Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits. Recherche mots ou phrases tous azimuts. Aussi outil de précision sémantique et de réflexion communautaire. Voir la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats !!!!..... Lire la suite >>
Résultat(s): 51
Temps de recherche: 0.0462s

transition capitaliste

- […] Il prit la terre pour construire une ville et il nous fit mourir de faim. La ville ne pouvait pas vivre. Il n’y avait plus de quoi manger pour les pies et les corbeaux, rien que des maisons et des humains. Il nous procura ceci et cela : beaucoup de maisons, une banque, une fabrique, des arbres de Noël et toutes ces histoires-là. Ayant appris dernièrement qu’il cultivait du tabac – est-ce un aliment, ça ? lui demandai-je. Non, me répondit-il, mais c’est l’évolution, c’est de l’argent pour acheter de la nourriture ! De l’argent ? Oui, c’était de l’argent et des bénéfices et du progrès, etc. Non, c’est la perdition, voilà ce que c’est, nous ne mangeons plus que des choses recherchées qu’on achète dans les boutiques et nous n’ouvrons la bouche que pour en avoir toujours davantage, c’est du vent que nous avalons, cela ne rassasie pas. Je vois, Hosea, que tu vas dire quelque chose. Tu veux parler du café.
- Oui, dit Hosea, on aurait pu en offrir une tasse à Joakim, mais je n’en ai pas, je n’ai pas de quoi en acheter.
Ezra : - Et tu crois que Joakim y tient ! Donne-lui donc une tasse de lait. Voilà ce qu’avant nous on mettait devant les invités. Et puis toutes ces grandes exigences ridicules, auxquelles August voulait nous habituer, tous ces besoins de friandises coûteuses ! Les gens en sont arrivés à être mécontents, à se figurer qu’ils souffrent la misère s’ils ne mangent pas chaque jour de la viande et des plats du dimanche. Exigences et mécontentement de plus en plus grands chez tous. Le dernier homme content à Polden-sur-Mer a été Martinus Halskar. Il n’était pas trop gâté, mais il avait de la reconnaissance envers Dieu, et il a dépassé quatre-vingt ans.

Auteur: Hamsun Knut

Info: Dans "August le marin", trad. Marguerite Gay et Gerd de Mautort, Le livre de poche, 1999, page 1485

[ mode de vie traditionnel ] [ dépossession ] [ moyens de production ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

cité imaginaire

A partir de là, après sept jours et sept nuits, l'homme arrive à Zobéïde, ville blanche, bien exposée à la lune, avec des rues qui tournent sur elles-mêmes comme des files d'une pelote. Voici ce qu'on raconte à propos de sa fondation : des hommes de diverses nations firent un rêve semblable, ils virent une femme courir en pleine nuit dans une ville inconnue, ils la virent de dos avec ses cheveux longs, et elle était nue. Ils rêvèrent qu'ils la suivaient. A la fin, chacun la perdit. Ayant rêvé, ils partirent à la recherche de la ville, ils ne la trouvèrent pas mais se retrouvèrent ensemble ; ils décidèrent de construire une ville comme dans leur rêve. Dans la disposition des rues chacun reconstitua l'itinéraire de sa poursuite : là où il avait perdu les traces de la fugitive, il ordonna l'espace et les murs autrement que dans le rêve, de telle sorte qu'elle ne puisse plus s'échapper. Ce qui donna la ville de Zobéïde où ils s'établirent dans l'attente qu'une nuit se répète la scène. Aucun d'entre eux, ni en rêve, ni à l'état de vaille, ne revit jamais la femme. Les rues de la ville étaient celles par lesquelles ils allaient au travail tous les jours, sans plus aucune relation avec la poursuite du rêve. Qui du reste était déjà oublié depuis longtemps. D'autres hommes arrivèrent d'autres pays, ayant fait un rêve semblable au leur, et ils reconnaissaient dans la ville de Zobéïde quelque chose des rues de leur rêve, et ils changeaient de place arcades et escaliers de manière à ce que cela ressemble mieux au chemin de la dame poursuivie et que là où elle avait disparu il ne reste plus d'issues par ou s'échapper. Les premiers arrivés ne comprenaient pas ce qui attirait ces gens à Zobéïde, dans cette ville sans grâce, cette souricière.

Auteur: Calvino Italo

Info: les villes invisibles

[ légende ] [ littérature ] [ femmes-hommes ]

 

Commentaires: 0

repli narcissique

Et pourtant, de nombreux ex-radicaux ont eux-mêmes embrassé la sensibilité thérapeutique dans les années 1970. Rennie Davis abandonne le radicalisme politique pour suivre Maharaj Ji, le gourou adolescent. Abbie Hoffman, l’ancien chef des Yippies, décide qu’il est plus important de rassembler ses esprits que de mouvoir les multitudes. Son associé d’antan, Jerry Rubin, lorsqu’il atteignit l’âge terrible de trente ans, se trouva confronté à ses peurs et à ses anxiétés secrètes ; il déménagea alors de New York à San Francisco, et se mit à acheter – avec des revenus apparemment inépuisables – tous les produits offerts par les supermarchés spirituels de la côte Ouest. […]

Dans ses mémoires, modestement intitulées Grandir à trente-sept ans, Rubin témoigne des effets salutaires du régime thérapeutique. Après avoir négligé son corps pendant des années, il se donna "la permission d’être en bonne santé", et perdit rapidement quinze kilos. Nourriture diététique, jogging, yoga, saunas, chiropraxie, acupuncture lui donnèrent l’impression, à trente-sept ans, "d’en avoir vingt-cinq". Sur le plan spirituel, ses progrès se révélèrent tout aussi satisfaisants et indolores. Abandonnant son armure protectrice, son sexisme, sa "manie de l’amour", il apprit "à s’aimer suffisamment soi-même pour n’avoir pas besoin d’un autre pour se rendre heureux", et parvint à comprendre que sa politique révolutionnaire cachait un "conditionnement puritain" qui provoquait parfois en lui un certain malaise, à cause de sa célébrité et des avantages monétaires qu’elle lui valait. C’est apparemment sans efforts psychiques épuisants que Rubin a réussi à se convaincre « qu’il n’y a pas de mal à "goûter les bienfaits de la vie qu’apporte l’argent". […]

Pourtant, cet "énorme auto examen" donne peu d’indications touchant la compréhension de soi auquel il serait parvenu sur le plan personnel ou collectif. Sa conscience de soi demeure embourbée dans les clichés de la libéralisation des mœurs. Rubin examine "la femme en lui", son besoin de se faire une conception plus tolérante de l’homosexualité et son envie de "faire la paix" avec ses parents, comme si ces lieux communs apportaient des révélations difficilement acquises sur la condition humaine. […]

Comme tant d’anciens radicaux, Rubin n’a fait que substituer des slogans thérapeutiques en vogue aux slogans politiques de naguère, qu’il utilise dans l’un et l’autre cas sans tenir compte de leur signification.

Auteur: Lasch Christopher

Info: Dans "La culture du narcissisme", trad. Michel L. Landa, éd. Flammarion, Paris, 2018, pp. 35-38

[ itinéraire ] [ critique ] [ autosatisfaction ] [ beat generation ]

 
Commentaires: 1
Ajouté à la BD par miguel

monde matheux

Furieuse, la bête se tordit et agita ses intégrales itérées sous les coups polynomiaux du roi, s'effondra en une série infinie de termes indéterminés, puis se releva en s'élevant à la puissance n, mais le roi l'assomma tellement de différentielles et de dérivées partielles que ses coefficients de Fourier s'annulèrent tous (voir le lemme de Riemann), et dans la confusion qui s'ensuivit, les constructeurs perdirent complètement de vue à la fois le roi et la bête. Ils firent donc une pause, se dégourdirent les jambes, burent une gorgée de la cruche de Leyde pour reprendre des forces, puis se remirent au travail et recommencèrent depuis le début, en déployant cette fois tout leur arsenal de matrices tensorielles et de grands ensembles canoniques, attaquant le problème avec une telle ferveur que le papier même se mit à fumer. Le roi se précipita avec toutes ses coordonnées cruelles et ses valeurs moyennes, trébucha dans une sombre forêt de racines et de logarithmes, dut faire marche arrière, puis rencontra la bête sur un champ de nombres irrationnels (F1) et la frappa si durement qu'elle tomba de deux décimales et perdit un epsilon, mais la bête glissa autour d'une asymptote et se cacha dans un espace de phase orthogonal à n dimensions, subit une expansion et sortit, fumant de manière factorielle, et tomba sur le roi et lui causa une blessure cuisante. Mais le roi, sans se décourager, enfila sa cotte de mailles de Markov et tous ses paramètres imperméables, porta son incrément Δk à l'infini et asséna à la bête un véritable coup booléen, l'envoyant rouler à travers un axe des x et plusieurs parenthèses - mais la bête, préparée à cela, baissa ses cornes et... vlan ! -Les crayons volèrent comme des fous au travers des fonctions transcendantes et des transformations à double figure, et lorsqu'enfin la bête se rapprocha et que le roi fut à terre, les constructeurs se levèrent d'un bond, dansèrent une gigue, rirent et chantèrent en déchirant tous leurs papiers en lambeaux, à la grande surprise des espions perchés dans le lustre - perchés en vain, car ils n'étaient pas initiés aux subtilités des mathématiques supérieures et n'avaient donc aucune idée de la raison pour laquelle Trurl et Klapaucius criaient maintenant, encore et encore, "Hourra ! Victoire !!!"

Auteur: Lem Stanislaw

Info: La Cyberiade

[ incompréhensible ] [ humour ] [ littéraire ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

combat

Furieuse, la bête se cabra et a tortilla ses intégrales itérées sous les coups polynomiaux du roi, s'écroula en une série infinie de termes indéterminés, puis se releva, montant à la puissance n, mais le roi l'avait tellement abreuvée de différentielles et de dérivées partielles que ses coefficients de Fourier s'annulèrent tous (voir le lemme de Riemann), et dans la confusion qui s'en suivit, les constructeurs perdirent complètement de vue tant le roi que la bête. Ils firent donc une pause, se dégourdirent les jambes, burent une gorgée de la cruche de Leyde pour reprendre des forces, puis se remirent au travail et recommencèrent depuis le début, en déployant cette fois tout leur arsenal de matrices tensorielles et de grands ensembles canoniques, attaquant le problème avec une telle ferveur que le papier même se mit à fumer. Le roi, s'étant précipité avec toutes ses coordonnées cruelles et ses valeurs moyennes, trébucha dans une sombre forêt de racines et de logarithmes, et dut faire marche arrière, puis il rencontra la bête sur un champ de nombres irrationnels (F1) et la frappa si durement qu'elle perdit deux décimales et un epsilon, mais la bête avait glissé autour d'une asymptote pour se cacher dans un espace de phase orthogonal à n dimensions, puis, ayant subi une expansion elle en ressortit, fumante de manière factorielle, et elle tomba sur le roi pour le blesser de manière passagère. Mais le roi, sans se décourager, revêtit sa cotte de mailles de Markov et tous ses paramètres imperméables, puis porta son incrément Δk à l'infini et asséna à la bête un véritable uppercut booléen, la faisant tituber à travers un axe des x et plusieurs parenthèses - mais la bête, préparée à cela, a abaissé ses cornes et... VLAN ! - Les crayons s'éparpillèrent comme des fous à travers les fonctions transcendantes et les doubles transformations, et lorsque la bête se rapprocha enfin alors que le roi était mis à terre pour le compte, les constructeurs se levèrent d'un bond, dansèrent une gigue, en riant et chantant, déchirant tous leurs papiers en lambeaux, à la grande surprise des espions juchés dans le lustre - perchés là en vain, car ils n'étaient pas initiés aux subtilités des mathématiques supérieures et n'avaient donc aucune idée de la raison pour laquelle Trurl et Klapaucius criaient maintenant, encore et encore, "Hourra ! Victoire !!!"

Auteur: Lem Stanislaw

Info: The Cyberiad

[ monde mathématique ] [ humour ] [ complexité ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

génocide

[...] ... Un historien, un jour, estima que, si les morts de Nankin pouvaient se donner la main, ils formeraient une chaîne jusqu'à Hangzhou, à deux cents kilomètres de là. Leur sang pèserait 1 200 tonnes et leurs cadavres rempliraient 2 500 wagons de marchandises. Empilés les uns sur les autres, ils auraient la hauteur d'un immeuble de soixante-quatorze étages.
(...)
Le massacre de Nankin dépasse en nombre de tués la plupart des pires crimes de tous les temps. Les Japonais battirent dans l'horreur les Romains à Carthage (qui n'avaient fait "que" 150 000 morts), les armées catholiques pendant la période de l'Inquisition et même certaines des atrocités de Tamerlan qui massacra 100 000 prisonniers à Delhi en 1398 et édifia deux tours de crânes en Syrie en 1400 et 1401.
(...)
Certes, au cours du XXème siècle, quand les outils du meurtre de masse furent parfaitement au point, Hitler tua environ six millions de Juifs et Staline, plus de quarante millions de Russes, mais il fallut plusieurs années pour arriver à de tels résultats. A Nankin, la tuerie fut concentrée sur quelques semaines.
(...)
De fait, même au regard des standards de la guerre la plus destructrice de l'histoire de l'humanité, le Sac de Nankin représente l'une des pires instances de l'extermination de masse. Pour tenter de l'imaginer, penchons-nous encore sur quelques statistiques. A Nankin, le nombre de morts dépasse celui de certains pays pendant l'ensemble du second conflit mondial : la Grande-Bretagne perdit 61 000 civils, la France 108 000, la Belgique 101 000 et les Pays-Bas 242 000. Aux yeux des spécialistes de ces questions, les bombardements aériens représentent l'un des instruments les plus atroces de destruction massive. Et pourtant, aucun des raids les plus meurtriers ne dépassa les ravages de Nankin. Il est probable que les morts y furent plus nombreux qu'à Dresde lors de l'expédition britannique sur la ville et de l'incendie qui s'ensuivit (à l'époque, on avança le chiffre de 225 000 morts mais des rapports plus objectifs parlent aujourd'hui de 60 000 morts et de 30 000 blessés). Quoi qu'il en soit, que l'on se réfère au chiffre le plus faible - 260 000 - ou le plus élevé -350 000 - il est choquant de constater que le nombre des victimes de Nankin dépasse de loin celui des raids américains sur Tôkyô (entre 80 000 et 120 000 morts) et même les scores des deux bombardements atomiques d'Hiroshima et Nagasaki à la fin de 1945 (estimés respectivement à 140 000 et 70 000 morts.) ... [...]

Auteur: Chang Iris

Info: Le viol de Nankin : 1937 : un des plus grands massacres du XXe siècle

[ historique ] [ Asie ]

 

Commentaires: 0

dernières paroles

Homère, disparu au fond des âges, pour autant qu'il ait existé en tant qu’individu. Zoroastre, mort vénéré, mais sans avoir laissé de derniers mots. Les versions de la mort d'Emphédocle sont pléthoriques et légendaires, la plus épique racontant qu’il se serait alors jeté dans le cratère de l’Etna et que le volcan aurait rejeté sa sandale… qui était de bronze! Héraclite d’Ephèse aurait demandé qu’on enduise son corps de fumier. Ainsi, rendu méconnaissable, il aurait été dévoré vif par une meute de chiens! De Lao Tseu, on sait si peu de chose que son existence peut apparaître comme un mythe. Aristote disparut à 63 ans d'une maladie de l'estomac. Pythagore fut massacré par les Crotoniates, à moins qu’il n’ait vécu le reste de sa vie ailleurs, comme d’aucuns le prétendent. La légende raconte que Démocrite décida d’en finir et qu’il diminua progressivement sa ration de nourriture jusqu’à ne plus rien manger. Sans parler de Chrysippe mort de rire en voyant un âne manger des figues… Zeuxis idem, mort d'hilarité en peignant une vieille femme ridée. Nous n’avons rien trouvé sur la fin de Thucydide, d’Hérodote et de Xénophon. A notre connaissance, on ne sait pas non plus comment est mort Plutarque, Tacite encore moins. On dit que Li Taï Po, grand buveur, tomba à l’eau, ivre avant d’être mort. Dù Shàolíng serait décédé d’avoir trop mangé après être resté plusieurs jours à la diète. Maître Eckhart expira en 1328 sur la route d’Avignon où il allait défendre sa cause auprès du pape Jean XXII. Villon, à la suite de son bannissement, s’évanouit dans la nature dès janvier 1463. Spinoza et Leibniz trépassèrent dans l'indifférence de leur époque. Le cardinal de Retz, pris d'un malaise en 1679, meurt dix jours plus tard chez sa confidente, la duchesse de Lesdiguières. Alors qu’il soupait avec appétit, La Bruyère perdit tout d'un coup la parole et montra alors sa tête comme le siège de son mal. Saignée, émétique, lavement de tabac, rien n'y fit. La Fontaine aurait eu, juste avant d’expirer, des remords quand à ses pièces libertines (on réalisa à son décès, oh surprise!, qu'il portait un cilice.) Max Stirner fit le grand saut dans la solitude et le dénuement à Berlin. L'état civil nota laconiquement sur les registres officiels: "Ni mère, ni femme, ni enfants."  Carl Friedrich Gauss disparut pendant son sommeil, comme Théophile Gautier. Nietzsche sombra définitivement dans la démence le 3 janvier 1889. Dans une rue de Turin, mû par une impulsion subite, il s'effondra en larmes au cou d'un cheval qui avait dérapé sur le pavé. Il décédera onze ans plus tard. Zola fut retrouvé à l’état de cadavre, traîtreusement asphyxié par un feu de briquettes sans fumée. René Daumal, mourut à trente-six ans miné par la tuberculose. On vient de retrouver, au large de Marseille, l’avion d’Antoine de Saint-Exupéry, porté disparu depuis 1944 lors d'un vol au-dessus de la Méditerranée. Seize ans après cette disparition, Albert Camus était effacé par un accident d'automobile. Albert Einstein murmura quelques mots en allemand, mais on ne sait pas lesquels. Buster Keaton, mort d’un cancer du poumon, ne pouvait pas décemment laisser de dernière parole. Pierre Dac, homme timide et presque effacé, passera de vie à trépas dans la plus grande discrétion. René Goscinny aurait eu une crise cardiaque sur le vélo de son cardiologue. Glenn Gould disparut prématurément à cinquante ans des suites d'une congestion cérébrale. Tennessee Williams exhala son dernier soupir, délaissé, dans sa chambre d'hôtel new-yorkais. L’écrivain John Fante, aveugle en fin de vie en raison des complications entraînées par son diabète, mourut après avoir dicté son dernier livre à sa femme. Primo Levi se suicida sans dernier message, mais celui-ci nous était transmis depuis longtemps. Marguerite Yourcenar décéda d’une hémorragie cérébrale à l'hôpital de l’île du Mont-Désert où elle résidait depuis longtemps. Isaac Asimov disparaissait un 6 avril à 2 h du matin à cause d’une insuffisance rénale et de problèmes cardiaques. Cioran, le grand vindicatif, s’éteignit à petit feu, miné par la maladie d’Alzheimer, tout comme Alfred E. Van Vogt. En 1980, Alfred Hitchcock ne ressortit pas de son sommeil, Félix Leclerc non plus en 1988, de même que, quatorze ans plus tard, l’essayiste autrichien Ivan Illich…

Auteur: Mg

Info: Dictionnaire des dernières paroles, Favre Ed 2005. Préface

[ manquantes ]

 

Commentaires: 0

cours naturel de la vie

Je me mis donc à fréquenter des croyants pauvres, des gens simples, analphabètes, des pèlerins, des moines, des vieux-croyants, des paysans. Ces gens du peuple confessaient la foi chrétienne, tout comme les pseudo-croyants de notre milieu. Un grand nombre de superstitions étaient mêlées aux vérités chrétiennes, mais à la différence des gens de notre milieu, dont les superstitions ne leur servaient à rien, ne s'accordaient pas à leur vie, n'étaient qu'une sorte d'amusement épicurien, celles des croyants issus du peuple travailleur étaient tellement liées à leur vie qu'on ne pouvait imaginer leur vie sans ces superstitions, celles-ci étaient une condition nécessaire de leur vie. Toute la vie des croyants de notre milieu était en contradiction avec leur foi, tandis que toute la vie des croyants travailleurs confirmait le sens de la vie que leur apportait la connaissance de leur foi. Je me mis à regarder de plus près la vie et les croyances de ces gens, et plus je les sondais, plus je voyais qu'ils avaient la vraie foi, nécessaire pour eux, et qu'elle seule leur donnait le sens et la possibilité de la vie. A la différence de ce que je voyais dans notre milieu, où il est possible de vivre sans foi et où il est rare qu'une personne sur mille se reconnaisse comme croyante, dans leur milieu à eux, on s'étonne de rencontrer un non-croyant sur mille personnes. Contrairement à ce que je voyais dans notre milieu où toute la vie se déroule dans l'oisiveté, dans des distractions, et où l'on est mécontent de la vie, je vis que toute la vie de ces gens était faite de pénible labeur, et qu'ils étaient heureux de vivre. A la différence de l'indignation qu'éprouvent les gens de notre milieu contre leur sort pour les privations et les souffrances que celui-ci leur inflige, ces gens-là accueillaient les maladies et les malheurs sans la moindre plainte ni révolte, mais avec une tranquille et ferme certitude que tout cela est un bien. Nous autres, plus nous sommes intelligents, et moins nous comprenons le sens de la vie, et plus la maladie et la mort nous apparaissent comme une cruelle moquerie, tandis que ces gens, eux, vivent, souffrent et s'approchent de la mort, et souffrent encore avec calme, la plupart du temps avec joie. Si une mort sereine, une mort sans terreur ni désespoir est une rare exception dans notre milieu, il est exceptionnel de voir, dans le peuple, une mort accompagnée d'angoisse, de révolte, d'affliction. Et ils sont extrêmement nombreux, ces gens privés de tout ce que Salomon et moi-même nous considérons comme l'unique bien de la vie, et qui sont malgré cela pleinement heureux. Je regardai plus loin autour de moi. Je sondai la vie d'immenses masses humaines, aujourd'hui et dans le passé. J'en vis donc qui avaient compris le sens de la vie, qui avaient su vivre et mourir, ils n'étaient pas deux, ni trois, ni dix, mais des centaines, des milliers, des millions. Et à la différence de mon ignorance à moi, tous, quels que fussent le caractère, leur intelligence, leur éducation, leur situation, ils connaissaient le sens de la vie et de la mort, ils travaillaient tranquillement, supportaient les privations et les souffrances, vivaient et mouraient, en voyant non pas de la vanité, mais un bien. Je finis par aimer ces gens. Plus je sondais leur vie, celle des vivants et celle des morts dont j'avais entendu parler ou que je connaissais par mes lectures, plus je les aimais, et plus ma vie à moi me semblait facile. Au bout de deux années de cette vie, je connus un bouleversement qui se préparait en moi depuis longtemps et dont les prémices m'habitaient depuis toujours. Il arriva que la vie de notre milieu, des gens riches et savants me parut non seulement dégoûtante, mais elle perdit pour moi tout son sens. Tous nos actes, nos raisonnements, nos sciences, nos arts, tout m'apparut sous un jour nouveau. Je compris que tout cela n'était que jeu, et que ce n'était pas là qu'il fallait chercher du sens. En revanche, la vie de tout le peuple travailleur, de toute l'humanité, occupée à créer la vie, m'apparut sous son jour véritable. Je compris que c'était la vie à l'état pur, et que le sens donné à cette vie était la vérité même, et je l'acceptai.

Auteur: Tolstoï Léon

Info: Confession, traduction Luba Jurgenson, Pygmalion, p. 81 à 84.

[ simplicité ] [ s'écouler ] [ sans complication ] [ prolétaires ] [ existences pragmatiques ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

mental ratiocinant

Ce sont les sophistes, Protagoras en tête, qui sont les véritables précurseurs de la pensée moderne ; ce sont eux les "penseurs" proprement dits, en ce sens qu'ils se bornaient à ratiociner et ne se souciaient guère de "percevoir" et de rendre compte de ce qui "est". Et c'est à tort qu'on a vu en Socrate, Platon et Aristote les pères du rationalisme, voire de la pensée moderne en général ; sans doute, ils raisonnent — Shankara et Râmânuja en font autant — mais ils n'ont jamais dit que le raisonnement est l'alpha et l'oméga de l'intelligence et de la vérité, ni a fortiori que nos expériences ou nos goûts déterminent la pensée et priment l'intuition intellectuelle et la logique, quod absit.
Somme toute, la philosophie moderne est la codification d'une infirmité acquise ; l'atrophie intellectuelle de l'homme marqué par la "chute" avait pour conséquence une hypertrophie de l'intelligence pratique, d'où en fin de compte l'explosion des sciences physiques et l'apparition de pseudo-sciences telles que la psychologie et la sociologie.
Quoi qu'il en soit, il faut reconnaître que le rationalisme bénéficie de circonstances atténuantes en face de la religion, dans la mesure où il se fait le porte-parole des besoins de causalité légitimes que suscitent certains dogmes, du moins quand on les prend à la lettre comme l'exige la théologie. D'une manière tout à fait générale, il va de soi qu'un rationaliste peut avoir raison sur le plan des observations et des expériences ; l'homme n'est pas un système clos, bien qu'il puisse s'efforcer de l'être. Mais même en dehors de toute question de rationalisme et de dogmatisme, on ne peut en vouloir à personne d'être scandalisé par les sottises et les crimes perpétrés au nom de la religion, ou même simplement par les antinomies entre les différents credos ; toutefois, comme les horreurs ne sont certes pas l'apanage de la religion — les prédicateurs de la "déesse raison" en fournissent la preuve —, il faut nous arrêter à la constatation que les excès et les abus sont dans la nature humaine. S'il est absurde et choquant que des crimes se réclament du Saint-Esprit, il n'est pas moins illogique et scandaleux qu'ils aient lieu à l'ombre d'un idéal de rationalité et de justice. [...]
En parlant, plus haut, d'apparentes "absurdités", nous avions en vue surtout l'idée d'un Dieu à la fois infiniment puissant et infiniment bon qui crée un monde rempli d'imperfections et de calamités, y compris un Enfer éternel ; seule la métaphysique peut résoudre ces énigmes que la foi impose au croyant, et qu'il accepte parce qu'il accepte Dieu ; non par naïveté, mais grâce à un certain instinct de l'essentiel et du surnaturel. C'est précisément la perte de cet instinct qui a permis au rationalisme d'éclore et de se répandre ; la piété s'affaiblissant, l'impiété pouvait s'affirmer. Et si d'une part le monde de la foi comporte incontestablement de la naïveté, d'autre part le monde de la raison manque totalement d'intuition intellectuelle et spirituelle, ce qui est autrement grave ; c'est la perte du sacré et la mort de l'esprit. Au lieu de discuter vainement sur ce que Dieu "veut" ou ne "veut pas", les théologiens répondent volontiers, et avec raison, par une fin de non-recevoir : qui es-tu, homme, pour vouloir sonder les motivations de ton Créateur ? Dieu est incompréhensible, et incompréhensibles sont ses volontés ; ce qui, au point de vue de la mâyâ terrestre, est la stricte vérité, et la seule vérité que l'humanité à laquelle le Message religieux s'adresse, soit capable d'assimiler avec fruit. Assimilation plus morale qu'intellectuelle ; on ne prêche pas le platonisme aux pécheurs en danger de perdition, pour lesquels la réalité, c'est le monde "tel qu'il est".
On peut le voir par ce que nous venons de dire : notre intention n'est pas d'insinuer que la religion devrait être autre chose que ce qu'elle est. Les religions n'avaient pas le choix : la scission, chez l'homme moyen de l'"âge de fer", entre l'Intellect et une intelligence extravertie et superficielle, les obligeait à traiter les adultes comme des enfants, sous peine d'inefficacité psychologique, morale et sociale. Les idéologies profanes au contraire traitent comme adultes des hommes rendus quasi irresponsables par leurs passions et leurs illusions, ce qui revient à dire qu'ils les incitent à jouer avec le feu ; on n'en voit que trop bien les résultats sinistres à notre époque. Dans l'exotérisme religieux, l'efficacité tient parfois lieu de vérité, et avec raison, étant donné la nature des hommes auxquels il s'adresse ; en d'autres termes : pour le théologien volontariste et moraliste, est vrai ce qui aura le bon résultat ; pour le métaphysicien-né, au contraire, est efficace ce qui est vrai ; "il n'y a pas de droit supérieur à celui de la vérité". Mais tout le monde n'est pas un "pneumatique", et il faut équilibrer les sociétés et sauver les âmes comme on peut.

Auteur: Schuon Frithjof

Info: Dans "La transfiguration de l'homme"

[ éloignement de la source ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

bêtise bipolaire

Il ne fait aucun doute que les IA sont biaisées. Mais beaucoup déclarent que ces problématiques de l'IA existent parce que nous humains sommes imparfaits, plus que les machines. "Les machines sont-elles condamnées à hériter des préjugés humains ?", titrent les journaux. "Les préjugés humains sont un énorme problème pour l'IA. Voilà comment on va arranger ça." Mais ces récits perpétuent une dangereuse erreur algorithmique qu'il faut éviter.

Oui, les humains sont subjectifs. Oui, malgré les efforts conscients et inconscients de ne pas l'être, nous faisons de la discrimination, nous stéréotypons et portons toutes sortes de jugements de valeur sur les gens, les produits et la politique. Mais nos préjugés ne sont pas correctement mesurés ou modélisés par les machines. Non, les tendances machine sont dues à la logique même de la collecte des données : le système binaire.

Le système binaire est la chaîne de 0 et 1 à la base de tous les systèmes informatiques. Cette méthode mathématique permet de réduire et de calculer efficacement les grands nombres et, deuxièmement, elle permet la conversion de l'alphabet et de la ponctuation en ASCII (American Standard Code for Information Interchange).

Mais ne vous laissez pas berner : Ces 0 et 1 ne signifient pas que la machine comprend le monde et les langages comme nous le faisons : "La plupart d'entre nous, la plupart du temps, suivons des instructions qui nous sont données par ordinateur plutôt que l'inverse ", explique l'historien des technologies George Dyson. Afin de pouvoir communiquer avec les ordinateurs, nous sommes ajustés et orientés vers leur logique, et non vers la nôtre.

Le système binaire réduit tout à des 0 et des 1 insignifiants, quand la vie et l'intelligence font fonctionner XY en tandem. lui rend la lecture et le traitement des données quantitatives plus pratiques, plus efficaces et plus rentables pour les machines. Mais c'est au détriment des nuances, de la richesse, du contexte, des dimensions et de la dynamique de nos langues, cultures, valeurs et expériences.

Il ne faut pas accabler ici les développeurs de la Silicon Valley pour ce système binaire biaisé - mais plutôt Aristote.

Le parti pris binaire d'Aristote
Si vous pensez à Aristote, vous pensez probablement au philosophe grec antique comme à un des pères fondateurs de la démocratie, et non comme l'ancêtre de siècles de logique mécanique et de méthodes scientifiques erronées. C'est cependant sa théorie du "dualisme", selon laquelle quelque chose est soit vrai soit faux, logique ou illogique, qui nous a mis dans cette situation délicate en premier lieu.

Vers 350 av. J.-C., Aristote voulut réduire et structurer la complexité du monde. Pour ce faire, il fit des emprunts à la Table des Opposés de Pythagore, dans laquelle deux éléments sont comparés :

fini, infini... impair, pair... un, beaucoup... droite, gauche... repos, mouvement... droit, tordu... etc.

Mais au lieu d'appliquer ce dualisme à la géométrie neutre comme l'avait fait Pythagore, Aristote l'appliqua aux personnes, aux animaux et à la société. Ce faisant, il conçut un patriarcat hiérarchique social polarisé clivant, enraciné dans ses valeurs internes et ses préjugés : Les objets qu'il ordonnait avoir plus de valeur devinrent des 1, et ceux de moindre importance des 0. En ce qui concerne les femmes, par exemple, il écrivit : "La relation de l'homme à la femme est par nature une relation de supérieur à inférieur et de souverain à gouverné."

Hélas, le système de classification hiérarchique d'Aristote a été implémenté dans l'IA, la pondérant en faveur d'hommes comme lui. Le système même sur lequel toute la technologie moderne est construite contient les artefacts du sexisme d'il y a 2 000 ans.

1 = vrai = rationnel = droit = masculin
0 = faux = émotionnel = gauche = féminin
Si Aristote avait créé la démocratie - et la démocratie est censée être une véritable représentation - femmes et gens de couleur auraient dû avoir un accès égal à l'éducation, avoir voix au chapitre dans les forums et avoir le droit de vote en 350 av. JC. Il n'aurait pas été nécessaire de se battre jusqu'en 1920 pour que le vote féminin soit ratifié aux Etats-Unis. Il n'y aurait pas eu d'esclavage et pas besoin du mouvement pour les droits civiques. Tout le monde aurait été classé et considéré comme égal dès le départ.

Le classement biaisé d'Aristote est maintenant verrouillé et renforcé par plus de 15 millions d'ingénieurs.
Aristote aurait dû lire les notes de son prédécesseur, Socrate. Selon les souvenirs de Platon, Socrate considérait les oracles féminins de Delphes comme "un guide essentiel du développement personnel et de l'état". De plus, dans le Symposium de Platon, Socrate se souvient de l'époque où il était l'élève de Diotima de Mantinea, une femme philosophe dont il tenait en haute estime l'intelligence. Dans le livre V, Socrate est crédité d'avoir suggéré que les femmes sont également qualifiées pour diriger et gouverner : "Il n'y a pas de pratique des gouverneurs d'une ville qui appartient à une femme parce qu'elle est une femme, ou à un homme parce qu'il est un homme."

Mais au lieu que les idées de Socrate sur l'égalité enracinent les idées occidentales sur l'intelligence, nous nous sommes retrouvés avec la logique d'Aristote et son classement biaisé sans être conscients de ses origines binaires et anti-démocratiques.

Mais ne blâmons pas seulement Aristote. Deux autres coquins ont contribué à ces problèmes sociaux et scientifiques : Descartes et Leibniz.

Descartes - philosophe français du XVIIe siècle qui a inventé l'expression "je pense, donc je suis" -, a implanté l'idée qu'un sujet n'a ni matière ni valeur autre que ce que le visiteur attribue et déduit. (S'il avait dit "Nous pensons, donc nous sommes", cela aurait mieux reflété comment nous sommes symbiotiquement informés par les perceptions les uns et des autres.)

En outre, Descartes a proposé une plus grande séparation de l'esprit du corps et des émotions dans son traité de 1641, Méditations sur la Première Philosophie. Il a soutenu que nos esprits sont dans le domaine du spirituel tandis que nos corps et nos émotions sont dans le domaine du physique, et que les deux royaumes ne peuvent pas s'influencer mutuellement. Ce qui a causé des problèmes en IA parce que maintenant nous empilons des unités d'émotions sur des couches de classification binaires d'une manière artificielle et non intégrée. Encore du binaire.

La logique déductive-inductive de Descartes, qu'il explora dans son discours sur la méthode de 1637, fut créée parce qu'il était désabusé par les méthodes non systématiques des scientifiques de son temps. Il fit valoir que les mathématiques ont été construites sur une "base solide", et a donc cherché à établir un nouveau système de vérité fondée sur Aristote 1 = vrai = valide, et 0 = faux = invalide. La différence étant qu'il a mis les lignes de la logique syllogistique d'Aristote au sein d'une structure arborescente. Structures arborescentes qui sont maintenant utilisées dans les réseaux neuronaux récurrents du NLP (Natural Language Processing)

Vint ensuite Leibniz, le philosophe et avocat allemand inventa le calcul indépendamment de son contemporain, Newton. Il créa le système binaire entre 1697 et 1701 afin d'obtenir des verdicts "oui/non" plus rapides et ainsi réduire les grands nombres en unités plus faciles à gérer de 0 et 1.

Contrairement aux autres, Leibniz était sinophile. En 1703, le prêtre jésuite Bouvet lui avait envoyé une copie du Yi King (le Livre des Changements), artefact culturel chinois dont l'origine remonte à 5.000 ans. Il était fasciné par les similitudes apparentes entre les lignes horizontales et les intervalles des hexagrammes du Yi King et les 0 et 1 des lignes verticales de son système binaire. Il interpréta faussement ces intervalles comme étant du vide (donc zéro) croyant (à tort) que les hexagrammes confirmaient que son système binaire était la bonne base pour un système logique universel.

Leibniz fit trois autres erreurs majeures. Tout d'abord, il a fit pivoter les hexagrammes de leurs positions horizontales naturelles vers les positions verticales pour les faire correspondre à ses lignes binaires. Deuxièmement, il les sépara du contexte des symboles chinois et des chiffres correspondants. Troisièmement, puisqu'il n'était pas chinois et qu'il ne comprenait pas l'héritage philosophique ou la langue, il supposa que les hexagrammes représentaient les nombres 0 et 1 lorsqu'ils représentent des énergies négatives et positives, Yin Yang, homme et femme. Erreurs qui signifient que Leibniz perdit beaucoup d'informations et de connaissances venant des codes du Yi King et de la vraie signification de ses hexagrammes.

Au lieu de créer un système universel cohérent, le système binaire de Leibniz renforça les modèles de pensée occidentale de Descartes amplifiant la base biaisée d'Aristote, nous verrouillant davantage, nous et les machines que nous avons créées, vers une logique non naturelle.

Le système binaire dans l'informatique moderne
Les classifications binaires d'Aristote sont donc maintenant évidentes dans tous les systèmes de données d'aujourd'hui, servant, préservant, propageant et amplifiant les biais partout dans les couches d'apprentissage machine.

Exemples de biais binaires dans les front-end utilisateur et le traitement des données :

glissement à droite = 1, glissement à gauche = 0
cliquer sur "like" sur Facebook = 1, pas cliquer sur like = 0
nos émotions complexes étant attribuées grossièrement comme positives = 1, négatives = 0 dans les cadres du NPL
convertir des paires d'objets comparés et leurs caractéristiques en 0 ou 1, par exemple pomme = 1, orange = 0, ou lisse = 1, bosselé = 0
lignes et colonnes pleines de 0 et de 1 dans des graphes géants "big data"
Mais le problème de la logique binaire est qu'elle ne permet pas de comprendre et de modéliser pourquoi et comment les gens ont choisi une option plutôt qu'une autre. Les machines enregistrent simplement que les gens ont fait un choix, et qu'il y a un résultat

Les machines sont donc étalonnées à partir de ces biais binaires, pas à partir des nôtres. Bien sûr, nous sommes remplis de nos propres défauts et faiblesses très humains, mais les cadres conceptuels informatiques existants sont incapables de corriger ces erreurs (et les ingénieurs n'écrivent que du code qui correspond aux limites de l'ancienne logique).

Heureusement, il existe une alternative. Les philosophies occidentales d'Aristote, de Descartes et de Leibniz sont opposées aux philosophies orientales, elles fondées sur l'équilibre naturel, la cohérence et l'intégration. Le concept chinois de Yin Yang, par exemple, met l'accent sur la dynamique égale et symbiotique du masculin et du féminin en nous et dans l'univers. Ces idées décrites dans le Yi King, que Leibniz n'a pas reconnues.

La nature rejette également le binaire. Des milliards d'années avant que le parti pris d'Aristote ne s'imprime dans la logique informatique occidentale, la nature codifiait l'intelligence comme la coexistence entrelacée de la femme X et de l'homme Y dans notre ADN. De plus, la recherche quantique a montré que les particules peuvent avoir des états de superposition enchevêtrés où elles sont à la fois 0 et 1 en même temps, tout comme le Yin Yang. La nature ne fonctionne pas en binaire, pas même avec les pigeons. Alors pourquoi le faisons-nous en informatique ?

Nous ne classons et ne qualifions pas nécessairement le monde qui nous entoure avec les préjugés hiérarchiques binaires d'Aristote. Mais la façon dont les données sont recueillies est noir (0) et blanc (1), avec des nuances de gris fournies par des pourcentages de ces données, alors que la nature et les philosophies orientales montrent que nos perceptions ne sont que vagues de couleurs mélangées ou arc-en-ciel.

Tant que nous n'aurons pas conçu des modes de catégorisation non binaires et plus holistiques en IA, les ordinateurs ne seront pas en mesure de modéliser l'image animée en technicolor de notre intelligence. Ce n'est qu'alors que les machines représenteront nos divers langages, raisonnements, valeurs, cultures, qualités et comportements humains.

Auteur: Twain Liu

Info: https://qz.com/1515889/aristotles-binary-philosophies-created-todays-ai-bias/?utm_source=facebook&utm_medium=partner-share&utm_campaign=partner-bbc

[ rationalisme occidental ] [ logique formelle ] [ intelligence artificielle ] [ Asie ] [ sciences ]

 
Commentaires: 1
Ajouté à la BD par miguel