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démotivation générale

J'appartiens à une génération qui, ayant reçu en héritage l'incrédulité à l'égard de la foi chrétienne, a créé en son sein une égale incrédulité à l'égard de toutes les autres croyances. Nos pères possédaient encore un élan capable de faire crédit, et qu'ils transféraient du christianisme à d'autres formes d'illusion. Certains d'entre eux s'enthousiasmaient pour l'égalité sociale, d'autres n'étaient passionnés que de beauté, ou encore croyaient en la science et les progrès qu'elle apportait ; d'autres enfin, plus attachés au christianisme, allaient chercher, au fond de l'Orient et de l'Occident, de nouvelles formes religieuses pour distraire leur conscience - sans elles totalement creuse - de l'acte de vivre. […]

Nous avons perdu cette religion qui était la nôtre, et toutes les autres du même coup.

Chacun s'est ainsi retrouvé livré à lui-même, seul avec le désespoir de se sentir vivre. Un bateau semble fait pour naviguer ; mais son but véritable, ce n'est pas de naviguer : c'est d'arriver au port. Nous voilà tous en train de naviguer, sans la moindre idée du port auquel nous devrions arriver.

Auteur: Pessoa Fernando (Alv. de Campos)

Info: Le livre de l'intranquillité, Texte n° 306

[ perdus ]

 

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faire miroiter

Une défense beaucoup plus attrayante et convaincante de la nécessité occasionnelle d'exagérer les bénéfices potentiels apparaît dans un essai du philosophe polonais Kolakowski : Les améliorations les plus simples des conditions sociales exigent un effort si énorme de la part de la société que la pleine conscience de cette disproportion serait des plus décourageantes et rendrait ainsi tout progrès social impossible. L'effort doit être prodigieusement grand si l'on veut que le résultat soit visible... Il n'est donc pas du tout étonnant que cette terrible disproportion soit très faiblement reflétée dans la conscience humaine si l'on veut que la société génère l'énergie nécessaire pour apporter des changements dans les relations sociales et humaines. Pour cela, on exagère les résultats prospectifs en un mythe pour leur faire prendre des dimensions qui correspondent un peu plus à l'effort immédiatement ressenti.... Le mythe se comporte comme une Fata Morgana qui fait surgir de belles terres sous les yeux des membres d'une caravane et augmente ainsi leurs efforts jusqu'à ce que, malgré toutes leurs souffrances, ils atteignent la prochaine petite oasis. Si de tels mirages tentants n'étaient pas apparus, la caravane épuisée aurait inévitablement péri dans la tempête de sable, privée d'espoir.  

Auteur: Hirschman Albert Otto

Info: Development Projects Observed

[ incitation ] [ encouragement ] [ carotte mieux que bâton ]

 

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progrès

Chaque technologie intellectuelle incarne une éthique intellectuelle, un ensemble de présupposés sur la façon dont fonctionne, ou devrait fonctionner, l'esprit humain. La carte et l'horloge avaient en commun la même éthique. Toutes deux innovaient en mettant l'accent sur les mesures et l'abstraction, sur le fait de percevoir et de définir des formes et des processus au-delà de ceux auxquels les sens avaient accès. L'éthique intellectuelle d'une technologie est rarement perçue par ses inventeurs. Ils sont en général si absorbés à résoudre un problème particulier ou à démêler un dilemme d'ingénierie épineux qu'ils ne voient pas les implications plus larges de leurs travaux. Les utilisateurs de cette technologie, eux aussi, n'ont souvent pas conscience de son éthique. Ils s'intéressent aux avantages pratiques qu'ils tirent à utiliser cet outil. Nos ancêtres n'ont pas créé ou utilisé les cartes pour renforcer leur capacité de pensée conceptuelle ou pour mettre au jour les structures cachées du monde. Pas plus qu'ils n'ont fabriqué des horloges mécaniques pour stimuler l'adoption d'un mode de pensée plus scientifique. C'étaient là des effets secondaires de ces technologies. Mais quels effets secondaires ! En fin de compte, c'est l'éthique d'une invention intellectuelle qui a sur nous l'impact le plus profond. L'éthique intellectuelle est le message qu'un média ou autre outil transmet à l'esprit et à la culture de ceux qui l'utilisent.

Auteur: Carr Nicholas

Info: Internet rend-il bête ? : Réapprendre à lire et à penser dans un monde fragmenté

[ causes-effets ] [ diachroniques ] [ géographie ] [ localisation ] [ mesure ]

 

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philosophie

Il y a une nouvelle déduction du moi, liée directement à l'intuition intellectuelle. Le but final de l'homme est la réalisation d'une communauté d'êtres libres. La catégorie décisive de l'éthique est celle d'un progrès à l'infini, qui conduit les consciences à se réunir dans une unité pure. Ainsi à l'idée luthérienne d'unité des consciences est associée la dynamique de la raison. Ce Système manifeste, par rapport à Kant, un double progrès. D'une part, on dépasse le dualisme de la sensibilité et de la raison, de l'âme et du corps, comme l'avait déjà montré la philosophie exposée dans les Principes : l'homme constitue une unité indissoluble. Loin d'être des obstacles que rencontre l'âme, la nature et le corps sont les instruments de la moralité. D'autre part, on dépasse, ici comme dans L'Initiation à la vie bienheureuse, le formalisme kantien, en insistant sur le fait que chaque conscience est placée devant "son" devoir, devoir qui n'appartient qu'à elle et qui marque sa place dans l'histoire des consciences. Dès lors, j'interprète le mal radical, point essentiel de la doctrine kantienne, comme étant le contraire du progrès et par là une catégorie susceptible de définir l'homme en totalité. On ne dira donc pas que l'homme est mauvais dans la mesure où il est un être sensible, mais dans la mesure où il est un être immobile et inerte. La paresse est le véritable mal radical, inné en l'homme; elle le pousse dans la voie des habitudes où s'enlise la liberté; contre elle, il n'existe qu'une seule défense: l'éducation. Le philosophe est donc l'éducateur du genre humain, le prêtre de la vérité.

Auteur: Fichte Johann Gottlieb

Info: Le Système de l'éthique

[ action ] [ enseignement ] [ voie ]

 

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progrès symbolique

Pour comprendre les conséquences psychologiques de l’aveu, nous devons songer qu’il s’agit d’une répétition de l’acte sous sa forme la plus anodine, celle de la parole. Il permet en quelque sorte d’annuler l’acte de façon magique. Toutefois, cette tentative d’annulation rétroactive par les mots et par les gestes n’est pas suffisante si elle ne s’accompagne pas d’une forte réaction émotionnelle. Elle n’en demeure pas moins une tentative pour maîtriser le méfait au niveau de l’intellect. Ce phénomène peut sembler étrange. Peut-être s’éclairera-t-il si nous décrivons ce qui se passe si une telle répétition, au sens magique, n’a pas lieu. Comme celle-ci consiste en la prise de conscience partielle de la genèse et de la signification du crime, elle constitue la condition sine qua non du repentir et de l’expiation. Il ne peut y avoir sentiment conscient de culpabilité et tendance réelle à l’expiation que si le sujet prend pleinement conscience du fait que le crime lui a permis de satisfaire ses pulsions. Pour cela, il est indispensable qu’il se remémore son geste et le traduise en paroles, et qu’en même temps il le revive sur le plan émotionnel. S’il n’éprouve pas à nouveau la satisfaction que son méfait lui a procurée, celui-ci lui devient mystérieux, tout comme les hiéroglyphes enfouis dans la terre d’Égypte. [...]

Si l’auteur d’un méfait ne revit pas son geste et la gratification qui y était attachée, il ne peut pas prendre conscience de sa culpabilité, alors que c’est là la condition indispensable de l’expiation, faute de quoi le terme d’ "expiation" ou de "châtiment" se vide de son sens pour ne garder qu’une valeur purement légale de type formel ou mécanique.

Auteur: Reik Theodor

Info: Dans "Le besoin d'avouer", traduit de l'américain par Sylvie Laroche et Massimo Giacometti, Payot, Paris, 1973, page 107

[ réel-symbolique-imaginaire ] [ détachement pulsionnel ]

 

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appartenance

Il n'y a pas si longtemps des milliers d'individus passaient leur vie en reclus pour trouver la vision spirituelle dans la solitude de la nature. L'homme moderne n'a pas besoin de devenir un ermite pour atteindre ce but, car ce ne sont ni l'extase ni un mysticisme étranger au monde que son époque exige, mais un équilibre entre la réalité quantitative et qualitative. L'homme moderne, dont la capacité de perception intuitive a diminué, ne peut guère bénéficier d'une vie contemplative comme celle d'un ermite dans la nature. Mais ce qu'il peut faire, c'est, à certains moments, d'accorder toute son attention à un phénomène naturel, à l'observer en détail en se remémorant les faits scientifiques dont il peut se souvenir à son sujet. Et ensuite graduellement faire taire ses pensées afin, pour quelques instants au moins, d'oublier ses soucis et autres désirs personnels, jusqu'à ce qu'il ne reste plus dans son âme que l'émerveillement devant le miracle qui s'offre à lui. Les efforts de ce genre sont comme des voyages au-delà des frontières de l'amour-propre étriqué et, bien que le processus d'éveil intuitif soit lent et laborieux, ses récompenses sont perceptibles dès le début. S'il est poursuivi au fil des années, quelque chose commencera à s'agiter dans l'âme humaine, un sentiment de parenté avec les forces de la conscience vitale qui régissent le monde des plantes et des animaux et avec les pouvoirs qui déterminent les lois de la matière. Si l'intellect analytique peut être considéré comme le fruit le plus précieux de l'âge moderne, il ne faut pas lui permettre de régner en maître sur les questions de connaissance. Si la science doit apporter bonheur et réel progrès au monde, elle a tout autant besoin de la chaleur du cœur de l'homme que de la froide curiosité de son cerveau.

Auteur: Winkler Franz

Info:

[ connexion ] [ conscience ] [ ancrage ] [ méditation ]

 
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déshumanisation technique

Ayant éliminé l’humain de la sphère de la production (robots, automates, algorithmes), les machines le remplacent dans sa reproduction. Comme dans tous les aspects de la vie 4.0, le progrès est implacable : toujours moins d’humain. Ce que la loi de bioéthique valide en autorisant les femmes à faire des enfants sans partenaire masculin. Comme s’en glorifie Anne, consultante en ressources humaines, à L’Obs : "J’ai fait ma petite fille toute seule, en Belgique." Alice, cinq ans, est sûrement fière d’avoir une maman si forte — Toute seule ! mais avec un laboratoire, des médecins, un traitement de stimulation ovarienne, un dispositif de fécondation in vitro. L’autonomie assistée par la technologie et l’expertise. L’indépendance, c’est la dépendance.

Le plus facile à évincer était le père. Son compte est réglé. Alice en réclame un, paraît-il, mais les générations futures auront oublié ce détail. Qui plus est, cette disparition s’opère au nom du droit, ce qui renforce la bonne conscience de ceux que leur standing politique préoccupe.

Puis il faut dire que ces accouplements à visée reproductrice étaient atrocement mammifères. Pensons aux religieuses et aux "a‑sexuelles", elles aussi victimes de "stérilité sociale" et privées de leur "liberté procréative" en raison de leur chasteté. Grâce à la technologie, elles pourront enfanter comme Marie et devenir des vierges augmentées.

D’après sociologues et gynécologues, les écrans éteignent la vie sexuelle. Selon une étude de l’université de Cambridge, les couples anglais ont 40 % de rapports sexuels de moins en 2010 qu’en 1990. À ce rythme, c’est fini en 2030. Aux États-Unis, les couples ont neuf fois moins de rapports sexuels dans les années 2010 que vingt ans avant, et les "Millenials" (nés après 1990) sont les plus touchés. La plupart reconnaissent consacrer plus de temps à leur smartphone qu’à leur partenaire. On le savait depuis les années soixante, la natalité baisse avec la télé. Avec Internet, le porno est à portée de vue permanente des adolescents. Selon les spécialistes, cela en détourne beaucoup de la sexualité avec des humains en chair et en os.

Auteur: PMO Pièces et main-d'oeuvre

Info: Dans "Alertez les bébés ! ", éditions Service compris, 2020, pages 74-75

[ recomposition parentale ] [ légalité du désir ] [ reproduction ] [ statistiques ]

 

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décollage astral

Il existe un grand obstacle à l’investigation du Corps Second et de l'environnement dans lequel il opère. Peut-être est-ce la seule barrière majeure. Elle est présente chez tous les individus sans exceptions. Elle est parfois dissimulée par des couches d'inhibition et de conditionnement, mais dès que vous en êtes dépouillé, l'obstacle demeure. Cette barrière se nomme peur, une peur aveugle, irraisonnée. Il lui suffit de peu pour la transformer en panique voire en terreur. Si vous réussissez à dépasser consciemment la barrière de la peur vous aurez réalisé un énorme progrès.

Je suis convaincu que nombre d'entre nous dépassent cette barrière de manière inconsciente chaque nuit. Lorsque cette partie de notre être se situant au-delà de la conscience prend l'initiative, il n'y a pas d'inhibition due à la peur, quoiqu'elle soit, semble-t-il, influencée par la pensée et l'action de l'esprit conscient. Le Supra Esprit prend la relève dès que l'esprit conscient se met en veilleuse pour la nuit.

Le processus d'investigation relatif au Corps Second et à son environnement semble être une fusion ou un mélange du conscient et de ce Supra Esprit. Par cette opération la barrière de la peur est vaincue.

La barrière de la peur présente maintes facettes. Les plus intrépides d'entre nous s'imaginent qu'elle n'existe pas, jusqu'à ce qu'à leur grande surprise il la découvrent tapie en eux-mêmes. Il y a tout d'abord la peur de la mort. La séparation d'avec le corps physique ressemble beaucoup à l'idée que nous nous faisons de la mort, aussi les premières réactions sont-elle automatiques. Vous vous dites : "Retourne vite vers ton corps physique ! Tu meurs ! La vie se déroule là-bas dans le physique, pas ici !"

Réactions qui se produisent quelle que soit votre formation intellectuelle ou affective. Il me fallut renouveler le processus une vingtaine de fois pour réussir enfin à rassembler assez de courage (et de curiosité) pour rester hors de mon corps plus de quelques secondes et réaliser des observations objectives. La peur de la mort fut en définitive sublimée ou apaisée par la familiarité. (...)

Auteur: Monroe Robert Allan

Info: Le voyage hors du corps : Techniques de projection du corps astral - La barrière de la peur. (Exercices préliminaires)

[ dépassement ]

 

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repli narcissique

Et pourtant, de nombreux ex-radicaux ont eux-mêmes embrassé la sensibilité thérapeutique dans les années 1970. Rennie Davis abandonne le radicalisme politique pour suivre Maharaj Ji, le gourou adolescent. Abbie Hoffman, l’ancien chef des Yippies, décide qu’il est plus important de rassembler ses esprits que de mouvoir les multitudes. Son associé d’antan, Jerry Rubin, lorsqu’il atteignit l’âge terrible de trente ans, se trouva confronté à ses peurs et à ses anxiétés secrètes ; il déménagea alors de New York à San Francisco, et se mit à acheter – avec des revenus apparemment inépuisables – tous les produits offerts par les supermarchés spirituels de la côte Ouest. […]

Dans ses mémoires, modestement intitulées Grandir à trente-sept ans, Rubin témoigne des effets salutaires du régime thérapeutique. Après avoir négligé son corps pendant des années, il se donna "la permission d’être en bonne santé", et perdit rapidement quinze kilos. Nourriture diététique, jogging, yoga, saunas, chiropraxie, acupuncture lui donnèrent l’impression, à trente-sept ans, "d’en avoir vingt-cinq". Sur le plan spirituel, ses progrès se révélèrent tout aussi satisfaisants et indolores. Abandonnant son armure protectrice, son sexisme, sa "manie de l’amour", il apprit "à s’aimer suffisamment soi-même pour n’avoir pas besoin d’un autre pour se rendre heureux", et parvint à comprendre que sa politique révolutionnaire cachait un "conditionnement puritain" qui provoquait parfois en lui un certain malaise, à cause de sa célébrité et des avantages monétaires qu’elle lui valait. C’est apparemment sans efforts psychiques épuisants que Rubin a réussi à se convaincre « qu’il n’y a pas de mal à "goûter les bienfaits de la vie qu’apporte l’argent". […]

Pourtant, cet "énorme auto examen" donne peu d’indications touchant la compréhension de soi auquel il serait parvenu sur le plan personnel ou collectif. Sa conscience de soi demeure embourbée dans les clichés de la libéralisation des mœurs. Rubin examine "la femme en lui", son besoin de se faire une conception plus tolérante de l’homosexualité et son envie de "faire la paix" avec ses parents, comme si ces lieux communs apportaient des révélations difficilement acquises sur la condition humaine. […]

Comme tant d’anciens radicaux, Rubin n’a fait que substituer des slogans thérapeutiques en vogue aux slogans politiques de naguère, qu’il utilise dans l’un et l’autre cas sans tenir compte de leur signification.

Auteur: Lasch Christopher

Info: Dans "La culture du narcissisme", trad. Michel L. Landa, éd. Flammarion, Paris, 2018, pp. 35-38

[ itinéraire ] [ critique ] [ autosatisfaction ] [ beat generation ]

 
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pulsion de mort

Les pulsions organiques conservatrices se sont assimilé chacune des modifications du cours vital qui leur ont été ainsi imposées, elles les ont conservées pour les répéter de sorte qu’elles nous donnent nécessairement l’impression fallacieuse de forces qui tendent vers le changement et le progrès alors qu’elles ne font que chercher à atteindre un but ancien par des voies à la fois anciennes et nouvelles. On pourrait même indiquer quel est ce but final vers quoi tend tout ce qui est organique. Si le but de la vie était un état qui n’a pas encore été atteint auparavant, il y aurait là une contradiction avec la nature conservatrice des pulsions. Ce but doit bien plutôt être un état ancien, un état initial que le vivant a jadis abandonné et auquel il tend à revenir par tous les détours du développement. S’il nous est permis d’admettre comme un fait d’expérience ne souffrant pas d’exception que tout être vivant meurt, fait retour à l’inorganique, pour des raisons internes, alors nous ne pouvons que dire : le but de toute vie est la mort et, en remontant en arrière, le non-vivant était là avant le vivant.

Il advint un jour que les propriétés de la vie furent suscitées dans la matière inanimée par l’action d’une force qu’on ne peut encore absolument pas se représenter. Il s’agissait peut-être d’un processus préfigurant celui qui plus tard a fait apparaître la conscience dans une certaine couche de la matière vivante. La tension survenue dans la substance jusque-là inanimée cherche alors à se réduire ; ainsi était donnée la première pulsion, celle du retour à l’inanimé. La substance vivante avait encore en ce temps la mort facile ; elle n’avait vraisemblablement à parcourir dans la vie qu’un court chemin dont la direction était déterminée par la structure chimique de la jeune vie. Pendant toute une longue période, il se peut que la substance vivante ait été ainsi recréée sans cesse et soit morte facilement jusqu’au jour où des influences externes déterminantes se transformèrent, obligeant la substance qui survivait encore à dévier toujours davantage de son cours vital originaire et à faire des détours toujours plus compliqués pour atteindre son but : la mort. Ces détours sur le chemin qui mène à la mort, fidèlement maintenus par les pulsions conservatrices, seraient ce qui nous apparaît aujourd’hui comme phénomènes vitaux.

Auteur: Freud Sigmund

Info: Dans "Au-delà du principe de plaisir" (1920), trad. de l'allemand par Jean Laplanche et J.-B. Pontalis, éditions Payot, Paris, 2010, pages 99 à 101

[ erreur ] [ complexification ]

 
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