Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits. Recherche mots ou phrases tous azimuts. Aussi outil de précision sémantique et de réflexion communautaire. Voir la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats !!!!..... Lire la suite >>
Résultat(s): 14
Temps de recherche: 0.0325s

pensée-de-femme

On me pose deux ou trois questions, puis une fois que je dis que je ne travaille pas, la conversation glisse sur quelqu'un d'autre et ne revient jamais vers moi. Les gens n'imaginent pas qu'une femme au foyer puisse avoir une vie, des centres d'intérêt, et encore moins des choses à dire. Ils n'imaginent pas qu'elle puisse prononcer plusieurs phrases sensées au sujet du monde qui nous entoure, ni être en mesure de formuler une opinion. Tout se passe comme si la femme au foyer était, par définition, assignée à résidence et que son cerveau, ayant souffert d'avoir été trop longtemps privé d'oxygène, fonctionnait au ralenti.

Auteur: Vigan Delphine de

Info: Les loyautés

[ ménagère ] [ incomprise ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

identité source

Oui, j’étais peut-être une mouette engluée par la marée noire, mais aujourd’hui je ressemble étrangement au corbeau de l’histoire que me racontait ma grand-mère, ce volatile grossier au plumage d’ébène qui rêvait d’être un oiseau blanc. Car ainsi se poursuit la fable : l’oiseau se roule d’abord dans le talc, puis dans la farine, mais le subterfuge est de courte durée et ne tarde pas à s’évaporer. Ainsi, il se trempe tout entier dans le pot de peinture blanche, duquel il reste prisonnier. Je suis cet oiseau noir qui voulait devenir blanc et qui a trahi les siens. Je me croyais plus maline. Je me croyais capable d’imiter le chant des tourterelles. Mais moi aussi j’ai perdu l’usage de mes ailes, et là où je suis, il est inutile de se débattre.

Auteur: Vigan Delphine de

Info: Les loyautés. P. 167, Jean-Claude Lattès, 2018.

[ dénaturée ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

inquiétude diffuse

Mais que veille-t-elle, cette âme inquiète pour ne pas pouvoir s’abandonner au repos ? Quel désir au-delà du désir se rappelle ainsi à elle ? Soudain vous êtes éveillés en pleine nuit, pour rien. Pas envie de lire ni de faire l’amour, et plus vous cherchez la manne réparatrice du sommeil, plus elle semble se détacher de vous. Vous avez peur comme des écoliers d’être épuisés demain alors que vous êtes seulement dans la fatigue de vivre. Peu d’insomnies en temps de guerre ou dans les affres de la passion (des nuits blanches, oui), ni dans l’extrême tristesse d’un deuil ou d’une épreuve, non l’insomnie appartient plutôt à l’entre-vie, ces moments où l’on n’habite pas sa propre existence sans pouvoir pour autant se déprendre du "souci de soi". Est-ce le souvenir d’une terreur ancienne ? Là, seul dans la nuit, je retrouve ce face-à-face dont tout, dans la vie quotidienne, me détourne. […] L’insomnie est faite de cette solitude : c’est notre veille d’être vivant, loin de ces loyautés multiples auxquelles nous obéissons depuis l’enfance.

Auteur: Dufourmantelle Anne

Info: Dans "En cas d'amour", pages 151-152

[ lucidité ] [ autres règles ] [ explication ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

pensée-de-femme

Les coups je les ai reçus et le secret je l’ai gardé jusqu’au bout. J’ai trente-huit ans et je n’ai pas d’enfant. Je n’ai pas de photo à montrer, ni prénom ni âge à annoncer, pas d’anecdote ou de bon mot à raconter.

J'abrite en moi-même, et à l’insu de tous, l’enfant que je n’aurai pas. Mon ventre abîmé est peuplé de visages à la peau diaphane, de dents minuscules et blanches, de cheveux de soie. Et lorsqu’on me pose la question – c’est-à-dire chaque fois que je rencontre une nouvelle personne (en particulier des femmes), chaque fois qu’après m’avoir demandé quel est mon métier (ou juste avant), on me demande si j’ai des enfants –, chaque fois donc que je dois me résigner à tracer sur le sol cette ligne à la craie blanche qui sépare le monde en deux (celles qui en ont, celles qui n’en ont pas), j’ai envie de dire : non je n’en ai pas, mais regarde dans mon ventre tous les enfants que je n’ai pas eus, regarde comme ils dansent au rythme de mes pas, ils ne demandent rien d’autre qu’à être bercés, regarde cet amour que j’ai retenu converti en lingots, regarde l’énergie que je n’ai pas dépensée et qu’il me reste à distribuer, regarde la curiosité naïve et sauvage qui est la mienne, et l’appétit de tout, regarde l’enfant que je suis restée moi-même faute d’être devenue mère, ou grâce à cela.

Auteur: Vigan Delphine de

Info: Les loyautés

[ nullipare ] [ regrets ]

 

Commentaires: 0