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naïveté enfantine

Ainsi donc, pensa Ulrich lorsqu’il se retrouva seul, ils avaient été vraiment, dans un temps pas si lointain, deux jeunes hommes dont l’esprit bénéficiait des plus hautes révélations non seulement avant tous les autres, mais encore, chose étrange, simultanément ; il suffisait en effet, que l’un des deux ouvrit la bouche dans l’intention de proférer quelque grande nouveauté, pour que l’autre fît aussitôt la même extraordinaire découverte. Les amitiés d’enfance sont chose bizarre ; elles ressemblent à un œuf qui pressent déjà dans le jaune son splendide avenir d’oiseau, mais ne montre encore au monde qu’un ovale assez inexpressif, impossible à distinguer d’aucun autre. […]

Il cherchait à se rappeler ces conversations avec Walter. Mais c’était comme des rêves dont on attrape juste les ultimes pensées au moment du réveil. Et il pensa, non sans surprise : "Alors, quand nous soutenions telle ou telle affirmation, nous ne nous souciions pas tellement qu’elles fussent justes, mais bien qu’elles servissent à nous affirmer !" Tant le besoin de luire soi-même, chez les jeunes gens, est plus fort que celui de voir dans la lumière ; et le souvenir de ce sentiment qu’on avait de flotter sur des rayons, Ulrich l’éprouvait comme une perte douloureuse. 

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, pages 89-90

[ remémoration ] [ construction identitaire ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

déshumanisation technique

S’il venait à l’idée d’un de ces danseurs, dans l’ivresse de sa transformation en machine [...] de mettre un masque, reniant ainsi son visage qui de toute façon n’a déjà plus aucune valeur, cette trouvaille n’aurait absolument rien de surprenant. Tout comme il ne serait pas étonnant qu’une nouvelle variante de honte voie le jour au cours de l’orgie : la honte du visage. Je ne parle pas de la honte que l’on éprouve lorsque l’on possède un visage ingrat ou repoussant, mais de la honte que fait naître chez le danseur le simple fait de posséder un visage (une honte analogue à celle qu’éprouve l’ascète envers son corps), la honte d’être condamné à toujours porter ce stigmate d’individualité comme un legs obligé.

Ces idées ne sont peut-être que des "exagérations philosophiques", des déformations allant dans le sens de la vérité ; il est pourtant indiscutable que le visage est devenu aujourd’hui un résidu, une pièce obsolète. Ce n’est certainement pas un hasard si cette perte du visage a lieu en un temps où les arts figuratifs négligent de prendre le visage comme sujet et où le dessin publicitaire trouve très chic d’omettre complètement le visage de l’homme dans ses représentations.

Auteur: Anders Günther Stern

Info: Dans "L'obsolescence de l'homme", trad. de l'allemand par Christophe David, éditions Ivrea, Paris, 2002, page 106

[ danse moderne ] [ culte industriel de Dionysos ] [ élimination des traits individuels ] [ expressions subjectives ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

vaincus

Nos admirables équipages qui se sont multipliés d’une manière surhumaine pour compenser une infériorité d’effectifs et de matériel écrasante, nos admirables équipages dont les pertes ont dépassé 33 % du personnel navigant et qui ont infligé à l’aviation ennemie (de son propre aveu) des pertes numériquement trois fois supérieures à celles de l’aviation française, nos admirables équipages qui ont été de jour et de nuit au combat sans une heure de repos, qui, ayant à peine atterri, reprenaient leur vol sur des avions criblés de balles et souvent avec, dans la carlingue, le sang non encore essuyé de leurs camarades tués ou blessés à leur poste, nos admirables équipages qui devaient se battre à un contre cinq et parfois à un contre huit se sont vus méconnus, critiqués, pis encore, parfois insultés par la foule désordonnée de la retraite.

Des larmes de rage aux yeux, ils repartaient cependant inlassablement, stoïquement, pour tenir tête, souvent contre tout espoir, à l’adversaire. Voilà pourquoi nous disons que le calvaire de l’aviation a été pire que le calvaire des autres ! Après l’avoir accusée en temps de paix d'avoir voulu être trop nombreuse, trop forte et trop luxueusement équipée, on l’a accusée, la guerre venue, d’être trop peu nombreuse et insuffisamment armée. C’est d’une atroce et douloureuse dérision.

Auteur: Chambe René

Info: Equipages dans la fournaise - 1940

[ ww2 ] [ déshonneur ] [ défaite ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

roublard

Il y a en effet deux catégories de gens dans ce bas monde : les niais et les malins et, que je sache, personne n'a envie d'appartenir à la première catégorie. Le tout est de savoir certaines choses et d'avoir l'œil bien ouvert. Les gobe-mouches sont ceux qui croient aux balivernes des journaux, qui paient leurs impôts et qui vont à la guerre, voire même y laissent leur peau. Les malins, eh bien ! les malins...sont tout le contraire, voilà tout. Or, nous vivons dans un temps où le gobe-mouches court à sa perte , mais où le malin s'en tire; où le niais ne peut manquer d'être plus roulé qu'à l'ordinaire et où le malin doit devenir plus malin de jour en jour. Vous connaissez le proverbe : " mieux vaut un âne vivant qu'un professeur mort" et cet autre : "plutôt l'œuf aujourd'hui que la poule demain", et cet autre encore : "c'est d'un homme veule de promettre et de tenir". Moi, je dirai plus encore : dorénavant, il n'y aura plus de place en ce monde que pour les malins, la niaiserie sera un luxe qu'on ne pourra plus se permettre, et il faudra devenir encore plus malin, extrêmement malin, car notre époque est dangereuse : à qui donne un doigt, on prend le bras....

Auteur: Moravia Alberto

Info: La Ciociara

[ rusé ] [ survie ] [ mariolle ] [ retors ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

langue française

Cher monsieur, à peine sus-je que vous ne composâtes jamais avec le passé simple ; à peine connus-je que le subjonctif vous sembla d'emblée imparfait quand un usage trivial prétendit qu'il ne fût plus régi par la concordance des temps ; à peine appris-je la louable mission à laquelle vous résolûtes de vous dévouer en faveur de l'intangibilité des aspects verbaux, qu'il m'eût semblé commettre une sorte de forfaiture quand j'eusse douté s'il fallait que je vous rejoignisse, après que j'avais été instruit de vos intentions.
Quelle déplorable perte si le laxisme grammatical l'emportait au point que nous renonçassions et que nous nous privassions du virtuel, de l'inchoatif, du procès et de l'inachevé, propres à l'exact imparfait du subjonctif ! Il fallait que nous fussions nonchalants pour que nous vissions sans regrets de tels solécismes, que nous nous soumissions à un tel appauvrissement, que nous nous résignassions à un tel émondage.
Il n'était pas possible que ces écarts temporels plussent au vulgaire, qu'ils s'installassent dans l'usage commun, et qu'on assassinât la grammaire sans que personne ne réagît ni protestât. Il importait donc que vous vinssiez et que vous prissiez des mesures, ce que vous fîtes.
Vous semblerait-il opportun que je pusse prendre rang dans votre cohorte d'orthodoxie ? Sans doute, tolérâtes-vous des militants plus idoines et plus disponibles, mais il me serait agréable que vous ne me rejetassiez pas. Dans cet espoir, je vous dis mes pensées attentives et cordiales.

Auteur: Darcos Xavier

Info: doyen de l'Inspection Générale... Bouissière A., Le bar du subjonctif, adhérent 360

[ subjonctif ]

 

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passivité

Contre ce monde insaisissable et fantasmagorique où ce qui est noir aujourd’hui peut être blanc demain et où le temps qu’il faisait la veille peut être modifié par décret, il n’y a à vrai dire que deux remparts. Le premier est qu’on a beau s’acharner à nier la vérité, la vérité n’en continue pas moins d’exister, dans votre dos pour ainsi dire, et qu’il vous est par conséquent impossible de la violer sans nuire à l’efficacité militaire. La seconde, c’est qu’aussi longtemps qu’il demeurera sur cette terre des régions non conquises, la tradition libérale pourra continuer de vivre. Que le fascisme, ou l’association des fascismes divers, conquière le monde entier, et ces deux remparts s’écrouleront. Nous sous-estimons, en Angleterre, ce genre de danger, nos traditions et notre sécurité passée nous ayant inculqué la croyance sentimentale que tout finit toujours par s’arranger et que ce que l’on craint le plus n’arrive jamais pour de bon. Nourris pendant des siècles d’une littérature où le bon droit triomphe invariablement au dernier chapitre, nous sommes presque instinctivement convaincus qu’à long terme le mal va toujours de lui-même à sa perte. Le pacifisme, par exemple, repose largement sur cette idée. Ne résistez pas au mal, il se détruira tout seul, d’une façon ou d’une autre. Mais pourquoi se détruirait-il ? Quelles preuves avons-nous qu’il le fasse jamais ? Et quel exemple y a-t-il d’un État industrialisé moderne qui se soit effondré sans l’intervention armée d’une puissance extérieure ?

Auteur: Orwell George

Info: Dans "Pourquoi j'écris ?", trad. de l'anglais par Marc Chénetier, éditions Gallimard, 2022, pages 27-28

[ croyance réconfortante ] [ zen hypocrite ] [ optimisme ]

 

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prix

En fait, savoir quel sera le cours de l'or n'a pas vraiment d'intérêt. Car le jour où l'or vaudra 6 000 euros, ou pourquoi pas même 10 000 euros l'once, vous ne serez pas forcément riche. Pourquoi ? Simplement parce que vos euros ou vos dollars, personne n'en voudra. Dans un tel cas, ce n'est pas l'or qui est "cher", c'est la monnaie qui ne vaut plus rien. L'or ne doit pas être envisagé comme une façon de gagner de l'argent en gestion patrimoniale mais comme l'assurance ultime pour votre patrimoine.
En 1923, en Allemagne, l'once d'or valait 88 000 milliards de marks... il fallait une brouette entière de billets pour une miche de pain ! Ce n'est pas l'or qui était cher, c'était le mark qui ne valait rien.
Exprimer l'or en valeur monétaire n'a, en réalité, pas de sens car le prix de l'or reflète la perte de valeur de votre monnaie. En 1914, avec une once d'or on achetait une vache. En 2014, avec une once d'or... vous n'achetez toujours qu'une vache. En 1914, une vache coûtait 100 francs et en 2014 environ 1 300 euros soit 8 600 francs environ... mais en or, la vache coûte toujours la même chose un siècle après.
Vous devez comprendre qu'avec l'inflation, la valeur d'une monnaie tend toujours vers 0 avec le temps. L'or a ceci d'extraordinaire qu'il ne vous enrichira pas, il conserve la valeur et c'est bien tout ce que nous lui demandons.

Auteur: Sannat Charles

Info:

[ conservation ] [ fric ]

 

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énergie psychique

Car la vie continue, malgré la perte de jeunesse ; on peut même la vivre avec une plus grande intensité si l’on n’en entrave pas la marche en jetant un regard en arrière sur ce qui disparaît. Ce regard en arrière serait dans l’ordre s’il ne s’arrêtait pas aux dehors que l’on ne peut rappeler et si l’on se rendait bien compte de l’origine de la fascination exercée par ce qui fut. L’éclat doré des vieux souvenirs d’enfance repose moins sur de simples faits que sur un mélange d’images magiques, soupçonnées plutôt que vraiment conscientes. […] Le "mystère" que l’on perçoit représente le trésor d’images primitives que chacun apporte au monde comme cadeau de l’humanité, somme des formes innées qui sont propres aux instincts. […] Elles constituent l’inconscient collectif. La libido en régression vient-elle animer cette couche, alors apparaît une possibilité de renouvellement de la vie en même temps que de destruction. Une régression conséquente marque un rétablissement de la liaison avec le monde des instincts naturels qui, au point de vue formel également, […] représente la matière originelle. Si la conscience peut la saisir, alors il y aura animation nouvelle et nouvelle ordonnance. Par contre, si la conscience s’avère incapable d’assimiler les contenus de l’inconscient qui font irruption, alors apparaît une situation menaçante car les nouveaux contenus conservent leur forme archaïque et chaotique première et font éclater l’unité conscientielle. Le trouble mental qui en résulte s’appelle […] schizophrénie, autrement dit aliénation par scission.

Auteur: Jung Carl Gustav

Info: Dans "Métamorphoses de l'âme et ses symboles", page 665

[ idéalisation rétrospective ] [ croissance des pensées ] [ intégration ] [ individuation ]

 

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portrait de Bonaparte

Du moment où il fut chef d'État, on connaît son emploi du temps au jour le jour, le nombre de chapeaux que lui confectionna Poupart (entre cent soixante et cent soixante-dix) ou de culottes qu'il emporta à Saint-Hélène (dix-neuf), la couleur de ses yeux (gris-bleu) et de ses cheveux (châtains), sa taille (entre 1m 68 et 1m 69) et mille autres détails encore. On sait que son sourire conquérait jusqu'à ceux qui ne l'aimaient pas ; que sa voix pouvait être douce puis impérieuse ; qu'il savait feindre la colère et pouvait se laisser parfois déborder par elle. Il mangeait vite, chantait faux, prenait des bains très chauds, montait moyennement à cheval, aimait l'opéra italien, ne fumait pas mais priait, dormait lorsqu'il le voulait (environ sept heures par jour), plaçait sa main droite dans son gilet (geste banal pour l'époque mais qu'il a immortalisé), jetait par la fenêtre les livres qui l'ennuyaient, préférait une tenue modeste aux chamarrures qui l'auraient mis au même niveau que ses subordonnés. Il écoutait parfois avant d'ordonner. Il finit par ordonner sans avoir entendu ceux qu'il ne considérait plus comme ses conseillers mais comme des exécutants. Il détestait les longs discours, aimait que ses décisions fussent exécutées sans perte de temps. Il travaillait beaucoup sur tous les sujets sans en négliger aucun, entrant souvent dans le détail des nombreux dossiers qui transitaient par son cabinet. Il calligraphiait mal, prenait parfois un mot pour un autre mais dictait bien ce qu'il voulait écrire, parfois à plusieurs secrétaires en même temps.

Auteur: Lentz Thierry

Info: Napoléon (1804-1814),  Prologue, page 9

 

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couple

L'amour est masochiste. Ces cris, ces plaintes, ces douces alarmes, cet état d'angoisse des amants, cet état d'attente, cette souffrance latente, sous-entendue, à peine exprimée, ces mille inquiétudes au sujet de l'absence de l'être aimé, cette fuite du temps, ces susceptibilités, ces sautes d'humeur, ces rêvasseries, ces enfantillages, cette torture morale où la vanité et l'amour-propre sont en jeu, l'honneur, l'éducation, la pudeur, ces hauts et ces bas du tonus nerveux, ces écarts de l'imagination, ce fétichisme, cette précision cruelle des sens qui fouaillent et qui fouillent, cette chute, cette prostration, cette abdication, cet avilissement, cette perte et cette reprise perpétuelle de la personnalité, ces bégaiements, ces mots, ces phrases, cet emploi du diminutif, cette familiarité, ces hésitations dans les attouchements, ce tremblement épileptique, ces rechutes successives et multipliées, cette passion de plus en plus troublée, orageuse et dont les ravages vont progressant, jusqu'à la complète inhibition, la complète annihilation de l'âme, jusqu'à l'atonie des sens, jusqu'à l'épuisement de la moelle, au vide du cerveau, jusqu'à la sécheresse du coeur, ce besoin d'anéantissement, de destruction, de mutilation, ce besoin d'effusion, d'adoration, de mysticisme, cet inassouvissement qui a recours à l'hyper irritabilité des muqueuses, aux errances du goût, aux désordres vaso-moteurs ou périphériques et qui fait appel à la jalousie et à la vengeance, aux crimes, aux mensonges, aux trahisons, cette idolâtrie, cette mélancolie incurable, cette apathie, cette profonde misère morale, ce doute définitif et navrant, ce désespoir, tous ces stigmates ne sont-ils point les symptômes mêmes de l'amour d'après lesquels on peut diagnostiquer, puis tracer d'une main sûre le tableau clinique du masochisme ?

Auteur: Cendrars Blaise

Info: Moravagine, p.61, Livre de Poche, no 275, Paris, 1960

[ voyage ]

 

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