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humour

Toujours est-il que la chose m’est apparue d’importance et propre à me hausser d’un cran dans votre estime : vous concevrez que nul travail, cette récompense en vue, n’eût paru d’intérêt suffisant pour retarder la mise en graphie de cette méditation.

Le problème est cette fois, monsieur, celui de la couille. (J’aurais pu dire celui de la coquille, mais je cède au goût du sensationnel, vous voyez, c’est un faible bien inoffensif.) De fait, il s’agit d’un problème de conchyliorchidologie (ou d’orchido-conchyliologie, qui me paraît, si plus orthodoxe, moins expéditif ; donc, je garde le premier).

AXIOME  :  Retirez le Q de la coquille : vous avez la couille, et ceci constitue précisément une coquille.

Je laisse à cet axiome, monsieur, le soin de perforer lui-même, de son bec rotatif à insertions de patacarbure de wolfram, les épaisses membranes dont s’entoure, par mesure de prudence, votre entendement toujours actif. Et je vous assène, le souffle repris, ce corollaire fascinant :

Et ceci est vrai, que la coquille initiale soit une coquille de coquillage ou une coquille d’imprimerie, bien que la coquille obtenue en fin de réaction soit toujours (à moins de marée extrêmement violente) une coquille d’imprimerie en même temps qu’une couille imprimée.

Vous entrevoyez d’un coup, je suppose, les conséquences à peine croyables de cette découverte. La guerre est bien loin.

Partons d’une coquille de coquillage, acarde ou ampullacée, bitestacée ou bivalve, bullée, caniculée ou cataphractée, chambrée, cloisonnée, cucullée… mais je ne vois pas l’intérêt de recopier dans son entier le dictionnaire analogique de Boissière. Bref, partons d’une coquille. La suppression du Q entraîne presque immédiatement la mutation du minéral inerte en un organe vivant et générateur. Et dans le cas d’une coquille initiale d’imprimeur, le résultat est encore plus spectaculaire, car la coquille en question est essence et abstraction, concept, être de raison, noumène. Le Q ôté permet le passage de l’essence à l’existence non seulement existante mais excitable et susceptible de prolongements.

J’aime à croire que parvenu à ce point, vous allez poser votre beau front dans votre main pour imiter l’homme de Rodin – vous conviendrez en passant de la nécessité d’une adéquation des positions aux fonctions, et que vous n’auriez pas l’idée de déféquer à plat ventre sauf caprice. Et vous vous demanderez, monsieur, d’abord, quel est le phénomène qui se produit. Y a-t-il transfert ? Disparition ? Mise en minorité ? ou effacement derrière une partie plus importante, que le trout ? Qui sait ? Qui ? Mais moi, naturellement sans quoi je ne vous écrirais pas. Je ne suis pas de ces brutes malavisées qui soulèvent les problèmes et les laissent retomber sauvagement sur la gueule de leur prochain.

Tiens, pourtant, si, en voilà un autre qui me tracasse, et je vous le dis en passant, car le genre épistolaire permet plus de caprice et de primesaut que le genre oratoire ou dissertatif, lequel je ne me sens pas qualifié pour oser aborder ce jour. L’expression : mettre la dernière main n’implique-t-elle pas, selon vous, que l’une des deux mains – et laquelle – fut créée avant l’autre par le père Ubu ? La dernière main est souvent la droite ; mais d’aucuns sont-ils pas gauchers ? Ainsi, de la dextre ou de la senestre, laquelle est la plus âgée ? Gageons que ce problème va tenter madame de Valsenestre à qui, en passant, vous voudrez bien présenter mes hommages. Et revenons à nos roustons.

Eh bien, monsieur, pour résoudre le mystère de l’absence du Q, nous disposons d’un moyen fécond et qui permet généralement de noyer sans douleur la poiscaille en remplaçant un mystère que l’on ne pénètre point par un mystère plus mou, c’est-à-dire non mystérieux et par conséquent inoffensif. C’est la "comparaison", méthode pataphysique s’il en fût. A cet agent d’exécution puissant, nous donnerons l’outil qui lui manque, c’est-à-dire le terme de.

Le jargon russe en l’espèce, qui sera notre étalon.

Vous le savez, monsieur, et si vous ne le savez pas, vous n’aurez jamais la sottise de le dire en public, il fut procédé en Russie, n’y a pas si longtemps que nos auteurs ne puissent s’en souvenir, à une réforme dite alphabétique, bien qu’en russe, cela ne se prononce point si facilement. Je vous le concède, cette réforme est à l’origine de la mort de Lénine, de la canonisation de sainte Bernadette et de quelques modifications structurales spécifiquement slaves apportées à un Etat de structure d’ailleurs imprécise ; nous passerons sur les épiphénomènes mineurs pour n’en conserver que le plus important. La réforme en question supprimait trois des 36 lettres alors en usage là-bas : le ? ou ’fita, le ? ou ’izitsa et le ? ou is’kratkoï.. [...]

Mais d’ores et déjà, vous voyez comment on peut supprimer le Q : il suffit d’un décret.

La question est de savoir ce que l’on a fait des lettres supprimées. Ne parlons même pas de celles à qui l’on en a substitué d’autres. Le problème est singulièrement précis : Où a-t-on mis les is’kratkoï ?

Vous vous doutez déjà de la suite. Et vous voyez l’origine de certaines rumeurs se découvrir à vos yeux émerveillés d’enfant sage.

D’ailleurs, monsieur, peu importe. Peu importe que l’on ait, par le passé, mésusé des lettres ainsi frappées d’interdit. Sans vouloir faire planer le soupçon sur qui que ce soit, je sais bien où l’on risquerait d’en dénicher quelques muids.

L’expression "lettre morte" n’est pas née de l’écume de la mer du même nom, vous le savez, monsieur. Les vérités les plus désagréables finissent par transpirer, comme l’eau orange d’un chorizo pendu par les pieds ou la sueur délicate d’un fragment d’Emmenthal qui tourne au translucide. Et les cimetières de lettres sont monnaie courante (sans que l’on ait jamais songé à chronométrer cette dernière, ce qui paraît inexcusable en un siècle sportif et ne permet point d’en préciser la vitesse). Nous n’avons pas accoutumé, me direz-vous, de remettre en cause le passé : je sais, et vous savez, que tout y est à refaire. Mais à bien y regarder, on est forcé de constater que c’est sans aucune originalité qu’a été résolu, de notre vivant ou presque, cet ardu problème de l’élimination en masse. Et cela continue.

Avant que la merdecine ait eu l’idée de s’adjoindre des fi ! syciens et des chie-mistes (ou cague-brouillard, comme disent les Anglois), la peste apportait une ingénieuse solution. Et les destructions provoquées parmi la gent corbote et ratière par la chasse, vu l’absence de grenades et de rusées à tête chercheuse, n’étaient point telles que ces bestioles ne fussent à même de procéder hygiéniquement à l’enlèvement des charognes. Il restait les os, que l’on suçait et que l’on perçait pour jouer de la quenia, comme Gaston Leroux l’a soigneusement rapporté dans " L’Epouse du soleil ". Bref, le professeur Yersin imagina de foutre une canule au cul des poux, et vainquit la peste. Le cancer fait des progrès, mais il abêtit, et déprive le frappé du contact de ses semblables – ou plutôt de ses différents – si utile pourtant. Sur quoi l’Allemagne redécouvre le camp de concentration déjà utilisé avant et ailleurs (le premier qui l’a inventé, levez le doigt). Le principe était bon : c’est celui du couvent. Mais si l’on sait où ça mène, l’on se refuse à voir où cela pourrait mener.

Vous avez déjà compris qu’en ce moment, loin de m’égarer, j’arrive à la proposition ferme, concrète et positive. Vous avez vu que, loin de lamenter le révolu, je suggère simplement que l’on améliore. Vous sentez, avec votre grand nez, que si le sort des prisonniers d’autrefois m’indiffère, c’est que la " pataphysique va toujours de l’avant puisqu’elle est immobile dans le temps et que le temps, lui, est rétrograde par définition, puisque l’on nomme “ direct ” celui des aiguilles d’une montre. Et vous voyez que je suis en train de poser les bases du camp de concentration pataphysique, qui est celui de l’avenir.

Grosso modo, une Thélème. Mais une Thélème obligatoire. Une Thélème où tout serait libre, sauf la liberté. Il s’agit bien en l’espèce de cette exception exceptionnelle à laquelle se réfère Le Livre. Un lieu où l’on serait contraint de ne pas s’éloigner du bonheur. Outre que le rendement des divers travaux que l’on pourrait ainsi faire exécuter librement aux détenus serait excellent – mais sachez que cette considération économique n’a pas un instant pesé sur notre choix plus ni moins que son contraire – le camp de concentration paradisiaque satisferait la tendance religieuse profonde qui sommeille au cœur de tout un tas d’individus non satisfaits de leur vie terrestre – et vous concevez qu’un prisonnier a des raisons de ne pas l’être. Il s’y pourrait, naturellement, faire du vélocipède. Vous pensez bien. Je ne développe pas les mille avantages du projet : je me borne à vous dire que, me désintéressant totalement du sort des is’kratkoï, je propose, par la présente, à votre excellence d’accumuler les Q des coquilles dans les camps ainsi com-binés qui prendraient par exemple le nom de camps de cul-centration, et de récupérer outre les coquilles résultantes et régénérées, les bûmes créées de la sorte à partir de rien, ce qui est quelque chose.

Vous ne serez pas sans remarquer que la réaction qui s’établit est assez analogue à celle qui se produirait, selon eux, dans ces breeders autotrophes où se fabrique une espèce de plutonium. Vous prenez la coquille, lui retirez le Q que vous enfermez en liberté, vous obtenez la couille et une nouvelle coquille, et ainsi de suite jusqu’à neuf heures vingt, où un ange passe. Je passe à mon tour sur l’émission de rayons bêta concomitante, d’une part parce qu’elle n’a pas lieu, d’autre part parce que cela ne regarde personne. Que le Q fût en fin de compte bien traité m’importait avant tout, du point de vue moral et parce qu’il est séant de ne point porter atteinte, sauf si l’on se nomme le P. U., à l’intégrité de quelque être que ce soit, (excepté le militaire) vu qu’il peut pêcher à la ligne, boire de l’alcool et s’abonner au Chasseur français, ou les trois. Du moins, c’est une des choses que l’on peut dire, et comme elle diffère de tout ce que l’on pourrait dire d’autre, il me semble qu’elle a sa place ici.

Piste-scrotum 1. Cette lettre vous est personnellement destinée. Néanmoins, au cas où elle n’intéresserait aucun autre membre du Collège, il me paraîtrait urgent de la diffuser. Si vous en décidiez ainsi, il me serait à honneur que vous la fissiez coiffer d’un chapeau à la gloire de Stanislas Leczinski, roi polonais, inventeur de la lanterne sourde à éclairer pendant les tintamarres et autres espèces de révolutions, et dont je ne me sens pas force d’entreprendre la rédaction que j’estime trop au-dessus de mes indignes moyens.

Piste-scrotum 2. En passant, vous constaterez que le principe de la conservation de ce que vous voudrez en prend un vieux coup dans les tabourets.

Auteur: Vian Boris

Info: Lettre au Provéditeur-éditeur sur un problème quapital et quelques autres, 26 mars 1955, In les Cahiers du Collège de Pataphysique.

[ lapsus ]

 

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annales

Les régimes institutionnels de la mémoire

On pourrait distinguer la reproduction biologique (un individu se reproduit en individus de la même espèce), l’élevage (on sélectionne par la reproduction un profil génétique donné), la domestication (les êtres humains éduquent des animaux, transmettant par le dressage pratiques et comportements) et enfin l’éducation où des individus d’une espèce enseignent à leurs progénitures leurs propres acquis. La domestication n’est pas l’éducation car ce ne sont pas les animaux qui dressent leurs petits, mais leurs maîtres.

La culture commence quand, au delà du patrimoine génétique, des contenus, pratiques et savoir faire sont transmis d’une génération à une autre. Autrement dit, quand il s’agit de passer de l’élevage à l’éducation, de la répétition des capacités propres à l’espèce à la transmission des contenus acquis.

Cela implique d’une part la prise de conscience d’un déjà-là constitué et d’autre part la mise en place d’outils et procédures pour l’entretenir et donc le transmettre. Il s’agit d’avoir des institutions du sens qui régissent, au niveau d’une société ou d’un collectif, les pratiques culturelles et les modalités de leur transmission.

À travers la notion d’institution, nous visons trois caractéristiques principales : la tradition qui sanctionne l’existence d’un déjà-là ("c’est ainsi que l’on a toujours fait"), une normalisation, qui ajuste et régule ses modalités d’expression selon certains critères ("c’est ainsi qu’il convient de faire"), une transmission qui assure une pérennisation de la tradition, de cet héritage reçu et donc à léguer ("c’est ce qu’il faut continuer de faire"). Les institutions du sens sont donc toujours traditionnelles et normatives, garantes de la culture comme acquis constitué et à transmettre. On retrouve ainsi les institutions scolaires, patrimoniales, culturelles, etc. De la langue qu’on apprend à maîtriser même quand elle est sa langue maternelle pour qu’elle devienne sa langue de culture et de réflexion [Judet & Wisman 2004], aux pratiques traditionnelles (cuisines, artisanat) en passant par les pratiques savantes, la culture est un déjà-là qui s’autonomise en tradition normée pour pouvoir être transmise. C’est le rôle et la mission des institutions du sens que d’accompagner la constitution de la tradition normée et d’en assurer la transmission.

La tension propre à ces institutions sera le conflit permanent entre d’une part la normalisation des contenus et d’autre part une transmission autorisant leur appropriation et transformation. Comment transformer sans trahir, comment transmettre sans figer, est la question que doit traiter toute institution du sens. Si la norme donne les conditions de la répétition et de la conservation du déjà-là, l’invention et l’appropriation seront les conditions pour que ce déjà-là reste accessible, signifiant, exploitable voire utile dans l’environnement contemporain. Une norme formelle et dogmatique rend le déjà-là sans intérêt, une appropriation dérégulée revient à une perte de mémoire et de sens.

Si les institutions du sens reposent en leur possibilité sur la constitution d’un déjà-là et sa reconnaissance comme tel, il en ressort qu’on en passe nécessairement par une institutionnalisation de la mémoire qui a pour fonction de fixer le périmètre du déjà-là, de définir les règles de son accroissement et de son enrichissement, et de proposer des modalités de sa consultation, partage et transmission. Les institutions de la mémoire seront donc des instances nécessaires à la reconnaissance d’un déjà-là constitué et à sa pérennisation.

Il y a plusieurs manières de mettre en place de telles institutions et d’en fixer les missions et les contours. Notre civilisation, au cours de son histoire longue, en distingue selon nous quatre modalités principales [Bachimont 2017] : la mémoire de la preuve (les archives), celle de l’œuvre (les bibliothèques et les musées), celle de l’information (les centres de documentation et de ressources) et enfin l’identité culturelle (le patrimoine).

Aussi anciennes que l’écriture elle-même, les archives [Delsalle 1998] sont avant tout une mémoire de l’événement, une trace de ce qui s’est passé, la permanence de cette dernière permettant de pallier l’évanescence de l’événement. L’archive possède une relation organique à ce dont elle est archive : causée par l’événement dont elle consigne la mémoire, l’archive est le signe, par son existence même, de l’événement et du fait qu’il a bien eu lieu. À travers une telle relation organique, on veut insister sur le fait que, même si l’archive est un document produit par des collectifs culturels, elle est néanmoins provoquée, produite quasi naturellement par l’événement qu’elle relate. Autrement dit, elle n’est pas altérée par un processus interprétatif qui viendrait se mettre en l’événement et sa trace. Pour reprendre la belle image de Marie-Anne Chabin [2000], "Les archives procèdent de l’activité de leur auteur comme les alluvions découlent du fleuve", comme si elles consistaient en un processus naturel.

Ainsi, plus tekmerion que semeion, indice que symbole ou icône *, même si en pratique, il faut bien en passer par l’interprétation et les conventions qui lui sont inhérentes, l’archive peut être la preuve que recherchent l’historien, le juge ou l’enquêteur. Mais, puisque l’événement produit le document, ce dernier ne peut être une preuve pleine et entière que si le seul moyen de produire le document qui deviendra l’archive est que l’événement se soit produit. Par exemple, l’acte notarié est ainsi conçu que la seule manière d’avoir un acte est que l’événement associé (une transaction par exemple) ait eu lieu. Sinon, c’est un faux, c’est-à-dire un document établi pour faire croire que l’événement a eu lieu. L’archive officielle est donc une preuve déductive (si on dispose de l’archive, alors l’événement a eu lieu), les autres ont plutôt une valeur abductive plutôt que déductive (si on dispose de l’archive, la cause la plus probable ou la plus simple est que l’événement ait eu lieu mais on en reste à une présomption). C’est la raison pour laquelle l’authenticité, au sens où le document est bien ce qu’il prétend être, est si fondamentale pour les archives. C’est en effet cette dernière qui permet de retracer le schéma causal qui a produit le document à rebours, en remontant à l’événement.

La seconde modalité ou institution de mémoire mobilise les traces du génie humain, autrement dit ce qui reflète les productions de l’esprit et de la culture. Il ne s’agit pas tant d’avoir des preuves de l’événement que de disposer des traces de ce qui a été pensé ou de ce qui fut créé. L’enjeu n’est pas de savoir ce qui s’est passé, mais de connaître comment cela a été pensé. Du monde comme événement (le fait relaté par un témoignage), on remonte à la culture comme monument (le témoignage comme fait). L’authenticité n’est plus ici gagée par le lien organique entre l’événement et le document, mais entre ce dernier et son auteur. L’authenticité reposera sur l’attribution de son auteur et la détermination du contexte de création pour pouvoir en déduire le sens qu’on peut lui conférer. Les institutions en charge des œuvres sont les bibliothèques, les musées, les conservatoires. L’enjeu n’est pas tant de connaître le passé pour lui-même, mais de se reposer sur les œuvres du passé pour appréhender une part des possibilités du génie humain, une province du sens et de l’être. Les œuvres du passé n’appartiennent pas à un passé révolu, mais au présent, un présent permanent et continuel car les œuvres, sitôt produites, restent un témoignage vivant qu’il est toujours temps et opportun de recevoir. Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas important de prendre en compte leur historicité ni leur contexte originel, mais qu’en tant que créations humaines, il est toujours actuel et pertinent pour les êtres humains de les recevoir, accueillir et interpréter.

La troisième institution de la mémoire est celle du savoir, de la connaissance et de l’information. Ni preuve ni œuvre, l’information est le savoir anonyme, sans auteur, apportant la connaissance d’un fait, d’un procédé ou d’un raisonnement possibles. Information de personne, mais information pour tous, l’information prend sa valeur à partir de l’institution qui la produit, ou le processus qui la constitue. De l’information savante gagée par la publication scientifique et son système de relecture par les pairs, à l’information journalistique fondée sur une régulation spécifique, en passant par l’institution scolaire et ses programmes, l’information doit être produite par une institution qui lui sert de caution pour être reçue comme telle et valoir comme connaissance. On comprend qu’une telle notion d’information est le cœur même des activités relevant de ce qu’on a appelé par la suite "l’information scientifique et technique", et qu’elle se formalisa lors de la révolution industrielle [Briet 1951]. Une dimension spécifique de l’information, et faisant rupture avec les figures plus anciennes de l’archive et de la bibliothèque (les preuves et les œuvres), est l’indépendance ou plutôt l’indifférence au support. Peu importe que le document soit un article ou un livre, un journal ou une encyclopédie, numérique ou matériel, il n’importe que par l’information qu’il détient. Derrière cette indifférence se cache un présupposé selon lequel le contenant n’influe pas sur le contenu, que le support matériel ne conditionne pas l’intelligibilité de l’inscription consignée sur le support. Présupposé qu’il est facile de réfuter, aucun changement de support ne pouvant être neutre quant à l’intelligibilité du contenu [Bachimont 2010]. Mais on peut voir derrière ce présupposé, non une erreur quant à la réalité de la dépendance du contenu au contenant, mais l’intérêt exclusif pour un invariant sémantique commun aux différentes expressions rencontrées sur différents supports, où l’on s’intéresse au fait, par exemple, que l’eau bout à 100°, indépendamment de l’expression qui nous a permis d’en prendre connaissance.

Cette conception abstraite du support de l’information entraîne un intérêt exclusif à l’inscription comme expression, à sa grammaire et à son lexique. Privilégiant la forme sur la matière, l’information a un tropisme naturel vers la formalisation et la circulation : formalisation car il s’agit de contrôler l’information uniquement à partir de sa forme, indépendamment de son support ; circulation parce que cette indifférence au support permet en principe la migration d’un support à un autre sans altération de l’information. Cela aboutit fort logiquement aux initiatives comme le Web des données (ou Web sémantique) où le formalisme de l’expression assure les conditions de son interprétation et de sa circulation.

Enfin, le dernier régime est celui de l’identité culturelle ou celui du patrimoine. Ce régime est le plus indéterminé des quatre considérés ici dans la mesure où il mobilise le rapport fondamental à la mémoire et à la culture : il concerne tout objet permettant à un collectif d’accéder à une mémoire, à la mémoire de son identité collective. Le patrimoine est donc, pour utiliser le vocabulaire de Gilbert Simondon [2005], ce qui permet l’individuation d’une identité collective et la constitution d’objets comme vecteurs de cette dernière. Le patrimoine est donc un jeu triple entre des objets, des individus, et un collectif tissant ces derniers ensemble. Aussi tout objet peut-il, en principe, devenir patrimonial, les règles de l’individuation n’étant pas fixées a priori. On ne peut que constater a posteriori que tels ou tels objets "font patrimoine".

L’identité collective est un déjà-là revendiqué et assumé par le collectif. Il s’agit d’une mémoire reconnue comme étant la sienne et associée à un objet qui l’incarne et la porte. Mais la seule caractéristique de cet objet est qu’il est distingué dans sa capacité de porter un souvenir, d’incarner une mémoire, de véhiculer un sens partagé. En ce sens, l’objet patrimonial est un mnémophore, un porteur de mémoire, en plagiant le néologisme naguère proposé par Krzystof Pomian, le sémiophore [1996].

L’objet patrimonial, le mnémophore, ne s’oppose pas aux autres régimes de mémoire que nous avons distingués, mais les intègre comme des modalités possibles de sa déclinaison. En effet, les preuves, œuvres et informations sont porteuses de mémoire et permettent par leur entremise un rapport au passé.

Auteur: Bachimont Bruno

Info: https://journals.openedition.org/signata/2980. *CS Peirce (1978) Écrits sur le signe. Paris, Seuil.

[ conservatisme ] [ pré-mémétique ] [ damnatio memoriae ] [ diachronie ] [ sciences ] [ humaines tiercités ] [ citation s'appliquant à ce logiciel ]

 

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civilisation

Pour expliquer les États-Unis d'Amérique, on les a comparés, avec raison, à un creuset. L'Amérique est en effet un de ces cas où, à partir d'une matière première on ne peut plus hétérogène, a pris naissance un type d'homme dont les caractéristiques sont, dans une large mesure, uniformes et constantes. Des hommes des peuples les plus divers reçoivent donc, en s'installant en Amérique, la même empreinte. Presque toujours, après deux générations, ils perdent leurs caractéristiques originelles et reproduisent un type assez unitaire pour ce qui est de la mentalité, de la sensibilité et des modes de comportement : le type américain justement.

Mais, dans ce cas précis, des théories comme celles formulées par Frobenius et Spengler – il y a aurait une étroite relation entre les formes d'une civilisation et une sorte d' "âme" liée au milieu naturel, au "paysage" et à la population originelle – ne semblent pas pertinentes. S'il en était ainsi, en Amérique l'élément constitué par les Amérindiens, par les Peaux-Rouges, aurait dû jouer un rôle important. Les Peaux-Rouges étaient une race fière, possédant style, dignité, sensibilité et religiosité ; ce n'est pas sans raison qu'un auteur traditionaliste, F. Schuon, a parlé de la présence en eux de quelque chose "d'aquilin et de solaire". Et nous n'hésitons pas à affirmer que si leur esprit avait marqué, sous ses meilleurs aspects et sur un plan adéquat, la matière mélangée dans le "creuset américain", le niveau de la civilisation américaine aurait été probablement plus élevé. Mais, abstraction faite de la composante puritaine et protestante (qui se ressent à son tour, en raison de l'insistance fétichiste sur l'Ancien Testament, d'influences judaïsantes négatives), il semble que ce soit l'élément noir, avec son primitivisme, qui ait donné le ton à bien des traits décisifs de la mentalité américaine.

Une première chose est, à elle seule, caractéristique : quand on parle de folklore en Amérique, c'est aux Noirs qu'on pense, comme s'ils avaient été les premiers habitants du pays. Si bien qu'on traite, aux États-Unis, comme un oeuvre classique inspirée du "folklore américain", le fameux Porgy and Bess du musicien d'origine juive Gershwin, oeuvre qui ne parle que des Noirs. Cet auteur déclara d'ailleurs que, pour écrire son oeuvre, il se plongea pendant un certain temps dans l'ambiance des Noirs américains. Le phénomène représenté par la musique légère et la danse est encore plus frappant. On ne peut pas donner tort à Fitzgerald, qui a dit que, sous un de ses principaux aspects, la civilisation américaine peut être appelée une civilisation du jazz, ce qui veut dire d'une musique et d'une danse d'origine noire ou négrifiée. Dans ce domaine, des "affinités électives" très singulières ont amené l'Amérique, tout au long d'un processus de régression et de retour au primitif, à s'inspirer justement des Noirs, comme si elle n'avait pas pu trouver, dans son désir compréhensible de création de rythmes et de formes frénétiques en mesure de compenser le côté desséché de la civilisation mécanique et matérielle moderne, rien de mieux. Alors que de nombreuses sources européennes s'offraient à elle - nous avons déjà fait allusion, en une autre occasion, aux rythmes de danse de l'Europe balkanique, qui ont vraiment quelque chose de dionysiaque. Mais l'Amérique a choisi les Noirs et les rythmes afro-cubains, et la contagion, à partir d'elle, a gagné peu à peu les autres pays.

Le psychanalyste C.-G. Jung avait déjà remarqué la composante noire du psychisme américain. Certaines de ses observations méritent d'être reproduites ici : "Ce qui m'étonna beaucoup, chez les Américains, ce fut la grande influence du Noir. Influence psychologique, car je ne veux pas parler de certains mélanges de sang. Les expressions émotives de l'Américain et, en premier lieu, sa façon de rire, on peut les étudier fort bien dans les suppléments des journaux américains consacrés au society gossip. Cette façon inimitable de rire, de rire à la Roosevelt, est visible chez le Noir américain sous sa forme originelle. Cette manière caractéristique de marcher, avec les articulations relâchées ou en balançant des hanches, qu'on remarque souvent chez les Américains, vient des Noirs. La musique américaine doit aux Noirs l'essentiel de son inspiration. Les danses américaines sont des danses de Noirs. Les manifestations du sentiment religieux, les revival meetings, les holy rollers et d'autres phénomènes américains anormaux sont grandement influencés par le Noir. Le tempérament extrêmement vif en général, qui s'exprime non seulement dans un jeu comme le base ball, mais aussi, et en particulier, dans l'expression verbale – le flux continu, illimité, de bavardages, typique des journaux américains, en est un exemple remarquable –, ne provient certainement pas des ancêtres d'origine germanique, mais ressemble au chattering de village nègre. L'absence presque totale d'intimité et la vie collective qui contient tout rappellent, en Amérique, la vie primitive des cabanes ouvertes où règne une promiscuité complète entre les membres de la tribu".

Poursuivant des observations de ce genre, Jung a fini par se demander si les habitants du nouveau continent peuvent encore être considérés comme des Européens. Mais ses remarques doivent être prolongées. Cette brutalité, qui est un des traits évidents de l'Américain, on peut dire qu'elle possède une empreinte noire. D'une manière générale, le goût de la brutalité fait désormais partie de la mentalité américaine. II est exact que le sport le plus brutal, la boxe, est né en Angleterre ; mais il est tout aussi exact que c'est aux États-Unis qu'il a connu les développements les plus aberrants au point de faire l'objet d'un véritable fanatisme collectif, bien vite transmis aux autres peuples. En ce qui concerne la tendance à en venir aux mains de la façon la plus sauvage qui soit, il suffit d'ailleurs de songer à une quantité de films américains et à l'essentiel de la littérature populaire américaine, la littérature "policière" : les coups de poing y sont monnaie courante, parce qu'ils répondent évidemment aux goûts des spectateurs et des lecteurs d'outre-Atlantique, pour lesquels la brutalité semble être la marque de la vraie virilité. La nation-guide américaine a depuis longtemps relégué, plus que toute autre, parmi les ridicules antiquailles européennes, la manière de régler un différend par les voies du droit, en suivant des normes rigoureuses, sans recourir à la force brute et primitive du bras et du poing, manière qui pouvait correspondre au duel traditionnel. On ne peut que souligner l'abîme séparant ce trait de la mentalité américaine de ce que fut l'idéal de comportement du gentleman anglais, et ce, bien que les Anglais aient été une composante de la population blanche originelle des États-Unis. On peut comparer l'homme occidental moderne, qui est dans une large mesure un type humain régressif, à un crustacé : il est d'autant plus "dur" dans son comportement extérieur d'homme d'action, d'entrepreneur sans scrupules, qu'il est "mou" et inconsistant sur le plan de l'intériorité. Or, cela est éminemment vrai de l'Américain, en tant qu'il incarne le type occidental dévié jusqu'à l'extrême limite.

On rencontre ici une autre affinité avec le Noir. Un sentimentalisme fade, un pathos banal, notamment dans les relations sentimentales, rapprochent bien plus l'Américain du Noir que de l'Européen vraiment civilisé. L'observateur peut à ce sujet tirer aisément les preuves irréfutables à partir de nombreux romans américains typiques, à partir aussi des chansons, du cinéma et de la vie privée courante. Que l'érotisme de l'Américain soit aussi pandémique que techniquement primitif, c'est une chose qu'ont déplorée aussi et surtout des jeunes filles et des femmes américaines. Ce qui ramène une fois de plus aux races noires, chez lesquelles l'importance, parfois obsessionnelle, qu'ont toujours eu l'érotisme et la sexualité, s'associe, justement, à un primitivisme ; ces races, à la différence des Orientaux, du monde occidental antique et d'autres peuples encore, n'ont jamais connu un ars amatoria digne de ce nom. Les grands exploits sexuels, si vantés, des Noirs, n'ont en réalité qu'un grossier caractère quantitatif et priapique.

Un autre aspect typique du primitivisme américain concerne l'idée de "grandeur". Werner Sombart a parfaitement vu la chose en disant : they mistake bigness for greatness, phrase qu'on pourrait traduire ainsi : ils prennent la grandeur matérielle pour la vraie grandeur, pour la grandeur spirituelle. Or, ce trait n'est pas propre à tous les peuples de couleur en général. Par exemple, un Arabe de vieille race, un Peau-Rouge, un Extrême-Oriental ne se laissent pas trop impressionner par tout ce qui est grandeur de surface, matérielle, quantitative, y compris la grandeur liée aux machines, à la technique, à l'économie (abstraction faite, naturellement, des éléments déjà occidentalisés de ces peuples). Pour se laisser prendre par tout cela ; il fallait une race vraiment primitive et infantile comme la race noire. Il n'est donc pas exagéré de dire que le stupide orgueil des Américains pour la "grandeur" spectaculaire, pour les achievements de leur civilisation, se ressent lui aussi d'une disposition du psychisme nègre. On peut aussi parler d'une des bêtises que l'on entend souvent répéter, à savoir que les Américains seraient une "race jeune", avec pour corollaire tacite que c'est à eux qu'appartient l'avenir. Car un regard myope peut facilement confondre les traits d'une jeunesse effective avec ceux d'un infantilisme régressif. Du reste, il suffit de reprendre la conception traditionnelle pour que la perspective soit renversée. En dépit des apparences, les peuples récemment formés doivent être considérés comme les peuples les plus vieux et, éventuellement, comme des peuples crépusculaires, parce qu'ils sont venus en dernier justement, parce qu'ils sont encore plus éloignés des origines.

Cette manière de voir les choses trouve d'ailleurs une correspondance dans le monde des organismes vivants. Ceci explique la rencontre paradoxale des peuples présumés "jeunes" (au sens de peuples venus en dernier) avec des races vraiment primitives, toujours restées en dehors de la grande histoire ; cela explique le goût de ce qui est primitif et le retour à ce qui est primitif. Nous l'avons déjà fait remarquer à propos du choix fait par les Américains, à cause d'une affinité élective profonde, en faveur de la musique nègre et sub-tropicale ; mais le même phénomène est perceptible aussi dans d'autres domaines de la culture et de l'art. On peut se référer, par exemple, au culte assez récent de la négritude qu'avaient fondé en France des existentialistes, des intellectuels et des artistes "progressistes".

Une autre conclusion à tirer de tout cela, c'est que les Européens et les représentants de civilisations supérieures non européennes font preuve, à leur tour, de la même mentalité de primitif et de provincial lorsqu'ils admirent l'Amérique, lorsqu'ils se laissent impressionner par l'Amérique, lorsqu'ils s'américanisent avec stupidité et enthousiasme, croyant ainsi marcher au pas du progrès et témoigner d'un esprit "libre" et "ouvert". La marche du progrès concerne aussi l' "intégration" sociale et culturelle du Noir, qui se répand en Europe même et qui est favorisée, même en Italie, par une action sournoise, notamment au moyen de films importés (où Blancs et Noirs remplissent ensemble des fonctions sociales : juges, policiers, avocats, etc.) et par la télévision, avec des spectacles où danseuses et chanteuses noires sont mélangées à des blanches, afin que le grand public s'accoutume peu à peu à la promiscuité des races, perde tout reste de conscience raciale naturelle et tout sentiment de la distance. Le fanatisme collectif qu'a provoqué en Italie, lors de ses exhibitions, cette masse de chair informe et hurlante qu'est la Noire Ella Fitzgerald, est un signe aussi triste que révélateur. On peut en dire autant du fait que l'exaltation la plus délirante de la "culture" nègre, de la négritude, soit due à un Allemand, Janheinz Jahn, dont le livre Muntu, publié par une vieille et respectable maison d'édition allemande (donc dans le pays du racisme aryen !), a été immédiatement traduit et diffusé par un éditeur italien de gauche bien connu, Einaudi. Dans cet ouvrage invraisemblable, l'auteur en arrive à soutenir que la "culture" nègre serait un excellent moyen de relever et de régénérer la "civilisation matérielle" occidentale... Au sujet des affinités électives américaines, nous ferons allusion à un dernier point. On peut dire qu'il y a eu aux États-Unis d'Amérique quelque chose de valable, vraiment prometteur : le phénomène de cette jeune génération qui prônait une sorte d'existentialisme révolté, anarchiste, anticonformiste et nihiliste ; ce qu'on a appelé la beat generation, les beats, les hipsters et compagnie, sur lesquels nous reviendrons d'ailleurs. Or, même dans ce cas, la fraternisation avec les Noirs, l'instauration d'une véritable religion du jazz nègre, la promiscuité affichée, y compris sur le plan sexuel, avec les Noirs, ont fait partie des caractéristiques de ce mouvement.

Dans un essai célèbre, Norman Mailer, qui a été un des principaux représentants de la beat generation, avait même établi une sorte d'équivalence entre le Noir et le type humain de la génération en question ; il avait carrément appelé ce dernier the white Negro, le "nègre blanc". A ce propos, Fausto Gianfranceschi a écrit très justement : "En raison de la fascination exercée par la 'culture' nègre, sous la forme décrite par Mailer, on ne peut s'empêcher d'établir immédiatement un parallèle – irrespectueux – avec l'impression que fit le message de Friedrich Nietzsche au début du XIXe siècle. Le point de départ, c'est le même désir de rompre tout ce qui est fossilisé et conformiste par une prise de conscience brutale du donné vital et existentiel ; mais quelle confusion lorsqu'on met le Noir, comme on l'a fait de nos jours, avec le jazz et l'orgasme sexuel, sur le piédestal du "surhomme" !

Pour la bonne bouche nous terminerons par un témoignage significatif dû à un écrivain américain particulièrement intéressant, James Burnham (dans "The struggle for the world") : "On trouve dans la vie américaine les signes d'une indiscutable brutalité. Ces signes se révèlent aussi bien dans le lynchage et le gangstérisme que dans la prétention et la goujaterie des soldats et des touristes à l'étranger. Le provincialisme de la mentalité américaine s'exprime par un manque de compréhension pour tout autre peuple et toute autre culture. Il y a, chez de nombreux Américains, un mépris de rustre pour les idées, les traditions, l'histoire, un mépris lié à l'orgueil pour les petites choses dues au progrès matériel. Qui, après avoir écouté une radio américaine, ne sentira pas un frisson à la pensée que le prix de la survie serait l'américanisation du monde ?"

Ce qui, malheureusement, est déjà en train de se produire sous nos yeux.

Auteur: Evola Julius

Info: L'arc et la massue (1971, 275p.)

[ racialisme ] [ melting-pot ] [ nouveau monde ] [ désintégration ] [ ethno-différentialisme ]

 
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psychosomatique

Nous avons 2 cerveaux.

On se demande souvent pourquoi les gens ont des "boules" dans l'estomac avant d'aller sur scène ? Ou pourquoi un entretien d'emploi imminent peut causer des crampes intestinales ? Ainsi que : pourquoi les antidépresseur qui visent le cerveau causent la nausée ou un bouleversement abdominal chez des millions de personnes qui prennent de telles drogues ?

Les scientifiques disent que la raison de ces réactions est que notre corps a deux cerveaux : le familier, dans le crâne et, moins connus, mais extrêmement importants un autre dans l'intestin humain- Tout comme des jumeaux siamois, les deux cerveaux sont reliés ensemble ; quand l'un est affecté, l'autre aussi. Le cerveau de l'intestin, connu sous le nom de système nerveux entérique, est situé dans les gaines du tissu qui tapissent l'oesophage, l'estomac, le petit intestin et le colon. Si on le considère comme une simple entité, c'est un réseau de neurones, de neurotransmetteurs et de protéines qui zappent des messages entre eux, soutiennent des cellules comme celles du cerveau proprement dit et offrent des circuits complexes qui lui permettent d'agir indépendamment, d'apprendre, de se rappeler et, selon le dicton, de produire des sensations dans les intestins.

Le cerveau de l'intestin joue un rôle important dans le bonheur et la misère humains. Mais peu de gens savent qu'il existe indique le Dr. Michael Gershon, professeur d'anatomie et de biologie des cellules au centre médical presbytérien de Colombia à New York. Pendant des années, on a dit aux gens qui ont des ulcères, des problèmes pour avaler ou des douleurs abdominales chroniques que leurs problèmes étaient imaginaires ou, émotifs, c'est à dire simplement dans leurs têtes. Ces gens ont donc faits la navette entre divers psychiatres pour le traitement. Les médecins avaient raison en attribuant ces problèmes au cerveau dit le DR. Gershon, mais ils blâment le faux. Beaucoup de désordres gastro-intestinaux, comme le syndrome d'entrailles irritable proviennent des problèmes dans le propre cerveau de l'intestin, affirme-t'il. Les symptômes provenant des deux cerveaux - tendent à être confus : " Comme le cerveau peut déranger l'intestin, l'intestin peut également déranger le cerveau... si tu es enchaîné aux toilette avec un serre joint, tu seras aussi affecté."

Les détails de la façon dont le système nerveux entérique reflète le système nerveux central ont émergé ces dernières années, dit le Dr. Gershon, et c'est considéré comme un nouveau champ d'investigation appelé neuro-gastro-enterologie par la médecine. Ainsi, presque chaque substance qui aide à faire fonctionner et à commander le cerveau a donné des résultat dans l'intestin, dit Gershon. Les neurotransmetteurs principaux comme la sérotonine, dopamine, glutamate, nopépinéphrine et l'oxyde nitrique sont là. Deux douzaine de petites protéines cervicales, appelées les neuropeptides, sont dans l'intestin, comme les cellules principales du système immunitaire. Les Enkephalins, une classe d'opiacés normaux du corps, sont dans l'intestin et, constatation qui laisse les chercheurs perplexe, l'intestin est une riche source de benzodiazépines - la famille des produits chimiques psycho-actifs qui inclut des drogues toujours populaires telles que le Valium et le Xanax.

En termes évolutionnistes, il est assez clair que le corps a deux cerveaux, dit le Dr. David Wingate, professeur de science gastro-intestinale à l'université de Londres et conseiller à l'hôpital royal de Londres. Les premiers systèmes nerveux étaient des animaux non tubulaires qui collaient aux roches et attendaient le passage de nourriture. Le système limbique est souvent désignée sous le nom de "cerveau reptilien". Alors que la vie évoluait, les animaux ont eu besoin d'un cerveau plus complexe pour trouver la nourriture et un partenaire sexuel et ainsi ont développé un système nerveux central. Mais le système nerveux de l'intestin était trop important pour l'intégrer à cette nouvelle tête, même avec de longs raccordements sur tout le corps. Un rejeton à toujours besoin de manger et digérer de la nourriture à la naissance. Par conséquent, la nature semble avoir préservé le système nerveux entérique en tant que circuit indépendant.

Chez de plus grands animaux, il est simplement relié de manière vague au système nerveux central et peut la plupart du temps fonctionner seul, sans instructions de l'extérieur. C'est en effet l'image vue par les biologistes développementalistes. Une motte de tissus appelée la "crête neurale" se forme tôt dans l'embryogenese dit le DR.Gershon. Une section se transforme en système nerveux central. Un autre morceau émigre pour devenir le système nerveux entérique. Et postérieurieurement seulement les deux systèmes nerveux seront relié par l'intermédiaire d'une sorte de câble appelé le nerf "vagus". Jusque à relativement récemment, les gens ont pensé que les muscles et les nerfs sensoriels de l'intestin étaient câblés directement au cerveau et que le cerveau commandait l'intestin par deux voies qui augmentaient ou diminuaient les taux de l'activité. L'intestin étant un simple tube avec des réflexes. L'ennui est que personne ne pris la peine de compter les fibres de nerf dans l'intestin. Quand on l'a fait on fut étonné de constater que l'intestin contient 100 millions de neurones - plus que la moelle épinière.

Pourtant le conduit vagus n'envoie qu'environ deux mille fibres de nerf vers l'intestin. Le cerveau envoie des signaux à l'intestin en parlant à un nombre restreint de'"neurones de commande", qui envoient à leur tour des signaux aux neurones internes de l'intestin qui diffusent les messages. Les neurones et les inter neurones de commande sont dispersées dans deux couches de tissu intestinal appelées le plexus myenteric et le plexus subrmuscosal. ("le plexus solaire" est en fait un terme de boxe qui se réfère simplement aux nerfs de l'abdomen.) Ces neurones commandent et contrôlent le modèle de l'activité de l'intestin. Le nerf vagus modifie seulement le volume en changeant le taux de mise à feu. Les plexus contiennent également les cellules gliales qui nourrissent les neurones, les cellules pylônes impliquées dans des immuno-réactions, et "une barrière de sang cervical " qui maintient ces substances nocives loin des neurones importants. Ils ont des sondes pour les protéines de sucre, d'acidité et d'autres facteurs chimiques qui pourraient aider à surveiller le progrès de la digestion, déterminant comment l'intestin mélange et propulse son contenu. "Ce n'est pas une voie simple", Y sont employés des circuits intégrés complexes, pas différents du cerveau." Le cerveau de l'intestin et le cerveau de la tête agissent de la même manière quand ils sont privés d'informations venant du monde extérieur.

Pendant le sommeil, le cerveau de la tête produit des cycles de 90-minutes de sommeil lent, ponctué par des périodes de sommeil avec des mouvement d'oeil rapide (REM) où les rêves se produisent. Pendant la nuit, quand il n'a aucune nourriture, le cerveau de l'intestin produit des cycles 90-minute de lentes vagues de contractions des muscles, ponctuées par de courts gerbes de mouvements rapides des muscles, dit le Dr. Wingate. Les deux cerveaux peuvent donc s'influencer dans cet état. On a trouvé des patients présentant des problèmes d'entrailles ayant un sommeil REM anormal. Ce qui n'est pas contradictoire avec la sagesse folklorique qui voudrait que l'indigestion pousse au cauchemar. Alors que la lumière se fait sur les connexions entre les deux cerveaux, les chercheurs commencent à comprendre pourquoi les gens agissent et se sentent de telle manière.

Quand le cerveau central rencontre une situation effrayante, il libère les hormones d'effort qui préparent le corps combattre ou à se sauver dit le DR.Gershon. L'estomac contient beaucoup de nerfs sensoriels qui sont stimulés par cette montée chimique subite - ainsi surviennent les ballonnements. Sur le champ de bataille, le cerveau de la tête indique au cerveau d'intestin arrêter dit le DR.Gershon " Effrayé un animal en train de courir ne cesse pas de déféquer ". La crainte fait aussi que le nerf vagus au "monte le volume" des circuits de sérotonine dans l'intestin. Ainsi, trop stimulé, l'intestin impulse des vitesse élevés et, souvent, de la diarrhée. De même, des gens s'étouffent avec l'émotion. Quand des nerfs dans l'oesophage sont fortement stimulés, les gens peuvent éprouver des problèmes d'ingestion. Même le prétendu " Moment de Maalox " d'efficacité publicitaire peut être expliqué par les deux cerveaux agissant en interaction, dit le Dr. Jackie D. Wood, président du département de physiologie à l'université de l'Etat de l'Ohio à Columbus. Les signaux d'effort du cerveau de la tête peuvent changer la fonction de nerf entre l'estomac et l'oesophage, ayant pour résultat la brûlure d'estomac.

Dans les cas d'efforts extrême. le cerveau dominant semble protéger l'intestin en envoyant des signaux aux cellules pylônes immunologiques dans le plexus. Les cellules pylônes sécrètent l'histamine, la prostaglandine et d'autres agents qui aident à produire l'inflammation. "C'est protecteur. Si un animal est en danger et sujet au trauma, la substance sale dans les intestins est seulement à quelques cellules du reste du corps. En enflammant l'intestin, le cerveau amorce l'intestin pour la surveillance. Si la barrière se casse, l'intestin est prêt à faire les réparations ". Dit le DR. Wood. Malheureusement, ces produits chimiques libérés causent également la diarrhée et les crampes. Ceci explique également beaucoup d'interactions.."quand tu prends une drogue pour avoir des effets psychiques sur le cerveau, il est très probable que tu auras aussi des effets sur l'intestin. Réciproquement, les drogues développées pour le cerveau ont des utilisations pour l'intestin.

Par exemple, l'intestin est chargé avec la sérotonine des neurotransmetteur. Quand des récepteurs de pression de la doublure de l'intestin sont stimulés, la sérotonine est libérée et commence le mouvement réflexe du péristaltisme. Maintenant un quart des personnes prenant du Prozac ou des antidépresseur semblables ont des problèmes gastro- intestinaux comme la nausée, diarrhée et constipation. Ces drogues agissent sur la sérotonine, empêchant sa prise par les cellules cible de sorte qu'elle demeure plus abondante dans le système nerveux central. Dans une étude le DR.Gershon et ses collègues expliquent les effets secondaires du Prozac sur l'intestin. Ils ont monté une section de colon du cobaye sur un stand et ont mis un petit granule à l'extrémité de la "bouche". Le colon isolé fouette le granule vers le bas vers l'extrémité "anale" de la colonne, juste comme il le ferai à l'intérieur de l'animal. Quand les chercheurs ont mis un peu de Prozac dans le colon, le granule " y est entré dans la haute vitesse". La drogue a doublé la vitesse à laquelle le granule a traversé le colon, ce qui expliqueraient pourquoi certains ont la diarrhée. Le Prozac a été parfois utilisé à petites doses pour traiter la constipation chronique, a il ajouté. Mais quand les chercheurs ont augmenté la quantité de Prozac dans le colon du cobaye, le granule a cessé de se déplacer. Le DR Gershon dit que c'est pourquoi certains deviennent constipé avec cette drogue. Et parce que les nerfs sensoriels stimulés par Prozac peuvent également causer la nausée. Certains antibiotiques comme la crythromycine agissent sur des récepteurs d'intestin et produisent des oscillations. Certaines ont alors des crampes et des nausées. Des drogues comme la morphine et l'héroïne s'attachent aux récepteurs des opiacé de l'intestin, produisant la constipation. En effet, les deux cerveaux peuvent être intoxiqués aux opiacés. Les victimes des maladies d'Alzheimer et de Parkinson souffrent de constipation. Les nerfs dans leur intestin sont aussi malades que les cellules de nerf dans leurs cerveaux. Juste comme le cerveau central affecte l'intestin, le cerveau de l'intestin peut parler à la tête. La plupart des sensations d'intestin qui entrent dans la part consciente sont des choses négatives comme la douleur et le ballonnement.

Les gens ne s'attendent pas à sentir "du bon" venant de l'intestin... mais cela ne signifie pas que de tels signaux sont absents. Par conséquent, il y a la question intrigante : pourquoi l'intestin produit-il de la benzodiazépine ? Le cerveau humain contient des récepteurs pour la benzodiazépine, une drogue qui soulage l'inquiétude, suggérant que le corps produise sa propre source interne de la drogue, dit le Dr. Anthony Basile, neurochimiste au laboratoire de neurologie aux instituts nationaux de la santé a Bethesda. Il y a plusieurs années, dit-il, un scientifique italien a fait une découverte plus effrayante. Les patients présentant un disfonctionnement du foie tombèrent dans un coma profond. Le coma put être renversé, en quelques minutes, en donnant aux patients une drogue qui bloque la benzodiazépine. Quand le foie s'arrête, les substances habituellement neutralisées par le foie vont au cerveau. Certaines sont mauvaises, comme l'ammoniaque et les mercaptans, qui sont "les composés puants que les putois pulvérisent pour se défendre ". Mais une série de composés est également identique à la benzodiazépine. " Nous ne savons pas s'ils viennent de l'intestin lui-même, de bactéries dans l'intestin ou de la nourriture". dit. Le Dr Basile. Mais quand le foie s'arrête la benzodiazépine de l'intestin va directement au cerveau, mettant le patient dans le coma.

L'intérêt pour de telles interactions entre le cerveau d'intestin et celui de tête est énorme... Par exemple, beaucoup de personnes sont allergiques à certaines nourritures, comme les mollusques et les crustacés. C'est parce que les cellules pylônes dans l'intestin deviennent mystérieusement sensibilisées aux antigènes de la nourriture. La prochaine fois que l'antigène apparaît dans l'intestin ; les cellules pylônes appellent un programme, libérant des modulateurs chimiques, qui essaye d'éliminer la menace. La personne allergique se retrouve donc avec de la diarrhée et des crampes. Beaucoup de maladies auto-immunes comme la maladie de Krohn et les colites ulcérative peuvent impliquer le cerveau de l'intestin. Les conséquences peuvent être horribles, comme dans la maladie de Chagas, qui est provoquée par un parasite trouvé en Amérique du sud. Les infectés développent une réponse auto-immune des neurones de leur intestin. Leurs systèmes immunitaires détruit alors lentement leurs propres neurones intestinales. Quand assez de neurones sont mortes, les intestins éclatent littéralement.

Restent ces questions : Est ce que le cerveau de l'intestin apprend ? Pense - il pour lui-même ? L'intestin humain a été longtemps vu comme le réceptacle des bons et des mauvais sentiments. Des états peut-être émotifs du cerveau de la tête sont reflétés dans le cerveau de l'intestin, ou sont-ils ressentis que par ceux qui prêtent l'attention à elles. Le cerveau de l'intestin prend la forme de deux réseaux de raccordements neuraux dans la doublure de l'appareil gastro-intestinal, appelée le plexus myenteric et le plexus subrnucosal. Les nerfs sont fortement reliés ensemble et ont une influence directe sur des choses comme la vitesse de la digestion, le mouvement et des sécrétions de la muqueuses "comme-des-doigts" qui ligne les intestins et les contractions des différents genres de muscle dans les parois de l'intestin. Autoroute cerveau intestin à 2 voies : RUE Bidirectionnelle : L'intestin a son propre esprit, le système nerveux entérique. Juste comme le cerveau dans la tête, disent les chercheurs. Ce système envoie et reçoit des impulsions, enregistre, fait des expériences et répond aux émotions. Ses cellules nerveuse sont baignées et influencées par les mêmes neurotransmetteurs. L'intestin peut déranger le cerveau juste comme le cerveau peut déranger l'intestin. Diagramme des parois du petit intestin : un plan de coupe montre deux réseaux de nerfs qui composent le système nerveux entérique, ou "cerveau dans l'intestin". Le premier réseau, appelé le plexus submucosal, est juste sous la doublure muqueuse. le second, le plexus myenteric, se trouve entre les deux manteaux de muscle.

Auteur: Blakeslee Sandra

Info: New York Times 23 Janvier 1996

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résonances organiques

Les avantages sociaux de la synchronisation de notre cerveau

Nos ondes cérébrales peuvent s'aligner lorsque nous travaillons et jouons en étroite collaboration. Le phénomène, connu sous le nom de synchronisation inter-cerveau, suggère que la collaboration est biologique.

(Photo : De plus en plus de recherches montrent comment l’activité neuronale peut se synchroniser entre plusieurs personnes, ce qui entraîne de meilleurs résultats sociaux et créatifs.)

Le célèbre duo de pianos polonais Marek et Wacek n'utilisait pas de partitions lors de ses concerts live. Et pourtant, sur scène, le duo semblait parfaitement synchronisé. Sur des pianos adjacents, ils reprenaient de manière ludique divers thèmes musicaux, mêlé musique classique et jazz et improvisé en temps réel. "Nous avons suivi le courant", a déclaré Marek Tomaszewski, qui a joué avec Wacek Kisielewski jusqu'à la mort de Wacek en 1986. "C'était un pur plaisir."

Les pianistes semblaient lire dans les pensées des autres en échangeant des regards. C’était, dit Marek, comme s’ils étaient sur la même longueur d’onde. Un nombre croissant de recherches suggèrent que cela aurait pu être littéralement vrai.

Des dizaines d'expériences récentes étudiant l'activité cérébrale de personnes qui se produisent et travaillent ensemble – pianistes en duo, joueurs de cartes, enseignants et étudiants, puzzleurs et autres – montrent que leurs ondes cérébrales peuvent s'aligner dans un phénomène connu sous le nom de synchronisation neuronale interpersonnelle, également connue sous le nom de synchronie inter-cerveau.

"De nombreuses recherches montrent désormais que les personnes qui interagissent ensemble présentent des activités neuronales coordonnées", a déclaré Giacomo Novembre, neuroscientifique cognitif à l'Institut italien de technologie de Rome, qui a publié l'été dernier un article clé sur ce sujet. Les études se sont multipliées au cours des dernières années – notamment la semaine dernière – au fur et à mesure que de nouveaux outils et des techniques améliorées ont affiné la science et la théorie.

Ils montrent que la synchronisation entre les cerveaux présente des avantages. Qui conduit à une meilleure résolution de problèmes, à un meilleur apprentissage et à une meilleure coopération, et même à des comportements qui aident les autres à leur dépens. De plus, des études récentes dans lesquelles les cerveaux ont été stimulés par un courant électrique suggèrent que la synchronisation elle-même pourrait entraîner l'amélioration des performances observée par les scientifiques.

" La cognition est quelque chose qui se produit non seulement dans le crâne, mais aussi en relation avec l'environnement et avec les autres ", a déclaré Guillaume Dumas, professeur de psychiatrie computationnelle à l'Université de Montréal. Comprendre quand et comment nos cerveaux se synchronisent pourrait nous aider à communiquer plus efficacement, à concevoir de meilleures salles de classe et à aider les équipes à coopérer.

Se synchroniser


Les humains, comme les autres animaux sociaux, ont tendance à synchroniser leurs comportements. Si vous marchez à côté de quelqu’un, vous commencerez probablement à marcher au pas. Si deux personnes s’assoient côte à côte dans des fauteuils à bascule, il y a de fortes chances qu’elles commencent à se balancer au même rythme.

Une telle synchronisation comportementale, selon les recherches, nous rend plus confiants, nous aide à créer des liens et stimule nos instincts sociaux. Dans une étude, danser de manière synchronisée permettait aux participants de se sentir émotionnellement proches les uns des autres – bien plus que pour les groupes qui se déplaçaient de manière asynchrone. Dans une autre étude, les participants qui scandaient des mots de manière rythmée étaient plus susceptibles de coopérer à un jeu d'investissement. Même une simple marche à l'unisson avec une personne issue d'une minorité ethnique peut réduire les préjugés.

" La coordination est une caractéristique de l’interaction sociale. C'est vraiment crucial " a déclaré Novembre. "Lorsque la coordination est altérée, l'interaction sociale est profondément altérée."

Lorsque nos mouvements se coordonnent, une myriade de synchronisations invisibles à l’œil nu se produisent également à l’intérieur de notre corps. Quand les gens tambourinent ensemble, leurs cœurs battent ensemble. Les fréquences cardiaques des thérapeutes et de leurs patients peuvent se synchroniser pendant les séances (surtout si la relation thérapeutique fonctionne bien), tout comme celles des couples mariés. D’autres processus physiologiques, tels que notre rythme respiratoire et nos niveaux de conductance cutanée, peuvent également correspondre à ceux d’autres personnes.

(Photo : Ce n’est qu’au cours des 20 dernières années qu’est apparue une technologie permettant aux neuroscientifiques d’étudier la synchronisation inter-cerveau. L'hyperscanning utilise la spectroscopie fonctionnelle proche infrarouge, portée sur un appareil semblable à un bonnet de bain, pour surveiller l'activité neuronale de plusieurs individus s'engageant socialement.)

L’activité de notre cerveau peut-elle se synchroniser ? En 1965, la revue Science a publié les résultats d’une expérience suggérant que c’était possible. Des scientifiques de l'Université Thomas Jefferson de Philadelphie ont testé des paires de jumeaux identiques en insérant des électrodes sous leur cuir chevelu pour mesurer leurs ondes cérébrales – une technique appelée électroencéphalographie. Les chercheurs ont rapporté que lorsque les jumeaux restaient dans des pièces séparées, si l’un d’eux fermait les yeux, les ondes cérébrales des deux reflétaient le même mouvement. Les pointes sur l'électroencéphalographe de l'un des jumeaux reflétaient celles de l'autre. L’étude était cependant erronée sur le plan méthodologique. Les chercheurs avaient testé plusieurs paires de jumeaux mais n'avaient publié les résultats que pour la paire dans laquelle ils avaient observé une synchronie. Voilà qui n’a pas aidé ce domaine universitaire en plein essor. Pendant des décennies, la recherche sur la synchronisation intercérébrale fut donc reléguée dans la catégorie des " étranges bizarreries paranormales " et n’a pas été prise au sérieux.

La réputation du domaine a commencé à changer au début des années 2000 avec la popularisation de l' hyperscanning, une technique qui permet aux scientifiques de scanner simultanément le cerveau de plusieurs personnes en interaction. Au début, cela impliquait de demander à des paires de volontaires de s'allonger dans des appareils d'IRMf séparés, ce qui limitait considérablement les types d'études que les scientifiques pouvaient réaliser. Les chercheurs ont finalement pu utiliser la spectroscopie fonctionnelle proche infrarouge (fNIRS), qui mesure l'activité des neurones dans les couches externes du cortex. Le grand avantage de cette technologie est sa facilité d'utilisation : les volontaires peuvent jouer de la batterie ou étudier dans une salle de classe tout en portant des bonnets fNIRS, qui ressemblent à des bonnets de bain avec une multitude de câbles qui dépassent.

Lorsque plusieurs personnes  interagissent tout en portant des casquettes fNIRS, les scientifiques ont commencé à découvrir une activité interneurale synchronisée dans des régions du cerveau, qui variaient selon la tâche et la configuration de l'étude. Ils ont également observé des ondes cérébrales, qui représentent des schémas électriques dans le déclenchement neuronal, se synchronisant sur plusieurs fréquences. Sur une lecture électroencéphalographique de deux cerveaux synchronisés, les lignes représentant l'activité neuronale de chaque personne fluctuent ensemble : chaque fois que l'une monte ou descend, l'autre fait de même, bien que parfois avec un décalage dans le temps. Parfois, des ondes cérébrales apparaissent dans des images en miroir – lorsque celles d’une personne montent, celles de l’autre descendent en même temps et avec une ampleur similaire – ce que certains chercheurs considèrent également comme une forme de synchronie.

Avec de nouveaux outils, il est devenu de plus en plus clair que la synchronisation inter-cerveau n’était ni un charabia métaphysique ni le produit de recherches erronées. "Le signal est définitivement là", a déclaré Antonia Hamilton , neuroscientifique sociale à l'University College de Londres. Ce qui s'est avéré plus difficile à comprendre, c'est comment deux cerveaux indépendants, dans deux corps distincts, pouvaient montrer une activité similaire dans l'espace. Maintenant, dit Hamilton, la grande question est : " Qu’est-ce que cela nous raconte ? "

La recette de la synchronisation

Novembre est fasciné depuis longtemps par la manière dont les humains se coordonnent pour atteindre des objectifs communs. Comment les musiciens – les pianistes en duo, par exemple – collaborent-ils si bien ? Pourtant, c'est en pensant aux animaux, comme les lucioles synchronisant leurs flashs, qu'il s'est mis sur la voie de l'étude des ingrédients nécessaires à l'apparition de la synchronisation inter-cerveau.

Étant donné que la synchronie est " si répandue parmi tant d’espèces différentes ", se souvient-il, " je me suis dit : OK, alors il pourrait y avoir un moyen très simple de l’expliquer. "

Novembre et ses collègues ont mis en place une expérience, publiée l'été dernier , dans laquelle des paires de volontaires ne faisaient que s'asseoir l'un en face de l'autre tandis qu'un équipement photographique suivait les mouvements de leurs yeux, de leur visage et de leur corps. Parfois, les volontaires pouvaient se voir ; à d'autres moments, ils étaient séparés par une cloison. Les chercheurs ont découvert que dès que les volontaires se regardaient dans les yeux, leurs ondes cérébrales se synchronisaient instantanément. Le sourire s’est avéré encore plus puissant pour aligner les ondes cérébrales.

" Il y a quelque chose de spontané dans la synchronisation", a déclaré Novembre.

Le mouvement est également lié à l’activité synchronisée des ondes cérébrales. Dans l'étude de Novembre, lorsque les gens bougeaient leur corps de manière synchronisée – si, par exemple, l'un levait la main et que l'autre faisait de même – leur activité neuronale correspondait, avec un léger décalage. Cependant, la synchronisation intercérébrale va au-delà de la simple reproduction des mouvements physiques. Dans une étude publiée l'automne dernier sur des pianistes jouant en duo, une rupture de la synchronisation comportementale n'a pas provoqué la désynchronisation des deux cerveaux.

Un autre ingrédient important de la synchronisation neuronale "face à face" semble être la prédiction mutuelle : anticiper les réponses et les comportements d'une autre personne. Chaque personne " bouge ses mains, son visage ou son corps, ou parle ", a expliqué Hamilton, " et réagit également aux actions de l'autre personne ". Par exemple, lorsque les gens jouaient au jeu de cartes italien Tressette, l'activité neuronale des partenaires se synchronisait, mais le cerveau de leurs adversaires ne s'alignait pas avec eux.

Le partage d’objectifs et l’attention commune semblent souvent cruciaux pour la synchronisation inter-cerveau. Dans une expérience menée en Chine, des groupes de trois personnes ont dû coopérer pour résoudre un problème. Se présenta un problème : l'un des membres de l'équipe était un chercheur qui faisait seulement semblant de s'engager dans la tâche, hochant la tête et commentant lorsque c'était approprié, mais ne se souciant pas vraiment du résultat. Son cerveau ne se synchronisait pas avec celui des véritables membres de l'équipe.

Cependant, certains critiques affirment que l’apparition d’une activité cérébrale synchronisée n’est pas la preuve d’une quelconque connexion, mais peut plutôt s’expliquer par la réaction des personnes à un environnement partagé. " Imaginez deux personnes écoutant la même station de radio dans deux pièces différentes ", a écrit Clay Holroyd, neuroscientifique cognitif à l'Université de Gand en Belgique qui n'étudie pas la synchronisation intercérébrale, dans un article de 2022 . "La synchronisation inter-cerveau pourrait augmenter pendant les chansons qu'ils apprécient  ensemble par rapport aux chansons qu'ils trouvent tous deux ennuyeuses, mais cela ne serait pas une conséquence d'un couplage direct de cerveau à cerveau."

Pour tester cette critique, des scientifiques de l'Université de Pittsburgh et de l'Université Temple ont conçu une expérience dans laquelle les participants travaillaient différemment sur une tâche ciblée : terminer un puzzle . Les volontaires ont soit assemblé un puzzle en collaboration, soit travaillé sur des puzzles identiques séparément, côte à côte. Même s’il existait une certaine synchronisation interneurale entre les chercheurs travaillant de manière indépendante, elle était bien plus importante chez ceux qui collaboraient.

Pour Novembre, ces découvertes et d’autres similaires suggèrent que la synchronisation intercérébrale est plus qu’un artefact environnemental. "Tant que vous mesurerez le cerveau lors d'une interaction sociale, vous devrez toujours faire face à ce problème", a-t-il déclaré. "Les cerveaux en interaction sociale seront exposés à des informations similaires."

(Photo : La Mutual Wave Machine, qui a fait le tour des villes du monde entier de 2013 à 2019, permet aux passants d'explorer la synchronisation intercérébrale par paires tout en générant des données pour la recherche en neurosciences.)

À moins qu’ils ne soient à des endroits différents, bien sûr. Pendant la pandémie, les chercheurs se sont intéressés à comprendre comment la synchronisation intercérébrale pourrait changer lorsque les gens parlent face à face par vidéo. Dans une étude, publiée fin 2022 , Dumas et ses collègues ont mesuré l'activité cérébrale des mères et de leurs préadolescents lorsqu'ils communiquaient par vidéo en ligne. Les cerveaux des couples étaient à peine synchronisés, bien moins que lorsqu'ils parlaient en vrai. Une telle mauvaise synchronisation inter-cerveau en ligne pourrait aider à expliquer pourquoi les réunions Zoom ont tendance à être si fatigantes, selon les auteurs de l'étude.

"Il manque beaucoup de choses dans un appel Zoom par rapport à une interaction en face à face", a déclaré Hamilton, qui n'a pas participé à la recherche. " Votre contact visuel est un peu différent parce que le positionnement de la caméra est incorrect. Plus important encore, votre attention commune est différente."

Identifier les ingrédients nécessaires à l'apparition de la synchronisation inter-cerveau – qu'il s'agisse d'un contact visuel, d'un sourire ou du partage d'un objectif – pourrait nous aider à mieux profiter des avantages de la synchronisation avec les autres. Lorsque nous sommes sur la même longueur d’onde, les choses deviennent tout simplement plus faciles.

Avantages émergents

La neuroscientifique cognitive Suzanne Dikker aime exprimer son côté créatif en utilisant l'art pour étudier le fonctionnement du cerveau humain. Pour capturer la notion insaisissable d’être sur la même longueur d’onde, elle et ses collègues ont créé la Mutual Wave Machine : mi-installation artistique, mi-expérience neurologique. Entre 2013 et 2019, les passants de diverses villes du monde – Madrid, New York, Toronto, Athènes, Moscou et autres – ont pu faire équipe avec une autre personne pour explorer la synchronisation interneurale. Ils sont assis dans deux structures en forme de coquille se faisant face tout en portant un casque électroencéphalographe pour mesurer leur activité cérébrale. Pendant qu’ils interagissent pendant 10 minutes, les coquilles s’éclairent avec des projections visuelles qui servaient de neurofeedback : plus les projections sont lumineuses, plus leurs ondes cérébrales sont couplées. Cependant, certaines paires n'étaient pas informées que la luminosité des projections reflétait leur niveau de synchronisation, tandis que d'autres voyaient de fausses projections.

Lorsque Dikker et ses collègues ont analysé les résultats, publiés en 2021, ils ont découvert que les couples qui savaient qu'ils voyaient du neurofeedback se synchronisaient davantage avec le temps – un effet motivé par leur motivation à rester concentrés sur leur partenaire, ont expliqué les chercheurs. Plus important encore, leur synchronisation accrue a augmenté le sentiment de connexion sociale entre les deux. Il est apparu qu’être sur la même longueur d’onde cérébrale pourrait aider à établir des relations.

Dikker a également étudié cette idée dans un cadre moins artistique : la salle de classe. Dans une salle de classe de fortune dans un laboratoire, un professeur de sciences du secondaire encadrait des groupes de quatre élèves maximum pendant que Dikker et ses collègues enregistraient leur activité cérébrale. Dans une étude publiée sur le serveur de prépublication biorxiv.org en 2019, les chercheurs ont rapporté que plus les cerveaux des étudiants et de l'enseignant étaient synchronisés, plus les étudiants retenaient le matériel lorsqu'ils étaient testés une semaine plus tard. Une analyse de 2022 portant sur 16 études a confirmé que la synchronisation intercérébrale est effectivement liée à un meilleur apprentissage.

" La personne qui prête le plus d'attention ou qui s'accroche le mieux au signal de l'orateur sera également la plus synchronisée avec d'autres personnes qui accordent également la plus grande attention à ce que dit l'orateur ", a déclaré Dikker.

Ce n'est pas seulement l'apprentissage qui semble stimulé lorsque nos cerveaux sont synchronisés, mais également les performances et la coopération de l'équipe. Dans une autre étude réalisée par Dikker et ses collègues, des groupes de quatre personnes ont réfléchi à des utilisations créatives d'une brique ou classé des éléments essentiels pour survivre à un accident d'avion. Les résultats ont montré que plus leurs ondes cérébrales étaient synchronisées, mieux ils effectuaient ces tâches en groupe. Entre-temps, d'autres études ont montré que les équipes neuronales synchronisées non seulement communiquent mieux, mais surpassent également les autres dans les activités créatives telles que l'interprétation de la poésie .

Alors que de nombreuses études ont établi un lien entre la synchronisation intercérébrale et un meilleur apprentissage et de meilleures performances, la question reste de savoir si la synchronisation entraîne réellement de telles améliorations. Serait-ce plutôt une mesure d’engagement ? "Les enfants qui prêtent attention à l'enseignant feront preuve d'une plus grande synchronisation avec cet enseignant parce qu'ils sont plus engagés", a déclaré Holroyd. "Mais cela ne signifie pas que les processus synchrones contribuent réellement d'une manière ou d'une autre à l'interaction et à l'apprentissage."

Pourtant, les expériences sur les animaux suggèrent que la synchronisation neuronale peut effectivement conduire à des changements de comportement. Lorsque l’activité neuronale des souris était mesurée en leur faisant porter de minuscules capteurs en forme de chapeau haut de forme, par exemple, la synchronisation inter-cerveau prédisait si et comment les animaux interagiraient dans le futur. "C'est une preuve assez solide qu'il existe une relation causale entre les deux", a déclaré Novembre.

Chez l’homme, les preuves les plus solides proviennent d’expériences utilisant la stimulation électrique du cerveau pour générer une synchronisation interneurale. Une fois les électrodes placées sur le cuir chevelu des personnes, des courants électriques peuvent passer entre les électrodes pour synchroniser l’activité neuronale du cerveau des personnes. En 2017, Novembre et son équipe ont réalisé la première de ces expériences. Les résultats suggèrent que la synchronisation des ondes cérébrales dans la bande bêta, liée aux fonctions motrices, améliore la capacité des participants à synchroniser les mouvements de leur corps – dans ce cas, en frappant un rythme avec leurs doigts.

Plusieurs études ont récemment reproduit les conclusions de Novembre. Fin 2023, des chercheurs ont découvert qu'une fois les ondes cérébrales synchronisées par stimulation électrique, leur capacité à coopérer dans un jeu informatique simple s'améliorait considérablement. Et l'été dernier d'autres scientifiques ont montré qu'une fois que deux cerveaux sont synchronisés, les gens parviennent mieux à transférer des informations et à se comprendre.

La science est nouvelle, donc le jury ne sait toujours pas s'il existe un véritable lien de causalité entre la synchronie et le comportement humain coopératif. Malgré cela, la science de la synchronisation neuronale nous montre déjà à quel point nous bénéficions lorsque nous faisons les choses en synchronisation avec les autres. Sur le plan biologique, nous sommes programmés pour nous connecter.


Auteur: Internet

Info: https://www.quantamagazine.org/ - Marta Zaraska, 28 mars 2024

[ intelligence collective ] [ manipulation du public ] [ collectives réverbérations ] [ implication ] [ rapports humains ] [ transe ] [ attention partagée ] [ murmurations ]

 

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aliénisme

La cause de la dépression n’est probablement pas celle que vous pensez

La dépression a souvent été imputée à de faibles niveaux de sérotonine dans le cerveau. Cette réponse est insuffisante, mais des alternatives apparaissent et modifient notre compréhension de la maladie.

Les gens pensent souvent savoir ce qui cause la dépression chronique. Des enquêtes indiquent que plus de 80 % de la population attribue la responsabilité à un " déséquilibre chimique " dans le cerveau. Cette idée est répandue dans la psychologie populaire et citée dans des documents de recherche et des manuels de médecine. L'écoute de Prozac, un livre qui décrit la valeur révolutionnaire du traitement de la dépression avec des médicaments visant à corriger ce déséquilibre, a passé des mois sur la liste des best-sellers du New York Times.

La substance chimique cérébrale déséquilibrée en question est la sérotonine, un neurotransmetteur important aux effets légendaires de " bien-être ". La sérotonine aide à réguler les systèmes cérébraux qui contrôlent tout, de la température corporelle au sommeil, en passant par la libido et la faim. Depuis des décennies, il est également présenté comme le produit pharmaceutique le plus efficace dans la lutte contre la dépression. Les médicaments largement prescrits comme le Prozac (fluoxétine) sont conçus pour traiter la dépression chronique en augmentant les niveaux de sérotonine.

Pourtant, les causes de la dépression vont bien au-delà de la carence en sérotonine. Les études cliniques ont conclu à plusieurs reprises que le rôle de la sérotonine dans la dépression avait été surestimé. En effet, l’ensemble de la théorie du déséquilibre chimique pourrait être erroné, malgré le soulagement que le Prozac semble apporter à de nombreux patients.

Une revue de la littérature parue dans Molecular Psychiatry en juillet a sonné le glas le plus récent et peut-être le plus fort de l’hypothèse de la sérotonine, du moins dans sa forme la plus simple. Une équipe internationale de scientifiques dirigée par Joanna Moncrieff de l'University College London a examiné 361 articles dans six domaines de recherche et en a soigneusement évalué 17. Ils n’ont trouvé aucune preuve convaincante que des niveaux plus faibles de sérotonine provoquaient ou étaient même associés à la dépression. Les personnes souffrant de dépression ne semblaient pas avoir une activité sérotoninergique inférieure à celle des personnes non atteintes. Les expériences dans lesquelles les chercheurs abaissaient artificiellement les niveaux de sérotonine des volontaires n’entraînaient pas systématiquement une dépression. Les études génétiques semblaient également exclure tout lien entre les gènes affectant les niveaux de sérotonine et la dépression, même lorsque les chercheurs essayaient de considérer le stress comme un cofacteur possible.

" Si vous pensez toujours qu'il s'agissait simplement d'un déséquilibre chimique de la sérotonine, alors oui, c'est assez accablant", a déclaré Taylor Braund , neuroscientifique clinicien et chercheur postdoctoral au Black Dog Institute en Australie, qui n'a pas participé à l'étude. nouvelle étude. (" Le chien noir " était le terme utilisé par Winston Churchill pour désigner ses propres humeurs sombres, que certains historiens pensent être une dépression.)

La prise de conscience que les déficits de sérotonine en eux-mêmes ne provoquent probablement pas la dépression a amené les scientifiques à se demander ce qui pouvait en être la cause. Les faits suggèrent qu’il n’y a peut-être pas de réponse simple. En fait, cela amène les chercheurs en neuropsychiatrie à repenser ce que pourrait être la dépression.

Traiter la mauvaise maladie

L’intérêt porté à la sérotonine dans la dépression a commencé avec un médicament contre la tuberculose. Dans les années 1950, les médecins ont commencé à prescrire de l’iproniazide, un composé développé pour cibler la bactérie Mycobacterium tuberculosis vivant dans les poumons. Le médicament n’était pas particulièrement efficace pour traiter les infections tuberculeuses, mais il a béni certains patients avec un effet secondaire inattendu et agréable. "Leur fonction pulmonaire et tout le reste ne s'améliorait pas beaucoup, mais leur humeur avait tendance à s'améliorer", a déclaré Gerard Sanacora, psychiatre clinicien et directeur du programme de recherche sur la dépression à l'Université de Yale.

(Photo : Pour évaluer les preuves selon lesquelles les déséquilibres en sérotonine provoquent la dépression, la chercheuse en psychiatrie Joanna Moncrieff de l'University College London a organisé une récapitulation qui a examiné des centaines d'articles dans six domaines de recherche.) 

Perplexes face à ce résultat, les chercheurs ont commencé à étudier le fonctionnement de l'iproniazide et des médicaments apparentés dans le cerveau des rats et des lapins. Ils ont découvert que les médicaments empêchaient le corps des animaux d'absorber des composés appelés amines, parmi lesquels se trouve la sérotonine, un produit chimique qui transmet les messages entre les cellules nerveuses du cerveau.

Plusieurs psychologues éminents, parmi lesquels les regrettés cliniciens Alec Coppen et Joseph Schildkraut, se sont emparés de l'idée que la dépression pourrait être causée par un déficit chronique de sérotonine dans le cerveau. L’hypothèse de la dépression liée à la sérotonine a ensuite inspiré des décennies de développement de médicaments et de recherche neuroscientifique. À la fin des années 1980, cela a conduit à l’introduction de médicaments inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine (ISRS), comme le Prozac. (Ces médicaments augmentent les niveaux d'activité de la sérotonine en ralentissant l'absorption du neurotransmetteur par les neurones.)  Aujourd'hui, l'hypothèse de la sérotonine reste l'explication la plus souvent donnée aux patients souffrant de dépression lorsqu'on leur prescrit des ISRS.

Mais des doutes sur le modèle sérotoninergique circulaient au milieu des années 1990. Certains chercheurs ont remarqué que les ISRS ne répondaient souvent pas aux attentes et n’amélioraient pas de manière significative les performances de médicaments plus anciens comme le lithium. " Les études ne concordaient pas vraiment ", a déclaré Moncrieff.

Au début des années 2000, peu d’experts pensaient que la dépression était causée uniquement par un manque de sérotonine, mais personne n’a jamais tenté une évaluation complète de ces preuves. Cela a finalement incité Moncrieff à organiser une telle étude, " afin que nous puissions avoir une idée si cette théorie était étayée ou non ", a-t-elle déclaré.

Elle et ses collègues ont découvert que ce n’était pas le cas, mais l’hypothèse de la sérotonine a toujours des adeptes. En octobre dernier – quelques mois seulement après la parution de leur étude – un article publié en ligne dans Biological Psychiatry prétendait offrir une validation concrète de la théorie de la sérotonine. D'autres chercheurs restent cependant sceptiques, car l'étude n'a porté que sur 17 volontaires. Moncrieff a rejeté les résultats comme étant statistiquement insignifiants.

Un déséquilibre chimique différent

Bien que les niveaux de sérotonine ne semblent pas être le principal facteur de dépression, les ISRS montrent une légère amélioration par rapport aux placebos dans les essais cliniques. Mais le mécanisme à l’origine de cette amélioration reste insaisissable. "Ce n'est pas parce que l'aspirine soulage les maux de tête que les déficits en aspirine dans le corps provoquent des maux de tête", a déclaré John Krystal , neuropharmacologue et directeur du département de psychiatrie de l'Université de Yale. " Comprendre pleinement comment les ISRS produisent des changements cliniques est encore un travail en cours. "

Les spéculations sur la source de ce bénéfice ont donné naissance à des théories alternatives sur les origines de la dépression.

Malgré le terme " sélectif " dans leur nom, certains ISRS modifient les concentrations relatives de produits chimiques autres que la sérotonine. Certains psychiatres cliniciens pensent que l’un des autres composés pourrait être la véritable force induisant ou soulageant la dépression. Par exemple, les ISRS augmentent les niveaux circulants de tryptophane, un acide aminé, un précurseur de la sérotonine qui aide à réguler les cycles de sommeil. Au cours des 15 dernières années, ce produit chimique est devenu un candidat sérieux pour prévenir la dépression. "Les études sur la déplétion en tryptophane fournissent des preuves assez solides", a déclaré Michael Browning , psychiatre clinicien à l'Université d'Oxford.

Un certain nombre d' études sur l'épuisement du tryptophane ont révélé qu'environ les deux tiers des personnes récemment remises d'un épisode dépressif rechuteront lorsqu'elles suivront un régime artificiellement pauvre en tryptophane. Les personnes ayant des antécédents familiaux de dépression semblent également vulnérables à une carence en tryptophane. Et le tryptophane a pour effet secondaire d’augmenter les niveaux de sérotonine dans le cerveau.

Des preuves récentes suggèrent également que le tryptophane et la sérotonine pourraient contribuer à la régulation des bactéries et autres microbes se développant dans l’intestin, et que les signaux chimiques émis par ce microbiote pourraient affecter l’humeur. Bien que les mécanismes exacts liant le cerveau et l’intestin soient encore mal compris, ce lien semble influencer le développement du cerveau. Cependant, comme la plupart des études sur la déplétion en tryptophane ont jusqu’à présent été limitées, la question est loin d’être réglée.

D'autres neurotransmetteurs comme le glutamate, qui joue un rôle essentiel dans la formation de la mémoire, et le GABA, qui empêche les cellules de s'envoyer des messages, pourraient également être impliqués dans la dépression, selon Browning. Il est possible que les ISRS agissent en modifiant les quantités de ces composés dans le cerveau.

Moncrieff considère la recherche d'autres déséquilibres chimiques à l'origine de la dépression comme une tentative de changement de marque plutôt que comme une véritable nouvelle ligne de recherche. " Je dirais qu’ils souscrivent toujours à quelque chose comme l’hypothèse de la sérotonine ", a-t-elle déclaré – l’idée selon laquelle les antidépresseurs agissent en inversant certaines anomalies chimiques dans le cerveau. Elle pense plutôt que la sérotonine a des effets si répandus dans le cerveau que nous pourrions avoir du mal à dissocier son effet antidépresseur direct des autres changements dans nos émotions ou sensations qui remplacent temporairement les sentiments d’anxiété et de désespoir.

Réponses génétiques

Toutes les théories sur la dépression ne reposent pas sur des déficits en neurotransmetteurs. Certains recherchent des coupables au niveau génétique.

Lorsque la première ébauche de séquence à peu près complète du génome humain a été annoncée en 2003, elle a été largement saluée comme le fondement d’une nouvelle ère en médecine. Au cours des deux décennies qui ont suivi, les chercheurs ont identifié des gènes à l’origine d’un large éventail de troubles, dont environ 200 gènes associés à un risque de dépression. (Plusieurs centaines de gènes supplémentaires ont été identifiés comme pouvant augmenter le risque.)

"Il est vraiment important que les gens comprennent qu'il existe une génétique à la dépression", a déclaré Krystal. "Jusqu'à très récemment, seuls les facteurs psychologiques et environnementaux étaient pris en compte."

Notre connaissance de la génétique est cependant incomplète. Krystal a noté que des études sur des jumeaux suggèrent que la génétique pourrait expliquer 40 % du risque de dépression. Pourtant, les gènes actuellement identifiés ne semblent expliquer qu’environ 5 %.

De plus, le simple fait d’avoir les gènes de la dépression ne garantit pas nécessairement qu’une personne deviendra déprimée. Les gènes doivent également être activés d’une manière ou d’une autre, par des conditions internes ou externes.

"Il existe parfois une fausse distinction entre les facteurs environnementaux et les facteurs génétiques", a déclaré Srijan Sen, neuroscientifique à l'Université du Michigan. "Pour les caractères d'intérêt les plus courants, les facteurs génétiques et environnementaux jouent un rôle essentiel."

Le laboratoire de Sen étudie les bases génétiques de la dépression en cartographiant le génome des sujets et en observant attentivement comment les individus présentant des profils génétiques différents réagissent aux changements dans leur environnement. (Récemment, ils se sont penchés sur le stress provoqué par la pandémie de Covid-19.) Différentes variations génétiques peuvent affecter la réaction des individus à certains types de stress, tels que le manque de sommeil, la violence physique ou émotionnelle et le manque de contact social, en devenant déprimé.

Les influences environnementales comme le stress peuvent aussi parfois donner lieu à des changements " épigénétiques " dans un génome qui affectent l’expression ultérieure des gènes. Par exemple, le laboratoire de Sen étudie les changements épigénétiques dans les capuchons situés aux extrémités des chromosomes, appelés télomères, qui affectent la division cellulaire. D'autres laboratoires examinent les modifications des étiquettes chimiques appelées groupes de méthylation qui peuvent activer ou désactiver les gènes. Les changements épigénétiques peuvent parfois même se transmettre de génération en génération. "Les effets de l'environnement sont tout aussi biologiques que les effets des gènes", a déclaré Sen. " Seule la source est différente. "

Les études de ces gènes pourraient un jour aider à identifier la forme de traitement à laquelle un patient répondrait le mieux. Certains gènes peuvent prédisposer un individu à de meilleurs résultats avec une thérapie cognitivo-comportementale, tandis que d'autres patients pourraient mieux s'en sortir avec un ISRS ou de la kétamine thérapeutique. Cependant, il est beaucoup trop tôt pour dire quels gènes répondent à quel traitement, a déclaré Sen.

Un produit du câblage neuronal

Les différences dans les gènes d’une personne peuvent la prédisposer à la dépression ; il en va de même pour les différences dans le câblage neuronal et la structure de leur cerveau. De nombreuses études ont montré que les individus diffèrent dans la manière dont les neurones de leur cerveau s’interconnectent pour former des voies fonctionnelles, et que ces voies influencent la santé mentale.

Lors d'une récente conférence, une équipe dirigée par Jonathan Repple, chercheur en psychiatrie à l'Université Goethe de Francfort, en Allemagne, a décrit comment elle a scanné le cerveau de volontaires gravement déprimés et a découvert qu'ils différaient structurellement de ceux d'un groupe témoin non déprimé. Par exemple, les personnes souffrant de dépression présentaient moins de connexions au sein de la " substance blanche " des fibres nerveuses de leur cerveau. (Cependant, il n'y a pas de seuil de matière blanche pour une mauvaise santé mentale : Repple note que vous ne pouvez pas diagnostiquer la dépression en scannant le cerveau de quelqu'un.)

Après que le groupe déprimé ait subi six semaines de traitement, l'équipe de Repple a effectué une autre série d'échographies cérébrales. Cette fois, ils ont constaté que le niveau général de connectivité neuronale dans le cerveau des patients déprimés avait augmenté à mesure que leurs symptômes diminuaient. Pour obtenir cette augmentation, le type de traitement que les patients recevaient ne semblait pas avoir d'importance, du moment que leur humeur s'améliorait.

Une explication possible de ce changement est le phénomène de neuroplasticité. "La neuroplasticité signifie que le cerveau est réellement capable de créer de nouvelles connexions, de modifier son câblage", a déclaré Repple. Si la dépression survient lorsqu'un cerveau a trop peu d'interconnexions ou en perd certaines, alors exploiter les effets neuroplastiques pour augmenter l'interconnexion pourrait aider à améliorer l'humeur d'une personne.

Inflammation chronique

Repple prévient cependant qu'une autre explication des effets observés par son équipe est également possible : peut-être que les connexions cérébrales des patients déprimés ont été altérées par l'inflammation. L'inflammation chronique entrave la capacité du corps à guérir et, dans le tissu neuronal, elle peut progressivement dégrader les connexions synaptiques. On pense que la perte de ces connexions contribue aux troubles de l’humeur.

De bonnes preuves soutiennent cette théorie. Lorsque les psychiatres ont évalué des populations de patients souffrant de maladies inflammatoires chroniques comme le lupus et la polyarthrite rhumatoïde, ils ont constaté que " tous présentaient des taux de dépression supérieurs à la moyenne ", a déclaré Charles Nemeroff, neuropsychiatre à l'Université du Texas Austin. Bien sûr, savoir qu'ils souffrent d'une maladie dégénérative incurable peut contribuer aux sentiments de dépression du patient, mais les chercheurs soupçonnent que l'inflammation elle-même est également un facteur.

Des chercheurs médicaux ont découvert que provoquer une inflammation chez certains patients peut déclencher une dépression. L'interféron alpha, qui est parfois utilisé pour traiter l'hépatite C chronique et d'autres affections, provoque une réponse inflammatoire majeure dans tout le corps en inondant le système immunitaire de protéines appelées cytokines, des molécules qui facilitent les réactions allant d'un léger gonflement au choc septique. L’afflux soudain de cytokines inflammatoires entraîne une perte d’appétit, de la fatigue et un ralentissement de l’activité mentale et physique – autant de symptômes d’une dépression majeure. Les patients prenant de l’interféron déclarent souvent se sentir soudainement, parfois sévèrement, déprimés.

Si une inflammation chronique négligée est à l’origine de la dépression chez de nombreuses personnes, les chercheurs doivent encore déterminer la source de cette inflammation. Les maladies auto-immunes, les infections bactériennes, le stress élevé et certains virus, dont celui qui cause le Covid-19, peuvent tous induire des réponses inflammatoires persistantes. L’inflammation virale peut s’étendre directement aux tissus du cerveau. La mise au point d’un traitement anti-inflammatoire efficace contre la dépression peut dépendre de la connaissance de laquelle de ces causes est à l’œuvre.

On ne sait pas non plus si le simple traitement de l’inflammation pourrait suffire à soulager la dépression. Les cliniciens tentent encore de déterminer si la dépression provoque une inflammation ou si l’inflammation conduit à la dépression. "C'est une sorte de phénomène de poule et d'œuf", a déclaré Nemeroff.

La théorie du parapluie

De plus en plus, certains scientifiques s’efforcent de recadrer le terme " dépression " pour en faire un terme générique désignant un ensemble de pathologies connexes, tout comme les oncologues considèrent désormais le " cancer " comme faisant référence à une légion de tumeurs malignes distinctes mais similaires. Et tout comme chaque cancer doit être prévenu ou traité de manière adaptée à son origine, les traitements de la dépression peuvent devoir être adaptés à chaque individu. 

S’il existe différents types de dépression, ils peuvent présenter des symptômes similaires – comme la fatigue, l’apathie, les changements d’appétit, les pensées suicidaires et l’insomnie ou un sommeil excessif – mais ils peuvent résulter de mélanges complètement différents de facteurs environnementaux et biologiques. Les déséquilibres chimiques, les gènes, la structure cérébrale et l’inflammation pourraient tous jouer un rôle à des degrés divers. "Dans cinq ou dix ans, nous ne parlerons plus de la dépression comme d'un phénomène unitaire", a déclaré Sen.

Pour traiter efficacement la dépression, les chercheurs en médecine devront peut-être développer une compréhension nuancée de la manière dont elle peut survenir. Nemeroff s'attend à ce qu'un jour, la référence en matière de soins ne soit pas seulement un traitement, mais un ensemble d'outils de diagnostic capables de déterminer la meilleure approche thérapeutique pour la dépression d'un patient individuel, qu'il s'agisse d'une thérapie cognitivo-comportementale, de changements de style de vie, de neuromodulation, d'évitement. déclencheurs génétiques, thérapie par la parole, médicaments ou une combinaison de ceux-ci.

Cette prédiction pourrait frustrer certains médecins et développeurs de médicaments, car il est beaucoup plus facile de prescrire une solution universelle. Mais " apprécier la véritable complexité de la dépression nous amène sur un chemin qui, en fin de compte, aura le plus d’impact ", a déclaré Krystal. Dans le passé, dit-il, les psychiatres cliniciens étaient comme des explorateurs qui atterrissaient sur une petite île inconnue, installaient leur campement et s’installaient confortablement. "Et puis nous avons découvert qu'il y avait tout un continent énorme."



 

Auteur: Internet

Info: https://www.quantamagazine.org/ - Joanna Thompson, 26 janvier 2023

[ corps-esprit ] [ thérapie holistique idiosyncrasique ]

 

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interrogation

Pourquoi cet univers ? Un nouveau calcul suggère que notre cosmos est typique.

Deux physiciens ont calculé que l’univers a une entropie plus élevée – et donc plus probable – que d’autres univers possibles. Le calcul est " une réponse à une question qui n’a pas encore été pleinement comprise ".

(image : Les propriétés de notre univers – lisse, plat, juste une pincée d’énergie noire – sont ce à quoi nous devrions nous attendre, selon un nouveau calcul.)

Les cosmologues ont passé des décennies à chercher à comprendre pourquoi notre univers est si étonnamment vanille. Non seulement il est lisse et plat à perte de vue, mais il s'étend également à un rythme toujours plus lent, alors que des calculs naïfs suggèrent que – à la sortie du Big Bang – l'espace aurait dû se froisser sous l'effet de la gravité et détruit par une énergie noire répulsive.

Pour expliquer la planéité du cosmos, les physiciens ont ajouté un premier chapitre dramatique à l'histoire cosmique : ils proposent que l'espace se soit rapidement gonflé comme un ballon au début du Big Bang, aplanissant toute courbure. Et pour expliquer la légère croissance de l’espace après cette première période d’inflation, certains ont avancé que notre univers n’est qu’un parmi tant d’autres univers moins hospitaliers dans un multivers géant.

Mais maintenant, deux physiciens ont bouleversé la pensée conventionnelle sur notre univers vanille. Suivant une ligne de recherche lancée par Stephen Hawking et Gary Gibbons en 1977, le duo a publié un nouveau calcul suggérant que la clarté du cosmos est attendue plutôt que rare. Notre univers est tel qu'il est, selon Neil Turok de l'Université d'Édimbourg et Latham Boyle de l'Institut Perimeter de physique théorique de Waterloo, au Canada, pour la même raison que l'air se propage uniformément dans une pièce : des options plus étranges sont concevables, mais extrêmement improbable.

L'univers " peut sembler extrêmement précis, extrêmement improbable, mais eux  disent : 'Attendez une minute, c'est l'univers préféré' ", a déclaré Thomas Hertog , cosmologue à l'Université catholique de Louvain en Belgique.

"Il s'agit d'une contribution nouvelle qui utilise des méthodes différentes de celles utilisées par la plupart des gens", a déclaré Steffen Gielen , cosmologue à l'Université de Sheffield au Royaume-Uni.

La conclusion provocatrice repose sur une astuce mathématique consistant à passer à une horloge qui tourne avec des nombres imaginaires. En utilisant l'horloge imaginaire, comme Hawking l'a fait dans les années 70, Turok et Boyle ont pu calculer une quantité, connue sous le nom d'entropie, qui semble correspondre à notre univers. Mais l’astuce du temps imaginaire est une manière détournée de calculer l’entropie, et sans une méthode plus rigoureuse, la signification de la quantité reste vivement débattue. Alors que les physiciens s’interrogent sur l’interprétation correcte du calcul de l’entropie, beaucoup le considèrent comme un nouveau guide sur la voie de la nature quantique fondamentale de l’espace et du temps.

"D'une manière ou d'une autre", a déclaré Gielen, "cela nous donne peut-être une fenêtre sur la microstructure de l'espace-temps."

Chemins imaginaires

Turok et Boyle, collaborateurs fréquents, sont réputés pour avoir conçu des idées créatives et peu orthodoxes sur la cosmologie. L’année dernière, pour étudier la probabilité que notre Univers soit probable, ils se sont tournés vers une technique développée dans les années 1940 par le physicien Richard Feynman.

Dans le but de capturer le comportement probabiliste des particules, Feynman a imaginé qu'une particule explore toutes les routes possibles reliant le début à la fin : une ligne droite, une courbe, une boucle, à l'infini. Il a imaginé un moyen d'attribuer à chaque chemin un nombre lié à sa probabilité et d'additionner tous les nombres. Cette technique de " l’intégrale du chemin " est devenue un cadre puissant pour prédire le comportement probable d’un système quantique.

Dès que Feynman a commencé à faire connaître l’intégrale du chemin, les physiciens ont repéré un curieux lien avec la thermodynamique, la vénérable science de la température et de l’énergie. C'est ce pont entre la théorie quantique et la thermodynamique qui a permis les calculs de Turok et Boyle.

La thermodynamique exploite la puissance des statistiques afin que vous puissiez utiliser seulement quelques chiffres pour décrire un système composé de plusieurs éléments, comme les milliards de molécules d'air qui s'agitent dans une pièce. La température, par exemple – essentiellement la vitesse moyenne des molécules d’air – donne une idée approximative de l’énergie de la pièce. Les propriétés globales telles que la température et la pression décrivent un "  macrostate " de la pièce.

Mais ce terme de un macro-état est un compte rendu rudimentaire ; les molécules d’air peuvent être disposées d’un très grand nombre de manières qui correspondent toutes au même macroétat. Déplacez un peu un atome d’oxygène vers la gauche et la température ne bougera pas. Chaque configuration microscopique unique est appelée microétat, et le nombre de microétats correspondant à un macroétat donné détermine son entropie.

L'entropie donne aux physiciens un moyen précis de comparer les probabilités de différents résultats : plus l'entropie d'un macroétat est élevée, plus il est probable. Il existe bien plus de façons pour les molécules d'air de s'organiser dans toute la pièce que si elles étaient regroupées dans un coin, par exemple. En conséquence, on s’attend à ce que les molécules d’air se propagent (et restent dispersées). La vérité évidente selon laquelle les résultats probables sont probables, exprimée dans le langage de la physique, devient la célèbre deuxième loi de la thermodynamique : selon laquelle l’entropie totale d’un système a tendance à croître.

La ressemblance avec l'intégrale du chemin était indubitable : en thermodynamique, on additionne toutes les configurations possibles d'un système. Et avec l’intégrale du chemin, vous additionnez tous les chemins possibles qu’un système peut emprunter. Il y a juste une distinction assez flagrante : la thermodynamique traite des probabilités, qui sont des nombres positifs qui s'additionnent simplement. Mais dans l'intégrale du chemin, le nombre attribué à chaque chemin est complexe, ce qui signifie qu'il implique le nombre imaginaire i , la racine carrée de −1. Les nombres complexes peuvent croître ou diminuer lorsqu’ils sont additionnés, ce qui leur permet de capturer la nature ondulatoire des particules quantiques, qui peuvent se combiner ou s’annuler.

Pourtant, les physiciens ont découvert qu’une simple transformation peut vous faire passer d’un domaine à un autre. Rendez le temps imaginaire (un mouvement connu sous le nom de rotation de Wick d'après le physicien italien Gian Carlo Wick), et un second i entre dans l'intégrale du chemin qui étouffe le premier, transformant les nombres imaginaires en probabilités réelles. Remplacez la variable temps par l'inverse de la température et vous obtenez une équation thermodynamique bien connue.

Cette astuce de Wick a conduit Hawking et Gibbons à une découverte à succès en 1977, à la fin d'une série éclair de découvertes théoriques sur l'espace et le temps.

L'entropie de l'espace-temps

Des décennies plus tôt, la théorie de la relativité générale d’Einstein avait révélé que l’espace et le temps formaient ensemble un tissu unifié de réalité – l’espace-temps – et que la force de gravité était en réalité la tendance des objets à suivre les plis de l’espace-temps. Dans des circonstances extrêmes, l’espace-temps peut se courber suffisamment fortement pour créer un Alcatraz incontournable connu sous le nom de trou noir.

En 1973, Jacob Bekenstein a avancé l’hérésie selon laquelle les trous noirs seraient des prisons cosmiques imparfaites. Il a estimé que les abysses devraient absorber l'entropie de leurs repas, plutôt que de supprimer cette entropie de l'univers et de violer la deuxième loi de la thermodynamique. Mais si les trous noirs ont de l’entropie, ils doivent aussi avoir des températures et rayonner de la chaleur.

Stephen Hawking, sceptique, a tenté de prouver que Bekenstein avait tort, en se lançant dans un calcul complexe du comportement des particules quantiques dans l'espace-temps incurvé d'un trou noir. À sa grande surprise, il découvrit en 1974 que les trous noirs rayonnaient effectivement. Un autre calcul a confirmé l'hypothèse de Bekenstein : un trou noir a une entropie égale au quart de la surface de son horizon des événements – le point de non-retour pour un objet tombant.

Dans les années qui suivirent, les physiciens britanniques Gibbons et Malcolm Perry, puis plus tard Gibbons et Hawking, arrivèrent au même résultat dans une autre direction . Ils ont établi une intégrale de chemin, additionnant en principe toutes les différentes manières dont l'espace-temps pourrait se plier pour former un trou noir. Ensuite, ils ont fait tourner le trou noir, marquant l'écoulement du temps avec des nombres imaginaires, et ont scruté sa forme. Ils ont découvert que, dans la direction du temps imaginaire, le trou noir revenait périodiquement à son état initial. Cette répétition semblable au jour de la marmotte dans un temps imaginaire a donné au trou noir une sorte de stase qui leur a permis de calculer sa température et son entropie.

Ils n’auraient peut-être pas fait confiance aux résultats si les réponses n’avaient pas correspondu exactement à celles calculées précédemment par Bekenstein et Hawking. À la fin de la décennie, leur travail collectif avait donné naissance à une idée surprenante : l’entropie des trous noirs impliquait que l’espace-temps lui-même était constitué de minuscules morceaux réorganisables, tout comme l’air est constitué de molécules. Et miraculeusement, même sans savoir ce qu’étaient ces " atomes gravitationnels ", les physiciens ont pu compter leurs arrangements en regardant un trou noir dans un temps imaginaire.

"C'est ce résultat qui a laissé une très profonde impression sur Hawking", a déclaré Hertog, ancien étudiant diplômé et collaborateur de longue date de Hawking. Hawking s'est immédiatement demandé si la rotation de Wick fonctionnerait pour autre chose que les trous noirs. "Si cette géométrie capture une propriété quantique d'un trou noir", a déclaré Hertog, "alors il est irrésistible de faire la même chose avec les propriétés cosmologiques de l'univers entier."

Compter tous les univers possibles

Immédiatement, Hawking et Gibbons Wick ont ​​fait tourner l’un des univers les plus simples imaginables – un univers ne contenant rien d’autre que l’énergie sombre construite dans l’espace lui-même. Cet univers vide et en expansion, appelé espace-temps " de Sitter ", a un horizon au-delà duquel l’espace s’étend si rapidement qu’aucun signal provenant de cet espace ne parviendra jamais à un observateur situé au centre de l’espace. En 1977, Gibbons et Hawking ont calculé que, comme un trou noir, un univers de De Sitter possède également une entropie égale au quart de la surface de son horizon. Encore une fois, l’espace-temps semblait comporter un nombre incalculable de micro-états.

Mais l’entropie de l’univers réel restait une question ouverte. Notre univers n'est pas vide ; il regorge de lumière rayonnante et de flux de galaxies et de matière noire. La lumière a provoqué une expansion rapide de l'espace pendant la jeunesse de l'univers, puis l'attraction gravitationnelle de la matière a ralenti les choses pendant l'adolescence cosmique. Aujourd’hui, l’énergie sombre semble avoir pris le dessus, entraînant une expansion galopante. "Cette histoire d'expansion est une aventure semée d'embûches", a déclaré Hertog. "Il n'est pas si facile d'obtenir une solution explicite."

Au cours de la dernière année, Boyle et Turok ont ​​élaboré une solution aussi explicite. Tout d'abord, en janvier, alors qu'ils jouaient avec des cosmologies jouets, ils ont remarqué que l'ajout de radiations à l'espace-temps de De Sitter ne gâchait pas la simplicité requise pour faire tourner l'univers par Wick.

Puis, au cours de l’été, ils ont découvert que la technique résisterait même à l’inclusion désordonnée de matière. La courbe mathématique décrivant l’histoire plus complexe de l’expansion relevait toujours d’un groupe particulier de fonctions faciles à manipuler, et le monde de la thermodynamique restait accessible. "Cette rotation de Wick est une affaire trouble lorsque l'on s'éloigne d'un espace-temps très symétrique", a déclaré Guilherme Leite Pimentel , cosmologiste à la Scuola Normale Superiore de Pise, en Italie. "Mais ils ont réussi à le trouver."

En faisant tourner Wick l’histoire de l’expansion en montagnes russes d’une classe d’univers plus réaliste, ils ont obtenu une équation plus polyvalente pour l’entropie cosmique. Pour une large gamme de macroétats cosmiques définis par le rayonnement, la matière, la courbure et une densité d'énergie sombre (tout comme une plage de températures et de pressions définit différents environnements possibles d'une pièce), la formule crache le nombre de microétats correspondants. Turok et Boyle ont publié leurs résultats en ligne début octobre.

Les experts ont salué le résultat explicite et quantitatif. Mais à partir de leur équation d’entropie, Boyle et Turok ont ​​tiré une conclusion non conventionnelle sur la nature de notre univers. "C'est là que cela devient un peu plus intéressant et un peu plus controversé", a déclaré Hertog.

Boyle et Turok pensent que l'équation effectue un recensement de toutes les histoires cosmiques imaginables. Tout comme l'entropie d'une pièce compte toutes les façons d'arranger les molécules d'air pour une température donnée, ils soupçonnent que leur entropie compte toutes les façons dont on peut mélanger les atomes de l'espace-temps et se retrouver avec un univers avec une histoire globale donnée. courbure et densité d’énergie sombre.

Boyle compare le processus à l'examen d'un gigantesque sac de billes, chacune représentant un univers différent. Ceux qui ont une courbure négative pourraient être verts. Ceux qui ont des tonnes d'énergie sombre pourraient être des yeux de chat, et ainsi de suite. Leur recensement révèle que l’écrasante majorité des billes n’ont qu’une seule couleur – le bleu, par exemple – correspondant à un type d’univers : un univers globalement semblable au nôtre, sans courbure appréciable et juste une touche d’énergie sombre. Les types de cosmos les plus étranges sont extrêmement rares. En d’autres termes, les caractéristiques étrangement vanille de notre univers qui ont motivé des décennies de théorie sur l’inflation cosmique et le multivers ne sont peut-être pas étranges du tout.

"C'est un résultat très intrigant", a déclaré Hertog. Mais " cela soulève plus de questions que de réponses ".

Compter la confusion

Boyle et Turok ont ​​calculé une équation qui compte les univers. Et ils ont fait l’observation frappante que des univers comme le nôtre semblent représenter la part du lion des options cosmiques imaginables. Mais c’est là que s’arrête la certitude.

Le duo ne tente pas d’expliquer quelle théorie quantique de la gravité et de la cosmologie pourrait rendre certains univers communs ou rares. Ils n’expliquent pas non plus comment notre univers, avec sa configuration particulière de parties microscopiques, est né. En fin de compte, ils considèrent leurs calculs comme un indice permettant de déterminer quels types d’univers sont préférés plutôt que comme quelque chose qui se rapproche d’une théorie complète de la cosmologie. "Ce que nous avons utilisé est une astuce bon marché pour obtenir la réponse sans connaître la théorie", a déclaré Turok.

Leurs travaux revitalisent également une question restée sans réponse depuis que Gibbons et Hawking ont lancé pour la première fois toute l’histoire de l’entropie spatio-temporelle : quels sont exactement les micro-états que compte l’astuce bon marché ?

"L'essentiel ici est de dire que nous ne savons pas ce que signifie cette entropie", a déclaré Henry Maxfield , physicien à l'Université de Stanford qui étudie les théories quantiques de la gravité.

En son cœur, l’entropie résume l’ignorance. Pour un gaz constitué de molécules, par exemple, les physiciens connaissent la température – la vitesse moyenne des particules – mais pas ce que fait chaque particule ; l'entropie du gaz reflète le nombre d'options.

Après des décennies de travaux théoriques, les physiciens convergent vers une vision similaire pour les trous noirs. De nombreux théoriciens pensent aujourd'hui que la zone de l'horizon décrit leur ignorance de ce qui s'y trouve, de toutes les façons dont les éléments constitutifs du trou noir sont disposés de manière interne pour correspondre à son apparence extérieure. (Les chercheurs ne savent toujours pas ce que sont réellement les microétats ; les idées incluent des configurations de particules appelées gravitons ou cordes de la théorie des cordes.)

Mais lorsqu’il s’agit de l’entropie de l’univers, les physiciens se sentent moins sûrs de savoir où se situe leur ignorance.

En avril, deux théoriciens ont tenté de donner à l’entropie cosmologique une base mathématique plus solide. Ted Jacobson , physicien à l'Université du Maryland réputé pour avoir dérivé la théorie de la gravité d'Einstein de la thermodynamique des trous noirs, et son étudiant diplômé Batoul Banihashemi ont explicitement défini l'entropie d'un univers de Sitter (vacant et en expansion). Ils ont adopté la perspective d’un observateur au centre. Leur technique, qui consistait à ajouter une surface fictive entre l'observateur central et l'horizon, puis à rétrécir la surface jusqu'à ce qu'elle atteigne l'observateur central et disparaisse, a récupéré la réponse de Gibbons et Hawking selon laquelle l'entropie est égale à un quart de la surface de l'horizon. Ils ont conclu que l’entropie de De Sitter compte tous les microétats possibles à l’intérieur de l’horizon.

Turok et Boyle calculent la même entropie que Jacobson et Banihashemi pour un univers vide. Mais dans leur nouveau calcul relatif à un univers réaliste rempli de matière et de rayonnement, ils obtiennent un nombre beaucoup plus grand de microétats – proportionnels au volume et non à la surface. Face à ce conflit apparent, ils spéculent que les différentes entropies répondent à des questions différentes : la plus petite entropie de De Sitter compte les microétats d'un espace-temps pur délimité par un horizon, tandis qu'ils soupçonnent que leur plus grande entropie compte tous les microétats d'un espace-temps rempli d'espace-temps. matière et énergie, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’horizon. "C'est tout un shebang", a déclaré Turok.

En fin de compte, régler la question de savoir ce que comptent Boyle et Turok nécessitera une définition mathématique plus explicite de l’ensemble des microétats, analogue à ce que Jacobson et Banihashemi ont fait pour l’espace de Sitter. Banihashemi a déclaré qu'elle considérait le calcul d'entropie de Boyle et Turok " comme une réponse à une question qui n'a pas encore été entièrement comprise ".

Quant aux réponses plus établies à la question " Pourquoi cet univers ? ", les cosmologistes affirment que l’inflation et le multivers sont loin d’être morts. La théorie moderne de l’inflation, en particulier, est parvenue à résoudre bien plus que la simple question de la douceur et de la planéité de l’univers. Les observations du ciel correspondent à bon nombre de ses autres prédictions. L'argument entropique de Turok et Boyle a passé avec succès un premier test notable, a déclaré Pimentel, mais il lui faudra trouver d'autres données plus détaillées pour rivaliser plus sérieusement avec l'inflation.

Comme il sied à une grandeur qui mesure l’ignorance, les mystères enracinés dans l’entropie ont déjà servi de précurseurs à une physique inconnue. À la fin des années 1800, une compréhension précise de l’entropie en termes d’arrangements microscopiques a permis de confirmer l’existence des atomes. Aujourd'hui, l'espoir est que si les chercheurs calculant l'entropie cosmologique de différentes manières peuvent déterminer exactement à quelles questions ils répondent, ces chiffres les guideront vers une compréhension similaire de la façon dont les briques Lego du temps et de l'espace s'empilent pour créer l'univers qui nous entoure.

"Notre calcul fournit une énorme motivation supplémentaire aux personnes qui tentent de construire des théories microscopiques de la gravité quantique", a déclaré Turok. "Parce que la perspective est que cette théorie finira par expliquer la géométrie à grande échelle de l'univers."

 

Auteur: Internet

Info: https://www.quantamagazine.org/ - Charlie Wood, 17 nov 2022

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homme-végétal

Il arrive parfois qu’une personne puisse nommer le moment exact où sa vie a changé de manière irrévocable. Pour Cleve Backster, ce fut tôt le matin du 2 février 1966, treize minutes et cinquante-cinq secondes après le début d'un test polygraphique qu'il administrait. Backster, un expert en polygraphie de premier plan dont le test de comparaison de zones Backster est la norme mondiale en matière de détection de mensonge, avait à ce moment-là menacé le bien-être de son sujet de test. Le sujet répondit électrochimiquement à sa menace. Le sujet était une plante.

Depuis lors, Backster a mené des centaines d’expériences démontrant non seulement que les plantes réagissent à nos émotions et à nos intentions, mais aussi les feuilles coupées, les œufs (fécondés ou non), les yaourts et les échantillons de cellules humaines. Il a découvert, par exemple, que les globules blancs prélevés dans la bouche d'une personne et placés dans un tube à essai réagissent toujours électrochimiquement aux états émotionnels du donneur, même lorsque celui-ci est hors de la pièce, du bâtiment ou de l'État.

J'ai entendu parler du travail de Backster pour la première fois quand j'étais enfant. Ses observations ont confirmé une compréhension que j’avais alors, une compréhension que même un diplôme en physique ne pourrait éradiquer plus tard : que le monde est vivant et sensible.

J'ai parlé avec Backster à San Diego, trente et un ans et vingt-deux jours après sa première observation, et à un continent entier du bureau de Times Square à New York où il avait autrefois travaillé et vécu. Avant de commencer, il a placé du yaourt dans un tube à essai stérilisé, a inséré deux électrodes en or et a allumé la mire d'enregistrement. J'étais excité, mais dubitatif. Nous avons commencé à parler et le stylo s'est tortillé de haut en bas. Puis, juste au moment où je reprenais mon souffle avant d'être en désaccord avec quelque chose qu'il avait dit, le stylo sembla vaciller. Mais est-ce que ça avait vraiment bougé, ou est-ce que je voyais seulement ce que je voulais voir ?

À un moment donné, alors que Backster était hors de la pièce, j'ai essayé d'exprimer ma colère en pensant aux forêts coupées à blanc et aux politiciens qui les sanctionnent, aux enfants maltraités et à leurs agresseurs. Mais la ligne représentant la réponse électrochimique du yaourt est restée parfaitement plate. Peut-être que le yaourt ne m'intéressait pas. Perdant moi-même tout intérêt, j'ai commencé à errer dans le laboratoire. Mes yeux sont tombés sur un calendrier qui, après une inspection plus approfondie, s'est avéré être une publicité pour une compagnie maritime. J’ai ressenti une soudaine montée de colère face à l’omniprésence de la publicité. Puis j'ai réalisé : une émotion spontanée ! Je me suis précipité vers le graphique et j'y ai vu un pic soudain correspondant apparemment au moment où j'avais vu l'annonce.

Au retour de Backster, j’ai continué l’entretien, toujours excité et peut-être un peu moins sceptique.

Jensen : Pouvez-vous nous raconter en détail comment vous avez remarqué pour la première fois une réaction électrochimique dans une plante ?

Backster : C'était une plante de canne à sucre dracaena que j'avais dans mon laboratoire à Manhattan. Les plantes ne m'intéressaient pas particulièrement, mais il y avait une vente suite à une cessation d'activité chez un fleuriste au rez-de-chaussée de l'immeuble, et la secrétaire avait acheté quelques plantes pour le bureau : une plante à caoutchouc et cette dracaena. J'avais arrosé ces plantes jusqu'à saturation – en les mettant sous le robinet jusqu'à ce que l'eau coule du fond des pots – et j'étais curieux de voir combien de temps il faudrait à l'humidité pour atteindre le sommet. J'étais particulièrement intéressé par le dracaena, car l'eau devait remonter le long d'un long tronc, puis ressortir jusqu'au bout des longues feuilles. Je pensais que si je plaçais le détecteur de réponse galvanique cutanée du polygraphe au bout de la feuille, une baisse de résistance serait enregistrée sur le papier à mesure que l'humidité arriverait entre les électrodes.

C’est du moins ma façon de voir les choses. Je ne sais pas s’il y avait une autre raison, plus profonde, à mon action. Il se pourrait que mon subconscient m'ait poussé à faire ça – je ne sais pas.

En tout cas, j’ai remarqué quelque chose sur le graphique qui ressemblait à une réponse humaine sur un polygraphe : ce n’est pas du tout ce à quoi j’aurais pu m’attendre si de l’eau pénétrait dans une feuille. Les détecteurs de mensonge fonctionnent sur le principe selon lequel lorsque les gens perçoivent une menace pour leur bien-être, ils réagissent physiologiquement de manière prévisible. Par exemple, si vous effectuez un test polygraphique dans le cadre d’une enquête pour meurtre, vous pourriez demander à un suspect : " Est-ce vous qui avez tiré le coup mortel ? " Si la vraie réponse était oui , le suspect craindrait de mentir et les électrodes placées sur sa peau détecteraient la réponse physiologique à cette peur. J’ai donc commencé à réfléchir à des moyens de menacer le bien-être de la plante. J’ai d’abord essayé de tremper une de ses feuilles dans une tasse de café chaud. La plante, au contraire, montrait de l’ennui – la ligne sur le graphique continuait de baisser.

Puis, à treize minutes et cinquante-cinq secondes de temps graphique, l'idée m'est venue à l'esprit de brûler la feuille. Je n'ai pas verbalisé l'idée ; Je n'ai pas touché à la plante ; Je n'ai pas touché au matériel. Pourtant, la plante s'est comme affolée. Le stylo a sauté du haut du graphique. La seule chose à laquelle il avait pu réagir était mon image mentale.

Ensuite, j'ai récupéré quelques allumettes sur le bureau de mon secrétaire et, en allumant une, j'ai fait quelques passages sur la feuille. Cependant, j'ai réalisé que je constatais déjà une réaction si extrême qu'aucune augmentation ne serait perceptible. J'ai donc essayé une approche différente : j'ai éloigné la menace en remettant les allumettes sur le bureau du secrétaire. La plante s'est immédiatement calmée.

J’ai tout de suite compris qu’il se passait quelque chose d’important. Je ne trouvais aucune explication scientifique conventionnelle. Il n'y avait personne d'autre dans le laboratoire et je ne faisais rien qui aurait pu déclencher un mécanisme de déclenchement. A partir de ce moment, ma conscience n'a plus été la même. Toute ma vie a été consacrée à étudier ce phénomène.

Après cette première observation, j’ai parlé à des scientifiques de différents domaines pour obtenir leurs explications sur ce qui se passait. Mais cela leur était totalement étranger. J’ai donc conçu une expérience pour explorer plus en profondeur ce que j’ai commencé à appeler la perception primaire.

Jensen : Pourquoi  " perception primaire " ?

Backster : Je ne puis nommer ce dont j'ai été témoin perception extrasensorielle, car les plantes ne possèdent pas la plupart des cinq sens. Cette perception de la part de la plante semblait se produire à un niveau beaucoup plus basique – ou primaire.

Quoi qu’il en soit, ce qui a émergé est une expérience dans laquelle j’ai fait tomber automatiquement les crevettes de saumure, à intervalles aléatoires, dans de l’eau frémissante, tandis que la réaction des plantes était enregistrée à l’autre bout du laboratoire.

Jensen : Comment pouviez-vous savoir si les plantes réagissaient à la mort de la crevette ou à vos émotions ?

Backster : Il est très difficile d'éliminer le lien entre l'expérimentateur et les plantes testées. Même une brève association avec les plantes – quelques heures seulement – ​​suffit pour qu’elles s’adaptent à vous. Ensuite, même si vous automatisez et randomisez l’expérience et quittez le laboratoire, ce qui garantit que vous ignorez totalement le moment où l’expérience commence, les plantes resteront à votre écoute, peu importe où vous irez. Au début, mon partenaire et moi allions dans un bar situé à un pâté de maisons, mais au bout d'un certain temps, nous avons commencé à soupçonner que les plantes réagissaient, non pas à la mort des crevettes saumâtres, mais à l'augmentation et à la diminution du niveau d'excitation dans nos conversations.

Finalement, quelqu'un d'autre a acheté les plantes et les a stockées dans une autre partie du bâtiment. Le jour de l’expérience, nous sommes allés chercher les plantes, les avons amenées, les avons branchées et sommes partis. Cela signifiait que les plantes étaient seules dans un environnement étrange, avec seulement la pression des électrodes et un petit filet d'électricité traversant leurs feuilles. Parce qu’il n’y avait pas d’humains avec lesquels s’harmoniser, elles ont commencé à " regarder autour " de leur environnement. Ce n’est qu’à ce moment-là que quelque chose d’aussi subtil que la mort des artémias a été capté par les plantes.

Jensen : Les plantes s'adaptent-elles uniquement aux humains, ou également aux autres créatures vivantes de leur environnement ?

Backster : Je vais répondre à cette question avec un exemple. Souvent, je branche une plante et je m'occupe de mes affaires, puis j'observe ce qui la fait réagir. Un jour, je faisais bouillir de l'eau dans une bouilloire pour faire du café. Puis j’ai réalisé que j’avais besoin de la bouilloire pour autre chose, alors j’ai versé l’eau bouillante dans l’évier. Le végétal en question, surveillé, a réagi énormément à cela. Maintenant, si vous ne mettez pas de produits chimiques ou d’eau chaude dans l’évier pendant une longue période, une jungle microscopique commence à s’y développer. Il s’est avéré que la plante réagissait à la mort des microbes présents dans les égouts.

À maintes reprises, j'ai été étonné de constater que la capacité de perception s'étend jusqu'au niveau bactérien. Un échantillon de yaourt, par exemple, réagira lorsqu'un autre est nourri, comme pour dire : " Celui-là reçoit de la nourriture. Où est la mienne? " Cela se produit avec un certain degré de répétabilité. Ou si vous déposez des antibiotiques dans l’autre échantillon, le premier échantillon de yaourt montre une énorme réponse à la mort de l’autre. Et il n’est même pas nécessaire qu’il s’agisse de bactéries du même type pour que cela se produise. Mon premier chat siamois ne mangeait que du poulet. J'en gardais un cuit dans le réfrigérateur du laboratoire et en retirais un morceau chaque jour pour nourrir le chat. Au moment où j'arriverais à la fin, la carcasse serait assez vieille et des bactéries auraient commencé à s'y développer. Un jour, j'ai fait brancher du yaourt, et alors que je sortais le poulet du réfrigérateur et commençais à retirer des lanières de viande, le yaourt a répondu. Ensuite, je mets le poulet sous une lampe chauffante pour le ramener à température ambiante.

Jensen : Vous avez visiblement chouchouté votre chat.

Backster : Je n'aurais pas voulu que le chat doive manger du poulet froid ! Quoi qu’il en soit, la chaleur frappant les bactéries a provoqué une énorme réaction dans le yaourt.

Jensen : Comment saviez-vous que vous n'aviez pas d'influence sur cela ?

Backster : Je n’étais pas au courant de la réaction à l’époque. Vous voyez, j'avais installé des commutateurs pip partout dans le laboratoire ; chaque fois que j'effectuais une action, j'appuyais sur un interrupteur, ce qui plaçait une marque sur un tableau distant. Ce n’est que plus tard que j’ai comparé la réaction du yaourt à ce qui s’était passé en laboratoire.

Jensen : Et quand le chat a commencé à ingérer le poulet ?

Backster : Chose intéressante, les bactéries semblent avoir un mécanisme de défense tel qu'un danger extrême les amène dans un état similaire à un choc : en fait, elles s'évanouissent. De nombreuses plantes font cela également ; si vous les harcelez suffisamment, elles se bloquent. C'est apparemment ce que les bactéries ont fait, car dès qu'elles ont touché le système digestif du chat, le signal s'est éteint. À partir de ce moment-là, la ligne est plate.

Jensen : Le Dr David Livingstone, l'explorateur africain, a été mutilé par un lion. Il a déclaré plus tard que lors de l'attaque, il n'avait pas ressenti de douleur, mais plutôt un sentiment de bonheur. Il a dit que cela n'aurait posé aucun problème de se livrer au lion.

Backster : Une fois, j'étais dans un avion et j'avais avec moi un petit compteur à réponse galvanique alimenté par batterie. Juste au moment où les agents de bord commençaient à servir le déjeuner, j'ai dit à l'homme assis à côté de moi : " Vous voulez voir quelque chose d'intéressant ? J'ai mis un morceau de laitue entre les électrodes, et quand les gens ont commencé à manger leurs salades, nous avons eu des réactions, mais elles se sont arrêtées car les feuilles étaient en état de choc. " Attendez qu'ils récupèrent les plateaux ", dis-je, "et voyez ce qui se passe." Lorsque les préposés ont retiré nos repas, la laitue a retrouvé sa réactivité. Le fait est que la laitue passait dans un état de latence pour ne pas souffrir. Quand le danger est parti, la réactivité est revenue. Cet arrêt de l’énergie électrique au niveau cellulaire est lié, je crois, à l’état de choc chez les humains.

Les cellules extérieures au corps réagissent toujours aux émotions que vous ressentez, même si vous êtes à des kilomètres de vous. La plus grande distance que nous avons testée est d’environ trois cents milles.

Jensen : Vous avez donc testé des plantes, des bactéries, des feuilles de laitue. . .

Backster : Et des œufs. J'ai eu un Doberman pinscher pendant un certain temps et je lui donnais un œuf par jour. Un jour, j'avais une plante reliée à un grand compteur à réponse galvanique, et alors que je cassais un œuf pour nourrir le chien, le compteur est devenu fou. Après cela, j’ai passé des centaines d’heures à surveiller les œufs, fécondés et non fécondés, c'est pareil ; c'est toujours une cellule vivante.

Après avoir travaillé avec des plantes, des bactéries et des œufs, j’ai commencé à me demander comment les animaux réagiraient. Mais je n’arrivais pas à faire en sorte qu’un chat ou un chien reste immobile assez longtemps pour effectuer une surveillance significative. J'ai donc pensé essayer les spermatozoïdes humains, qui sont capables de rester vivants en dehors du corps pendant de longues périodes et sont certainement assez faciles à obtenir. Dans cette expérience, l’échantillon du donneur était placé dans un tube à essai doté d’électrodes et le donneur était séparé du sperme par plusieurs pièces. Ensuite, le donneur a inhalé du nitrite d'amyle, qui dilate les vaisseaux sanguins et est classiquement utilisé pour arrêter un accident vasculaire cérébral. Le simple fait d’écraser le nitrite d’amyle a provoqué une réaction importante du sperme, et lorsque le donneur a inhalé, le sperme s’est déchaîné.

Cependant, je ne pouvais pas poursuivre ces recherches. Cela aurait été scientifiquement valable, mais politiquement stupide. Les sceptiques dévoués m'auraient sans doute ridiculisé en me demandant où se trouvait mon masturbatorium, etc.

Puis j’ai rencontré un chercheur dentaire qui avait mis au point une méthode de collecte de globules blancs dans la bouche. C’était politiquement faisable, facile à réaliser et ne nécessitait aucune surveillance médicale. J'ai commencé à faire des expériences enregistrées sur écran partagé, avec l'affichage du graphique superposé au bas d'un écran montrant les activités du donneur. Nous avons prélevé des échantillons de globules blancs, puis renvoyé les gens chez eux pour regarder un programme télévisé présélectionné susceptible de susciter une réaction émotionnelle – par exemple, montrer à un vétéran de Pearl Harbor un documentaire sur les attaques aériennes japonaises. Ce que nous avons découvert, c'est que les cellules situées à l'extérieur du corps réagissent toujours aux émotions que vous ressentez, même si elles sont à des kilomètres de vous.

La plus grande distance que nous avons testée est d’environ trois cents milles. Brian O'Leary, qui a écrit Exploring Inner and Outer Space , a laissé ses globules blancs ici à San Diego, puis s'est envolé pour Phoenix. En chemin, il a gardé une trace des événements qui l'avaient agacé, en notant soigneusement l'heure de chacun. La corrélation est restée, même sur cette distance.

Jensen : Les implications de tout cela...

Backster : – sont stupéfiantes, oui. J'ai des tiroirs remplis de données anecdotiques de haute qualité montrant à maintes reprises comment les bactéries, les plantes, etc. sont toutes incroyablement en harmonie les unes avec les autres. Les cellules humaines ont elles aussi cette capacité de perception primaire, mais d'une manière ou d'une autre, elle s'est perdue au niveau conscient. Ou peut-être n’avons-nous jamais eu un tel talent.

Je soupçonne que lorsqu’une personne est suffisamment avancée spirituellement pour gérer de telles perceptions, elle sera correctement à l’écoute. En attendant, il serait peut-être préférable de ne pas être à l’écoute, à cause des dommages que nous pourrions causer en manipulant mal les informations reçues.

Nous avons tendance à nous considérer comme la forme de vie la plus évoluée de la planète. C'est vrai, nous réussissons très bien dans nos efforts intellectuels. Mais ce n’est peut-être pas le critère ultime permettant de juger. Il se pourrait que d’autres formes de vie soient plus avancées spirituellement. Il se pourrait également que nous nous approchons de quelque chose qui nous permettra d'améliorer notre perception en toute sécurité. De plus en plus de personnes travaillent ouvertement dans ces domaines de recherche encore marginalisés. Par exemple, avez-vous entendu parler du travail de Rupert Sheldrake avec les chiens ? Il installe une caméra d'enregistrement du temps sur le chien à la maison et sur le compagnon humain au travail. Il a découvert que, même si les gens rentrent du travail à une heure différente chaque jour, au moment où la personne quitte le travail, le chien de la maison se dirige vers la porte.

Jensen : Comment la communauté scientifique a-t-elle accueilli votre travail ?

Backster : À l’exception de scientifiques marginalisés comme Sheldrake, la réponse a été d’abord la dérision, puis l’hostilité, et maintenant surtout le silence.

Au début, les scientifiques appelaient la perception primaire " l’effet Backster ", espérant peut-être pouvoir banaliser les observations en leur donnant le nom de cet homme sauvage qui prétendait voir des choses qui avaient échappé à la science dominante. Le nom est resté, mais comme la perception primaire ne peut pas être facilement écartée, ce n'est plus un terme de mépris.

Au moment même où les scientifiques ridiculisaient mon travail, la presse populaire lui prêtait une très grande attention, dans des dizaines d'articles et dans des livres, comme The Secret Life of Plants de Peter Tompkins . Je n’ai jamais demandé aucune attention et je n’en ai jamais profité. Les gens sont toujours venus me chercher des informations.

Pendant ce temps, la communauté botanique était de plus en plus mécontente. Ils voulaient " aller au fond de toutes ces absurdités " et prévoyaient de résoudre le problème lors de la réunion de 1975 de l’Association américaine pour l’avancement de la science à New York. Arthur Galston, un botaniste bien connu de l'Université de Yale, a réuni un groupe restreint de scientifiques pour, à mon avis, tenter de discréditer mon travail ; il s’agit d’une réponse typique de la communauté scientifique aux théories controversées. J'avais déjà appris qu'on ne se lance pas dans ces combats pour gagner ; vous y allez pour survivre. Et c’est exactement ce que j’ai pu faire.

Ils en sont maintenant arrivés au point où ils ne peuvent plus contrer mes recherches, leur stratégie consiste donc simplement à m'ignorer et à espérer que je m'en aille. Bien sûr, cela ne fonctionne pas non plus.

Jensen : Quelle est leur principale critique ?

Backster : Le gros problème – et c’est un gros problème en ce qui concerne la recherche sur la conscience en général – est la répétabilité. Les événements que j'ai observés ont tous été spontanés. Elles doivent être. Si vous les planifiez à l'avance, vous les avez déjà modifiés. Tout se résume à ceci : répétabilité et spontanéité ne font pas bon ménage, et aussi longtemps que les membres de la communauté scientifique insisteront trop sur la répétabilité dans la méthodologie scientifique, ils n’iront pas très loin dans la recherche sur la conscience.

Non seulement la spontanéité est importante, mais l’intention l’est aussi. Vous ne pouvez pas faire semblant. Si vous dites que vous allez brûler une feuille sur la plante, mais que vous ne le pensez pas, rien ne se passera. J'entends constamment des gens de tout le pays vouloir savoir comment provoquer des réactions chez les plantes. Je leur dis : " Ne faites rien. Allez à votre travail; prenez des notes sur ce que vous faites à des moments précis et comparez-les plus tard à votre enregistrement graphique. Mais ne planifiez rien, sinon l’expérience ne fonctionnera pas. " Les gens qui font cela obtiennent souvent les mêmes résultats que moi et remportent le premier prix aux expo-sciences. Mais lorsqu'ils arrivent au cours de biologie 101, on leur dit que ce qu'ils ont vécu n'est pas important.

Il y a eu quelques tentatives de la part des scientifiques pour reproduire mon expérience avec les crevettes Artemia, mais elles se sont toutes révélées inadéquates sur le plan méthodologique. Lorsqu’ils ont appris qu’ils devaient automatiser l’expérience, ils se sont simplement rendus de l’autre côté d’un mur et ont utilisé la télévision en circuit fermé pour regarder ce qui se passait. De toute évidence, ils ne retiraient pas leur conscience de l’expérience, il leur était donc très facile d’échouer. Et soyons honnêtes : certains scientifiques ont été soulagés lorsqu’ils ont échoué, car le succès aurait été contraire à l’ensemble des connaissances scientifiques.

Jensen : L'accent mis sur la répétabilité semble anti-vie, car la vie elle-même n'est pas reproductible. Comme Francis Bacon l’a clairement indiqué, la répétabilité est inextricablement liée au contrôle, et le contrôle est fondamentalement l’essence même de la science occidentale, de la culture occidentale. Pour que les scientifiques abandonnent la répétabilité, ils devraient abandonner le contrôle, ce qui signifie qu’ils devraient abandonner la culture occidentale, et cela n’arrivera pas tant que cette civilisation ne s’effondrera pas sous le poids de ses propres excès écologiques.

Backster : J’ai renoncé à lutter contre d’autres scientifiques sur ce point. Mais je sais que s’ils réalisent mon expérience, même si elle échoue, ils verront quand même des choses qui changeront leur conscience. Ils ne seront plus jamais tout à fait les mêmes.

Des gens qui n’auraient rien dit il y a vingt ans me disent souvent : " Je pense que je peux maintenant vous dire en toute sécurité à quel point vous avez vraiment changé ma vie avec ce que vous faisiez au début des années soixante-dix. " À l’époque, ces scientifiques ne pensaient pas avoir le luxe de faire bouger les choses ; leur crédibilité, et donc leurs demandes de subvention, en auraient été affectées.

Jensen : En regardant votre travail, nous sommes confrontés à plusieurs options : Nous pouvons croire que vous mentez, ainsi que tous ceux qui ont déjà fait des observations similaires. On peut croire que ce que vous dites est vrai, ce qui nécessiterait de retravailler toute la notion de répétabilité dans la méthode scientifique, ainsi que nos notions de conscience, de communication, de perception, etc. Ou bien on peut croire que vous avez commis une erreur. Est-il possible que vous ayez négligé une explication strictement mécaniste de vos observations ? Un scientifique a dit qu’il devait y avoir un fil lâche dans votre détecteur de mensonge.

Backster : En trente et un ans de recherche, c'est comme si j'avais " desserré tous les noeuds ". Non, je ne vois aucune solution mécaniste. Certains parapsychologues pensent que je maîtrise l'art de la psychokinésie, que je fait bouger les aiguilles et autres indicateurs avec mon esprit – ce qui serait en soi une très bonne astuce. Mais ils négligent le fait que j'ai automatisé et randomisé de nombreuses expériences, de sorte que je ne suis même conscient de ce qui se passe que plus tard, lorsque j'étudie les graphiques et les bandes vidéo qui en résultent. Les explications conventionnelles sont devenues assez minces. L’une de ces explications, proposée dans un article du Harper’s, était l’électricité statique : si vous vous déplacez à travers la pièce et touchez la plante, vous obtenez une réponse. Mais bien sûr, je touche rarement la plante pendant l'observation, et de toute façon cette réaction serait totalement différente.

Jensen : Alors, quel est le signal capté par la plante ?

Backster : Je ne sais pas. Quoi qu’il en soit, je ne crois pas que le signal se dissipe à distance, comme ce serait le cas si nous avions affaire à un phénomène électromagnétique. Le signal de Phoenix, par exemple, était aussi fort que si Brian O'Leary avait été dans la pièce voisine.

Nous avons également tenté d'obstruer le signal à l'aide de plomb et d'autres matériaux, mais nous ne pouvons pas l'arrêter. Cela me fait penser que le signal ne va pas réellement d'ici à là, mais se manifeste plutôt à différents endroits. Je soupçonne que le signal ne prend pas de temps pour se déplacer. Il n'y a aucun moyen, en utilisant les distances terrestres, de tester cela, car si le signal était électromagnétique, il se propagerait à la vitesse de la lumière, et les retards biologiques consommeraient plus que la fraction de seconde qu'il faudrait au signal pour se propager. La seule façon de tester cela serait dans l’espace.

Certains physiciens quantiques soutiennent cette conviction – selon laquelle le signal ne dépend ni du temps ni de la distance. Il existe une théorie quantique appelée théorème de Bell, qui stipule que deux atomes éloignés l'un de l'autre changent parfois simultanément la direction de leur rotation.

Bien entendu, tout cela nous amène fermement sur le territoire du métaphysique et du spirituel. Pensez à la prière, par exemple. Si vous deviez prier Dieu, et que Dieu se trouvait de l’autre côté de la galaxie, et que votre prière voyageait à la vitesse de la lumière, vos os seraient depuis longtemps poussière avant que Dieu puisse répondre. Mais si Dieu – quelle que soit la manière dont vous définissez Dieu – est partout, la prière n'a pas besoin de voyager.

Jensen : Soyons plus concrets. Vous avez une image mentale de la plante en train de brûler et la plante réagit. Que se passe-t-il précisément à cet instant ? Comment la plante sait-elle réagir ?

Backster : Je ne prétends pas savoir. En fait, j’ai attribué une grande partie de ma réussite à pouvoir rester actif dans ce domaine – et à ne pas avoir été discrédité – au fait que je ne prétends pas le savoir. Vous voyez, si je donne une explication erronée, peu importe la quantité de données dont je dispose ou le nombre d’observations de qualité que j’ai faites. La communauté scientifique dominante utilisera l’explication incorrecte comme excuse pour rejeter mes données et mes observations. J'ai donc toujours dit que je ne savais pas comment cela se produisait. Je suis un expérimentateur, pas un théoricien.

Jensen : La capacité des plantes à percevoir l'intention me suggère une redéfinition radicale de la conscience.

Backster : Vous voulez dire que cela supprimerait la notion de conscience comme quelque chose sur lequel les humains ont le monopole ?

Jensen : Les humains et autres animaux dits supérieurs. Selon la pensée occidentale, parce que les plantes n’ont pas de cerveau, elles ne peuvent pas avoir de conscience.

Backster : Je pense que la science occidentale exagère le rôle du cerveau dans la conscience. Des livres entiers ont été écrits sur la conscience de l’atome. La conscience pourrait exister à un tout autre niveau. De très bonnes recherches ont été réalisées sur la survie de la conscience après la mort corporelle. Tout cela pointe vers l’idée selon laquelle la conscience n’a pas besoin d’être spécifiquement liée à la matière grise. Cette notion est une autre camisole de force dont nous devons nous débarrasser. Le cerveau a peut-être quelque chose à voir avec la mémoire, mais on peut affirmer avec force qu’une grande partie de notre mémoire n’y est pas stockée.

Jensen : La notion de mémoire corporelle est familière à tout athlète : lorsque vous vous entraînez, vous essayez de créer des souvenirs dans vos muscles.

Backster : Le cerveau ne fait peut-être même pas partie de cette boucle.

Jensen : J'ai également lu des articles sur les séquelles physiologiques des traumatismes – maltraitance des enfants, viol, guerre. De nombreuses recherches montrent que le traumatisme s’imprime sur différentes parties du corps ; une victime de viol pourrait plus tard ressentir une brûlure dans son vagin, par exemple.

Backster : Si je me cogne, j'explique aux tissus de cette zone ce qui s'est passé. Je ne sais pas à quel point cette méthode de guérison est efficace, mais elle ne peut pas faire de mal.

Jensen : Avez-vous également travaillé avec ce que l'on appelle normalement des matériaux inanimés ?

Backster : J'ai déchiqueté certaines substances et je les ai mises en suspension dans de la gélose. Je reçois des signaux électriques, mais ils ne sont pas nécessairement liés à quoi que ce soit qui se passe dans l'environnement. Les schémas sont trop grossiers pour que je puisse les déchiffrer. Mais je soupçonne que la conscience est plus répandue.

En 1987, j'ai participé à un programme de l'Université du Missouri qui comprenait une conférence du Dr Sidney Fox, qui était alors lié à l'Institut pour l'évolution moléculaire et cellulaire de l'Université de Miami. Fox avait enregistré des signaux électriques provenant d’un matériau semblable à une protéine qui présentait des propriétés étonnamment similaires à celles des cellules vivantes. La simplicité du matériel qu'il a utilisé et la capacité d'auto-organisation dont il fait preuve me suggèrent que la biocommunication était présente dès les tout premiers stades de l'évolution de la vie sur cette planète.

Bien sûr, l’hypothèse de Gaia – selon laquelle la Terre est un grand, grand organisme fonctionnel – s’inscrit parfaitement dans ce contexte. La planète va avoir le dernier mot concernant les dégâts que les humains lui infligent. Il ne lui faudra qu'un certain nombre d'abus, et alors il pourrait bien roter et renifler un peu, et détruire une bonne partie de la population. Je ne pense pas qu'il serait exagéré de pousser l'hypothèse un peu plus loin et d'attribuer une telle stratégie de défense à une sorte d'intelligence planétaire.

Jensen : Comment votre travail a-t-il été reçu dans d'autres parties du monde ?

Backster : Les Russes ont toujours été très intéressés et n'ont pas eu peur de s'aventurer dans ces domaines de recherche. À bien des égards, ils semblent beaucoup plus sensibles aux concepts spirituels que la plupart des scientifiques occidentaux. Et chaque fois que je parle de ce que je fais avec des scientifiques indiens – bouddhistes ou hindous –, ils me demandent : " Qu’est-ce qui vous a pris autant de temps ? " Mon travail s'accorde très bien avec de nombreux concepts adoptés par l'hindouisme et le bouddhisme.

Jensen : De quoi avons-nous peur, nous, les Occidentaux ?

Backster : La crainte est que, si ce que j’observe est exact, bon nombre des théories sur lesquelles nous avons construit nos vies doivent être complètement remaniées. J'ai connu des biologistes dire : " Si Backster a raison, nous sommes dans la merde . " Cela signifierait une refonte radicale de notre place dans le monde. Je pense que nous le voyons déjà.

Notre communauté scientifique occidentale en général se trouve dans une situation difficile car, pour maintenir notre mode de pensée scientifique actuel, nous devons ignorer une énorme quantité d’informations. Et de plus en plus d’informations de ce type sont recueillies en permanence. Les chercheurs butent partout sur ce phénomène de biocommunication. Il semble impossible, compte tenu de la sophistication des instruments modernes, de passer à côté de cette harmonisation fondamentale entre les êtres vivants. Seulement pendant un certain temps, ils pourront prétendre qu’il s’agit que de " cables déconnectés ".

Auteur: Internet

Info: Les plantes réagissent - Une entrevue avec Cleve Backster, Derrick Jensen,  Juillet 1997 - https://www.thesunmagazine.org/

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste