire quelque chose dans ce sens il y a longtemps. Il aura donc fallu la mise en scène d’une énième guerre mondiale et la menace d’une autre catastrophe pour qu’on sache que Cannes est un outil de propagande comme un autre. Ils propagent l’esthétique occidentale, quoi…

S’en rendre compte n’est pas grand-chose mais c’est déjà ça. La vérité des images avance lentement. Maintenant, imaginez que la guerre elle-même soit cette esthétique déployée lors d’un festival mondial, dont les parties prenantes sont les États en conflit, ou plutôt "en intérêts", diffusant des représentations dont on est tous spectateurs… vous comme moi.

J’entends qu’on dit souvent "conflit d’intérêt", ce qui est une tautologie. Il n’y a de conflit, petit ou grand, que s’il y a intérêt. Brutus, Néron, Biden, ou Poutine, Constantinople, l’Irak ou l’Ukraine, il n’y a pas grand-chose qui a changé, mise à part la massification du meurtre.

Auteur: Godard Jean-Luc

Info: 23 mai 2022

[ ukraine-russie ] [ géopolitique ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

humiliation

Les enfants dans les écoles sont une engeance impitoyable : pris séparément, ce sont des anges du ciel mais ensemble, surtout à l’école, ils sont très souvent impitoyables. Ils le taquinaient donc, un noble esprit s’est éveillé en Ilioucha. Un petit garçon ordinaire, un fils faible se serait résigné, aurait eu honte de son père, mais lui, il s’est dressé seul contre tous pour défendre son père. Son père et la vérité, la justice. Car ce qu’il a enduré alors qu’il baisait la main de votre frère et qu’il criait : "Pardonnez à mon petit papa, pardonnez à mon petit papa", cela Dieu seul le sait, et moi. Et c’est ainsi que nos petits, j’entends les nôtres, pas les vôtres, les petits des miséreux, méprisés mais nobles, c’est ainsi que, dès l’âge de neuf ans, ils apprennent à connaître la vérité sur cette terre. Les riches, comment pourraient-ils l’apprendre, eux ? De toute leur vie, ils n’exploreront jamais une telle profondeur, tandis que mon Iliouchka, au moment même où, sur la place, il lui baisait les mains, a accédé à toute la vérité. Elle est entrée en lui, cette vérité, et l’a marqué à jamais, prononça le capitaine avec passion, l’air de nouveau éperdu et, ce faisant, il frappa de son poing droit la paume de sa main gauche, comme pour montrer comment cette "vérité" avait marqué Ilioucha.

Auteur: Dostoïevski Fédor Mikhaïlovitch

Info: Dans "Les Frères Karamazov", traduction d'Elisabeth Guertik, le Cercle du bibliophile, page 262

[ réel ] [ cruauté ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

Gaule

[…] il y a deux choses que j’ai découvertes en France. Ce que signifie manger. Et ce que signifie écrire. Avant de venir en France, je mangeais comme un animal. Parce que ma mère, jamais elle ne nous a expliqué : à midi, on va manger ça et ça. Jamais je n’ai entendu un commentaire disant : ça c’est bon, et ça c’est mauvais. On mangeait, c’est tout. (Rires.) Ma famille n’était absolument pas pauvre, loin de là, mais on considérait que l’acte de manger ne participait pas de la civilisation. Encore que je ne vienne pas d’un peuple civilisé, mais enfin, le problème n’est pas là. On n’en est pas là. Mais voilà ce qui se passait : quand je suis arrivé à Paris, j’ai débarqué dans un petit hôtel du quartier Latin. Et je descendais tous les matins pour téléphoner en bas, et je me rappelle, tout au début, j’entends la patronne, son mari et leur fil discuter : "Maman, qu’est-ce qu’on va manger à midi ?" C’est vrai, pendant une demi-heure ils élaborent tout un truc. Moi, je pensais qu’ils avaient des invités. Ça s’est répété deux ou trois fois, et finalement indéfiniment, puis je me suis dit : "Eh bien, manger, c’est donc un acte intellectuel. Ça fait partie vraiment de la civilisation." Et je commençais quand je mangeais, à faire des commentaires : "C’est bon." Je commençais à manger de façon consciente…

Auteur: Cioran Emil Michel

Info: Entretiens

[ culture ] [ spécificité ] [ écriture ] [ nourriture ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

réforme de l'église

[...] il n’y a que deux philosophies, si on tient absolument à ce mot ignoble : la spéculative chrétienne, c’est-à-dire la théologie du Pape, et la torcheculative. L’une pour le midi, l’autre pour le nord. Voulez-vous que je vous fasse en deux mots cette histoire de dégoûtation ? Avant votre Luther, on n’était pas déjà trop brillant dans le monde germanique. Quand je dis votre, j’entends le Luther de cette nation crapuleuse. C’était une ingouvernable pétaudière de cinq ou six cents États dont chacun représentait un grouillis de caboches obscures, imperméables à la lumière, dont les descendants ne peuvent être orientés ou disciplinés qu’à coups de trique. L’autorité spirituelle était là-dessus comme l’abeille sur le fumier. Luther eut cet avantage suprême d’être le Salaud attendu par les patriarches de la gueuserie septentrionale. Il incarnait à ravir la bestialité, l’inintelligence des choses profondes et le croupissant orgueil de tous les buveurs de pissat de vache. Il fut adoré, naturellement, et tout le nord de l’Europe s’empressa d’oublier la Mère Église pour aller dans les fientes de ce marcassin. Le mouvement continue depuis bientôt quatre siècles et la philosophie allemande, exactement qualifiée par moi tout à l’heure, est la plus copieuse ordure tombée du protestantisme. Ça se nomme l’esprit d’examen, ça s’attrape avant de naître, aussi bien que la syphilis, et il se trouve de petits français assez engendrés au-dessous des dépotoirs pour écrire que c’est tout à fait supérieur à l’intuition de notre génie national.

Auteur: Bloy Léon

Info: Dans "La femme Pauvre", Mercure de France, 1972, pages 166-167

[ vacheries ] [ diatribe ] [ religion ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson