Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits. Recherche mots ou phrases tous azimuts. Aussi outil de précision sémantique et de réflexion communautaire. Voir la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats !!!!..... Lire la suite >>
Résultat(s): 165
Temps de recherche: 0.0609s

rencontre

Leurs contacts plus fréquents à la suite de l'accord nuptial firent naître chez Don Fabrizio une curieuse admiration pour les mérites de Sedara. L'habitude finit par l'accoutumer aux joues mal rasées, à l'accent plébéien, aux vêtements farfelus et à l'odeur persistante de la sueur, et il eut ainsi tout loisir de se rendre compte de la rare intelligence de l'homme ; bien des problèmes qui semblaient insolubles au Prince étaient démêlés en moins de deux par don Calogero ; étant affranchi de certaines entraves que l'honnêteté, la décence et peut-être la bonne éducation imposent aux actions de beaucoup d'autres hommes, il avançait dans la forêt de la vie avec l'assurance d'un éléphant qui, déracinant les arbres et piétinant les tanières, progresse en ligne droite, sans prêter attention aux griffures des épines et aux gémissements des écrasés. Élevé, au contraire, dans des vallées amènes parcourues par des zéphyrs courtois des "S'il te plaît", "je te serais reconnaissant", "me ferais-tu la faveur", "tu as été très aimable", le Prince, maintenant, quand il parlait avec don Calogero se trouvait à découvert sur une lande balayée par des vents de sécheresse et, tout en continuant à préférer en son for intérieur les anfractuosités des montagnes, il ne pouvait s'empêcher d'admirer l'impétuosité de ces courants d'air qui tiraient des chênes-lièges et des cèdres de Donnafugata des arpèges jamais entendus auparavant.

Auteur: Lampedusa Giuseppe Tomasi di

Info: Le Guépard

[ ouverture ] [ rapports humains ] [ différence ] [ sociologie ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

fantasmagorie

La nuit dernière encore, cela a commencé ainsi.

En fin d’après-midi, le vent et la pluie avaient forci et, au lieu d’aller accrocher les volets comme je l’aurais dû, je m’étais paresseusement réfugié dans mon lit toujours défait. Mais dans la nuit, les vitres se sont mises à gémir. D’une façon tout à fait différente des vibrations qui les agitaient jusque-là. Cela m’a réveillé. Pour commencer, j’ai pensé à un chat ou quelque autre animal. Je m’apprêtais à me rendormir sans intervenir, mais les craquements empiraient. Pour finir, le vacarme est devenu tel qu’on aurait cru que la maison geignait ; bien obligé, j’ai fini par me lever, j’ai allumé la lampe à pétrole et je suis parti inspecter les fenêtres de la véranda.

Derrière les vitres, la lampe a révélé des ténèbres de poix, des rafales de vent et de pluie qui les battaient follement et, alors qu’en temps normal leur extrémité se contentait de frôler la fenêtre, même par grand vent, les fleurs du lilas des Indes qui se jetaient contre le carreau, face la première, comme aplaties par quelque force gigantesque. Les grandes branches déferlaient contre la fenêtre avant de reculer un instant, telle la vague qui se retire, et ainsi de suite. Leur grincement avait un effet hallucinatoire et, peu à peu, il m’a semblé entendre : … laisse-moi entrer…

Auteur: Nashiki Kaho

Info: Lilas des Indes

[ nocturne ] [ végétaux ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

maquette

Trois heures, temps universel. Les rues se coupent à angle droit. L’asphalte est muet. Les maisons immobiles. Gisèle dort sous une couette fleurie. Jacky, tout habillé, ronfle sur son divan. Suff est allongé sur le dos dans son lit de fer. Mme Angstroem sue sous son édredon. Maximilian lit une bande dessinée à la lueur d’une lampe de poche. Harry est assis à la table de la cuisine devant une canette de bière. Marguerite mange le dernier praliné. La mère et sa fille enlacées sur le sol ressemblent à des momies. Le collectionneur et sa femme font chambre a part. Les deux orphelines dorment dans le lit de leurs parents. Le troll bande dans son sommeil. Les sept nains ont un dortoir à sept lits. La fumeuse agonise. Tudal écrit une longue lettre. Le terroriste campe au salon, un briquet serré dans la main. Sonia et Carlos astiquent leurs armes de poing. La vieille n’a pas changé ses draps depuis des lustres. La famille empaillée ne bouge pas d’un pouce. Mme Pristil écoute son mari jurer dans le noir. Paul entend son beau-père jurer dans la chambre de sa mère. Le squelette grince des dents sur le sommier à lattes. Le petit garçon dort avec son dinosaure en peluche. Son père porte un protège-moustache en roupillant. Sur le parking, les camionneurs au fond de leurs cabines dorment profondément.

Auteur: Biermann Mika

Info: Mikki et le village miniature

[ écriture ] [ modélisation ] [ simultanéïté ]

 

Commentaires: 0

évolution

Vous habitez donc là. Appartement ou maison, arrangé comme ceci ou comme cela, vraisemblablement antico-moderne, avec la lampe habituelle de confection japonaise, en tout cas il y a une salle de bains commune, la vue quotidienne d’ustensiles pour les oins différents de deux corps, un de femme, un d’homme. Il vous arrive d’y être pris de nostalgie. Aucun d’entre vous n’a personne de plus proche, non, pas même en souvenir ; pas même en espérance. Peut-on être plus unis que vous l’êtes ? On ne peut pas. Mais parfois, vous avez donc une nostalgie. De quoi ? Vous en avez le frisson. Quel frisson ? Vous voilà vivant, plein d’amour, les années infinies et éphémères, un vrai couple, tendre, sans le montrer aux invités, car vous l’êtes vraiment, un vrai couple aux corps morts d’amour qui ne se recherchent plus que rarement. Après un voyage peut-être, une séparation de la durée d’un congrès, il arrive qu’en plein jour, peu après l’arrivée, avant de défaire les valises et de raconter le minimum, vous avez une étreinte. Qu’ont à y voir les autres ? Cela rafraîchit, mais ne mérite pas un aveu. Vous avez de nouveau, comme autrefois, une journée où les heures ne comptent pas, en robe de chambre et avec les disques. Puis de nouveau la douce disparition de toute curiosité de part et d’autre, inexprimée, à peine indiquée, camouflée seulement derrière les exigences de la journée.

Auteur: Frisch Max

Info: Dans "Le désert des miroirs", page 147

[ quotidien ] [ vie à deux ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

absurdité

Bois du vin, car tu dormiras longtemps sous l'argile,
Sans un ami, un camarade, une femme ;
Veille à ne jamais dire ce secret à personne :
Les tulipes fanées ne refleuriront jamais.

Ô toi dont la joue est modelée sur le modèle
des roses sauvages !
Toi dont le visage est moulé comme celui des idoles de la Chine,
Hier ton amoureux regard changea le roi de Babylone
En un fou que le joueur fait manœuvrer
sur l'échiquier

Ni toi ni moi ne résoudrons le mystère de ce monde ; ni toi ni moi ne lisons cette écriture secrète.
Tous deux, nous aimerions savoir ce que cache ce voile ; mais quand le voile tombe, il n'y a plus ni toi ni moi.

Ne cherche aucun ami dans cette foire que tu traverses.
Ne cherche pas, non plus, un abri sûr.
D'une âme ferme, accueille la douleur, et ne songe pas à te procurer un remède que tu ne trouveras pas.
Dans l'infortune, souris.
Ne demande à personne de te sourire.
Tu perdrais ton temps.

Ma naissance n'apporta pas le moindre profit à l'univers.
Ma mort ne diminuera ni son immensité ni sa splendeur.
Personne n'a jamais pu m'expliquer
pourquoi je suis venu, pourquoi je partirai.

Cette voûte céleste sous laquelle nous errons, je la compare à une lanterne magique dont le soleil est la lampe. Et le monde est le rideau où passent nos images.

Auteur: Khayyâm Omar

Info:

[ solitude ] [ confiance personnelle ] [ monade ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

séparation

Père ! dis-je. Chacun suit son destin, mon petit ; les hommes n’y peuvent rien changer. Tes oncles ont étudié. Moi –mais je te l’ai déjà dit : je te l’ai dit, si tu te souviens quand tu es parti pour Conakry…moi, je n’ai pas eu la chance et moins encore la tienne…mais maintenant que cette chance est devant toi, je veux que tu la saisisses ; tu as su saisir la précédente, saisis celle-ci aussi, saisis-la bien ! Il reste dans notre pays tant de choses à faire…Oui, je veux que tu ailles en France ; je le veux aujourd’hui autant que toi-même : on aura besoin ici sous peu d’hommes comme toi…Puisses-tu ne pas nous quitter pour trop longtemps ! Nous demeurâmes un long bout de temps sous la véranda, sans mot dire et à regarder la nuit ; et puis soudain mon père dit d’une voix cassée : promets-moi qu’un jour tu reviendras ? Je reviendrai ! dis-je. Ces pays lointains…dit-il lentement. Il laissa sa phrase inachevée ; il continuait de regarder la nuit. Je le voyais, à la lueur de la lampe-tempête, regarder comme un point dans la nuit, et il fronçait les sourcils comme s’il était mécontent ou inquiet de ce qu’il y découvrait. Que regardes-tu ? dis-je. Garde-toi de jamais tromper personne, dit-il ; sois droit dans ta pensée et dans tes actes ; et Dieu demeurera avec toi. Puis il eut comme un geste de découragement et il cessa de regarder la nuit.

Auteur: Laye Camara

Info: L'enfant noir

[ voyages ] [ afrique ] [ douleur ] [ espoir ] [ dernières paroles ]

 

Commentaires: 0

philosophie

L'histoire de la vie d'Emmanuel Kant est difficile à écrire, car il n'eut ni vie ni histoire. Il vécut d'une vie de célibataire, vie mécaniquement réglée et presque abstraite, dans une petite rue écartée de Koenigsberg, vieille ville des frontières nord-est de l'Allemagne. Je ne crois pas que la grande horloge de, la cathédrale ait accompli sa tâche visible avec moins de passion et plus de régularité que son compatriote Emmanuel Kant. Se lever, boire le café, écrire, faire son cours, dîner, aller à la promenade, tout avait son heure fixe, et les voisins savaient exactement qu'il était deux heures et demie quand Emmanuel Kant, vêtu de son habit gris, son jonc d'Espagne à la main, sortait de chez lui et se dirigeait vers la petite allée de tilleuls qu'on nomme encore à présent, en souvenir de lui, l'allée du philosophe. Il la montait et la descendait huit fois le jour, en quelque saison que ce fût, et quand le temps était couvert ou que les nuages noirs annonçaient la pluie, on voyait son domestique, le vieux Lampe, qui le suivait d'un air vigilant et inquiet, le parapluie sous le bras, véritable image de la Providence.
Quel contraste bizarre entre la vie extérieure de cet homme et sa pensée destructive! En vérité, si les bourgeois de Koenigsberg avaient pressenti toute la portée de cette pensée, ils auraient éprouvé devant cet homme un frémissement bien plus horrible qu'à la vue d'un bourreau qui ne tue que des hommes... Mais les bonnes gens ne virent jamais en lui qu'un professeur de philosophie, et quand il passait à l'heure dite, ils le saluaient amicalement et réglaient d'après lui leur montre.

Auteur: Heine Heinrich

Info: De l'Allemagne

[ routine ] [ anecdote ]

 

Commentaires: 0

femme-par-homme

Je te l'ai dit, Corbèra : c'était un animal mais c'était aussi, en même temps, une Immortelle, et il est dommage qu'en parlant, on ne puisse pas exprimer continuellement cette synthèse telle qu'elle l'exprimait elle-même dans son corps avec une simplicité absolue. Ce n'était pas seulement dans l'acte de chair qu'elle manifestait une gaieté et une délicatesse opposées au triste rut animal : sa parole avait une immédiateté puissante que je n'ai retrouvée que chez quelques grands poètes. On n'est pas fille de Calliope pour rien : méconnaissant toute culture, ignorant toute sagesse, dédaignant toute contrainte morale, elle faisait partie, cependant, de la source de toute culture, de toute sagesse, de toute éthique, et savait exprimer cette supériorité primordiale en des termes d'une âpre beauté : "Je suis tout parce que je ne suis qu'un courant de la vie sans aucune faille ; je suis Immortelle parce que toutes les morts confluent en moi, depuis celle du poisson d'il y a un instant jusqu'à celle de Zeus, et rassemblées en moi elles redeviennent une vie non plus individuelle et déterminée, mais panique et donc libre." Puis elle disait : "Tu es beau et jeune ; tu devrais me suivre à présent dans la mer et tu échapperais aux douleurs, à la vieillesse ; tu viendrais dans ma demeure, sous les très hautes montagnes d'eaux immobiles et sombres, où tout est quiétude silencieuse à tel point naturelle que celui qui la possède ne la ressent même pas. Je t’ai aimé, souviens-t’en, quand tu seras las, quand tu n'en pourras vraiment plus, tu n’auras qu’à te pencher sur la mer et m’appeler : je serai toujours là parce que je suis partout, et ta soif de sommeil sera réalisée."

Auteur: Lampedusa Giuseppe Tomasi di

Info: Le Professeur et la Sirène

[ déesse ] [ omnipotente ] [ supérieure ]

 
Commentaires: 2
Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

soirée familiale

J'ai le souvenir de longs moments, au temps de mon enfance où, heureusement, on n'avait qu'une lampe : il n'y avait pas l'électricité à la maison, si bien qu'autour de la lampe il y avait les personnes qui s'occupaient d'une façon active : une raccommodait, une autre dessinait, une troisième faisait une broderie, une autre son devoir ; et celui ou celle qui n'était pas obligé d'être sous la lampe pour travailler se trouvait en dehors du cercle lumineux.



C'était formidable pour moi de vivre en regardant celle qui tricotait ou raccommodait, en regardant gratter le papier et tracer des lignes quand mon frère faisait ses devoirs.



J'ai vécu là des moments de véritable vie tout à fait passive à regarder les autres et ce n'était pas du tout oisif. Je crois que cela enseigne à vivre ; c'est plein de poésie.



Quand je repense au charme de ce rond de la lampe avec les gens autour, chacun occupé, et puis moi la petite fille qui n'avait à faire et qui était contente, là, à passer une heure, ou deux ... j'ai beaucoup appris.



Après, je savais tricoter, coudre, raccommoder, rien qu'en ayant vu. J'avais vu faire les mains, j'observais, je ne faisais rien. Je me rappelle que de temps en temps on me disait : "Mais pourquoi tu ne viens pas près de la lampe ?" Je répondais : "Non, je suis bien comme cela." Alors on me laissait tranquille.



C'était le soir. C'est à ces moments-là que je me suis mise à broder, j'aimais beaucoup broder, j'étais active.



Mais, dans la journée, quand on était sur la plage, on nous houspillait : "Allez les enfants, on n'est pas là pour s'amuser, creusez des trous !" Il fallait creuser des trous, alors que moi j'aimais être assise et regarder la mer. On m'appelait : "Françoise, tu baguenaudes, tu baguenaudes", et je me disais : "On ne peut donc pas vivre ?"



Je vous le dis : laissez-les vivre, et vivre c'est baguenauder, ne rien faire, car on n'est tout de même pas toujours obligé de faire quelque chose.



Cela, c'est la solitude positive. 

Auteur: Dolto Françoise

Info:

[ observatrice ]

 
Commentaires: 4
Ajouté à la BD par miguel

coup d'oeil

Installé au premier rang, je me retournai pour observer en douce les gens. Je notai toutes les nuances de couleur. Toutes les teintes que j'avais pu voir auparavant étaient quelque part dans cette pièce. Les visages derrière moi offraient une palette de dégradés, des coloris fragmentés se reflétant telles les incrustations d'une mosaïque éclaboussée de lumière. Chacune insistant sur sa propre spécificité. Des éclats de chair en tous sens, acajou par ici, noix ou pin par là. Des bouquets de bronze et de cuivre, des étendues de pêche, ivoire et nacre. De temps en temps, des extrêmes : la pâte décolorée des pâtisseries danoises, ou bien la cendre nuit noire de la salle des machines d'un paquebot de l'histoire. Mais dans le milieu du spectre, majoritaire, toutes les traces et les nuances imaginables de marron s'entassaient sur les chaises pliantes. Ils se révélaient mutuellement, par contraste. Le brun-gris taupe révélant l'ambre, l'ocre révélant le fauve, les roses, les roux et les teks faisant mentir tous les noms dont on les avait toujours affublés. Toutes les proportions de miel, de thé, de café, de crème – fauve, renard, ivoire, chamois, beige, baie : j'étais incapable de distinguer un marron d'un autre. Marron comme les épines de pin. Marron comme le tabac séché. Des tons qu'il aurait sans douté été impossible de distinguer à la lumière du jour – châtaigne, roux, rouan – devenaient perceptibles grâce à ceux à côté desquels ils se trouvaient sous les lampes basses.

L'Afrique, l'Asie, l'Europe et l'Amérique se percutaient et ces nuances éclatées constituaient les incrustations de cet impact. Jadis, il y avait eu autant de couleurs de peau qu'il y avait de coins isolés sur terre. À présent, les combinaisons s'étaient multipliées. Combien de gradations un être humain pouvait-il percevoir ? Ce morceau polytonal et polyharmonique joué pour un public sourd comme un pot, qui n'entendait que les toniques et les dominantes, et tremblait même à l'idée de distinguer entre les deux. Il n'empêche, pour ma mère, toutes les notes de la gamme chromatique étaient présentes, et bon nombre de microtons intermédiaires.

Voilà pour le regard furtif que je lançai à la dérobade.

Auteur: Powers Richard

Info: Le temps où nous chantions

[ temps dilaté ] [ littérature ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel