Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits. Recherche mots ou phrases tous azimuts. Aussi outil de précision sémantique et de réflexion communautaire. Voir la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats !!!!..... Lire la suite >>
Résultat(s): 1860
Temps de recherche: 0.045s

transhumanisme

Tel un pionnier, il [le human engineer] repousse ses frontières toujours plus loin ; il s’éloigne toujours davantage de lui-même ; il se "transcende" toujours plus [1] – et s’il ne se transporte pas dans la région du surnaturel, il change néanmoins, puisqu’il repousse les limites innées de sa nature vers le royaume de l’hybride et de l’artificiel. Bref, le but de l’expérience est de soumettre la nature physique, qu’on a toujours considérée (à l’exception de la magie et de la médecine) comme un "fatum", à une transformation, de la dépouiller de sa fatalité – ce qui, pour elle, signifie en même temps [...] la débarrasser de tout ce qui est "fâcheux", de tout ce dont elle a honte. Qui sait si, derrière la passion avec laquelle les arrière-petits-fils des Puritains se livrent à cette transformation masochiste du corps, il n’y a pas secrètement à l’œuvre, sans qu’ils le sachent eux-mêmes, des restes de cette énergie avec laquelle leurs ancêtres ont haï le corps, des restes qui ne trouveraient plus d’autre utilisation dans le monde d’aujourd’hui ?



[1] Les folles exigences que l’homme impose à son corps pour le rendre capable d’accomplir les folles tâches que lui imposent ses instruments ressemblent étonnamment à ces folles exigences que les métaphysiciens spéculatifs imposaient autrefois à la raison : dans un cas comme dans l’autre, on a ignoré le fait que les capacités de l’homme étaient limitées. Ici aussi, des limites doivent être repoussées ou franchies. Sauf que, cette fois-ci, l’homme ne prétend pas être omniscient "à l’égal de Dieu", mais vise à devenir semblable à l’instrument, c’est-à-dire "l’égal d’un gadget".

Auteur: Anders Günther Stern

Info: Dans "L'obsolescence de l'homme", trad. de l'allemand par Christophe David, éditions Ivrea, Paris, 2002, page 55

[ ingénierie humaine ] [ dénigrement corporel ] [ dualisme ] [ technolâtrie ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

beaux-arts

Même si tous les historiens de l'art ne sont pas d'accord, on peut voir dans le regard de Lautrec une grande empathie pour les prostituées. Il ne s'intéresse pas seulement aux corps nus et suggestifs, mais montre surtout les moments de vie entre filles, quand le client n'est pas là. On les voit manger ensemble au réfectoire, discuter tranquillement entre elles, faire une partie de cartes. D'un côté, les corps au travail, jouant leur rôle de séduction, de l'autre des corps au repos, relâchés ou en train de se préparer pour l'arrivée du client. L'atmosphère est souvent tranquille et douce, parfois morose et lugubre. L'artiste était un habitué de quelques maisons closes dans le quartier de l'Opéra, celle de la rue des Moulins en particulier, et on sait qu'il était autorisé à faire partie du quotidien des filles.
D'autres peintres, comme Munch ou Picasso dans certaines toiles, ont ce même regard empathique. Dans Mélancolie ou La femme au fichu, Picasso représente une prostituée de la prison Saint-Lazare (que l'on reconnaît au bonnet qu'elle porte) et nous fait sentir toute la solitude de la jeune femme aux traits émaciés, au corps recroquevillé sur lui-même. Munch quant à lui, dans Noël au bordel, propose la vision étonnante d'une maison de tolérance à l'atmosphère presque familiale et douillette, avec le sapin en arrière-plan et cette femme qui lit, une cigarette à la main. Dans L'Allée, il donne à voir une très jeune fille, dont le corps nu est livré en pâture à ces bourgeois habillés et portant haut-de-forme qui l'entourent - comme si l'aisance matérielle leur donnait le droit d'en détourner la vertu.

Auteur: Pludermacher Isolde

Info: Entretien, in l'Objet d'Art hors-série 91, Splendeurs et misères, images de la prostitution, 1850-1910, de L'Objet d'Art

[ art pictural ] [ chair-esprit ]

 

Commentaires: 0

structures incorporées du langage

Si effectivement, l’action spécifique qui vise à l’expérience de satisfaction, est une action dont la fin est de reproduire l’état, de retrouver das Ding, l’objet, nous comprendrons bien des modes de ce qui est le comportement névrotique, de la conduite de l’hystérique, si tant est qu’il s’agit, dans la conduite de l’hystérique, de recréer un état centré par l’objet en tant que cet objet, das Ding, est le centre et le support d’une aversion comme FREUD l’écrit quelque part.

C’est en tant que l’objet premier est objet d’insatisfaction que s’ordonne, s’organise l’Erlebnis spécifique de l’hystérique. Et c’est aussi pour autant que par une différence, une distinction, une opposition que FREUD a vue, la première, et qui n’a pas lieu d’être abandonnée que dans la névrose obsessionnelle, cet objet, das Ding, par rapport à quoi s’organise l’expérience de fond, l’expérience de plaisir, est un objet - FREUD l’a très bien perçu, cela a été sa première aperception de la névrose obsessionnelle - un objet qui littéralement apporte trop de plaisir.

Si vous regardez dans ses cheminements divers, dans tous ses ruisselets le comportement de l’obsessionnel : ce qu’il indique et ce qu’il signifie, ce comme quoi il apparaît sujet lui-même, c’est toujours ce quelque chose qui se règle pour éviter en fin de compte ce qu’il voit souvent assez clairement comme étant le but et la fin de son désir. Et pour l’éviter d’une façon dont la motivation est somme toute extraordinairement radicale, puisque effectivement le principe du plaisir nous est donné pour avoir un mode de fonctionnement qui est justement d’éviter cet excès, ce trop de plaisir.

Auteur: Lacan Jacques

Info: 9 décembre 1959, L'éthique

[ définition ] [ hystérie ] [ choix de la névrose ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

dialogue

Le frère du roi, indifférent à l’affolement qu’il avait provoqué, se dirigea tout droit vers la vieille femme au teint hâlé qui, assise sur son tabouret, surveillait le quartier du haut de ses soixante-dix ans.

— Que nous vaut l’honneur ? ricana la vieille femme. Seraient-ce tes jolis drilles qui voudraient goûter du combat amoureux ?
— Non, madame. C’est vous que je suis venu voir.

Si elle était bien vieille et qu’il lui manquait beaucoup de dents, la femme n’était pourtant pas vilaine, au contraire : il y avait dans ce visage ridé et brûlé de soleil une sorte de beauté digne, d’immortelle fierté, le miroir d’une grâce ancienne, et ses yeux noirs étaient si brillants qu’ils lui donnaient presque un air fripon.

— Monsieur fait dans les antiquités ? Je suis sûre que j’ai pour toi de la viande bien plus fraîche, mon bichon…
— Sais-tu à qui tu t’adresses ? s’emporta le comte de Valois, offusqué par l’impertinence de la vieille femme.
— Je m’en tamponne la mouniche, du moment que t’es bien monté, mon bijou, et à en juger par ta culotte, je dirais que t’en as bien sept pouces moins la tête. Quant à ce nez ! Ce nez ! Chez moi on dit : beau clocher, belle église !

L’un des soldats, fulminant, s’approcha d’elle en portant la main à l’épée. De Valois l’arrêta aussitôt et, s’obligeant à retrouver lui-même son calme, revint au voussoiement :

— Êtes-vous bien celle qu’on appelle Izia ?
— Ici on m’appelle la Mère, mais pour toi je veux bien m’appeler Marie-Madeleine, Jeanne de Navarre ou même le grand Robert, si t’es plutôt de la rosette !

Auteur: Loevenbruck Henri

Info: L'apothicaire

[ famiiarité ] [ prostitution ]

 

Commentaires: 0

drogue

Si encore, au prix de sa dignité, de son honnêteté et de son libre arbitre, l'homme pouvait tirer du haschisch de grands bénéfices spirituels, en faire une espèce de machine à penser, un instrument fécond ? C'est une question que j'ai souvent entendue poser, et j'y réponds. D'abord, comme je l'ai longuement expliqué, le haschisch ne révèle à l'individu rien que l'individu lui-même. Il est vrai que cet individu est pour ainsi dire cubé et poussé à l'extrême, et comme il est également certain que la mémoire des impressions survit à l'orgie, l'espérance de ces utilitaires, ne paraît pas au premier aspect tout à fait dénuée de raison. Mais je les prierai d'observer que les pensées, dont ils comptent tirer un si grand parti, ne sont pas réellement aussi belles qu'elles le paraissent sous leur travestissement momentané et recouvertes d'oripeaux magiques. Elles tiennent de la terre plutôt que du ciel, et doivent une grande partie de leur beauté à l'agitation nerveuse, à l'avidité avec laquelle l'esprit se jette sur elles. Ensuite, cette espérance est un cercle vicieux : admettons un instant que le haschisch donne, ou du moins augmente le génie, ils oublient qu'il est de la nature du haschisch de diminuer la volonté, et qu'ainsi il accorde d'un côté ce qu'il retire de l'autre, c'est-à-dire l'imagination sans la faculté d'en profiter. Enfin il faut songer, en supposant un homme assez adroit et assez vigoureux pour se soustraire à cette alternative, à un autre danger, fatal, terrible, qui est celui de toutes les accoutumances. Toutes se transforment bientôt en nécessités. Celui qui aura recours à un poison pour penser ne pourra bientôt plus penser sans poison.

Auteur: Baudelaire Charles

Info: Les Paradis artificiels, Oeuvres complètes I/la Pléiade/Gallimard 1975<p.440>

 

Commentaires: 0

différenciation

[…] je m’insurge contre l’abus de langage par lequel, de plus en plus, on en vient à confondre le racisme défini au sens strict et des attitudes normales, légitimes même, et en tout cas inévitables. Le racisme est une doctrine qui prétend voir dans les caractères intellectuels et moraux attribués à un ensemble d’individus, de quelque façon qu’on le définisse, l’effet nécessaire d’un commun patrimoine génétique. On ne saurait ranger sous la même rubrique, ou imputer automatiquement au même préjugé l’attitude d’individus ou de groupes que leur fidélité à certaines valeurs rend partiellement ou totalement insensibles à d’autres valeurs.

Il n’est nullement coupable de placer une manière de vivre et de la penser au-dessus de toutes les autres et d’éprouver peu d’attirance envers tels ou tels dont le genre de vie, respectable en lui-même, s’éloigne par trop de celui auquel on est traditionnellement attaché. Cette incommunicabilité relative peut même représenter le prix à payer pour que les systèmes de valeurs de chaque famille spirituelle ou de chaque communauté se conservent, et trouvent dans leur propre fonds les ressources nécessaires à leur renouvellement. Si comme je l’ai écrit ailleurs, il existe entre les sociétés humaines un certain optimum de diversité au-delà duquel elles ne sauraient aller, mais en dessous duquel elles ne peuvent non plus descendre sans danger, on doit reconnaître que cette diversité résulte pour une grande part du désir de chaque culture de s’opposer à celles qui l’environnent, de se distinguer d’elles, en un mot d’être soi : elles ne s’ignorent pas, s’empruntent à l’occasion, mais pour ne pas périr, il faut que, sous d’autres rapports persiste entre elles une certaine imperméabilité.

Auteur: Lévi-Strauss Claude

Info: "Le regard éloigné" (1983)

[ variété nécessaire ] [ monades communautaires ] [ cohésion ] [ identité ] [ psycho-sociologie ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

indistinctibilité

D'un point de vue philosophique, l'argument le plus intéressant de Leibniz était que l'espace absolu entrait en conflit avec ce qu'il appelait le principe d'identité des indiscernables (PII). Le PII stipule que si deux objets sont indiscernables, ils sont alors identiques, c'est-à-dire qu'ils sont réellement un seul et même objet. Que signifie l'indiscernabilité de deux objets ? Ça signifie qu'aucune différence ne peut être trouvée entre eux - ils ont exactement les mêmes attributs. Ainsi, si PII est vrai, deux objets véritablement distincts doivent différer par au moins un de leurs attributs, sinon ils ne seraient qu'un et non deux. PII est intuitivement très convaincant. Il n'est certainement pas facile de trouver un exemple de deux objets distincts qui partagent tous leurs attributs. Même deux produits manufacturés fabriqués en série présentent normalement d'innombrables différences, même si celles-ci ne peuvent être détectées à l'œil nu.

Leibniz nous demande d'imaginer deux univers différents, contenant tous deux exactement les mêmes objets. Dans l'univers 1, chaque objet occupe un emplacement particulier dans l'espace absolu. Dans l'univers 2, chaque objet a été déplacé vers un autre emplacement dans l'espace absolu, à trois kilomètres à l'est (par exemple). Il n'y aurait aucun moyen de distinguer ces deux univers. Nous ne pouvons en effet pas observer la position d'un objet dans l'espace absolu, comme l'a admis Newton lui-même. Tout ce que nous pourrions observer, ce sont les positions des objets les uns par rapport aux autres, et ces positions resteraient inchangées, car tous les objets sont décalés de la même manière. Aucune observation ou expérience ne pourra jamais révéler si nous vivons dans l'univers 1 ou 2.




Auteur: Okasha Samir

Info: Philosophie des sciences : Une très courte introduction

[ expériences de pensée ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

intellectualisme non pragmatique

Barthes n'a évidemment pas tort d'opposer Voltaire, Pascal et Rousseau : il est lui-même auprès de ces derniers. Du côté du signe, de l'expérience intime, de la nostalgie de l'être ; et le travail du langage est chargé de réaliser les desseins de l'histoire. Le marxisme vient culminer et s'abolir dans le dévoilement heideggerien. On ne peut s'étonner si les tenants de cette philosophie supportent mal ce que l'on désignerait, par opposition à l'ontologie, comme philosophie de la vérité. Voltaire est essentiellement du côté de l'énoncé, de la proposition, du vrai, non du côté des mots et de la sémantique. La philosophie du sens ou la philosophie se moque du langage se moque de la science et se soucie de l'être. La philosophie de la vérité se moque de l'être et se préoccupe de la science. L'une est sans doute capable de penser la littérature, de ne pas préférer à tout le texte. Une semblable dichotomie est, à coup sûr, grossière. Mais Barthes commentant Voltaire en vérifie les alternatives principales. Si la vérité est, comme le veut Poe, dans la consistance, (celui qui ne supporte pas la consistance se ferme à une éthique de la vérité, il lâche le mot, la proposition, l'idée, dès qu'ils "prennent" et passent à l'état de solide, de "stéréotypé"). Ce n'est pas Voltaire que gênerait le stéréotype de la vérité. Il la répéterait plutôt à la manière d'un slogan. On ne saurait abuser du langage en ce sens. Aussi l'anathème dont il frappe Voltaire engage-t'il Barthes gravement, et avec Barthes notre époque ostensiblement anti-voltairienne, parfois jusqu'à la caricature. Il vaut mieux ne pas lire Candide, de peur de se reconnaître en Pangloss.

Auteur: Dagen Jean

Info: En réaction, 20 ans plus tard, aux commentaires de Barthes dans sa préface au "Romans et contes" de Voltaire. https://www.persee.fr/doc/litts_0563-9751_1984_num_9_1_1273

[ vacherie ] [ prestige du parisianisme ] [ France ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

esthétique

Les cultures musulmanes et bouddhiques doutent moins de l'équivalence  Beau - Vrai - Bien  parce qu’elles n’ont pas posé cette trinité conceptuelle. Ou pour mieux dire, parce qu’elles n’ont pas fait du Beau un concept. Elles ne l’ont pas abstrait. J’ai été frappé, à cet égard, par un exemple que je ne cite pas dans mon livre, mais que je peux donner ici, même s’il ne concerne pas directement le mot " Beau ". Il s’agit de la traduction arabe d’un mot important s’il en est dans la philosophie grecque puis occidentale, le mot οὐσία (ousia, devenu essentia en latin, puis essence en français). Or ce même mot d’οὐσία fut traduit en arabe par jawhar : littéralement " joyau ", " pierre précieuse ". C’est magnifique, et révélateur : d’une certaine manière la langue arabe répudie l’abstraction philosophique, au profit d’une approche poétique du monde. S’agissant du Beau lui-même, la pensée des mystiques musulmans affirme que Dieu est beau, ce qui signifie immédiatement que le Bien et le Vrai sont Beaux. On n’a pas à distinguer ce qui est un en Dieu.

Du côté de l’Extrême-Orient, je me suis appuyé sur les réflexions de François Jullien, qui affirme que l’association beauté-bonté n’est qu’un " piège platonicien " dans lequel les penseurs chinois ou japonais d’aujourd’hui se croient tenus de tomber, alors que leur propre tradition ne joue pas avec ces Idées. Mais c’est surtout ma lecture des grands romanciers japonais qui m’a suggéré la toute-puissance muette de la Beauté, en deçà ou au-delà de tout concept qui permettrait de l’articuler au Bien ou au Vrai. Bien sûr, tout cela devrait être nuancé de mille manières, mais on ne peut nier, il me semble, que la trinité conceptuelle Beau-Bien-Vrai demeure propre à l’Occident. 

Auteur: Barilier ​​​​​​​Étienne

Info: A propos de son livre : Réenchanter le monde. L’Europe et la beauté (PUF)

[ religions ] [ nord-sud ] [ étymologie ] [ évidente harmonie ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

gratte-ciel

Pourquoi y a-t-il deux tours au World Trade Center de New York ? Tous les grands buildings de Manhattan se sont toujours contentés de s’affronter dans une verticalité concurrentielle, d’où résultait un panorama architectural à l’image du système capitaliste : une jungle pyramidale, tous les buildings à l’assaut les uns des autres. Le système lui-même se prolifait dans l’image célèbre qu’on avait de New York en arrivant de la mer. Cette image a complètement changé en quelques années. L’effigie du système capitaliste est passée de la pyramide à la carte perforée. Les buildings ne sont plus des obélisques, mais s’accolent les uns aux autres, sans plus se défier, telles les colonnes d’un graphe statistique. Cette nouvelle architecture incarne un système non plus concurrentiel, mais comptable, et où la concurrence a disparu au profit des corrélations. [...] Ce graphisme architectural est celui du monopole : les deux tours du W.T.C., parallélépipèdes parfaits de 400 mètres de haut sur base carrée, vases communicants parfaitement équilibrés et aveugles – le fait qu’il y en ait deux identiques signifie la fin de toute concurrence, la fin de toute référence originale. Paradoxalement, s’il n’y en avait qu’une, le monopole ne serait pas incarné, puisque nous avons vu qu’il se stabilise sur une forme duelle. Pour que le signe soit pur, il faut qu’il se redouble en lui-même : c’est le redoublement du signe qui met véritablement fin à ce qu’il désigne. [...] Les deux tours du W.T.C. sont le signe visible de la clôture d’un système dans le vertige du redoublement, alors que les autres gratte-ciel sont chacun le moment original d’un système se dépassant continuellement dans la crise et le défi.

Auteur: Baudrillard Jean

Info: Dans "L'échange symbolique et la mort", éditions Gallimard, 1976, pages 114-115

[ symbole ] [ digitalité ] [ régulation binaire ] [ immeubles d'affaires ]

 
Commentaires: 2
Ajouté à la BD par Coli Masson