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anticlassicisme

Mon hermétisme aux grandes oeuvres classiques se confirme encore une fois. Déjà, l'Enéide m'avait soulée ; quant à l'Iliade et l'Odyssée, je n'arrive toujours pas à comprendre ce qui les distingue l'une de l'autre et pour tout dire, je crois les avoir lus mais je n'en suis même plus sûre. le cas non-échant, c'est dire si l'idée de les lire me traumatise. Toutefois, je m'incite parfois à penser que je ne suis jamais à l'abri d'une bonne surprise et, comme ne trouvant guère de bonnes surprises dans ce que je connais déjà – le connaissant déjà - je me plais fatalement à rechercher les bonnes surprises vers ce qui semble a priori le moins apte à me convenir. Me glissant dans la peau d'un personnage que je ne suis pas, mais qui aurait de nobles goûts littéraires, je me prends à dresser la liste de ce qui pourrait plaire dans cette oeuvre du Paradis perdu. Commençons.

Tout d'abord, Chateaubriand a fait beaucoup d'efforts pour nous en fournir une version très littéraire et recherchée. Il s'est fait chier à essayer de reproduire le rythme et les tonalités des phrases originales, et de ce point de vue c'est réussi. Il se permet même des néologismes, plutôt couillu à une époque que j'imagine conservatrice, mais après tout qu'est-ce que j'en sais de ce qui se faisait vraiment ou pas tellement en ces temps-là ?

Ensuite, Milton s'est posé un défi plutôt audacieux puisque le Paradis Perdu revisite l'épisode biblique du péché originel sur le mode de l'épopée. Imaginez un épisode chrétien chanté par des prêtres déguisés en poètes grecs, ou un truc du genre, pardonnez mon imprécision ignare et typique de notre siècle. La progression est donc assez prévisible et on retrouve notamment ce qui m'avait déjà barbé dans l'Enéide, une sorte de publicité généalogique des descendants du "héros", ici donc Adam, qui dure au moins dix minutes, le temps idéal en effet pour aller aux chiottes avant un épisode plus intéressant. Certes, on se fait quand même moins chier qu'en lisant la Bible, à condition d'aimer toutefois le lyrisme poétique et l'hystérisme descriptif, ce qui n'est pas mon cas. Quand je lis un Zola, j'ai l'habitude de sauter systématiquement toutes les descriptions ; quand je lis Milton, j'épure systématiquement les phrases de tout ce qui ne se réduit pas à sujet-verbe-complément d'objet. le reste peut être joliment trouvé, mais l'accumulation de mots d'esprits et de prouesses poétiques finit toujours par me donner la gerbe. La dernière fois que j'avais éprouvé ça, j'avais éclusé trop de vin blanc et je m'étais retrouvée la tête tournant à la vitesse d'un manège déchaîné, tout foutant le camp autour de moi alors que je comatais végétalement sur un pieu. Très désagréable. Bref, cette lourdeur étouffante n'était peut-être qu'une contrainte d'époque pour être lu (comme la contrainte pour être lu, de nos jours, c'est d'être une star de la télé, du sport ou du porno). La préparation de la bataille menée par Satan est le pire morceau du livre, c'est dommage parce que c'est ce qui ouvre l'épopée et ce qui devrait normalement convaincre le lecteur de rester un peu plus longtemps.

Auteur: Colimasson

Info: critique de "Le paradis perdu" de John Milton sur Babelio

[ lecture ]

 
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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

individuation

Lorsque l’enfant réussit à se cuirasser contre la douleur et à faire preuve de rebond vital, de résilience, il va souvent suivre la pente du héros. Le héros dans tous les mythes a une origine princière, mais il est blessé, voire abandonné d’une façon ou d’une autre, et doit trouver un moyen de compenser son extrême fragilité en découvrant sa destinée qui est toujours en partie différente de celle de son groupe familial. Quitte à le retrouver bien des années plus tard lorsqu’il rentrera de ses épopées porteur du trésor, ou du remède, dont sa communauté a besoin. Le conte que mes analysants m’ont rappelé le plus souvent est bien sûr celui du "vilain petit canard" du poète danois Andersen. Une mère cane découvre parmi ses œufs un œuf d’allure bizarre. Puis c’est le caneton qui lui aussi paraît bizarre et, en tout cas, différent du reste de la couvée. Le pauvre oiseau grandit sans jamais se sentir à sa place, systématiquement les autres canards, les canards BCBG le snobent. Mais un jour, il aperçoit près d’un lac un groupe de magnifiques oiseaux blancs. Fasciné par la famille cygnes, il s’approche timidement, et pendant qu’il se penche sur la berge pour boire il rencontre dans l’eau son image. Lui aussi est devenu maintenant un bel oiseau lumineux.
En analyse on commence par rencontrer tous les aspects de soi-même par lesquels on s’est senti isolé, différent, incompris, inacceptable, récusé, humilié, vilain petit canard. Puis peu à peu en suivant le fil de l’âme et en découvrant un sens à sa vie, on résonne au diapason d’êtres de plus en plus nombreux, ornés des mêmes plumes scintillantes acquises dans la traversée de chaque épreuve. On ne naît pas cygne, on le devient…
Mais cet enfant héros, cet enfant cygne, s’il est souvent précoce, voire surdoué, dans certains domaines de la vie – arts, carrière, fortune, notoriété naissent souvent sous ses pas –, reste marqué par la fêlure des carences oubliées. Et c’est dans le domaine de l’engagement affectif qu’il est le plus fragile, soit qu’il tombe dans la passion amoureuse avec la force compulsive de l’addiction, soit qu’il se protège et se mure derrière une haie d’épines digne de la plus endormie des belles au bois dormant. Les sentiments oscillent entre la dépendance affective et l’anesthésie. Les scénarios de désillusion se répètent et ce n’est parfois que tard dans l’existence que notre héros/héroïne acceptera, à la faveur d’une rencontre, de se décongeler, de sortir son cœur du freezer pour que la vie maternelle le réchauffe doucement. [...]
Guérir de son passé, s’individuer, cela revient finalement à retrouver le grand souffle heureux de l’âme du monde. Celui qui habite le nouveau-né avant que les épreuves de la vie ne commencent. C’est trouver son propre souffle. Commencer, ou recommencer à aimer, quel que soit l’âge, quels que soient les hauts et bas de la vie. Redevenir enfant, renouer avec la confiance de l’enfant, mais chargé de toute la maturité conquise au travers de ces seuils initiatiques que sont les épreuves que chacun traversera à coup sûr. Ce n’est pas un hasard si toutes les voies de sagesse enseignent que l’éveillé est comme un petit enfant, simple et presque naïf, rien ne le distingue dans la rue des autres hommes, mais, comme dit joliment la tradition zen, partout où il va, autour de lui les cerisiers fleurissent.

Auteur: Colonna Marie-Laure

Info: Dans "Réenchanter l’Occident, vers un éveil de la conscience individuelle et collective"

[ symbolique ] [ révolution personnelle ] [ amor fati ] [ symptôme-sinthome ] [ psychanalyse ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

père-fille

Notre pauvre enfant, Annie, née à Gower St le 2 mars 1841 est décédée à Malvern le 23 avril 1851 à midi. J'écris ces quelques pages, car je pense que dans les années à venir, si nous vivons, les impressions que je viens d'écrire me rappelleront plus vivement ses principales caractéristiques. De quelque point de vue que je la regarde, le trait principal de son caractère qui s'impose immédiatement à moi est sa joie de vivre tempérée par deux autres caractéristiques, à savoir sa sensibilité, qui aurait pu facilement passer inaperçue aux yeux d'un étranger, et sa grande affection. Sa joie et son esprit animal rayonnaient sur tout son visage et rendaient chacun de ses mouvements élastiques, pleins de vie et de vigueur. C'était un plaisir et une joie de la voir. Son cher visage se dresse maintenant devant moi, comme elle avait l'habitude de descendre les escaliers en courant avec une pincée de tabac à priser volée pour moi, son attitude entière rayonnant du plaisir de donner du plaisir. Même lorsqu'elle jouait avec ses cousins et que sa joie se transformait presque en turbulence, un seul regard de ma part, non pas de mécontentement (car je remercie Dieu de n'en avoir presque jamais jeté sur elle), mais de manque de sympathie, modifiait pendant quelques minutes toute sa physionomie. Cette sensibilité au moindre reproche la rendait très facile à gérer et très bonne : elle n'avait presque jamais besoin d'être prise en défaut et n'était jamais punie de quelque manière que ce soit. Sa sensibilité e manifesta très tôt dans la vie, en pleurant amèrement sur toute histoire un tant soit peu mélancolique, ou en se séparant d'Emma, même pour un court laps de temps. Une fois, alors qu'elle était très jeune, elle s'est exclamée "Oh Mamma, que ferions-nous si tu venais à mourir".

L'autre point de son caractère, qui rendait sa joie de vivre et son esprit si délicieux, était sa forte affection, qui était d'une nature très attachante et caressante. Lorsqu'elle était encore un bébé, cela se manifestait par le fait qu'elle ne pouvait jamais se passer de toucher Emma lorsqu'elle était au lit avec elle, et dernièrement, lorsqu'elle était mal en point, elle caressait pendant un certain temps l'un des bras d'Emma. Lorsqu'elle était très malade, le fait qu'Emma s'allonge à côté d'elle semblait l'apaiser d'une manière tout à fait différente de ce qu'elle aurait fait pour n'importe lequel de nos autres enfants. De même, elle passait presque toujours une demi-heure à arranger mes cheveux, à les "rendre", comme elle disait, "beaux", ou à lisser, le pauvre chéri, mon col ou mes manchettes, bref à me caresser. Elle aimait être embrassée ; en fait, chaque expression de son visage rayonnait d'affection et de bonté, et toutes ses habitudes étaient influencées par sa disposition affectueuse.

Outre sa gaieté ainsi tempérée, elle était dans ses manières remarquablement cordiale, franche, ouverte, d'un naturel direct et sans aucune nuance de réserve. Tout son esprit était pur et transparent. On avait l'impression de la connaître parfaitement et de pouvoir lui faire confiance : J'ai toujours pensé que, quoi qu'il arrive, nous aurions eu dans notre vieillesse au moins une âme aimante, que rien n'aurait pu changer. Elle était généreuse, belle et sans méfiance dans toute sa conduite ; elle était exempte d'envie et de jalousie ; elle avait bon caractère et n'était jamais passionnée. Elle était donc très populaire dans toute la maison, les étrangers l'aimaient et l'appréciaient rapidement. La manière même dont elle serrait la main de ses connaissances témoignait de sa cordialité.

Sa silhouette et son apparence étaient clairement influencées par son caractère : ses yeux brillaient, elle souriait souvent, son pas était élastique et ferme, elle se tenait droite et rejetait souvent la tête un peu en arrière, comme si elle défiait le monde dans sa joie de vivre. Pour son âge, elle était très grande, pas mince et forte. Ses cheveux étaient d'un beau brun et longs ; son teint légèrement brun ; ses yeux, gris foncé ; ses dents grandes et blanches. Le Daguerrotype lui ressemble beaucoup, mais l'expression lui fait entièrement défaut : ayant été fait deux ans plus tard, son visage s'était allongé et était devenu plus beau. Tous ses mouvements étaient vigoureux, actifs et généralement gracieux : llorsque nous faisions le tour du chemin de sable ensemble, bien que je marche vite, elle avait souvent l'habitude de me précéder en pirouettant de la manière la plus élégante, son cher visage brillant tout le temps, avec les sourires les plus doux.

De temps en temps, elle avait une attitude coquette envers moi, dont le souvenir est charmant : elle utilisait souvent un langage exagéré, et lorsque je la questionnais en exagérant ce qu'elle avait dit, je revois clairement le petit mouvement de tête et l'exclamation "Oh Papa, quelle honte". - Elle avait un intérêt vraiment féminin pour l'habillement et était toujours soignée : une satisfaction non dissimulée, échappant en quelque sorte à toute teinte de vanité, rayonnait sur son visage lorsqu'elle avait mis la main sur un ruban ou un mouchoir gai de sa mère. Un jour, elle s'est habillée d'une robe de soie, d'un bonnet, d'un châle et de gants d'Emma, ressemblant à une petite vieille femme, mais avec sa couleur exacerbée, ses yeux pétillants et ses sourires bridés, elle était, je m'en rappelle, tout à fait charmante.

Elle admirait cordialement les plus jeunes enfants ; combien de fois l'ai-je entendue déclarer avec emphase. "Quel petit canard cette Betty, n'est-ce pas ?

Elle était très adroite, faisant tout proprement avec ses mains : elle apprenait facilement la musique, et j'en suis sûr, en observant son visage quand elle écoutait les autres jouer, qu'elle avait un goût prononcé pour la musique. Elle avait un certain goût pour le dessin, et pouvait copier les visages très joliment. Elle dansait bien et aimait beaucoup cela. Elle aimait la lecture, mais ne manifestait aucun goût particulier. Elle avait une habitude singulière qui, je présume, aurait fini par se transformer en une activité quelconque, à savoir un grand plaisir à chercher des mots ou des noms dans les dictionnaires, les annuaires, les gazetiers et, dans ce dernier cas, à trouver les lieux sur la carte : de même, elle prenait un intérêt étrange à comparer mot à mot deux éditions du même livre ; et encore, elle passait des heures à comparer les couleurs de n'importe quel objet avec un de mes livres, dans lequel toutes les couleurs sont classées et nommées.

Sa santé s'est légèrement détériorée pendant environ neuf mois avant sa dernière maladie ; mais elle ne lui a donné qu'occasionnellement un de l'inconfort : dans ces moments-là, elle n'a jamais été le moins du monde fâchée, irritable ou impatiente ; c'était merveilleux de voir, à mesure que l'inconfort passait, avec quelle rapidité ses esprits élastiques lui rendaient sa gaieté et son bonheur. Pendant la dernière courte maladie, sa conduite fut tout simplement angélique ; elle ne s'est jamais plainte, ne s'est jamais énervée, a toujours eu de la considération pour les autres et a été reconnaissante de la manière la plus douce et la plus pathétique pour tout ce qui a été fait pour elle. Lorsqu'elle était si épuisée qu'elle pouvait à peine parler, elle louait tout ce qu'on lui donnait, et disait qu'un thé "était merveilleusement bon". Lorsque je lui ai donné de l'eau, elle m'a dit : "Je vous remercie beaucoup" ; et je crois que ce sont là les derniers mots précieux que ses chères lèvres m'ont jamais adressés.

Mais en regardant en arrière, c'est toujours l'esprit de joie qui se dresse devant moi comme son emblème et sa caractéristique : elle semblait formée pour vivre une vie de bonheur : ses esprits étaient toujours retenus par une sensibilité, une peur de déplaire à ceux qu'elle aimait, et son tendre amour ne cessait jamais de se manifester par des caresses et tous les autres petits actes d'affection.

Nous avons perdu la joie du ménage et le réconfort de notre vieillesse : elle devait savoir à quel point nous l'aimions ; oh, si elle pouvait maintenant savoir à quel point nous aimons encore et aimerons toujours son cher visage joyeux, profondément et tendrement. Bénédictions pour elle.

Le 30 avril 1851

Auteur: Darwin Charles

Info: Il a écrit ce mémorial pour sa fille une semaine après sa mort

[ deuil ] [ eulogie ]

 

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Ajouté à la BD par miguel