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anthropocentrisme

Marquée par Nietzsche, la fin du dix-neuvième siècle vit l'éclosion d'une grande passion des élites occidentales (souvent désœuvrée, donc peu occupées à leur survie) pour le spiritisme (Hugo, etc), la télépathie et autres phénomènes parapsychiques (Warcollier et consort). Marottes qui créèrent évidemment des conflits avec la science balisée, rationnelle et reproductible. Elle donnent surtout un bel éclairage sur les appétences intellectuelles d'alors. C'est ainsi que "La Belle époque" accoucha de théories fort diverses, toutes du domaine psychique humain - donc aisées à monter ou réfuter - et qui, pour la même raison, peuvent se mélanger les unes les autres. Chacune étayée comme il se peut, tout naturellement et pour des raisons bien compréhensibles de cohérence apparente, par les théories précédentes, mythes et autres constructions religieuses de l'histoire humaine.
Citons dans le désordre : la théosophie, les resucées d'ouvrage rosicruciens genre Blavatsky, l'inconscient collectif des psys et analystes, la vie après la mort de Cayce et suivants, le structuralisme de De Saussure, vite dépassé par le post structuralisme... Avec en parallèle la continuation des infinis développement de la Gnose, tentative de la compréhension du Grand Tout, de fait un mot fourre-tout impliquant, toujours dans le désordre : "quête", "subversion", "théologie", "individualisme" (donc égoïsme), etc...
Estimation générale qui me porte à revenir vers Rutherford : "Toute science est soit de la physique, soit collection de timbres."
Et Max Born : "Je suis maintenant convaincu que la physique théorique est la vraie philosophie."
Pour réitérer ce constat, aussi valable pour ces deux citations : l'homme, encore et toujours, ne parle qu'a lui-même. Aah Monade, quand tu nous tiens !

Auteur: Mg

Info: 22 juillet 2018

[ vingtième-siècle ] [ surhomme ] [ quantique ]

 

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femmes-par-hommes

Dans sa petite maison immaculée bâtie au milieu d'un grand jardin envahi de végétation tout près du Vieux Port, elle se penchait vers son miroir pour inspecter son matériel de maquillage, et à travers la crème, la poudre, le mascara et les cils gainés de noir, ses yeux voyaient les rides cachées, le manque d'élasticité de la peau. Elle sentait les années monter comme la marée autour d'un rocher sur une mer calme. Il existe un arsenal de la maturité, de l'âge mûr, mais cela exige un entraînement, une technique qu'elle ne possédait pas encore. Elle devait les apprendre avant de voir écrouler la structure de sa jeunesse qui la laisserait nue, pourrie, ridicule. Son succès était dû au fait qu'elle ne mettait jamais bas les armes, même quand elle était seule. Et là, à titre d'expérience, elle laissa sa bouche s'affaisser comme elle en avait envie, ses paupières se mettre en berne. Elle baissa le menton qu'elle tenait si haut, et un tendon un peu noueux apparut devant elle, dans le miroir, elle vit vingt années fondre sur elle et elle frissonna tandis que le murmure glacé lui disait ce qui l'attendait. Elle avait reculé trop longtemps ce moment. Une femme doit avoir une vitrine où vieillir, avec des éclairages, des accessoires, du velours noir, des enfants, de l'amour, de la protection, un mari serein et peu exigeant, ou bien son testament et son héritage encore plus sereins et encore moins exigeants. Une femme qui vieillit seule est un déchet inutile, une horreur fripée sans serviteurs boitillants pour hocher la tête et marmonner sur ses douleurs et le frictionner.

Auteur: Steinbeck John

Info: L'Hiver de notre Déplaisir, Deuxième partie, Chapitre II

[ vieillissante ] [ littérature ]

 

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couchant

Pirate et Osbie Feel sont étendus sur le toit de l'immeuble, un magnifique coucher de soleil traverse et dessine la rivière sinueuse, impérial serpent, une multitude d'usines, d'appartements, de parcs, de tours et de façades enfumées, un ciel incandescent qui se déverse sur les kilomètres de rues profondes, l'encombrement des toits et les ondulations de la Tamise, y mettant une tension drastique d'orange brûlée pour rappeler au visiteur sa fugacité mortelle, pour sceller ou cacher toutes portes et fenêtres visibles à ses yeux, qui ne cherchent qu'un peu de compagnie, un mot ou deux dans la rue avant de monter vers l'odeur de savon de la chambre louée et les carrés corail du coucher de soleil sur le plancher - une lumière antique, intériorisée, combustible consommé dans l'holocauste hivernal programmé, les formes plus lointaines parmi les brins ou les feuilles de fumée sont maintenant elles-mêmes de parfaites ruines carbonisées, les fenêtres plus proches, frappées un instant par le soleil, ne réfléchissent plus rien mais contiennent la même lumière destructrice,  intense décoloration qui ne permet aucune promesse de retour, une lumière qui rouille les voitures du gouvernement sur les trottoirs, qui vernit les derniers visages se pressant devant les magasins dans le froid comme si une vaste sirène avait finalement retenti,  une lumière qui fait que les innombrables rues se transforment en canaux froids déserts, et qui, avec les étourneaux de Londres, emplit tout, les oiseaux convergent par millions vers des piédestaux de pierre embrumés, vers les endroits qui se vident et vers un grand sommeil collectif. Ils convergent en anneaux, des anneaux concentriques sur les écrans radar. Les opérateurs les appellent des "anges".  

Auteur: Pynchon Thomas

Info: Gravity's Rainbow, trad Mg

[ soir ] [ cépuscule ]

 
Mis dans la chaine

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Ajouté à la BD par miguel

bourse

Le spectre d'un krach
Avant l'ouverture du marché, les indications sur les plateformes alternatives sont les plus sombres. Entraîné la chute de Wall Street puis des marchés asiatiques, l'indice est autour de 3.216 points, soit une chute de plus de 3% par rapport à la clôture de la veille.
Quelques minutes avant l'ouverture officielle du marché, les banques entrent en action. Elles achètent massivement leurs titres d'abord, qui forment l'armature de l'indice, puis les actions qui pèsent lourds dans l'indice comme Total, Edf, ou FranceTelecom. Tous les "fondamentaux", les algorithmes boursiers sont jetés au panier. Il faut à tout prix faire monter le Cac, pour éviter la descente aux enfers.
Les banques connaissent par coeur le système. Elles savent à quelques points près où sont les niveaux des autres ordinateurs qui déclenchent les ordres automatiques d'achat. Des millions sont jetés en quelques minutes sur le marché pour forcer l'indice à monter et trouver ses fameux points des ordres automatiques et enclencher le "cercle vertueux" comme diraient les banquiers.
A l'ouverture officielle, le Cac 40 ouvre à 3220, 30 points, en baisse de 3,07%. Et la hausse s'enclenche. A 9h30, l'indice est déjà à 2.285 et ne perd que 1,5% par rapport à la veille. A 10h, il a 3.313, presque au cours de clôture de la veille (3.220 points). En une heure à peine, il s'est échangé plus d'un milliard d'euros, soit le quart des échanges d'une journée normale sur le marché parisien.
Les banques ont tenu comme en 14. En pure perte, on peut le craindre. Dès 10 heures, le marché s'est retourné. A 10 h 30, il était en baisse de 1,5%.

Auteur: Orange Martine

Info: Médiapart, 5 août 2011 à 11:52

[ magouille ]

 

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conte

LA FRONDE DE DAVID
Il était une fois un petit garçon nommé David N dont la précision de tir et l'habileté dans le maniement du lance-pierres éveillait tant d'envie et d'admiration chez les copains du voisinage et ceux de l'école qu'ils voyaient en lui – c'est le commentaire qu'ils en faisaient lorsque les parents ne pouvaient les entendre - un nouveau David.

Le temps passa.

Fatigué des tirs à blanc qu'il pratiquait en visant de ses cailloux des boites vides ou des tessons de bouteille, David découvrit qu'il était bien plus amusant d’exercer contre les oiseaux le talent que Dieu lui avait donné, si bien que désormais il s'en prenait à tous ceux qui se posaient à sa portée, et en particulier aux Grives, aux Alouettes, aux Rossignols et aux Chardonnerets, dont les petits corps sanglants tombaient doucement sur l'herbe, le cœur encore agité de la peur et de la violence du jet de pierre.

David courait vers eux tout heureux et les enterrait chrétiennement.

Quand les parents de David apprirent cette habitude de leur gentil garçon, ils demandèrent ce que c'était que cette manie, et lui reprochèrent sa conduite en termes si durs et si convaincants que David, des larmes plein les yeux, reconnut sa faute, se repentit sincèrement et pendant longtemps s'appliqua à ne plus tirer que sur les autres enfants.

Engagé dans la milice des années plus tard, pendant la seconde guerre mondiale, David fut élevé au grade de général et décoré des croix les plus prestigieuses pour avoir à lui tout seul tué trente six hommes, et ensuite on le dégrada et on le fusilla pour avoir laissé la vie sauve à un pigeon voyageur qui volait pour le camp ennemi.

Auteur: Monterroso Augusto

Info: LA OVEJA NEGRA, traduction de docline - pseudo sur Babelio

[ chasse ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

intelligence

Mao était fin lettré qui, avant même d’entrer en politique, connaissait la sentence si fameuse, si décisive pour toute entreprise de guérilla, du traité de guerre des Trente-six stratagèmes dont l’auteur nous est inconnu mais que l’on sait inspiré du Yi-king : "Un grand général doit connaître l’art des changements." "Toujours l’actif s’affaiblit et le passif se renforce", dit ce même traité. L’art des changements, c’est l’art de monter en puissance se sachant faible, de transformer le discontinu en continu, et inversement. Sun-Tzu disait que "soumettre l’ennemi sans combat est ce qu’il y a de mieux", indépendamment des forces des uns et des autres, mais dépendamment des ruses de chacun pour affaiblir moralement l’adversaire avant tout combat.
Il fallut près de vingt ans à Mao pour parvenir à la puissance étant faible. Le coup d’État n’est qu’affaire de patience et de prudence. L’art des changements, en matière de guerre comme ailleurs, est un art de la situation, un potentiel de situation, c’est-à-dire un potentiel à l’inverser ou à la confirmer. L’art du changement est un art de la connaissance des causes des choses – tout stratège doit être assez philosophe pour comprendre où veut le mener son ennemi, et où lui-même veut aller, pour en tirer parti. Le but de la stratégie est l’inversion des rapports, et les tactiques ne sont que les opérations d’inversion, les changements, les ouvertures à d’autres situations. Là encore, ce sont des plis : Mao ne croit pas qu’il y ait une situation qui puisse un jour se présenter sous un aspect immuable, rien n’est irréversible ; comme l’indique le Livre des mutations, toutes les situations présentent en leur creux une face et son envers, une situation et son changement, une virtualité de renversement et une virtualité de maintien, de conservation.

Auteur: Bohm Antoine

Info: De Gandhi à Daech, Histoires honorables ou infâmes de guérillas, d'insurrections et de déstabilisations

[ détermination ] [ révolution ] [ Chine ]

 

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Internet

Avec Internet vint l'usage des "like".

Au-delà d'une lecture devenue plus rapide et superficielle, qui a fait perdre de la continuité dans les raisonnements et les développement, on sait maintenant que les objets les plus "likés" (phrases, photos, articles ou films) le sont pour plusieurs raisons. Certaines énervantes, d'autres amusantes, à l'instar des anciens films de cul en vidéo (ou VHS) où les scènes les plus chaudes montraient une forte usure de la bande (d'où altération de l'image, au grand dam de l'utilisateur monomane)...

Statistiques souvent déprimantes puisque très proches du panurgisme d'un audimat aux pulsions naïves et formatées par le consumérisme de masse et à sa perméabilité aux modes grégaires, rassurantes et convenues... "Pourquoi croise-t-on des milliers de personnes et ne s'éprend-on que d'une seule ?" Cette phrase de Guillaume Musso étant par exemple la citation préférée sur babelio "depuis la nuit des temps". Il y a un autre mécanisme, moins décelable mais très en vogue ; la contre-affaire... Je "like" tes interventions et tu "like" les miennes, OK ?... D'où le développement de petits cénacles - forts sympathiques par ailleurs - qui en se soutenant font parfois monter en neige des choses insignifiantes.

Il y a aussi les petits malins qui vous vendent des "like" ou des "clicks", afin de faire monter l'audience de votre site ou de vos interventions, action mue en général plus par simple gloriole que par souci mercantile.

L'effet temporel peut aussi jouer un rôle important. Exemple : après les attentats de Paris en octobre 2015 les surfeurs plébiscitèrent les citations condamnant violence, fanatisme et religion.

On pourrait aussi parler des stratégies de guérilla marketing et autres recettes pour "faire le buzz" sur le web. Inutile. Sur le Web comme dans la vie réelle, on retrouve principalement un monde d'apparences et d'effets miroirs.

Auteur: Mg

Info: 13 juin 2015

[ magouilles ] [ cooptation ] [ pnl ]

 

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triades

" Tu as écrit un recueil de tercets, brefs et condensés comme ta vie. Tu n'en parlas à personne. Ta femme les découvrit après ta mort dans le tiroir de ton bureau: [...] Le jour m'éblouit, Le soir m'apaise, La nuit m'enveloppe. Dominer m'oppresse, Subir m'asservit, Etre seul me libère. La chaleur me gêne, La pluie m'enferme, Le froid m'éveille. Le tabac m'irrite, L'alcool m'endort, La drogue m'isole. Le mal me surprend, L'oubli me manque, Le rire me sauve. L'envie me porte, Le plaisir me déçoit, Le désir me reprend. [...] L'équilibre me tient, La chute me révèle, Le rétablissement me coûte. [...] Le temps me manque, L'espace me suffit, Le vide m'attire. [...] Le bord me tente, Le trou m'aspire, Le fond m'effraie. Le vrai m'émeut, L'incertain me gêne, Le faux me fascine. Le bavardage m'égare, La polémique m'enflamme, Le silence me rachète. L'obstacle m'élève, L'échec m'endurcit, Le succès m'adoucit. [...] L'offense me surprend, La répartie me tarde, L'affection me rédime. [...] Le sermon m'irrite, L'exemple me persuade, L'acte me prouve. Nettoyer m'ennuie, Ranger m'apaise, Jeter me délivre. [...] Savoir me grandit, Ignorer me nuit, Oublier me libère. Perdre m'énerve, Gagner m'indiffère, Jouer me déçoit. Nier me tente, Affirmer m'exalte, Suggérer me contente. [...] Dire m'engage, Ecouter m'apprend, Taire me tempère. Naître m'advient, Vivre m'occupe, Mourir m'achève. Monter m'est difficile, Descendre m'est facile, Stationner m'est inutile. [...] La menace me trompe, L'angoisse me meut, La peur m'exalte. [...] La fatigue me calme, La lassitude me décourage, L'épuisement m'arrête. Construire m'obsède, Conserver m'apaise, Détruire m'allège. [...] Le groupe m'oppresse, La solitude me tient, La folie me guette. Plaire me plaît, Déplaire me déplaît, Indifférer m'indiffère. L'âge me gagne, La jeunesse me quitte, La mémoire me reste. Le bonheur me précède, La tristesse me suit, La mort m'attend.

Auteur: Levé Edouard

Info: Suicide

[ autodestruction ] [ dernières paroles ]

 

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mort

Un de mes collègues médecins, de peu mon aîné, se plaisait lors de nos rencontres à me taquiner sur "ma manie d'interpréter les rêves". Un jour, me rencontrant dans la rue, il m'interpella : "Comment allez-vous ? Toujours plongé dans les rêves? A propos, j'ai eu dernièrement un rêve stupide; veut-il aussi dire quelque chose?" Voici ce qu'il avait rêvé :
"Je fais l'ascension d'un haut sommet et me trouve sur un névé incliné. Je monte toujours plus haut et il fait un temps splendide. Plus je monte, plus mon bien-être grandit; mon sentiment est tel que je pense: Ah! Si je pouvais monter ainsi éternellement! Lorsque j'arrive à la cime, je suis transporté de bonheur; mon impression de plénitude est telle que je sens pouvoir continuer à m'élever dans l'espace; je m'y risque et m'élève dans les airs. Je me réveillai dans l'extase la plus parfaite."
Je lui répondis: "Mon cher collègue, comme je vous sais alpiniste incorrigible, il me faut au moins vous adjurer de renoncer à l'avenir aux excursions solitaires. Quand vous irez en montagne, engagez deux guides auxquels vous promettrez sur l'honneur une obéissance absolue." Il rit et s'écria en prenant congé: "Vous êtes bien toujours le même!" Je ne le revis plus. Deux mois plus tard survint le premier accident : au cours d'une excursion entreprise seul, il fut surpris par une avalanche et recouvert; une patrouille militaire qui passait par là put encore le dégager. Trois mois après ce fut la fin : lors d'une excursion sans guide, en compagnie d'un ami plus jeune, il fit à la descente, comme l'observa un guide qui se trouvait en dessous, une enjambée littéralement dans le vide, s'écroula sur l'ami qui le précédait, et ils furent tous deux précipités dans le gouffre où ils s'écrasèrent. C'était bien là l'extase, au sens plein du terme.

Auteur: Jung Carl Gustav

Info:

[ prémonition ] [ littérature ]

 

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fausses apparences

Un cas terrible de syndrome de l’imposteur est celui du philosophe français Louis Althusser. C’était un homme qui a souffert de problèmes mentaux extrêmement graves ; à vingt-neuf ans, on lui a diagnostiqué une psychose maniaco-dépressive et il a été interné une vingtaine de fois dans différents centres psychiatriques. En 1980, il a commencé à faire un massage à sa femme, la sociologue Hélène Rytmann, avec qui il vivait depuis trente-cinq ans, et il a fini par l’étrangler jusqu’à ce que mort s’ensuive. Il a été déclaré irresponsable devant la loi pour avoir eu un accès de folie, et il a encore été interné pendant trois ans. En 1992, deux ans après sa mort, on a publié son autobiographie, L’avenir dure longtemps, dans laquelle il raconte d’une façon déchirante qu’il se considérait comme un lâche et un imposteur. Qu’il abritait des désirs homosexuels qu’il n’a jamais concrétisés ; qu’il passait pour un éminent philosophe alors que le fait est qu’il avait des lacunes considérables dans ses connaissances : il ne savait rien sur Aristote, ni sur les sophistes, ni sur les stoïciens, ni sur Kant (je me l’imagine se disant dans un moment de stupeur : Aristote ? Ou est-ce Aristarque ? Ou peut-être Anaxarque ?). Et qu’il avait été considéré comme un héros de la Seconde Guerre mondiale parce qu’il était resté cinq ans dans un camp de prisonniers allemand, mais qu’en réalité il avait ressenti une “terreur totale” à l’idée de se battre, qu’il s’inventait des maladies pour éviter les missions et que, quand les Allemands l’avaient capturé, il s’était senti soulagé. Pauvre Althusser, qui avait vécu, comme nous l’avons dit avant, écrasé par l’impératif héroïque de cet oncle et premier fiancé de sa mère dont il portait le nom, mort au combat pendant la Première Guerre mondiale. D’ailleurs, c’est à son retour du camp de prisonniers que la psychose d’Althusser a officiellement éclaté : il avait eu la terrible malchance d’avoir à vivre une autre guerre mondiale dans laquelle se mesurer à son fantôme. Il avait perdu, bien entendu.

Auteur: Montero Rosa

Info: Le danger de ne pas être folle

[ imposture ] [ autoportrait ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste