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destin

Le dieu dont l’oracle est à Delphes, Apollon, n’explique pas les prédictions qu’il nous livre, ni ne nous les cache : il donne juste des indications pour comprendre.

Auteur: Héraclite d'Éphèse

Info: Fragments, §93

[ réconciliation ] [ symbiose ] [ moi-soi ]

 

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athée

Le Père Brown : - C’est le premier effet de ne pas croire en Dieu : vous perdez votre sens commun et ne pouvez plus voir les choses comme elles sont.

Auteur: Chesterton Gilbert Keith

Info: L’oracle du chien, nouvelle, in L’Incrédulité du père Brown

[ incroyant ] [ mécréant ] [ agnostique ]

 

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économies

Jamais il n’a été autant déblatéré contre l’argent qu’en ces sociétés où il règle tout ; et l’on a tiré maints profits de la dénonciation du Capital. Nous ne lui dressons plus des autels sur les places comme au temps de Louis-Philippe, nous lui réservons seulement une case dans un classeur. De public, le culte du Veau est devenu pénate et clandestin. Nous ne l’enfouissons plus dans les bois, dans la cave d’une banque. De cet argent mythique nous ne connaîtrons qu’un chiffre : de temps à autre nous allons au temple consulter l’oracle, et clic, voici qu’il nous est rendu. [...]

Nous avons deux vies, celle où nous fraternisons et conversons religion, art ou politique, celle où nous comptons ; et cette distinction devient souvent presque absolue avec l’âge.

Auteur: Charbonneau Bernard

Info: Dans "Je fus", R&N Éditions, 2021, pages 190-191

[ compte bancaire ] [ quantitatif ] [ règne souterrain ] [ caché ] [ cerveau fric ]

 

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couvent

Avant toute action dans ce village, nous avons coutume de consulter l’oracle. Nous nous sommes prêtés à cet exercice. Nous avons interrogé la fa, imploré les dieux, sollicité l’assistance des mânes de nos ancêtres. Mais ils nous ont tous répondu par la négation. Toute tentative de neutralisation du fétiche est formellement déconseillée. Car ont-ils dit, ce peuple risquerait d’y laisser la vie. N’étant point convaincus, nous nous sommes rendus dans la forêt sacrée où nous avons passé trois jours et trois nuits au cours desquels nous nous sommes entêtés de savoir s’il y avait un moyen d’apaiser asholé. La réponse qui nous a été servie est la suivante : Le fétiche réclame du sang humain. Combien d’hommes devons-nous sacrifier ? Telle était notre question. Mais la réponse ne s’est pas fait attendre. Autant d’hommes qu’il a été nécessaire de sacrifier pour le constituer, a répondu l’oracle.

Auteur: Wassi A. Sanni

Info: Gbèdossou

[ tradition ] [ rites ] [ fétichisme ]

 

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mythologie

Mais d’où est venu à cette ville le nom d’Athènes, nom qu’évidemment elle emprunte à Minerve, appelée en grec " Ἀθηνᾶ " ? Voici l’origine que Varron signale. Un olivier était soudain sorti de terre ; ailleurs, une source d’eau vive venait de jaillir. Frappé de ce prodige, le roi envoie consulter l’oracle de Delphes, pour savoir ce qu’il faut penser, ce qu’il faut faire. L’oracle répond que l’olivier est l’emblème de Minerve, l’eau celui de Neptune, et qu’il était au pouvoir des citoyens de choisir, pour nommer leur ville, entre les noms de ces deux divinités. A cette réponse de l’oracle, Cécrops appelle aux suffrages les citoyens de l’un et de l’autre sexe : car selon l’ancien usage de ce pays, les femmes mêmes avaient voix dans les délibérations publiques. La multitude est consultée. Les hommes se prononcent en faveur de Neptune, les femmes en faveur de Minerve ; et comme il se trouve une femme de plus, Minerve l’emporte. Alors Neptune irrité précipite sur la terre des Athéniens les flots de la mer. Est-il donc si difficile aux démons de répandre au loin quelque masse d’eau que ce soit ? Pour apaiser la colère de ce dieu, les Athéniens, suivant le même auteur, frappèrent les femmes d’une triple déchéance : elles ne durent plus à l’avenir être admises aux suffrages ; nul enfant en naissant ne dut recevoir désormais le nom de sa mère ; enfin il ne fut plus permis de les appeler "Athéniennes". Ainsi, c’est à la raillerie des démons qui se jouent dans le débat de ces deux divinités, mâle et femelle, c’est à la victoire procurée par les femmes à la femme, que cette cité nourrice des arts libéraux, mère de tant d’illustres philosophes, cette cité, la gloire de la Grèce, doit le nom d’Athènes. Et cependant, frappée par le dieu vaincu, elle est forcée de punir la victoire même de la déesse, redoutant plus les eaux de Neptune que les armes de Minerve. Et dans les femmes ainsi châtiées, Minerve victorieuse est vaincue. Et elle ne vient pas en aide à celles qui l’ont assistée de leurs suffrages, afin qu’en dédommagement du droit dont elles sont déchues, et de cette rigueur qui rend les fils étrangers au nom de leurs mères, il leur soit du moins permis de s’appeler Athéniennes et de porter le nom de la déesse qui doit sa victoire à leurs suffrages !

Auteur: Saint Augustin Aurelius Augustinus

Info: La cité de Dieu, volume 3, traduction du latin de Louis Moreau revue par Jean-Claude Eslin, éditions du Seuil, mai 1994, pages 20-21

[ légende ] [ étymologie ]

 
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voyance

Le patient, en mars dernier, se décida à consulter la diseuse de bonne aventure, et il lui proposa la date de naissance de son beau-frère, sans bien entendu le nommer ou lui révéler qu’il pensait à lui. L’énoncé de l’oracle fut : en juillet-août prochain, cette personne mourra d’un empoisonnement causé par des écrevisses ou des huîtres. Après m’avoir raconté cela, il ajouta : c’est vraiment faramineux.

Ne comprenant pas, je lui répliquai vigoureusement : qu’y a-t-il de si faramineux ? Voilà déjà plusieurs semaines que vous êtes revenu chez moi ; si votre beau-frère était effectivement mort, vous me l’auriez raconté depuis longtemps ; il est donc toujours vivant. La prophétie s’est produite en mars, elle devait s’accomplir au milieu de l’été, nous sommes maintenant en novembre. Elle ne s’est donc pas réalisée, qu’y trouvez-vous de si merveilleux ?

Il me répondit : bien sûr que ce n’est pas arrivé. Mais ce qui est remarquable, c’est ceci : mon beau-frère est un grand amateur d’écrevisses, d’huîtres, etc., et il a effectivement été empoisonné par des écrevisses en août de l’année dernière, et il en est presque mort. Il n’en fut plus question.

Voulez-vous que nous discutions maintenant ce cas.

[…] L’affaire s’explique sans reste, si nous voulons admettre que ce savoir s’est transféré à elle, la soi-disant prophétesse, par des voies inconnues excluant les modes de communication qui nous sont connus. C’est-à-dire qu’il nous faut conclure : il y a du transfert de pensée. Le travail astrologique de la diseuse de bonne aventure y a joué le rôle d’une activité qui détourne et occupe de façon anodine ses forces psychiques de manière à ce qu’elle puisse recevoir et transmettre l’effet des pensées d’un autre, devenir un véritable "médium". Nous connaissons par exemple dans le trait d’esprit de semblables arrangements, lorsqu’il s’agit d’assurer à un processus psychique une décharge plus automatique. 

Mais l’analyse fournit à ce cas un surcroît de sens. Elle nous apprend que ce n’est pas un fragment quelconque de savoir indifférent qui s’est transmis par voie d’induction d’une personne à une autre, mais qu’un souhait extraordinairement fort de quelqu’un […] peut se trouver une expression consciente légèrement voilée à l’aide de quelqu’un d’autre […]. On pourrait reconstruire le cours des pensées du jeune homme après la maladie et le rétablissement du beau-frère haï comme rival. Bien, ce coup-ci c’est vrai qu’il en a vraiment réchappé, mais c’est bien pourquoi il ne va pas renoncer à ce goût dangereux et, la prochaine fois, espérons qu’il en mourra. C’est cet "espérons" qui est transformé en prophétie.

Auteur: Freud Sigmund

Info: "Psychanalyse et télépathie", trad. Wladimir Granoff et Jean-Michel Rey in "La transmission de pensée", éd. Flammarion, 2005, pages 47 à 53

[ explication psychanalytique ] [ désir refoulé ] [ inconscient ] [ parapsychologie ]

 
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totalitarismes

Apparemment enhardi par ses propres formulations, Jung s’aventure avec confiance sur la glace fragile des généralisations et des pronostics politiques. Tout d’abord, il exprime sa foi en la démocratie : "En qualité de Suisse, je suis un démocrate invétéré, et cependant je reconnais que la nature est aristocratique, et de plus, ésotérique." S’étant ainsi absous lui-même, il poursuit : "Les grands actes libérateurs de l’histoire universelle ont été accomplis par des personnalités dominantes, jamais par la masse inerte qui est en tout temps secondaire et dépend du démagogue si elle doit éventuellement bouger." Le péan de la nation italienne, ajoute-t-il, est dédié à la personnalité du Duce, et les chants funèbres des autres nations lamentent l’absence de grands chefs. Au cas où nous pourrions encore douter de la nature de ces grands chefs, Jung ajoute une note marginale qui mérite d’être citée en entier : Ce chapitre a été originellement donné sous forme de conférence sous le titre de Die Stimme des Innern au Kulturbund, à Vienne, en novembre 1932. Depuis lors, l’Allemagne aussi a trouvé son chef.

Que cette note ait été plus qu’un commentaire impersonnel est corroboré par un certain nombre de faits. Lorsqu’il fut critiqué par le Dr G. Bailly pour avoir accepté de devenir l’éditeur de la Zentrablatt für Psychotherapie, Jung soutint qu’en accomplissant cette démarche, il s’était exposé aux malentendus "auxquels personne ne peut échapper, lorsque mû par une nécessité supérieure, il est parvenu à s’entendre avec les pouvoirs qui existent en Allemagne" [Neue Zürcher Zeitung, 13 mars 1934]. […]

En 1936, alors qu’il développait son "analyse psycho-politique" conformément à la tendance aristocratique de la nature, Jung déclare explicitement : "La démocratie communiste ou socialiste est le soulèvement des inadaptés contre les efforts de l’ordre." Et encore : "Les hommes SS sont en pleine transformation et vont devenir une caste de chevaliers à la tête de 60 millions d’indigènes." "Il existe deux types de dictateurs, le type du chef et le type du medecine-man. Hitler appartient à ce dernier type. Il est le porte-parole des anciens dieux… la Sybille… l’oracle delphique." Dès le début de 1939 il avertit les chefs d’Etats occidentaux "de ne pas toucher à l’Allemagne dans son humeur présente. Elle est beaucoup trop dangereuse… Laissez-la pénétrer en Russie. Il y a là assez de territoires – un sixième de la surface de la terre" [Cosmopolitan Interview, janvier 1939]. […]

Après l’événement, Jung fit preuve d’une sagesse rétrospective comme l’eut fait à sa place tout autre mage politique qui se serait rendu coupable d’une semblable énormité. […] Après la défaite de 1945, son portrait de Hitler subit une transformation remarquable. La figure hermaphrodique du medecine-man "religieux" cum Sybille, le "demi-dieu" qu’il nous avait présenté en 1936 fait place à "cet épouvantail à moineaux psychique (avec pour bras un manche à balai)", un hystérique, souffrant de pseudologia phantastica, un psychopathe entraînant des millions d’êtres à une psychose collective, qui, incidemment cessait d’être – comme en un temps aux yeux de Jung – particulière à l’URSS. 

Auteur: Glover Edward

Info: Dans "Freud ou Jung ?", trad. Lucy Jones, P.U.F., Paris, 1954, pages 118-120

[ nazisme ] [ caution extérieure ] [ volte-face ] [ vingtième-siècle ] [ ambivalence ] [ adaptation ]

 

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philosophe

Il semble tout de même - pour essayer là-dessus de dire des choses - impossible de ne pas partir en prenant au pied de la lettre ce qui nous est attesté de la part de l’entourage de SOCRATE, et ceci encore à la veille de sa mort, qu’il est celui qui a dit que somme toute : nous ne saurions rien craindre d’une mort dont nous ne savons rien.

Et nommément nous ne savons pas, ajoute-t-il, si ce n’est pas une bonne chose. Évidemment, quand on lit ça... On est tellement habitué à ne lire dans les textes classiques que "bonnes paroles" qu’on n’y fait plus attention. Mais c’est frappant quand nous faisons résonner cela dans le contexte des derniers jours de SOCRATE, entouré de ses derniers fidèles, qu’il leur jette ce dernier "regard un peu en dessous" que PLATON photographie sur document - il n’y était pas ! - et qu’il appelle "ce regard de taureau". Et toute son attitude à son procès... Si l’Apologie de SOCRATE nous reproduit exactement ce qu’il a dit devant ses juges il est difficile de penser, à entendre sa défense, qu’il ne voulait pas expressément mourir. En tout cas il répudia expressément, et comme tel, tout pathétique de la situation, provoquant ainsi ses juges habitués aux supplications des accusés, rituelles, classiques.

Donc ce que je vise là en première approche de la nature énigmatique d’un désir de mort qui sans doute peut être retenu pour ambigu, c’est un homme qui aura mis, somme toute, soixante-dix ans à obtenir la satisfaction de ce désir, il est bien sûr qu’il ne saurait être pris au sens de la tendance au suicide, ni à l’échec, ni à aucun masochisme moral ou autre. Mais il est difficile de ne pas formuler ce minimum tragique lié au maintien d’un homme dans une zone de no man’s land, d’une entre-deux-morts en quelque sorte gratuite.

SOCRATE, vous le savez, quand NIETZSCHE en a fait la découverte, ça lui a monté à la tête : "La Naissance de la tragédie", et toute œuvre de NIETZSCHE à la suite, est sortie de là. Le ton dont je vous en parle doit bien marquer quelque personnelle impatience. On ne peut pas tout de même ne pas voir qu’incontestablement - NIETZSCHE là a mis le doigt dessus, il suffisait d’ouvrir à peu près un dialogue de PLATON au hasard - la profonde incompétence de SOCRATE chaque fois qu’il touche à ce sujet de la tragédie est quelque chose qui est tangible. Lisez dans le Gorgias. La tragédie passe là, exécutée en trois lignes, parmi les arts de la flatterie, une rhétorique comme une autre, rien de plus à en dire.

Nul tragique, nul "sentiment tragique" - comme on s’exprime de nos jours - ne soutient cette ἀτοπία [atopia] de SOCRATE. Seulement un "démon", le δαίμων [daimôn] - ne l’oublions pas, car il nous en parle sans cesse - qui l’hallucine, semble-t-il pour lui permettre de survivre dans cet espace, il l’avertit des trous où il pourrait tomber : "Ne fais pas cela...".

Et puis, en plus, un message d’un dieu - dont lui-même nous témoigne de la fonction qu’il a eue dans ce qu’on peut appeler une vocation - le dieu de Delphes : APOLLON, qu’un disciple à lui a eu l’idée, saugrenue il faut bien le dire, d’aller consulter. Et le dieu a répondu : 

"Il y a quelque sages. Il y en a un qui n’est pas mal : c’est EURIPIDE, mais le sage des sages, le fin du fin, le sacré, c’est SOCRATE". 

Et depuis ce jour-là, SOCRATE a dit : 

"Il faut que je réalise l’oracle du dieu, je ne savais pas que j’étais le plus sage, mais puisqu’il l’a dit, il faut que je le sois".

C’est exactement dans ces termes que SOCRATE nous présente le virage de ce qu’on peut appeler son "passage à la vie publique". 

C’est en somme un fou qui se croit au service commandé d’un dieu, un messie, et dans une société de bavards par-dessus le marché. Nul autre garant de la parole de l’Autre (avec le grand A) que cette parole même, il n’y a pas d’autre source de tragique que ce destin qui peut bien nous apparaître par un certain côté, être du néant. Avec tout ça, il est amené à rendre le terrain dont je vous parlais l’autre jour, le terrain de la reconquête du réel, de la conquête philosophique, c’est-à-dire scientifique, à rendre une bonne part du terrain aux dieux. 

Auteur: Lacan Jacques

Info: 21 décembre 1960

[ vocation ] [ caractère ]

 

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sens-de-la-vie

" Le maître dont l’oracle est à Delphes ne dit, ni ne cache, mais il donne des signes ", dit Héraclite. Il parle ici d’Apollon. La divinité, nous dit-il, ne dit ni ne cache. La manifestation de ce qui est caché n’est ni immédiate ni impossible. Le sens ne tombe pas tout cuit dans la main de celui qui cherche; il ne reste pas non plus caché ou délibérément hors d’atteinte. Le sens ne jaillit pas d’un coup, nous dispensant de la recherche; il ne se dérobe pas non plus, confinant nos vies à l’absurde. Au contraire, le mouvement du sens est subtil: il se dévoile, il se montre, à travers des signes, au cœur de la vie. La divinité donne des signes. Toute la question est là, dans les signes. En somme, rien n’est immédiat, et rien n’est hors d’atteinte. Tout est là, mais en filigrane.

Car la question du sens se pose régulièrement dans nos activités comme dans nos vies. Quel est le sens de ce que je fais? Comment est-ce qu’un engagement ponctuel s’inscrit dans un ensemble plus vaste, un projet plus large, pour lui donner sens et direction? La question du sens devient même aiguë quand l’on se trouve atteint par la maladie grave, rejoint par un pronostic létal. " Qu’est-ce qui m’arrive? ", " Pourquoi moi? ", " Pourquoi si tôt? " " Quel est le sens de cette vie qui se termine? " On se trouve alors comme convoqué par une nouvelle nécessité de sens.

La divinité, nous dit Héraclite, pose des signes. Et le propre de l’homme, c’est l’interprétation de ces indices. Mais pour les interpréter, il faut d’abord les discerner, avoir des yeux pour les voir!  Ainsi donc, dans cette quête de sens qui est la nôtre, la première qualité requise, c’est notre disponibilité, notre capacité de reconnaître les signes comme étant tels. Si je ne suis pas disponible, je vais manquer la rencontre, rien de plus logique. En somme, le sens émerge, car la vie produit continuellement du sens en produisant des signes. Et je peux m’ajuster avec fluidité à ce sens qui émerge, comme je peux rester aveugle et fermé à ces indices.

Ainsi donc la quête de sens se joue d’abord au cœur de la vie, et non dans une réflexion qui se tienne à distance de la vie. C’est ce que dit Jean-Yves Leloup: " Plutôt que de réfléchir sur le sens de la vie, il s’agit de la vivre. Et le sens se révèle dans l’intensité avec laquelle nous vivons cette vie-là. Sinon, nous nous posons en dehors de la vie, et nous nous observons en train de vivre…". Il ne faut jamais oublier que c’est de la vie elle-même que jaillit le sens. " La question du sens ne surgit pas de la pensée des intellectuels, mais des “cris” de la vie " (Père Amédée et Dr Dominique Megglé).

Et le propre de l’humain, c’est justement l’interprétation de ces signes qui sont là. Comme disait Epictète dans ses Entretiens " L’homme a été placé dans le monde pour contempler Dieu et ses œuvres; et non seulement pour les contempler, mais encore pour les interpréter ". Contempler c’est apprécier les choses pour elles-mêmes tout en les rapportant à leur auteur. Et interpréter, c’est y ajouter l’apport d’une signification qui est le propre de l’homme. Il s’agit de mettre des mots sur ce qui advient, de relier les signes entre eux en se plaçant sur un plan plus large. Il s’agit d’intégrer un événement, un indice, un signal, dans un ensemble plus vaste. Ce travail d’interprétation va permettre de donner sens, de créer du sens. Il peut produire un mieux-être chez celui qui en est l’auteur, voire même une transformation de sa personne toute entière.

Nous vous offrons dans ce numéro d’INFOKara les fruits de recherches et d’expériences très diverses qui, je l’espère, deviendront pour vous, lecteurs, des signes. C’est ainsi que la caresse devient signe d’humanité profonde dans la relation à l’Autre. Et les philosophes et théologiens juifs cités par Eytan Ellenberger, E. Lévinas et M.-A. Ouknine, font par excellence œuvre d’interprétation et de production de sens. De même, les questionnements ou les doutes des étudiants en soins infirmiers sont d’une fraîcheur qui se fait signe: est-ce que les " praticiens chevronnés " que nous pensons être devenus ont encore l’humilité de s’avouer leurs craintes ou leur impuissance? Ne sommes-nous pas tous des débutants? Quant aux animaux, ils deviennent aussi, par leur présence dans nos institutions, des signes de l’amitié du monde, pour ceux qui savent observer leur rôle et leurs comportements. En tous les cas, les signes sont là tout autour de nous, que nous sachions les lire ou non!

Au-dessus de la porte d’entrée de sa maison de Küsnacht, C.G. Jung avait gravé cette déclaration de l’oracle de Delphes: " Vocatus atque non vocatus, Deus aderit " (Appelé ou non appelé, le Dieu sera présent). Les signes sont . A nous d’être disponibles pour les lire et les interpréter. A nous de laisser émerger ET de créer le sens.



 

Auteur: Rosselet François

Info: La lecture des signes et l'émergence du sens. Pp 41 à 42

[ sémiologie ] [ ouverture ] [ spiritualité ] [ théorie-pratique ]

 

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intelligence artificielle

[...] au début de la guerre de Corée, le général McArthur a proposé des mesures dont l’application aurait pu déclencher une troisième guerre mondiale. Tout le monde sait aussi qu’on lui a retiré le pouvoir de décider s’il fallait ou non prendre un tel risque. Ceux qui lui ont retiré cette possibilité ne l’ont pas fait pour prendre eux-mêmes les décisions à sa place ou pour les confier à d’autres hommes politiquement, économiquement ou moralement qualifiés. Ils l’ont fait pour remettre le pouvoir de décider à un instrument (puisque le "dernier mot" doit être objectif et qu’on ne considère aujourd’hui comme "objectifs" que les jugements prononcés par des objets). Bref, on a confié la responsabilité suprême à un "electric brain", un cerveau électrique. On n’a pas retiré le pouvoir de décision à l’individu McArthur, mais à McArthur en tant qu’homme, et si on a préféré le cerveau-instrument au cerveau de McArthur, ce n’est pas parce qu’on avait des raisons particulières de se méfier de l’intelligence de McArthur mais parce qu’il n’avait, précisément, qu’un cerveau humain.

Dire qu’on lui a "retiré" sa responsabilité en tant qu’homme, c’est bien sûr employer une expression trompeuse. Car la puissance qui l’a privé de son pouvoir de décision n’était pas une instance surhumaine, ce n’était ni "Moïra" (le Destin), ni "Tyché" (la Fortune), ni "Dieu", ni l’ "Histoire", mais c’était l’homme lui-même qui, dépouillant sa main gauche avec sa main droite, déposait son butin – sa conscience morale et sa liberté de décision – sur l’autel de la machine et montrait par cet acte qu’il se soumettait à celle-ci, à ce robot calcultateur qu’il avait lui-même fabriqué et qu’il était prêt à considérer comme une conscience morale de substitution et une machine à oracles, bref une machine littéralement providentielle.

En subordonnant le général à cet instrument, l’humanité s’est en quelque sorte porté atteinte à elle-même. Qu’on ne se méprenne pas. Rien n’est plus éloigné de nos intentions que de nous solidariser avec McArthur. Que l’histoire, en cet instant exemplaire, se soit justement servie de lui pour tenir ce rôle est un pur caprice : n’importe quelle autre personnalité publique aurait aussi bien fait l’affaire. Nous voulons seulement dire que celui qui transfère la responsabilité d’un homme à un instrument lui transfère aussi, par là même, la responsabilité de tous. En cette occasion, l’humanité s’est pour la première fois humiliée elle-même de façon significative et a ouvertement déclaré : "On ne peut pas compter sur nous puisque nous comptons plus mal que nos machines. Qu’on ne tienne donc pas "compte" de nous." Elle n’a, pour la première fois, ressenti aucune honte d’avoir ouvertement honte.

On a donc "nourri" - to feed est le terme technique qu’on emploi pour désigner l’opération par laquelle on introduit dans l’appareil les éléments nécessaires à la décision – cette machine à oracles de touts les données relatives à l’économie américaine et à celle de l’ennemi. "Toutes les données", c’est beaucoup dire. Car les machines possèdent par essence leurs "idées fixes" : le nombre de paramètres qu’elles prennent en compte est artificiellement limité. [...] On les a ainsi exclusivement "nourries" de données susceptibles d’être facilement quantifiées – des données portant donc sur le caractère utile ou dommageable, rentable ou non rentable de la guerre en question. [...]

On sait bien que l’assimilation des données par les intestins mécaniques prend un temps ridiculement court. A peine avait-on nourri l’appareil qu’il délivra son oracle. Sa conclusion ayant valeur de décision, on sut alors si l’on pouvait se lancer dans cette entreprise et déclarer la guerre sainte, ou s’il fallait renoncer à cette mauvaise affaire et la condamner comme immorale.

Après quelques secondes de réflexion ou de digestion électrique, le "brain" donna une réponse qui se révéla, par hasard, plus humaine que les mesures suggérées par l’homme McArthur. Il proclama haut et fort que cette guerre serait une "mauvaise affaire", une catastrophe pour l’économie américaine. Ce fut sans aucun doute une grande chance, peut-être même la chance de l’humanité, puisqu’elle était déjà entrée dans l’ère atomique lorsque l’oracle sortit de la bouche de la machine. Mais le choix de ce mode de décision fut aussi la plus grande défaite que l’humanité se soit jamais infligée à elle-même : car jamais auparavant elle ne s’était abaissée à ce point et n’était allée jusqu’à confier à une chose le soin de statuer sur son histoire – et peut-être même sur son être ou son non-être. Que le jugement ait été cette fois-là un veto, une grâce, cela ne change rien à l’affaire. Ce n’en fut pas moins une sentence de mort puisqu’on avait placé dans une chose la source de toute grâce possible. [...] Si nous voulions bien réaliser que des milliers d’hommes, au nombre desquels nous figurons peut-être nous-mêmes, ne doivent ce que nous appelons aujourd’hui la "vie" - c’est-à-dire leur chance de n’avoir pas encore été tués  - qu’au "non" calculé par un instrument, à ce "non" sélectionné par l’électromécanique, alors nous voudrions rentrer sous terre pour cacher notre honte.

Auteur: Anders Günther Stern

Info: Dans "L'obsolescence de l'homme", trad. de l'allemand par Christophe David, éditions Ivrea, Paris, 2002, pages 78-81

[ historique ] [ délégation de la responsabilité humaine ] [ instrument médiumnique ]

 
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