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écrivain-sur-écrivain

C'est un lettré ultra-raffiné. Il est descendu jusqu'à la racine des auteurs du XVIIe siècle et du XIXe. Il écrit le Michelet comme Michelet et fera du Bossuet tant qu'on voudra. Cependant il peut assister poliment, ainsi qu'un écolier bien sage, à la dispute absurde de deux ignorants sur les mérites réciproques de Bossuet et de Michelet, jouissant même de l'excès de leur sottise. Car il a le sens de la caricature, de la déformation des individus par les tics, les travers et les circonstances. Il y a en lui de la vision de La Bruyère et de celle de Meredith, obscurcie par un brouillard de puérilité qui tient à la persistance inouïe de souvenirs d'enfance. Je le devine hanté par lui-même, parcouru de mille ruisselets venus de son ascendance et de sa prime jeunesse. S'il arrive à se guider, contenir, ordonner au point de vue littéraire, il écrira un beau matin, en marge de la vie, quelque chose d'étonnant. Ce n'est pas l'étoffe qui lui manque.

Auteur: Daudet Léon

Info: Dans "Souvenirs littéraires", à propos de Marcel Proust

[ éloge ] [ style ] [ sensibilité ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

langage écrit

Le courant du roman occidental est surtout prosaïque, au sens exact plutôt qu'au sens péjoratif du terme. Là, ni le Satan de Milton battant des ailes à travers l'immensité du chaos, ni les sorcières de Macbeth voguant vers Alep dans leur tamis ne sont vraiment chez eux. Les moulins à vent ne sont plus des géants, mais des moulins à vent. En échange, le roman nous dira comment sont construits les moulins, ce qu'ils rapportent et, avec beaucoup de précision, quel bruit ils font par une nuit de vent. Car c'est le génie du roman de décrire, d'analyser, d'explorer, et d'accumuler les données du réel et de l'introspection. De toutes les peintures de la vie que tente la littérature, de tous les contrepoids que les mots essaient de donner au réel, ceux du roman sont les plus cohérents et les plus complets. Les œuvres de Defoe, Balzac, Dickens, Trollope, Zola ou Proust enrichissent le sens que nous avons du monde et du passé. Elles sont cousines germaines de l'histoire.

Auteur: Steiner George

Info: Tolstoï ou Dostoïevski

[ historique ] [ codage du réel ] [ listes intriquées ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

portrait

Mais la plus aimable convive était la jeune duchesse de D…, dont l’esprit alerte et clair, jamais inquiet ni troublé, contrastait si étrangement avec l’incurable mélancolie de ses beaux yeux, le pessimisme de ses lèvres, l’infinie et noble lassitude de ses mains. Cette puissante amante de la vie sous toutes ses formes, bonté, littérature, théâtre, action, amitié, mordait sans les flétrir, comme une fleur dédaignée, ses belles lèvres rouges, dont un sourire désenchanté relevait faiblement les coins. Ses yeux semblaient promettre un esprit à jamais chaviré sur les eaux malades du regret. Combien de fois, dans la rue, au théâtre, des passants songeurs avaient allumé leur rêve à ces astres changeants ! Maintenant la duchesse, qui se souvenait d’un vaudeville ou combinait une toilette, n’en continuait pas moins à étirer tristement ses nobles phalanges résignées et pensives, et promenait autour d’elle des regards désespérés et profonds qui noyaient les convives impressionnables sous les torrents de leur mélancolie. Sa conversation exquise se parait négligemment des élégances fanées et si charmantes d’un scepticisme déjà ancien. 

Auteur: Proust Marcel

Info: Un dîner en ville

[ contrastes ] [ femme captivante ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

adaptation

Ne disons rien des incarnations de Charlus au cinéma qui, quels que soient par ailleurs les mérites des comédiens (Alain Delon chez Volker Schlöndorff, John Malkovitch chez Paul Ruiz, Didier Sandre dans le téléfilm de Nina Companeez), étaient voués à décevoir, non seulement parce qu'une heureuse fatalité propre à la littérature condamne les mêmes mots à suggérer chez les lecteurs des images différentes, mais aussi parce que les notations proustiennes sur le corps du personnage sont si riches et si précises qu'il est sans doute impossible de les reproduire toutes à la lettre dans le corps d'un interprète, quel qu'il soit. Et c'est fort bien ainsi, puisqu'au lieu de proposer une tautologie servile, le cinéma, avec ses moyens propres, laisse le dernier mot, le plus libre et le plus irresponsable, au texte qui l'a sécrété. On en arrive presque à se réjouir que Visconti (qui avait songé à Marlon Brando pour Charlus) ou Losey n'aient jamais pu mettre à exécution leurs projets d'un film tiré d'À la recherche du temps perdu. 




Auteur: Berthier Philippe

Info: Charlus, Hiéroglyphes, pp. 32 - 33

[ transposition ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

romantisme

À ce moment-là, il satisfaisait une curiosité voluptueuse en connaissant les plaisirs des gens qui vivent par l’amour. Il avait cru qu’il pourrait s’en tenir là, qu’il ne serait pas obligé d’en apprendre les douleurs ; comme maintenant le charme d’Odette lui était peu de chose auprès de cette formidable terreur qui le prolongeait comme un trouble halo, cette immense angoisse de ne pas savoir à tous moments ce qu’elle avait fait, de ne pas la posséder partout et toujours ! Hélas, il se rappela l’accent dont elle s’était écriée : "Mais je pourrai toujours vous voir, je suis toujours libre !" elle qui ne l’était plus jamais ! l’intérêt, la curiosité qu’elle avait eu pour sa vie à lui, le désir passionné qu’il lui fît la faveur — redoutée au contraire par lui en ce temps-là comme une cause d’ennuyeux dérangements — de l’y laisser pénétrer ; comme elle avait été obligée de le prier pour qu’il se laissât mener chez les Verdurin ; et, quand il la faisait venir chez lui une fois par mois.

Auteur: Proust Marcel

Info: A la recherche du temps perdu, tome 1, 2ème partie : Du Côté de chez Swann II : Un amour de Swann

[ femmes-hommes ] [ théorie-pratique ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

réminiscences

Proust formule ainsi le pont entre le passé et le présent : "ce que nous appelons réalité est un certain rapport entre sensations et souvenirs qui nous entourent simultanément". 

Bref, pour qu'il y ait re-création du passé il faut que se produise autre chose qu'une simple opération de mémoire. Il faut qu'il y ait la combinaison d'une sensation présente (particulièrement goût, odeur, toucher, son) avec la  résurgence d'un souvenir ou d'une impression passée. Derrick Leon a écrit : "Donc, si à l'instant de cette résurrection, comme celle où Proust trébucha sur deux dalles inégales du baptistère de Saint-Marc à Venise,  au lieu d'effacer le présent, on peut continuer à en avoir conscience, si on peut conserver le sentiment de sa propre identité et au même instant vivre pleinement un moment qu'on a cru oublié, alors, et alors seulement, nous voilà en pleine possession du temps perdu".

Autrement dit, un bouquet de sensations dans le présent avec la souvenance d'un événement du passé, voilà où sensation et mémoire se rejoignent et où le temps perdu se retrouve.

Auteur: Nabokov Vladimir

Info: Littérature 1, à propos du chapitre 3 du Temps perdu de Proust, extrait d'une conférence dans une université US en 1948 .

[ association d'idée ] [ inconscient ]

 
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art d'écrire

Je ne médirai jamais de la critique littéraire. Car rien n'est pire pour un écrivain que de se heurter à son absence. Je parle de la critique littéraire en tant que méditation, en tant qu'analyse ; de la critique littéraire qui sait lire plusieurs fois le livre dont elle veut parler (comme une grande musique qu'on peut réécouter sans fin, les grands romans aussi sont faites pour des lectures répétées) ; de la critique littéraire qui, sourde à l'implacable horloge de l'actualité, est prête à discuter les oeuvres nées il y a un an, trente ans, trois cents ans ; de la critique littéraire qui essaie de saisir la nouveauté d'une oeuvre pour l'inscrire ainsi dans la mémoire historique. Si une telle méditation n'accompagnait pas l'histoire du roman, nous ne saurions rien aujourd'hui ni de Dostoïevski, ni de Joyce, ni de Proust. Sans elle toute oeuvre est livrée aux jugements arbitraires et à l'oubli rapide. Or, le cas de Rushdie a montré (s'il fallait encore une preuve) qu'une telle méditation ne se pratique plus. La critique littéraire, imperceptiblement, innocemment, par la force des choses, par l'évolution de la société, de la presse, s'est transformée en une simple (souvent intelligente, toujours hâtive) information sur l'actualité littéraire.

Auteur: Kundera Milan

Info: Les Testaments trahis

[ appréciation ] [ opinion ] [ recensions ] [ diachronie ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

santé

Je suis (au point de vue médical), il paraît, beaucoup de choses différentes, bien qu’à vrai dire on n’ait jamais su très exactement quoi. Mais je suis surtout et indiscutablement très asthmatique. Asthme de foins d’abord, mon asthme est devenu assez vite un asthme d’été, puis un asthme de presque toute l’année. Et à la suite de repas trop copieux, il s’est compliqué d’un état d’apparence asthmatique mais d’origine, m’a-t-on dit, intestinale et gastrique qui est aujourd’hui depuis longtemps enrayé, bien qu’il soit prêt à reparaître à la moindre imprudence. Je fais un repas par 24 heures (et entre parenthèses je me permets de vous demander si au point de vue ration d’entretien vous trouvez ce repas suffisant pour vingt-quatre heures : deux œufs à la crème, une aile entière de poulet rôti, trois croissants, un plat de pommes de terre ou frites, du raisin, du café, une bouteille de bière) et pendant l’intervalle des vingt-quatre heures la seule chose que je prends est en me couchant un quart de verre d’eau de Vichy (neuf ou dix heures après mon repas). Si je prends un verre entier je suis réveillé par de l’oppression ; à plus forte raison si au lieu de l’eau de Vichy c’est un aliment.

Auteur: Proust Marcel

Info: Lettre (qui ne fut jamais expédiée) à Georges Linossier, août/septembre 1904

[ régime alimentaire ] [ jeûne intermittent ] [ indigestion ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

bizarreries

Pour en revenir à l'abondance des manies chez les créateurs et pour n'en citer que quelques unes en guise d'apéritif, je dirai que Kafka, en plus de mâcher 32 fois chaque bouchée, faisait de la gymnastique nu devant la fenêtre ouverte par un froid de canard ; Socrate portait toujours le même vêtement, marchait nu-pieds et dansait tout seul ; Proust s'est mis un jour au lit et n'en est plus sorti (et Valle-Inclan et l'Uruguayen Juan Carlos Onetti, parmi bien d'autres, ont fait la même chose) ; Agatha Christie écrivait dans sa baignoire; Rousseau était masochiste et exhibitionniste; Freud avait peur des trains; Hitchcock, des oeufs; Napoléon, des chats; et la jeune écrivaien colombienne Amalia Andrade, chez qui j'ai pris les trois derniers exemples de phobie, avait peur dans son enfance que des arbres lui poussent à l'intérieur du corps si elle avalait une graine. (...) Rudyard Kipling ne pouvait écrire qu'avec de l'encre très noire, au point que le noir bleuté lui semblait déjà une " aberration". Schiller mettait des pommes gâtées dans le tiroir de son bureau, car il avait besoin de humer la nourriture pour écrire*. Dans ses vieux jours Isaak Dinesen mangeait uniquement des huitres et du raisin blanc avec quelques asperges. Stefan Zweig collectionnait compulsivement les autographe et envoyait trois ou quatre lettres par jour à ses personnalités favorites pour leur demander une signature...

Auteur: Montero Rosa

Info: Le danger de ne pas être folle, pp 15,16. *Amélie Nothomb a une marotte similaire (note de mg)

[ insolites ] [ écrivains ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

réminiscence

Et tout d'un coup le souvenir m'est apparu. Ce goût c'était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l'heure de la messe), quand j'allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. La vue de la petite madeleine ne m'avait rien rappelé avant que je n'y eusse goûté ; peut-être parce que, en ayant souvent aperçu depuis, sans en manger, sur les tablettes des pâtissiers, leur image avait quitté ces jours de Combray pour se lier à d'autres plus récents ; peut-être parce que de ces souvenirs abandonnés si longtemps hors de la mémoire, rien ne survivait, tout s'était désagrégé ; les formes - et celle aussi du petit coquillage de pâtisserie, si grassement sensuel, sous son plissage sévère et dévot - s'étaient abolies, ou ensommeillées, avaient perdu la force d'expansion qui leur eût permis de rejoindre la conscience. Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir.

Auteur: Proust Marcel

Info: À la recherche du temps perdu, tome 1 : Du côté de chez Swann

[ parfum ] [ association ] [ classiques et poncifs ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste