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covid 1984

Dans un récent entretien avec Vice, le dénonciateur de la NSA, Edward Snowden, a exprimé ses inquiétudes concernant le programme de surveillance à venir, l’appelant "l’architecture de l’oppression". Nous avons demandé à Lucien Cerise son analyse du nouveau contrôle social à venir.



R/ L’état d’urgence sanitaire est-il pour vous un bon moyen pour les gouvernements mondiaux de poursuivre la réduction de nos libertés collectives et individuelles ? Pour vous, le confinement est-il un instrument d’ingénierie sociale ?



- Cet état d’urgence sanitaire est le prétexte idéal pour tenter de fabriquer le consentement des populations à une transformation du lien social sur une base transhumaniste, c’est-à-dire fondée sur un encadrement scientifique général, présentant un fort caractère carcéral et concentrationnaire, et allant dans le sens de l’artificialisation et de la réification du vivant, sa chosification, sa réduction à un objet. On peut reprendre à Michel Foucault et Giorgio Agamben la notion de biopouvoir pour décrire un pouvoir politique qui étudie la biologie, la médecine et les sciences de la vie autant que le droit ou l’économie. Le biopouvoir, qui n’est qu’une mise à jour de la notion d’eugénisme, se caractérise donc par une intrusion toujours croissante dans l’intimité physique des gens pour la modifier et surtout la contrôler.



En effet, ce qui dérange le biopouvoir, c’est la prolifération de la vie et de l’organique, impossible à contrôler totalement. Le transhumanisme est une tentative d’enfermement de l’organique dans une forme prétendument augmentée, mais surtout aseptisée, standardisée et sous contrôle, tentative de meurtre du vivant et de son aspect toujours imprévisible et débordant. Les gens normaux se refusent donc naturellement au transhumanisme. Pour parvenir à les emprisonner là-dedans malgré tout, il faut les séduire ou leur faire peur, afin de les soumettre volontairement par des manœuvres d’ingénierie sociale du type "pompier pyromane" et triangle de Karpman, consistant à exploiter les projections psycho-émotionnelles de la trilogie bourreau/victime/sauveur.



Cela commence par le déclenchement d’une crise, suivi d’une opération d’hameçonnage (phishing), c’est-à-dire un piratage de l’esprit par usurpation d’identité et abus de confiance, où le responsable de la crise, en position de "bourreau", se présente comme le "sauveur" qui va protéger les "victimes" de la crise. Quand le piratage est accompli, que le bourreau a gagné la confiance de la population victime et qu’elle s’ouvre à lui en abaissant ses défenses parce qu’elle le perçoit comme un sauveur, alors le pirate-bourreau peut passer à la deuxième phase sans rencontrer de résistance, c’est-à-dire la réécriture de l’architecture sociale selon un nouveau plan présenté comme une solution de sortie de crise. Cette restructuration du lien social consiste à prendre le contrôle des relations que les gens entretiennent librement pour les recomposer à leur place. Comment ? Cela se fait toujours en jouant sur les relations de confiance et de méfiance, afin de prendre le contrôle des relations de proximité et de distance. Avec cette crise du coronavirus, la relation à autrui et au monde est réécrite pour être fondée sur la méfiance et la paranoïa, selon une sorte de conflit triangulé généralisé, où chacun est potentiellement bourreau de chacun. Je dois apprendre à me méfier d’autrui et de la nature, avec le maintien d’une distance entre moi, autrui et le monde, et cette distance m’est dictée par le biopouvoir auquel, en revanche, je suis tenu d’accorder une confiance aveugle, au risque d’être accusé de "conspirationnisme" et d’encourir des représailles judiciaires. En résumé : pour le biopouvoir, cette crise du Covid-19 doit couper l’Histoire en deux et faire entrer l’humanité dans une nouvelle ère où l’auto-organisation du vivant sera progressivement abolie pour être entièrement subordonnée et rationalisée par un pouvoir scientifique eugéniste.



R/ La surveillance numérique de masse passe par les fameuses applications d’Apple ou de Google de contrôle sanitaire. Comment les États et les grandes multinationales de la Silicon Valley se partagent les informations et les rôles dans cette opération ?



Les États et les grandes multinationales sont toujours en fait dirigés directement ou indirectement par ce que l’on appelle le complexe militaro-industriel, qui n’est pas exclusivement américain, chaque pays possède le sien, mais celui des USA est le plus agressif. L’avant-garde de la recherche scientifique est toujours sponsorisée, surveillée et récupérée en premier lieu par les unités de "recherche et développement" militaires. Au niveau géopolitique international, tout est militarisé (weaponized, comme disent les anglophones), tout est rapport de forces, tout est volonté de puissance et relations dominant/dominé. Les applications de géolocalisation et de surveillance numérique de masse sont des outils de contrôle social, c’est-à-dire en fait de militarisation des comportements.



Nous sommes dans une guerre hybride mondiale. Par exemple, la Chine, qui est sous attaque permanente des USA et des réseaux de George Soros, a besoin de militariser et discipliner sa population par un encadrement informatique global. Afin de conserver sa souveraineté numérique et le contrôle de sa population, la Chine doit aussi prévenir et limiter les risques de piratages informatiques de l’étranger, d’où la campagne lancée par Pékin pour débarrasser totalement son parc informatique des systèmes d’exploitation étrangers, dont le plus connu est Windows de Microsoft, et développer de nouveaux systèmes d’exploitation et outils informatiques de conception chinoise et fabriqués en Chine, et qui seront dépourvus des backdoors et autres logiciels espions de la NSA.



À terme, la Chine va donc devenir un trou noir pour les services de renseignement anglophones, les Five Eyes de l’accord UKUSA et du système Echelon, et leurs associés israéliens et autres. Dans quelques années, il sera pratiquement impossible de pirater, espionner et attaquer le parc informatique chinois, qui sera beaucoup mieux sécurisé qu’aujourd’hui. Cet exemple chinois aura une forte capacité d’entraînement à l’internationale et fera des émules par effet domino en Asie et partout dans le monde. On comprend que cette émancipation chinoise de l’hégémonie numérique occidentale provoque un vent de panique de la Silicon Valley à Washington en passant par Tel-Aviv : c’est la fin du projet néoconservateur de domination mondiale. Ce qui ne veut pas dire que le gouvernement chinois va instaurer le paradis sur Terre, mais qu’il pourra certainement relâcher la surveillance de sa population quand les risques de déstabilisation de la Chine par des attaques extérieures et intérieures de cinquièmes colonnes pro-occidentales auront été jugulés.



R/ Les Français auront-ils le choix de refuser le traçage numérique ?



Pour le biopouvoir, il n’est pas prévu que nous ayons le choix. Comme beaucoup de gens, je vois les pièces du puzzle s’assembler depuis un certain temps, mais c’est l’affaire de Tarnac en 2008 qui a joué pour moi un rôle de catalyseur et m’a poussé à rédiger un texte que j’ai publié sous anonymat, Gouverner par le chaos – Ingénierie sociale et mondialisation.



J’exposais dans cet opuscule comment certaines forces politiques et économiques cherchaient à implémenter une dictature numérique au moyen d’une stratégie du choc qui pouvait être une épidémie, et je citais à l’appui de cette prospective un texte manifeste de 2004, le Livre Bleu, rédigé par le lobby du numérique en France, le GIXEL (devenu ACSIEL en 2013), dans lequel étaient exposés certains stratagèmes pour faire accepter dans l’opinion publique le développement de l’identité numérique. Dans le cadre de sa fondation ID-2020, Bill Gates élabore aussi un système d’identification numérique pour le monde entier et cherche à le vendre ainsi : à cause du coronavirus, il faut vacciner toute la planète, et nous devons tous recevoir un certificat numérique de vaccination. Plusieurs technologies de certificat numérique plus ou moins invasives sont à l’étude : dans votre Smartphone ; dans un bracelet électronique ; sur la peau sous forme de tatouage à points quantiques ; sous la peau sous forme de puces électroniques. Si finalement nous pouvons avoir le choix et échapper à ce sort, c’est parce que nous aurons remporté le rapport de forces pour dire "Non !" Tout est axé autour de la formule confinement/distanciation sociale/vaccination/surveillance électronique, dont il faut attaquer chaque point.



R/ Que nous réserve la suite des événements, selon vous ?



En fait, il faut se poser la question : comment vais-je peser sur la suite des événements ? Il faut sortir du rôle de spectateur ou d’analyste des événements, il faut créer les événements. Le biopouvoir mondialiste a de gros moyens financiers pour créer des événements au niveau international, impacter le réel et écrire l’Histoire. Il possède des millions, donc, en face, nous devons être des millions.



Nous n’avons pas le capital économique, mais nous avons le capital humain. Pour créer l’événement, impacter le réel et écrire l’Histoire contre le biopouvoir, pour faire dérailler son programme, il faut se poser deux questions concrètes : comment gagner la bataille de l’opinion publique et comment organiser les masses politiquement ?



La bataille de l’opinion publique se gagne en se formant aux méthodes de communication stratégique et d’ingénierie sociale, rhétorique et retournement de l’opinion (spin), dans le réel ou sur les réseaux sociaux, du moins tant que c’est possible, car la prochaine crise devrait être cyber et toucher Internet, comme l’a annoncé Alain Bauer. Cette grande crise cybernétique et numérique, d’ampleur géopolitique et déclenchée par un virus informatique qui provoquerait le "bug du siècle", permettra au pouvoir de couper Internet au moins partiellement, et surtout de mettre fin à la réinformation indépendante avec un bon prétexte. C’est le programme du Grand Confinement, par l’addition du confinement physique et du confinement mental – cognitif et informationnel.



Le but ultime est d’abolir toute auto-organisation du peuple, donc toute autonomie dans l’organisation horizontale de la société. Pour cela, il faut d’abord couper les gens physiquement les uns des autres dans le réel, par le confinement physique, la distanciation sociale, le télétravail, et tenter de pérenniser ce nouvel ordre social en annonçant que "plus rien ne sera comme avant", comme on nous le martèle depuis des semaines. Puis, dans un deuxième temps, au prétexte d’une crise numérique globale, le pouvoir coupera les gens les uns des autres dans le virtuel aussi, avec un Internet en mode dégradé, limité au télétravail et à quelques messageries et portails inoffensifs, usages qui seront malgré tout conservés, ce qui sera présenté comme une victoire. Il faut essayer d’imaginer l’enfer que serait un confinement physique sans Internet, c’est-à-dire sans aucun accès à la réinformation, sans aucune possibilité de comprendre ce qui se passe car nous serions enfermés physiquement à domicile, ou dans un périmètre limité, et enfermés mentalement dans la narration exclusive du pouvoir, dans une seule version des événements. Dans d’autres publications, j’ai baptisé cette fabrique de l’aliénation mentale "reality-building", car elle repose sur le principe de l’hypnose : la parole de l’hypnotiseur devient la réalité de l’hypnotisé. 



Comment cela est-il possible ? Parce que l’hypnotisé, qui n’est pas forcément endormi, n’a pas d’autre source d’information que la parole de l’hypnotiseur. Avant d’en arriver là, avant qu’il ne soit trop tard, il y a urgence à gagner le combat politique, ce qui signifie prendre le pouvoir, et ne pas se contenter des contre-pouvoirs, dans la rue ou sur Internet, qui risquent fort de devenir impraticables de toute façon. Prendre le pouvoir signifie être en capacité de se faire obéir par les forces de l’ordre. L’activité métapolitique n’est donc pas suffisante, il faut investir aussi le champ politique du pouvoir légal. Les forces de l’ordre, qui ont une capacité de contrainte sur votre corps et votre esprit, n’obéissent pas à la métapolitique mais au gouvernement et à ses représentants locaux, c’est-à-dire à l’État. Il faut donc reprendre le contrôle de l’État si nous voulons sortir de l’impuissance à laquelle la métapolitique nous limite. Ceci suppose d’organiser les masses de manière structurée dans une perspective de conquête du pouvoir, ce qui suppose à son tour, et inévitablement, de jouer le jeu quelque peu ingrat de la politique politicienne et des organisations politiques de masse.

Auteur: Cerise Lucien

Info: Sur rebellion-sre.fr, 6 mai 2020

[ géopolitique ] [ anti-mondialisme ] [ manipulation des masses ]

 
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paliers bayésiens

Une nouvelle preuve montre que les graphiques " expandeurs " se synchronisent

La preuve établit de nouvelles conditions qui provoquent une synchronisation synchronisée des oscillateurs connectés.

Il y a six ans, Afonso Bandeira et Shuyang Ling tentaient de trouver une meilleure façon de discerner les clusters dans d'énormes ensembles de données lorsqu'ils sont tombés sur un monde surréaliste. Ling s'est rendu compte que les équations qu'ils avaient proposées correspondaient, de manière inattendue, parfaitement à un modèle mathématique de synchronisation spontanée. La synchronisation spontanée est un phénomène dans lequel des oscillateurs, qui peuvent prendre la forme de pendules, de ressorts, de cellules cardiaques humaines ou de lucioles, finissent par se déplacer de manière synchronisée sans aucun mécanisme de coordination central.

Bandeira, mathématicien à l' École polytechnique fédérale de Zurich , et Ling, data scientist à l'Université de New York , se sont plongés dans la recherche sur la synchronisation, obtenant une série de résultats remarquables sur la force et la structure que doivent avoir les connexions entre oscillateurs pour forcer les oscillateurs. à synchroniser. Ce travail a abouti à un article d'octobre dans lequel Bandeira a prouvé (avec cinq co-auteurs) que la synchronisation est inévitable dans des types spéciaux de réseaux appelés graphes d'expansion, qui sont clairsemés mais également bien connectés.

Les graphiques expanseurs s'avèrent avoir de nombreuses applications non seulement en mathématiques, mais également en informatique et en physique. Ils peuvent être utilisés pour créer des codes correcteurs d’erreurs et pour déterminer quand les simulations basées sur des nombres aléatoires convergent vers la réalité qu’elles tentent de simuler. Les neurones peuvent être modélisés dans un graphique qui, selon certains chercheurs, forme un expanseur, en raison de l'espace limité pour les connexions à l'intérieur du cerveau. Les graphiques sont également utiles aux géomètres qui tentent de comprendre comment parcourir des surfaces compliquées , entre autres problèmes.

Le nouveau résultat " donne vraiment un aperçu considérable des types de structures graphiques qui vont garantir la synchronisation ", a déclaré Lee DeVille , un mathématicien de l'Université de l'Illinois qui n'a pas participé aux travaux. 

Synchronisation douce-amère         

"La synchronisation est vraiment l'un des phénomènes fondamentaux de la nature", a déclaré Victor Souza , un mathématicien de l'Université de Cambridge qui a travaillé avec Bandeira sur l'article. Pensez aux cellules stimulateurs cardiaques de votre cœur, qui synchronisent leurs pulsations via des signaux électriques. Lors d'expériences en laboratoire, "vous pouvez faire vibrer des centaines ou des milliers de cellules embryonnaires de stimulateur cardiaque à l'unisson", a déclaré Steven Strogatz , mathématicien à l'Université Cornell et autre co-auteur. " C'est un peu effrayant parce que ce n'est pas un cœur entier ; c'est juste au niveau des cellules."

En 1975, le physicien japonais Yoshiki Kuramoto a introduit un modèle mathématique décrivant ce type de système. Son modèle fonctionne sur un réseau appelé graphe, où les nœuds sont reliés par des lignes appelées arêtes. Les nœuds sont appelés voisins s’ils sont liés par une arête. Chaque arête peut se voir attribuer un numéro appelé poids qui code la force de la connexion entre les nœuds qu’elle connecte.

Dans le modèle de synchronisation de Kuramoto, chaque nœud contient un oscillateur, représenté par un point tournant autour d'un cercle. Ce point montre, par exemple, où se trouve une cellule cardiaque dans son cycle de pulsation. Chaque oscillateur tourne à sa propre vitesse préférée. Mais les oscillateurs veulent également correspondre à leurs voisins, qui peuvent tourner à une fréquence différente ou à un moment différent de leur cycle. (Le poids du bord reliant deux oscillateurs mesure la force du couplage entre eux.) S'écarter de ces préférences contribue à l'énergie dépensée par un oscillateur. Le système tente d'équilibrer tous les désirs concurrents en minimisant son énergie totale. La contribution de Kuramoto a été de simplifier suffisamment ces contraintes mathématiques pour que les mathématiciens puissent progresser dans l'étude du système. Dans la plupart des cas, de tels systèmes d’équations différentielles couplées sont pratiquement impossibles à résoudre.

Malgré sa simplicité, le modèle Kuramoto s'est révélé utile pour modéliser la synchronisation des réseaux, du cerveau aux réseaux électriques, a déclaré Ginestra Bianconi , mathématicienne appliquée à l'Université Queen Mary de Londres. "Dans le cerveau, ce n'est pas particulièrement précis, mais on sait que c'est très efficace", a-t-elle déclaré.

"Il y a ici une danse très fine entre les mathématiques et la physique, car un modèle qui capture un phénomène mais qui est très difficile à analyser n'est pas très utile", a déclaré Souza.

Dans son article de 1975, Kuramoto supposait que chaque nœud était connecté à tous les autres nœuds dans ce qu'on appelle un graphe complet. À partir de là, il a montré que pour un nombre infini d’oscillateurs, si le couplage entre eux était suffisamment fort, il pouvait comprendre leur comportement à long terme. Faisant l'hypothèse supplémentaire que tous les oscillateurs avaient la même fréquence (ce qui en ferait ce qu'on appelle un modèle homogène), il trouva une solution dans laquelle tous les oscillateurs finiraient par tourner simultanément, chacun arrondissant le même point de son cercle exactement au même endroit. en même temps. Même si la plupart des graphiques du monde réel sont loin d'être complets, le succès de Kuramoto a conduit les mathématiciens à se demander ce qui se passerait s'ils assouplissaient ses exigences.  

Mélodie et silence

Au début des années 1990, avec son élève Shinya Watanabe , Strogatz a montré que la solution de Kuramoto était non seulement possible, mais presque inévitable, même pour un nombre fini d'oscillateurs. En 2011, Richard Taylor , de l'Organisation australienne des sciences et technologies de la défense, a renoncé à l'exigence de Kuramoto selon laquelle le graphique devait être complet. Il a prouvé que les graphes homogènes où chaque nœud est connecté à au moins 94 % des autres sont assurés de se synchroniser globalement. Le résultat de Taylor avait l'avantage de s'appliquer à des graphes avec des structures de connectivité arbitraires, à condition que chaque nœud ait un grand nombre de voisins.

En 2018, Bandeira, Ling et Ruitu Xu , un étudiant diplômé de l'Université de Yale, ont abaissé à 79,3 % l'exigence de Taylor selon laquelle chaque nœud doit être connecté à 94 % des autres. En 2020, un groupe concurrent a atteint 78,89 % ; en 2021, Strogatz, Alex Townsend et Martin Kassabov ont établi le record actuel en démontrant que 75 % suffisaient.

Pendant ce temps, les chercheurs ont également attaqué le problème dans la direction opposée, en essayant de trouver des graphiques hautement connectés mais non synchronisés globalement. Dans une série d'articles de 2006 à 2022 , ils ont découvert graphique après graphique qui pourraient éviter la synchronisation globale, même si chaque nœud était lié à plus de 68 % des autres. Beaucoup de ces graphiques ressemblent à un cercle de personnes se tenant la main, où chaque personne tend la main à 10, voire 100 voisins proches. Ces graphiques, appelés graphiques en anneaux, peuvent s'installer dans un état dans lequel chaque oscillateur est légèrement décalé par rapport au suivant.

De toute évidence, la structure du graphique influence fortement la synchronisation. Ling, Xu et Bandeira sont donc devenus curieux des propriétés de synchronisation des graphiques générés aléatoirement. Pour rendre leur travail précis, ils ont utilisé deux méthodes courantes pour construire un graphique de manière aléatoire.

Le premier porte le nom de Paul Erdős et Alfréd Rényi, deux éminents théoriciens des graphes qui ont réalisé des travaux fondateurs sur le modèle. Pour construire un graphique à l'aide du modèle Erdős-Rényi, vous commencez avec un groupe de nœuds non connectés. Ensuite, pour chaque paire de nœuds, vous les reliez au hasard avec une certaine probabilité p . Si p vaut 1 %, vous liez les bords 1 % du temps ; si c'est 50 %, chaque nœud se connectera en moyenne à la moitié des autres.

Si p est légèrement supérieur à un seuil qui dépend du nombre de nœuds dans le graphique, le graphique formera, avec une très grande probabilité, un réseau interconnecté (au lieu de comprendre des clusters qui ne sont pas reliés). À mesure que la taille du graphique augmente, ce seuil devient minuscule, de sorte que pour des graphiques suffisamment grands, même si p est petit, ce qui rend le nombre total d'arêtes également petit, les graphiques d'Erdős-Rényi seront connectés.

Le deuxième type de graphe qu’ils ont considéré est appelé graphe d -régulier. Dans de tels graphes, chaque nœud a le même nombre d’arêtes, d . (Ainsi, dans un graphe 3-régulier, chaque nœud est connecté à 3 autres nœuds, dans un graphe 7-régulier, chaque nœud est connecté à 7 autres, et ainsi de suite.)

(Photo avec schéma)

Les graphiques bien connectés bien qu’ils soient clairsemés (n’ayant qu’un petit nombre d’arêtes) sont appelés graphiques d’expansion. Celles-ci sont importantes dans de nombreux domaines des mathématiques, de la physique et de l'informatique, mais si vous souhaitez construire un graphe d'expansion avec un ensemble particulier de propriétés, vous constaterez qu'il s'agit d'un " problème étonnamment non trivial ", selon l'éminent mathématicien. Terry Tao. Les graphes d'Erdős-Rényi, bien qu'ils ne soient pas toujours extensibles, partagent bon nombre de leurs caractéristiques importantes. Et il s'avère cependant que si vous construisez un graphe -régulier et connectez les arêtes de manière aléatoire, vous obtiendrez un graphe d'expansion.

Joindre les deux bouts

En 2018, Ling, Xu et Bandeira ont deviné que le seuil de connectivité pourrait également mesurer l'émergence d'une synchronisation globale : si vous générez un graphique d'Erdős-Rényi avec p juste un peu plus grand que le seuil, le graphique devrait se synchroniser globalement. Ils ont fait des progrès partiels sur cette conjecture, et Strogatz, Kassabov et Townsend ont ensuite amélioré leur résultat. Mais il subsiste un écart important entre leur nombre et le seuil de connectivité.

En mars 2022, Townsend a rendu visite à Bandeira à Zurich. Ils ont réalisé qu'ils avaient une chance d'atteindre le seuil de connectivité et ont fait appel à Pedro Abdalla , un étudiant diplômé de Bandeira, qui à son tour a enrôlé son ami Victor Souza. Abdalla et Souza ont commencé à peaufiner les détails, mais ils se sont rapidement heurtés à des obstacles.

Il semblait que le hasard s’accompagnait de problèmes inévitables. À moins que p ne soit significativement plus grand que le seuil de connectivité, il y aurait probablement des fluctuations sauvages dans le nombre d'arêtes de chaque nœud. L'un peut être attaché à 100 arêtes ; un autre pourrait être attaché à aucun. "Comme pour tout bon problème, il riposte", a déclaré Souza. Abdalla et Souza ont réalisé qu'aborder le problème du point de vue des graphiques aléatoires ne fonctionnerait pas. Au lieu de cela, ils utiliseraient le fait que la plupart des graphes d’Erdős-Rényi sont des expanseurs. "Après ce changement apparemment innocent, de nombreuses pièces du puzzle ont commencé à se mettre en place", a déclaré Souza. "En fin de compte, nous obtenons un résultat bien meilleur que ce à quoi nous nous attendions." Les graphiques sont accompagnés d'un nombre appelé expansion qui mesure la difficulté de les couper en deux, normalisé à la taille du graphique. Plus ce nombre est grand, plus il est difficile de le diviser en deux en supprimant des nœuds.

Au cours des mois suivants, l’équipe a complété le reste de l’argumentation en publiant son article en ligne en octobre. Leur preuve montre qu'avec suffisamment de temps, si le graphe a suffisamment d'expansion, le modèle homogène de Kuramoto se synchronisera toujours globalement.

Sur la seule route

L’un des plus grands mystères restants de l’étude mathématique de la synchronisation ne nécessite qu’une petite modification du modèle présenté dans le nouvel article : que se passe-t-il si certaines paires d’oscillateurs se synchronisent, mais que d’autres s’en écartent ? Dans cette situation, " presque tous nos outils disparaissent immédiatement ", a déclaré Souza. Si les chercheurs parviennent à progresser sur cette version du problème, ces techniques aideront probablement Bandeira à résoudre les problèmes de regroupement de données qu’il avait entrepris de résoudre avant de se tourner vers la synchronisation.

Au-delà de cela, il existe des classes de graphiques outre les extensions, des modèles plus complexes que la synchronisation globale et des modèles de synchronisation qui ne supposent pas que chaque nœud et chaque arête sont identiques. En 2018, Saber Jafarpour et Francesco Bullo de l'Université de Californie à Santa Barbara ont proposé un test de synchronisation globale qui fonctionne lorsque les rotateurs n'ont pas de poids ni de fréquences préférées identiques. L'équipe de Bianconi et d'autres ont travaillé avec des réseaux dont les liens impliquent trois, quatre nœuds ou plus, plutôt que de simples paires.

Bandeira et Abdalla tentent déjà d'aller au-delà des modèles Erdős-Rényi et d -regular vers d'autres modèles de graphes aléatoires plus réalistes. En août dernier, ils ont partagé un article , co-écrit avec Clara Invernizzi, sur la synchronisation dans les graphes géométriques aléatoires. Dans les graphes géométriques aléatoires, conçus en 1961, les nœuds sont dispersés de manière aléatoire dans l'espace, peut-être sur une surface comme une sphère ou un plan. Les arêtes sont placées entre des paires de nœuds s'ils se trouvent à une certaine distance les uns des autres. Leur inventeur, Edgar Gilbert, espérait modéliser des réseaux de communication dans lesquels les messages ne peuvent parcourir que de courtes distances, ou la propagation d'agents pathogènes infectieux qui nécessitent un contact étroit pour se transmettre. Des modèles géométriques aléatoires permettraient également de mieux capturer les liens entre les lucioles d'un essaim, qui se synchronisent en observant leurs voisines, a déclaré Bandeira.

Bien entendu, relier les résultats mathématiques au monde réel est un défi. "Je pense qu'il serait un peu mensonger de prétendre que cela est imposé par les applications", a déclaré Strogatz, qui a également noté que le modèle homogène de Kuramoto ne peut jamais capturer la variation inhérente aux systèmes biologiques. Souza a ajouté : " Il y a de nombreuses questions fondamentales que nous ne savons toujours pas comment résoudre. C'est plutôt comme explorer la jungle. " 



 

Auteur: Internet

Info: https://www.quantamagazine.org - Leïla Sloman, 24 juillet 2023

[ évolution ]

 

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méta-moteur

Le comportement de cet animal est programmé mécaniquement.

Des interactions biomécaniques, plutôt que des neurones, contrôlent les mouvements de l'un des animaux les plus simples. Cette découverte offre un aperçu de la façon dont le comportement animal fonctionnait avant l'apparition des neurones.

L'animal extrêmement simple Trichoplax adhaerens se déplace et réagit à son environnement avec agilité et avec un but apparent, mais il n'a pas de neurones ou de muscles pour coordonner ses mouvements. De nouveaux travaux montrent que les interactions biomécaniques entre les cils de l'animal suffisent à en expliquer ses mouvements.

Le biophysicien Manu Prakash se souvient très bien du moment où, tard dans la nuit, dans le laboratoire d'un collègue, il y a une douzaine d'années, il a regardé dans un microscope et a rencontré sa nouvelle obsession. L'animal sous les lentilles n'était pas très beau à voir, ressemblant plus à une amibe qu'à autre chose : une tache multicellulaire aplatie, de 20 microns d'épaisseur et de quelques millimètres de diamètre, sans tête ni queue. Elle se déplaçait grâce à des milliers de cils qui recouvraient sa face inférieure pour former la "plaque velue collante" qui lui a inspiré son nom latin, Trichoplax adhaerens.

Cette étrange créature marine, classée dans la catégorie des placozoaires, dispose pratiquement d'une branche entière de l'arbre de l'évolution de la vie pour elle-même, ainsi que du plus petit génome connu du règne animal. Mais ce qui a le plus intrigué Prakash, c'est la grâce, l'agilité et l'efficacité bien orchestrées avec lesquelles les milliers ou les millions de cellules du Trichoplax se déplacent.

Après tout, une telle coordination nécessite habituellement des neurones et des muscles - et le Trichoplax n'en a pas.

Prakash s'est ensuite associé à Matthew Storm Bull, alors étudiant diplômé de l'université de Stanford, pour faire de cet étrange organisme la vedette d'un projet ambitieux visant à comprendre comment les systèmes neuromusculaires ont pu évoluer et comment les premières créatures multicellulaires ont réussi à se déplacer, à trouver de la nourriture et à se reproduire avant l'existence des neurones.

"J'appelle souvent ce projet, en plaisantant, la neuroscience sans les neurones", a déclaré M. Prakash.

Dans un trio de prétirés totalisant plus de 100 pages - publiés simultanément sur le serveur arxiv.org l'année dernière - lui et Bull ont montré que le comportement de Trichoplax pouvait être décrit entièrement dans le langage de la physique et des systèmes dynamiques. Les interactions mécaniques qui commencent au niveau d'un seul cilium, puis se multiplient sur des millions de cellules et s'étendent à des niveaux supérieurs de structure, expliquent entièrement la locomotion coordonnée de l'animal tout entier. L'organisme ne "choisit" pas ce qu'il doit faire. Au contraire, la horde de cils individuels se déplace simplement - et l'animal dans son ensemble se comporte comme s'il était dirigé par un système nerveux. Les chercheurs ont même montré que la dynamique des cils présente des propriétés qui sont généralement considérées comme des signes distinctifs des neurones.

Ces travaux démontrent non seulement comment de simples interactions mécaniques peuvent générer une incroyable complexité, mais ils racontent également une histoire fascinante sur ce qui aurait pu précéder l'évolution du système nerveux.

"C'est un tour de force de la biophysique", a déclaré Orit Peleg, de l'université du Colorado à Boulder, qui n'a pas participé aux études. Ces découvertes ont déjà commencé à inspirer la conception de machines mécaniques et de robots, et peut-être même une nouvelle façon de penser au rôle des systèmes nerveux dans le comportement animal. 

La frontière entre le simple et le complexe

Les cerveaux sont surestimés. "Un cerveau est quelque chose qui ne fonctionne que dans le contexte très spécifique de son corps", a déclaré Bull. Dans les domaines connus sous le nom de "robotique douce" et de "matière active", la recherche a démontré que la bonne dynamique mécanique peut suffire à accomplir des tâches complexes sans contrôle centralisé. En fait, les cellules seules sont capables de comportements remarquables, et elles peuvent s'assembler en systèmes collectifs (comme les moisissures ou les xénobots) qui peuvent accomplir encore plus, le tout sans l'aide de neurones ou de muscles.

Mais est-ce possible à l'échelle d'un animal multicellulaire entier ?

Le Trichoplax fut un cas d'étude parfait : assez simple pour être étudié dans les moindres détails, mais aussi assez compliqué pour offrir quelque chose de nouveau aux chercheurs. En l'observant, "vous regardez simplement une danse", a déclaré Prakash. "Elle est d'une incroyable complexité". Elle tourne et se déplace sur des surfaces. Elle s'accroche à des plaques d'algues pour les piéger et les consommer comme nourriture. Elle se reproduit asexuellement en se divisant en deux.

"Un organisme comme celui-ci se situe dans un régime intermédiaire entre quelque chose de réellement complexe, comme un vertébré, et quelque chose qui commence à devenir complexe, comme les eucaryotes unicellulaires", explique Kirsty Wan, chercheur à l'université d'Exeter en Angleterre, qui étudie la locomotion ciliaire.

Ce terrain intermédiaire entre les cellules uniques et les animaux dotés de muscles et de systèmes nerveux semblait être l'endroit idéal pour que Prakash et Bull posent leurs questions. "Pour moi, un organisme est une idée", a déclaré Prakash, un terrain de jeu pour tester des hypothèses et un berceau de connaissances potentielles.

Prakash a d'abord construit de nouveaux microscopes permettant d'examiner le Trichoplax par en dessous et sur le côté, et a trouvé comment suivre le mouvement à grande vitesse de ses cils. (Ce n'était pas un terrain entièrement nouveau pour lui, puisqu'il était déjà célèbre pour ses travaux sur le Foldscope, un microscope facile à assembler et dont la fabrication coûte moins d'un dollar). Il pouvait alors voir et suivre des millions de cils individuels, chacun apparaissant comme une minuscule étincelle dans le champ de vision du microscope pendant une fraction de seconde à la fois. "Vous ne voyez que les empreintes lorsqu'elles se posent sur la surface", a déclaré Prakash.

Lui-même - et plus tard Bull, qui a rejoint son laboratoire il y a six ans - ont passé des heures à observer l'orientation de ces petites empreintes. Pour que ces motifs complexes soient possibles, les scientifiques savaient que les cils devaient être engagés dans une sorte de communication à longue distance. Mais ils ne savaient pas comment.

Ils ont donc commencé à rassembler les pièces du puzzle, jusqu'à ce que, l'année dernière, ils décident enfin qu'ils avaient leur histoire.

Une marche en pilote automatique

Au départ, Prakash et Bull s'attendaient à ce que les cils glissent sur des surfaces, avec une fine couche de liquide séparant l'animal du substrat. Après tout, les cils sont généralement vus dans le contexte des fluides : ils propulsent des bactéries ou d'autres organismes dans l'eau, ou déplacent le mucus ou les fluides cérébrospinaux dans un corps. Mais lorsque les chercheurs ont regardé dans leurs microscopes, ils ont constaté que les cils semblaient marcher, et non nager.

Bien que l'on sache que certains organismes unicellulaires utilisent les cils pour ramper, ce type de coordination n'avait jamais été observé à cette échelle. "Plutôt qu'utiliser les cils pour propulser un fluide, il s'agit de mécanique, de friction, d'adhésion et de toutes sortes de mécanismes solides très intéressants", a-t-elle déclaré.

Prakash, Bull et Laurel Kroo, une étudiante diplômée en génie mécanique de Stanford, ont donc entrepris de caractériser la démarche des cils. Ils ont suivi la trajectoire de l'extrémité de chaque cilium au fil du temps, l'observant tracer des cercles et pousser contre des surfaces. Ils ont défini trois types d'interactions : le glissement, au cours duquel les cils effleurent à peine la surface ; la marche, lorsque les cils adhèrent brièvement à la surface avant de se détacher ; et le calage, lorsque les cils restent coincés contre la surface.

Dans leurs modèles, l'activité de marche émergeait naturellement de l'interaction entre les forces motrices internes des cils et l'énergie de leur adhésion à la surface. Le bon équilibre entre ces deux paramètres (calculé à partir de mesures expérimentales de l'orientation, de la hauteur et de la fréquence des battements des cils) permettant une locomotion régulière, chaque cilium se collant puis se soulevant, comme une jambe. Un mauvais équilibre produisant les phases de glissement ou de décrochage.

Nous pensons généralement, lorsque quelque chose se passe comme ça, qu'il y a un signal interne semblable à une horloge qui dit : "OK, allez-y, arrêtez-vous, allez-y, arrêtez-vous", a déclaré Simon Sponberg, biophysicien à l'Institut de technologie de Géorgie. "Ce n'est pas ce qui se passe ici. Les cils ne sont pas rythmés. Il n'y a pas une chose centrale qui dit 'Go, go, go' ou autre. Ce sont les interactions mécaniques qui mettent en place quelque chose qui va, qui va, qui va."

De plus, la marche pourrait être modélisée comme un système excitable, c'est-à-dire un système dans lequel, sous certaines conditions, les signaux se propagent et s'amplifient au lieu de s'atténuer progressivement et de s'arrêter. Un neurone est un exemple classique de système excitable : De petites perturbations de tension peuvent provoquer une décharge soudaine et, au-delà d'un certain seuil, le nouvel état stimulé se propage au reste du système. Le même phénomène semble se produire ici avec les cils. Dans les expériences et les simulations, de petites perturbations de hauteur, plutôt que de tension, entraînent des changements relativement importants dans l'activité des cils voisins : Ils peuvent soudainement changer d'orientation, et même passer d'un état de stase à un état de marche. "C'est incroyablement non linéaire", a déclaré Prakash.

En fait, les modèles de cils de Prakash, Bull et Kroo se sont avérés très bien adaptés aux modèles établis pour les potentiels d'action au sein des neurones. "Ce type de phénomène unique se prête à une analogie très intéressante avec ce que l'on observe dans la dynamique non linéaire des neurones individuels", a déclaré Bull. Sponberg est d'accord. "C'est en fait très similaire. Il y a une accumulation de l'énergie, et puis pop, et puis pop, et puis pop".

Les cils s'assemblent comme des oiseaux

Forts de cette description mathématique, Prakash et Bull ont examiné comment chaque cilium pousse et tire sur ses voisins lors de son interaction avec la surface, et comment toute ces activités indépendantes peuvent se transformer en quelque chose de synchronisé et cohérent.

Ils ont mesuré comment la démarche mécanique de chaque cilium entraînait de petites fluctuations locales de la hauteur du tissu. Ils ont ensuite écrit des équations pour expliquer comment ces fluctuations pouvaient influencer le comportement des cellules voisines, alors même que les cils de ces cellules effectuaient leurs propres mouvements, comme un réseau de ressorts reliant de minuscules moteurs oscillants.

Lorsque les chercheurs ont modélisé "cette danse entre élasticité et activité", ils ont constaté que les interactions mécaniques - de cils poussant contre un substrat et de cellules se tirant les unes les autres - transmettaient rapidement des informations à travers l'organisme. La stimulation d'une région entraînait des vagues d'orientation synchronisée des cils qui se déplaçaient dans le tissu. "Cette élasticité et cette tension dans la physique d'un cilium qui marche, maintenant multipliées par des millions d'entre eux dans une feuille, donnent en fait lieu à un comportement mobile cohérent", a déclaré Prakash.

Et ces modèles d'orientation synchronisés peuvent être complexes : parfois, l'activité du système produit des tourbillons, les cils étant orientés autour d'un seul point. Dans d'autres cas, les cils se réorientent en quelques fractions de seconde, pointant d'abord dans une direction puis dans une autre - se regroupant comme le ferait un groupe d'étourneaux ou un banc de poissons, et donnant lieu à une agilité qui permet à l'animal de changer de direction en un clin d'œil.

"Nous avons été très surpris lorsque nous avons vu pour la première fois ces cils se réorienter en une seconde", a déclaré M. Bull.

Ce flocage agile est particulièrement intriguant. Le flocage se produit généralement dans des systèmes qui se comportent comme des fluides : les oiseaux et les poissons individuels, par exemple, peuvent échanger librement leurs positions avec leurs compagnons. Mais cela ne peut pas se produire chez Trichoplax, car ses cils sont des composants de cellules qui ont des positions fixes. Les cils se déplacent comme "un troupeau solide", explique Ricard Alert, physicien à l'Institut Max Planck pour la physique des systèmes complexes.

Prakash et Bull ont également constaté dans leurs simulations que la transmission d'informations était sélective : Après certains stimuli, l'énergie injectée dans le système par les cils se dissipe tout simplement, au lieu de se propager et de modifier le comportement de l'organisme. Nous utilisons notre cerveau pour faire cela tout le temps, pour observer avec nos yeux et reconnaître une situation et dire : "Je dois soit ignorer ça, soit y répondre", a déclaré M. Sponberg.

Finalement, Prakash et Bull ont découvert qu'ils pouvaient écrire un ensemble de règles mécaniques indiquant quand le Trichoplax peut tourner sur place ou se déplacer en cercles asymétriques, quand il peut suivre une trajectoire rectiligne ou dévier soudainement vers la gauche, et quand il peut même utiliser sa propre mécanique pour se déchirer en deux organismes distincts.

"Les trajectoires des animaux eux-mêmes sont littéralement codées" via ces simples propriétés mécaniques, a déclaré Prakash.

Il suppose que l'animal pourrait tirer parti de ces dynamiques de rotation et de reptation dans le cadre d'une stratégie de "course et culbute" pour trouver de la nourriture ou d'autres ressources dans son environnement. Lorsque les cils s'alignent, l'organisme peut "courir", en continuant dans la direction qui vient de lui apporter quelque chose de bénéfique ; lorsque cette ressource semble s'épuiser, Trichoplax peut utiliser son état de vortex ciliaire pour se retourner et tracer une nouvelle route.

Si d'autres études démontrent que c'est le cas, "ce sera très excitant", a déclaré Jordi Garcia-Ojalvo, professeur de biologie systémique à l'université Pompeu Fabra de Barcelone. Ce mécanisme permettrait de faire le lien entre beaucoups d'échelles, non seulement entre la structure moléculaire, le tissu et l'organisme, mais aussi pour ce qui concerne écologie et environnement.

En fait, pour de nombreux chercheurs, c'est en grande partie ce qui rend ce travail unique et fascinant. Habituellement, les approches des systèmes biologiques basées sur la physique décrivent l'activité à une ou deux échelles de complexité, mais pas au niveau du comportement d'un animal entier. "C'est une réussite...  vraiment rare", a déclaré M. Alert.

Plus gratifiant encore, à chacune de ces échelles, la mécanique exploite des principes qui font écho à la dynamique des neurones. "Ce modèle est purement mécanique. Néanmoins, le système dans son ensemble possède un grand nombre des propriétés que nous associons aux systèmes neuro-mécaniques : il est construit sur une base d'excitabilité, il trouve constamment un équilibre délicat entre sensibilité et stabilité et il est capable de comportements collectifs complexes." a déclaré Sponberg.

"Jusqu'où ces systèmes mécaniques peuvent-ils nous mener ?... Très loin." a-t-il ajouté.

Cela a des implications sur la façon dont les neuroscientifiques pensent au lien entre l'activité neuronale et le comportement de manière plus générale. "Les organismes sont de véritables objets dans l'espace", a déclaré Ricard Solé, biophysicien à l'ICREA, l'institution catalane pour la recherche et les études avancées, en Espagne. Si la mécanique seule peut expliquer entièrement certains comportements simples, les neuroscientifiques voudront peut-être examiner de plus près comment le système nerveux tire parti de la biophysique d'un animal pour obtenir des comportements complexes dans d'autres situations.

"Ce que fait le système nerveux n'est peut-être pas ce que nous pensions qu'il faisait", a déclaré M. Sponberg.

Un pas vers la multicellularité

"L'étude de Trichoplax peut nous donner un aperçu de ce qu'il a fallu faire pour développer des mécanismes de contrôle plus complexes comme les muscles et les systèmes nerveux", a déclaré Wan. "Avant d'arriver à ça, quelle est le meilleur truc à suivre ? Ca pourrait bien être ça".

Alert est d'accord. "C'est une façon si simple d'avoir des comportements organisationnels tels que l'agilité que c'est peut-être ainsi qu'ils ont émergé au début et  au cours de l'évolution, avant que les systèmes neuronaux ne se développent. Peut-être que ce que nous voyons n'est qu'un fossile vivant de ce qui était la norme à l'époque".

Solé considère que Trichoplax occupe une "twilight zone... au centre des grandes transitions vers la multicellularité complexe". L'animal semble commencer à mettre en place "les conditions préalables pour atteindre la vraie complexité, celle où les neurones semblent être nécessaires."

Prakash, Bull et leurs collaborateurs cherchent maintenant à savoir si Trichoplax pourrait être capable d'autres types de comportements ou même d'apprentissage. Que pourrait-il réaliser d'autre dans différents contextes environnementaux ? La prise en compte de sa biochimie en plus de sa mécanique ouvrirait-elle vers un autre niveau de comportement ?

Les étudiants du laboratoire de Prakash ont déjà commencé à construire des exemples fonctionnels de ces machines. Kroo, par exemple, a construit un dispositif de natation robotisé actionné par un matériau viscoélastique appelé mousse active : placée dans des fluides non newtoniens comme des suspensions d'amidon de maïs, elle peut se propulser vers l'avant.

"Jusqu'où voulez-vous aller ? a demandé Peleg. "Pouvez-vous construire un cerveau, juste à partir de ce genre de réseaux mécaniques ?"

Prakash considère que ce n'est que le premier chapitre de ce qui sera probablement une saga de plusieurs décennies. "Essayer de vraiment comprendre cet animal est pour moi un voyage de 30 ou 40 ans", a-t-il dit. "Nous avons terminé notre première décennie... C'est la fin d'une époque et le début d'une autre".

Auteur: Internet

Info: https://www.quantamagazine.org/before-brains-mechanics-may-have-ruled-animal-behavior. Jordana Cepelewicz, 16 mars 2022. Trad Mg

[ cerveau rétroactif ] [ échelles mélangées ] [ action-réaction ] [ plus petit dénominateur commun ] [ grégarisme ] [ essaims ] [ murmurations mathématiques ]

 

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résonances organiques

Les avantages sociaux de la synchronisation de notre cerveau

Nos ondes cérébrales peuvent s'aligner lorsque nous travaillons et jouons en étroite collaboration. Le phénomène, connu sous le nom de synchronisation inter-cerveau, suggère que la collaboration est biologique.

(Photo : De plus en plus de recherches montrent comment l’activité neuronale peut se synchroniser entre plusieurs personnes, ce qui entraîne de meilleurs résultats sociaux et créatifs.)

Le célèbre duo de pianos polonais Marek et Wacek n'utilisait pas de partitions lors de ses concerts live. Et pourtant, sur scène, le duo semblait parfaitement synchronisé. Sur des pianos adjacents, ils reprenaient de manière ludique divers thèmes musicaux, mêlé musique classique et jazz et improvisé en temps réel. "Nous avons suivi le courant", a déclaré Marek Tomaszewski, qui a joué avec Wacek Kisielewski jusqu'à la mort de Wacek en 1986. "C'était un pur plaisir."

Les pianistes semblaient lire dans les pensées des autres en échangeant des regards. C’était, dit Marek, comme s’ils étaient sur la même longueur d’onde. Un nombre croissant de recherches suggèrent que cela aurait pu être littéralement vrai.

Des dizaines d'expériences récentes étudiant l'activité cérébrale de personnes qui se produisent et travaillent ensemble – pianistes en duo, joueurs de cartes, enseignants et étudiants, puzzleurs et autres – montrent que leurs ondes cérébrales peuvent s'aligner dans un phénomène connu sous le nom de synchronisation neuronale interpersonnelle, également connue sous le nom de synchronie inter-cerveau.

"De nombreuses recherches montrent désormais que les personnes qui interagissent ensemble présentent des activités neuronales coordonnées", a déclaré Giacomo Novembre, neuroscientifique cognitif à l'Institut italien de technologie de Rome, qui a publié l'été dernier un article clé sur ce sujet. Les études se sont multipliées au cours des dernières années – notamment la semaine dernière – au fur et à mesure que de nouveaux outils et des techniques améliorées ont affiné la science et la théorie.

Ils montrent que la synchronisation entre les cerveaux présente des avantages. Qui conduit à une meilleure résolution de problèmes, à un meilleur apprentissage et à une meilleure coopération, et même à des comportements qui aident les autres à leur dépens. De plus, des études récentes dans lesquelles les cerveaux ont été stimulés par un courant électrique suggèrent que la synchronisation elle-même pourrait entraîner l'amélioration des performances observée par les scientifiques.

" La cognition est quelque chose qui se produit non seulement dans le crâne, mais aussi en relation avec l'environnement et avec les autres ", a déclaré Guillaume Dumas, professeur de psychiatrie computationnelle à l'Université de Montréal. Comprendre quand et comment nos cerveaux se synchronisent pourrait nous aider à communiquer plus efficacement, à concevoir de meilleures salles de classe et à aider les équipes à coopérer.

Se synchroniser


Les humains, comme les autres animaux sociaux, ont tendance à synchroniser leurs comportements. Si vous marchez à côté de quelqu’un, vous commencerez probablement à marcher au pas. Si deux personnes s’assoient côte à côte dans des fauteuils à bascule, il y a de fortes chances qu’elles commencent à se balancer au même rythme.

Une telle synchronisation comportementale, selon les recherches, nous rend plus confiants, nous aide à créer des liens et stimule nos instincts sociaux. Dans une étude, danser de manière synchronisée permettait aux participants de se sentir émotionnellement proches les uns des autres – bien plus que pour les groupes qui se déplaçaient de manière asynchrone. Dans une autre étude, les participants qui scandaient des mots de manière rythmée étaient plus susceptibles de coopérer à un jeu d'investissement. Même une simple marche à l'unisson avec une personne issue d'une minorité ethnique peut réduire les préjugés.

" La coordination est une caractéristique de l’interaction sociale. C'est vraiment crucial " a déclaré Novembre. "Lorsque la coordination est altérée, l'interaction sociale est profondément altérée."

Lorsque nos mouvements se coordonnent, une myriade de synchronisations invisibles à l’œil nu se produisent également à l’intérieur de notre corps. Quand les gens tambourinent ensemble, leurs cœurs battent ensemble. Les fréquences cardiaques des thérapeutes et de leurs patients peuvent se synchroniser pendant les séances (surtout si la relation thérapeutique fonctionne bien), tout comme celles des couples mariés. D’autres processus physiologiques, tels que notre rythme respiratoire et nos niveaux de conductance cutanée, peuvent également correspondre à ceux d’autres personnes.

(Photo : Ce n’est qu’au cours des 20 dernières années qu’est apparue une technologie permettant aux neuroscientifiques d’étudier la synchronisation inter-cerveau. L'hyperscanning utilise la spectroscopie fonctionnelle proche infrarouge, portée sur un appareil semblable à un bonnet de bain, pour surveiller l'activité neuronale de plusieurs individus s'engageant socialement.)

L’activité de notre cerveau peut-elle se synchroniser ? En 1965, la revue Science a publié les résultats d’une expérience suggérant que c’était possible. Des scientifiques de l'Université Thomas Jefferson de Philadelphie ont testé des paires de jumeaux identiques en insérant des électrodes sous leur cuir chevelu pour mesurer leurs ondes cérébrales – une technique appelée électroencéphalographie. Les chercheurs ont rapporté que lorsque les jumeaux restaient dans des pièces séparées, si l’un d’eux fermait les yeux, les ondes cérébrales des deux reflétaient le même mouvement. Les pointes sur l'électroencéphalographe de l'un des jumeaux reflétaient celles de l'autre. L’étude était cependant erronée sur le plan méthodologique. Les chercheurs avaient testé plusieurs paires de jumeaux mais n'avaient publié les résultats que pour la paire dans laquelle ils avaient observé une synchronie. Voilà qui n’a pas aidé ce domaine universitaire en plein essor. Pendant des décennies, la recherche sur la synchronisation intercérébrale fut donc reléguée dans la catégorie des " étranges bizarreries paranormales " et n’a pas été prise au sérieux.

La réputation du domaine a commencé à changer au début des années 2000 avec la popularisation de l' hyperscanning, une technique qui permet aux scientifiques de scanner simultanément le cerveau de plusieurs personnes en interaction. Au début, cela impliquait de demander à des paires de volontaires de s'allonger dans des appareils d'IRMf séparés, ce qui limitait considérablement les types d'études que les scientifiques pouvaient réaliser. Les chercheurs ont finalement pu utiliser la spectroscopie fonctionnelle proche infrarouge (fNIRS), qui mesure l'activité des neurones dans les couches externes du cortex. Le grand avantage de cette technologie est sa facilité d'utilisation : les volontaires peuvent jouer de la batterie ou étudier dans une salle de classe tout en portant des bonnets fNIRS, qui ressemblent à des bonnets de bain avec une multitude de câbles qui dépassent.

Lorsque plusieurs personnes  interagissent tout en portant des casquettes fNIRS, les scientifiques ont commencé à découvrir une activité interneurale synchronisée dans des régions du cerveau, qui variaient selon la tâche et la configuration de l'étude. Ils ont également observé des ondes cérébrales, qui représentent des schémas électriques dans le déclenchement neuronal, se synchronisant sur plusieurs fréquences. Sur une lecture électroencéphalographique de deux cerveaux synchronisés, les lignes représentant l'activité neuronale de chaque personne fluctuent ensemble : chaque fois que l'une monte ou descend, l'autre fait de même, bien que parfois avec un décalage dans le temps. Parfois, des ondes cérébrales apparaissent dans des images en miroir – lorsque celles d’une personne montent, celles de l’autre descendent en même temps et avec une ampleur similaire – ce que certains chercheurs considèrent également comme une forme de synchronie.

Avec de nouveaux outils, il est devenu de plus en plus clair que la synchronisation inter-cerveau n’était ni un charabia métaphysique ni le produit de recherches erronées. "Le signal est définitivement là", a déclaré Antonia Hamilton , neuroscientifique sociale à l'University College de Londres. Ce qui s'est avéré plus difficile à comprendre, c'est comment deux cerveaux indépendants, dans deux corps distincts, pouvaient montrer une activité similaire dans l'espace. Maintenant, dit Hamilton, la grande question est : " Qu’est-ce que cela nous raconte ? "

La recette de la synchronisation

Novembre est fasciné depuis longtemps par la manière dont les humains se coordonnent pour atteindre des objectifs communs. Comment les musiciens – les pianistes en duo, par exemple – collaborent-ils si bien ? Pourtant, c'est en pensant aux animaux, comme les lucioles synchronisant leurs flashs, qu'il s'est mis sur la voie de l'étude des ingrédients nécessaires à l'apparition de la synchronisation inter-cerveau.

Étant donné que la synchronie est " si répandue parmi tant d’espèces différentes ", se souvient-il, " je me suis dit : OK, alors il pourrait y avoir un moyen très simple de l’expliquer. "

Novembre et ses collègues ont mis en place une expérience, publiée l'été dernier , dans laquelle des paires de volontaires ne faisaient que s'asseoir l'un en face de l'autre tandis qu'un équipement photographique suivait les mouvements de leurs yeux, de leur visage et de leur corps. Parfois, les volontaires pouvaient se voir ; à d'autres moments, ils étaient séparés par une cloison. Les chercheurs ont découvert que dès que les volontaires se regardaient dans les yeux, leurs ondes cérébrales se synchronisaient instantanément. Le sourire s’est avéré encore plus puissant pour aligner les ondes cérébrales.

" Il y a quelque chose de spontané dans la synchronisation", a déclaré Novembre.

Le mouvement est également lié à l’activité synchronisée des ondes cérébrales. Dans l'étude de Novembre, lorsque les gens bougeaient leur corps de manière synchronisée – si, par exemple, l'un levait la main et que l'autre faisait de même – leur activité neuronale correspondait, avec un léger décalage. Cependant, la synchronisation intercérébrale va au-delà de la simple reproduction des mouvements physiques. Dans une étude publiée l'automne dernier sur des pianistes jouant en duo, une rupture de la synchronisation comportementale n'a pas provoqué la désynchronisation des deux cerveaux.

Un autre ingrédient important de la synchronisation neuronale "face à face" semble être la prédiction mutuelle : anticiper les réponses et les comportements d'une autre personne. Chaque personne " bouge ses mains, son visage ou son corps, ou parle ", a expliqué Hamilton, " et réagit également aux actions de l'autre personne ". Par exemple, lorsque les gens jouaient au jeu de cartes italien Tressette, l'activité neuronale des partenaires se synchronisait, mais le cerveau de leurs adversaires ne s'alignait pas avec eux.

Le partage d’objectifs et l’attention commune semblent souvent cruciaux pour la synchronisation inter-cerveau. Dans une expérience menée en Chine, des groupes de trois personnes ont dû coopérer pour résoudre un problème. Se présenta un problème : l'un des membres de l'équipe était un chercheur qui faisait seulement semblant de s'engager dans la tâche, hochant la tête et commentant lorsque c'était approprié, mais ne se souciant pas vraiment du résultat. Son cerveau ne se synchronisait pas avec celui des véritables membres de l'équipe.

Cependant, certains critiques affirment que l’apparition d’une activité cérébrale synchronisée n’est pas la preuve d’une quelconque connexion, mais peut plutôt s’expliquer par la réaction des personnes à un environnement partagé. " Imaginez deux personnes écoutant la même station de radio dans deux pièces différentes ", a écrit Clay Holroyd, neuroscientifique cognitif à l'Université de Gand en Belgique qui n'étudie pas la synchronisation intercérébrale, dans un article de 2022 . "La synchronisation inter-cerveau pourrait augmenter pendant les chansons qu'ils apprécient  ensemble par rapport aux chansons qu'ils trouvent tous deux ennuyeuses, mais cela ne serait pas une conséquence d'un couplage direct de cerveau à cerveau."

Pour tester cette critique, des scientifiques de l'Université de Pittsburgh et de l'Université Temple ont conçu une expérience dans laquelle les participants travaillaient différemment sur une tâche ciblée : terminer un puzzle . Les volontaires ont soit assemblé un puzzle en collaboration, soit travaillé sur des puzzles identiques séparément, côte à côte. Même s’il existait une certaine synchronisation interneurale entre les chercheurs travaillant de manière indépendante, elle était bien plus importante chez ceux qui collaboraient.

Pour Novembre, ces découvertes et d’autres similaires suggèrent que la synchronisation intercérébrale est plus qu’un artefact environnemental. "Tant que vous mesurerez le cerveau lors d'une interaction sociale, vous devrez toujours faire face à ce problème", a-t-il déclaré. "Les cerveaux en interaction sociale seront exposés à des informations similaires."

(Photo : La Mutual Wave Machine, qui a fait le tour des villes du monde entier de 2013 à 2019, permet aux passants d'explorer la synchronisation intercérébrale par paires tout en générant des données pour la recherche en neurosciences.)

À moins qu’ils ne soient à des endroits différents, bien sûr. Pendant la pandémie, les chercheurs se sont intéressés à comprendre comment la synchronisation intercérébrale pourrait changer lorsque les gens parlent face à face par vidéo. Dans une étude, publiée fin 2022 , Dumas et ses collègues ont mesuré l'activité cérébrale des mères et de leurs préadolescents lorsqu'ils communiquaient par vidéo en ligne. Les cerveaux des couples étaient à peine synchronisés, bien moins que lorsqu'ils parlaient en vrai. Une telle mauvaise synchronisation inter-cerveau en ligne pourrait aider à expliquer pourquoi les réunions Zoom ont tendance à être si fatigantes, selon les auteurs de l'étude.

"Il manque beaucoup de choses dans un appel Zoom par rapport à une interaction en face à face", a déclaré Hamilton, qui n'a pas participé à la recherche. " Votre contact visuel est un peu différent parce que le positionnement de la caméra est incorrect. Plus important encore, votre attention commune est différente."

Identifier les ingrédients nécessaires à l'apparition de la synchronisation inter-cerveau – qu'il s'agisse d'un contact visuel, d'un sourire ou du partage d'un objectif – pourrait nous aider à mieux profiter des avantages de la synchronisation avec les autres. Lorsque nous sommes sur la même longueur d’onde, les choses deviennent tout simplement plus faciles.

Avantages émergents

La neuroscientifique cognitive Suzanne Dikker aime exprimer son côté créatif en utilisant l'art pour étudier le fonctionnement du cerveau humain. Pour capturer la notion insaisissable d’être sur la même longueur d’onde, elle et ses collègues ont créé la Mutual Wave Machine : mi-installation artistique, mi-expérience neurologique. Entre 2013 et 2019, les passants de diverses villes du monde – Madrid, New York, Toronto, Athènes, Moscou et autres – ont pu faire équipe avec une autre personne pour explorer la synchronisation interneurale. Ils sont assis dans deux structures en forme de coquille se faisant face tout en portant un casque électroencéphalographe pour mesurer leur activité cérébrale. Pendant qu’ils interagissent pendant 10 minutes, les coquilles s’éclairent avec des projections visuelles qui servaient de neurofeedback : plus les projections sont lumineuses, plus leurs ondes cérébrales sont couplées. Cependant, certaines paires n'étaient pas informées que la luminosité des projections reflétait leur niveau de synchronisation, tandis que d'autres voyaient de fausses projections.

Lorsque Dikker et ses collègues ont analysé les résultats, publiés en 2021, ils ont découvert que les couples qui savaient qu'ils voyaient du neurofeedback se synchronisaient davantage avec le temps – un effet motivé par leur motivation à rester concentrés sur leur partenaire, ont expliqué les chercheurs. Plus important encore, leur synchronisation accrue a augmenté le sentiment de connexion sociale entre les deux. Il est apparu qu’être sur la même longueur d’onde cérébrale pourrait aider à établir des relations.

Dikker a également étudié cette idée dans un cadre moins artistique : la salle de classe. Dans une salle de classe de fortune dans un laboratoire, un professeur de sciences du secondaire encadrait des groupes de quatre élèves maximum pendant que Dikker et ses collègues enregistraient leur activité cérébrale. Dans une étude publiée sur le serveur de prépublication biorxiv.org en 2019, les chercheurs ont rapporté que plus les cerveaux des étudiants et de l'enseignant étaient synchronisés, plus les étudiants retenaient le matériel lorsqu'ils étaient testés une semaine plus tard. Une analyse de 2022 portant sur 16 études a confirmé que la synchronisation intercérébrale est effectivement liée à un meilleur apprentissage.

" La personne qui prête le plus d'attention ou qui s'accroche le mieux au signal de l'orateur sera également la plus synchronisée avec d'autres personnes qui accordent également la plus grande attention à ce que dit l'orateur ", a déclaré Dikker.

Ce n'est pas seulement l'apprentissage qui semble stimulé lorsque nos cerveaux sont synchronisés, mais également les performances et la coopération de l'équipe. Dans une autre étude réalisée par Dikker et ses collègues, des groupes de quatre personnes ont réfléchi à des utilisations créatives d'une brique ou classé des éléments essentiels pour survivre à un accident d'avion. Les résultats ont montré que plus leurs ondes cérébrales étaient synchronisées, mieux ils effectuaient ces tâches en groupe. Entre-temps, d'autres études ont montré que les équipes neuronales synchronisées non seulement communiquent mieux, mais surpassent également les autres dans les activités créatives telles que l'interprétation de la poésie .

Alors que de nombreuses études ont établi un lien entre la synchronisation intercérébrale et un meilleur apprentissage et de meilleures performances, la question reste de savoir si la synchronisation entraîne réellement de telles améliorations. Serait-ce plutôt une mesure d’engagement ? "Les enfants qui prêtent attention à l'enseignant feront preuve d'une plus grande synchronisation avec cet enseignant parce qu'ils sont plus engagés", a déclaré Holroyd. "Mais cela ne signifie pas que les processus synchrones contribuent réellement d'une manière ou d'une autre à l'interaction et à l'apprentissage."

Pourtant, les expériences sur les animaux suggèrent que la synchronisation neuronale peut effectivement conduire à des changements de comportement. Lorsque l’activité neuronale des souris était mesurée en leur faisant porter de minuscules capteurs en forme de chapeau haut de forme, par exemple, la synchronisation inter-cerveau prédisait si et comment les animaux interagiraient dans le futur. "C'est une preuve assez solide qu'il existe une relation causale entre les deux", a déclaré Novembre.

Chez l’homme, les preuves les plus solides proviennent d’expériences utilisant la stimulation électrique du cerveau pour générer une synchronisation interneurale. Une fois les électrodes placées sur le cuir chevelu des personnes, des courants électriques peuvent passer entre les électrodes pour synchroniser l’activité neuronale du cerveau des personnes. En 2017, Novembre et son équipe ont réalisé la première de ces expériences. Les résultats suggèrent que la synchronisation des ondes cérébrales dans la bande bêta, liée aux fonctions motrices, améliore la capacité des participants à synchroniser les mouvements de leur corps – dans ce cas, en frappant un rythme avec leurs doigts.

Plusieurs études ont récemment reproduit les conclusions de Novembre. Fin 2023, des chercheurs ont découvert qu'une fois les ondes cérébrales synchronisées par stimulation électrique, leur capacité à coopérer dans un jeu informatique simple s'améliorait considérablement. Et l'été dernier d'autres scientifiques ont montré qu'une fois que deux cerveaux sont synchronisés, les gens parviennent mieux à transférer des informations et à se comprendre.

La science est nouvelle, donc le jury ne sait toujours pas s'il existe un véritable lien de causalité entre la synchronie et le comportement humain coopératif. Malgré cela, la science de la synchronisation neuronale nous montre déjà à quel point nous bénéficions lorsque nous faisons les choses en synchronisation avec les autres. Sur le plan biologique, nous sommes programmés pour nous connecter.


Auteur: Internet

Info: https://www.quantamagazine.org/ - Marta Zaraska, 28 mars 2024

[ intelligence collective ] [ manipulation du public ] [ collectives réverbérations ] [ implication ] [ rapports humains ] [ transe ] [ attention partagée ] [ murmurations ]

 

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parapsychologie

Le pays des aveugles de Koestler (I) 

Ainsi, après plusieurs détours, nous voilà de retour à notre point de départ. Ce "sentiment océanique" mystique se situe certainement à un étage supérieur de cette spirale que celui de l'enfant nouveau-né. L'enfant n'a pas encore d'identité personnelle, le mystique et le medium l'ont eux transcendée. Cette spirale a beaucoup de cercles, mais à chaque tour nous sommes confrontés à la même polarité et au même genre de monade, dont une face dit que je suis le centre du monde, et l'autre que je suis une petite partie en quête de la totalité. Nous pouvons considérer les phénomènes de parapsychologie comme les fruits de cette recherche - qu'ils se soient produits spontanément ou en laboratoire. La perception extra sensorielle apparait alors comme la plus haute manifestation du potentiel d'intégration de la matière vivante - qui, chez les humains, s'accompagne généralement d'un type d'auto-transcendance de l'émotion.

Alors que tout au long de notre excursion dans la biologie et la physique nous étions sur un terrain scientifique solide, nous voilà en pleine étape spéculative. Je ne prétends pas que ce soit un plus. Mais c'est la science moderne elle-même, avec ses vues paradoxales, qui nous y incite. Nous ne nous arrêterons pas à la "classique" télépathie-ESP ni à la prévision à court terme - pour lesquelles des explications physiques peuvent encore être trouvée. Car exclure clairvoyance, psychokinésie et coïncidences de séries ou de synchronicités, serait arbitraire, tout en laissant les choses telles qu'elles étaient avant. D'autre part, si on prend la "Tendance Intégrative" comme un principe universel comprenant des phénomènes causals, l'image devient grandement simplifiée, même si elle est encore hors de portée de notre compréhension. Au lieu de plusieurs mystères, nous voilà aujourd'hui confrontés à une seule tendance évolutive irréductible, issue de la constitution d'ensembles plus complexes venant de pièces diversifiées. La doctrine hippocratique de la "sympathie de toutes choses" en est un paradigme précoce. L'évolution des connaissances, avec ses maillages en branches spécialisées et leur confluence vers un delta unifié, en est un autre.

On pourrait en effet le substituer à la maladresse de termes comme "sérialité" et "Synchronicité" - qui mettent l'accent sur le temps seul, avec pour résultat une non-incarcération grâce à des expressions comme "évènements confluentiels". Les évènements confluentiels seraient-ils causals de manifestations d'une tendance à l'intégration. L'apparition du scarabée de Jung serait alors un évènement confluentiel. Ainsi les effets de la psychokinésie comme le lancer de dés et autres phénomènes paranormaux seraient aussi causals de ces phénomènes. Si on leur prête une signification, c'est qu'ils donnent l'impression d'avoir un lien de causalité, même si ils ne sont manifestement pas de cette sorte de pseudo-causalité. Le scarabée semble être attiré à la fenêtre de Jung par le patient qui raconte son rêve, les dés semblent être manipulés par la volonté de l'expérimentateur, le clairvoyant semble voir les cartes cachées. Les potentiels intégratifs de la vie semblent inclure la capacité de produire des effets pseudo-causals - qui provoquent un évènement confluentiel sans se soucier, pour ainsi dire, de l'emploi d'agents physiques. Il est donc très difficile de tracer une ligne de démarcation nette séparant causalité et non-causalité des évènements. Les animaux aveugles peuvent sentir leur chemin par des usages physiques plus grossiers comme le toucher ou l'odorat. Les chauves-souris utilisent une sorte de radar - ce qui il n'y a pas si longtemps aurait été vu par les naturalistes comme une hypothèse bien saugrenue. Des animaux équipés pour réagir aux photons - particules avec une masse nulle au repos qui peuvent également se comporter comme des ondes dans un milieu et, partant, semblent défier la causalité. Des hommes sans yeux comme les citoyens des pays des aveugles, rejetteraient surement l'affirmation qu'on peut percevoir des objets éloignés sans contact par toucher comme un non-sens occulte - ou bien déclareraient qu'une telle faculté, si elle existe vraiment, est certainement au-delà du domaine de la causalité physique, et devrait être appelé perception extra-sensorielle.

Un des neurophysiologistes les plus respectés de Grande-Bretagne, le Dr W. Walter Grey, a réalisé ces dernières années une série d'expériences remarquables. Il s'est fabriqué une machine électrique, qui par un effort de volonté, peut influer sur les évènements externes sans mouvement ni action manifeste via les impalpables pics électriques du cerveau. Cet effort nécessite un état particulier de concentration, composé paradoxal de détachement et d'excitation. La procédure expérimentale de Grey Walter peut être décrite de manière simplifiée comme suit. Des électrodes fixées sur le cuir chevelu et le cortex frontal du sujet transmettent les vagues électriques des activités cervicales vers un amplificateur d'ondes via une machine. En face de l'objet il y a un bouton : si on le presse une "scène intéressante" apparait sur un écran de télévision. Mais, environ une seconde avant qu'on appuie sur le bouton, une surtension électrique d'une vingtaine de microvolts se produit dans une grande partie du cortex du sujet, on la nomme "vague de préparation". Mais les circuits de l'appareil peuvent être réglés de telle sorte que la "vague de préparation" amplifiée soit suffisante pour déclencher l'interrupteur et faire ainsi apparaitre la scène de télévision une fraction de seconde avant que le sujet ait effectivement appuyé sur le bouton. C'est ce qu'on appelle un "démarrage automatique". Un sujet intelligent se rend vite compte que son action a le résultat escompté avant qu'il n'ait effectivement déplacé son doigt, et donc il cesse généralement d'appuyer sur le bouton: les images apparaissent comme et quand il les veut... Mais, pour que cet effet soit durable, il est essentiel que le sujet "veuille" vraiment que l'évènement se produise, et donc il doit se concentrer sur l'évocation de cet évènement précis. Lorsque l'attention du sujet se détache à cause d'une présentation monotone, ou qu'il "se concentre sur la concentration", le potentiel du cerveau ne parvient pas à déclencher la vague. Ce démarrage automatique peut être combiné avec un auto-stop afin que le sujet puisse acquérir une image en voulant son apparition sur l'écran du téléviseur, puis l'effacer dès qu'il a terminé son inspection de celle-ci.

Du point de vue du sujet, c'est une expérience très particulière, parfois accompagnée de signes d'excitation contenue; une diurèse [évacuation d'urine] a été très marquée pour deux des expérimentateurs. Examinant ces expériences Renee Haynes rédacteur en chef du Journal de la SPR a déclaré: En principe, bien sûr, ce n'est pas plus remarquable que ce qui arrive quand un enfant regarde avec étonnement, quand, avec sa main, il prouve la puissance de sa volonté en décidant de lever le petit doigt ou en le déplaçant. En pratique, c'est étonnant parce que ce mode pour exercer une influence sur le monde extérieur est fort peu familier à l'homme, même s'il est probablement banal pour une anguille électrique. Il est aussi très intéressant en ce qu'il a amené le Dr Grey Walter a utiliser avec un certain embarras, un mot tel que "pouvoir de la volonté". Cela, on s'en souvient, fut aussi l'attitude de Sir John Eccles quand il considérait que l'action de "volonté mentale" du "cerveau physique", comme le mystère de base, et la psychokinésie simplement comme une extension de celui-ci. On pourrait décrire l'expérience Grey Walter comme de la "pseudo-télékinésie" car il y a des fils qui relient les électrodes et crâne du sujet avec l'appareil TV. Mais on pourrait tout aussi bien décrire l'action de l'esprit du sujet sur son propre cerveau comme une pseudo-causalité. Ou nous pourrions dire que le sujet a découvert une façon plus élégante de produire un "évènement confluentiel" sans prendre la peine d'employer des agents physiques. Dans ce contexte il nous faut maintenant parler du rapport hypnotique.

Jusqu'au milieu du siècle dernier, l'hypnose a été traitée comme une fantaisie occulte par la science occidentale (bien que dans d'autres cultures, elle ait été prise comme une acquis). Aujourd'hui elle est devenue si respectable et banale que nous avons tendance à oublier que nous n'avons pas d'explication la concernant. On a démontré qu'un sujet approprié peut être temporairement sourd, muet, aveugle, anesthésié, amené à avoir des hallucinations ou revivre des scènes de son passé. Il peut être amené à oublier ou à se rappeler ce qui s'est passé pendant la transe avec un claquement de doigts. On peut lui enjoindre une suggestion post-hypnotique qui lui fera exécuter le lendemain, à 5 heures précises, une action stupide comme le déliement de ses lacets - et aussi trouver une certaine rationalité à cet acte. Les utilisations de l'hypnose médicale sur des patients appropriés en dentisterie, obstétrique et en dermatologie sont bien connues. Moins connues, cependant, sont les expériences de A. Mason et S. Black sur la suppression des réactions cutanées allergiques par l'hypnose. On injecta à des patients des extraits de pollen, auxquels ils étaient très allergiques, et après le traitement hypnotique, ils cessèrent de montrer la moindre réaction. Avec l'hypnose, d'autres patients n'ont pas eu de réaction allergique contre le bacille de la tuberculose. Comment les suggestions hypnotiques peuvent-elles modifier la réactivité chimique des tissus au niveau microscopique reste donc une conjecture. Après la guérison remarquable de Mason par hypnose d'un garçon de seize ans souffrant d'ichtyose (la maladie de peau de poisson, une affection congénitale que l'on croyait incurable) un évaluateur du British Medical Journal a fait remarquer que ce cas unique suffirait pour exiger "une révision des concepts courants sur la relation entre l'esprit et le corps ". Cette révision des concepts actuels est attendue depuis longtemps. Nous ne savons pas si Eddington avait raison quand il a dit que le monde est fait de matière-esprit, et qu'il n'est certainement pas fait de l'étoffe des petites boules de billards du physicien du dix-neuvième siècle qui volaient dans tous les sens jusqu'à ce que le hasard les fasse s'agréger en une amibe.

Dans son adresse de 1969 à l'American Society for Psychical Research, que j'ai cité précédemment, le professeur Henry Margenau a dit ceci : Un artefact parfois invoqué pour expliquer la précognition est de prendre en compte un temps multidimensionnel. Ce qui permet un véritable passage vers l'arrière du temps, ce qui pourrait permettre à certains intervalles, positifs dans un sens du temps, de devenir négatifs ("effet avant la cause") dans un autre. En principe, ça représente un schéma valable, et je ne connais pas la critique qui pourra l'exclure en tant que démarche scientifique. Si elle est acceptable, cependant, une mesure entièrement nouvelle de l'espace-temps doit être développée. J'ai sondé quelques suggestions que la physique pourrait offrir comme solution à ce genre de problème que vous rencontrez. Les résultats positifs, je le crains, sont maigres et décevants, mais peut-être que cela vaut-il quand même une vraie étude. Mais pourquoi, voudrai-je maintenant demander, est-il nécessaire d'importer vers une nouvelle discipline tous les concepts approuvés d'une ancienne science à son stade actuel de développement? La physique n'adhère pas servilement aux formulations grecques rationalistes qui l'ont précédé, il a bien fallu créer nos propres constructions spécifiques.

Le parapsychologue, je pense ... doit voler de ses propres ailes et probablement de manière plus audacieuse que ce que les conditions que la physique d'aujourd'hui suggèrent - et aussi tolérer sans trop de souci les voix stridentes et critiques des scientifiques "hard-boiled", pragmatiques et satisfaits, et ainsi continuer sa propre recherche minutieuse vers une meilleure compréhension via de nouvelle sortes d'expériences, peut-être aussi avec des concepts qui apparaissent étranges. Nous sommes entourés de phénomènes que l'existence nous fait soigneusement ignorer, ou, s'ils ne peuvent pas être ignorés, nous les rejetons comme des superstitions. L'homme du XIIIe siècle ne se rendait pas compte qu'il était entouré de forces magnétiques. Nous n'avons donc pas la conscience sensorielle directe de beaucoup de manifestations, ni des douches de neutrinos qui nous traversent, ni d'autres "influences" inconnues. Donc, nous pourrions tout aussi bien écouter les conseils de Margenau et créer nos propres constructions "spécifiques", supposant que nous vivons plongés dans une sorte de "psycho-champ magnétique" qui produit des évènements confluentiels... tout ceci par des moyens qui dépassent les concepts classiques de la physique. Des buts et leur conception qui nous sont inconnus certes, mais nous estimons qu'il doivent être en quelque sorte liés à un effort vers une forme supérieure de l'ordre et de l'unité dans toute cette diversité que nous observons au travers de notre appréciation de l'évolution de l'univers dans son ensemble, de la vie sur terre, de la conscience humaine et, enfin, de la science et de l'art.

Un mystère "plus haut d'un cran" est plus facile à accepter qu'une litière de puzzles indépendants. Cela n'explique pas pourquoi le scarabée est apparu à la fenêtre, mais au moins on pourra l'adapter aux évènements confluentiels et autres phénomènes paranormaux d'une conception unifiée. Il ya, cependant, un aspect profondément troublant à ces phénomènes. Les évènements paranormaux sont rares, imprévisible et capricieux. C'est comme nous l'avons vu, la principale raison pour laquelle les sceptiques se sentent en droit de rejeter les résultats des cartes devinées et autres expériences de psychokinésie, en dépit de preuves statistiques qui, dans tout autre domaine de la recherche, suffiraient à prouver cette hypothèse. Une des raisons du caractère erratique de l'ESP a déjà été mentionnée : notre incapacité à contrôler les processus inconscients sous-jacents. Les expériences de Grey Walter n'étaient pas concernées par l'ESP, mais il a bien dû se rendre compte que la "vague de préparation" ne pouvait atteindre le seuil suffisant que si le sujet était dans un état décrit comme "un composé paradoxal de détachement et d'excitation".

Les expériences paranormales spontanées sont toujours liées à un certain type d'auto-transcendance de l'émotion, comme dans les rêves télépathiques ou lors de transe médiumnique. Même dans le laboratoire, où là aussi le rapport affectif entre l'expérimentateur et le sujet est d'une importance décisive. L'intérêt du sujet dans le mystère de l'ESP en lui-même évoque une émotion auto-transcendante. Lorsque que son intérêt baisse à la fin d'une longue séance ESP, il mpntre un déclin caractéristique du nombre de "hits" sur la feuille de score. Cet "effet de déclin" peut être considéré comme une preuve supplémentaire de la réalité de l'ESP. Il y a aussi une diminution globale de la performance de la plupart des sujets après une longue série de séances. Ils s'ennuient. Les compétences les plus normales s'améliorent avec la pratique. Avec l'ESP c'est le contraire.

Un autre argument relatif à la rareté apparente des phénomènes paranormaux a été présentée par le regretté professeur Broad dans un article de philosophie: "Si la cognition paranormale et la causalité sont des faits paranormaux, il est alors fort probable que cela ne se limite pas à ces très rares occasions pendant lesquelles elles se manifestent sporadiquement, ou de façon spectaculaire, ou dans des conditions très particulières pendant lesquelles leur présence peut être expérimentalement établie. Ces phénomènes pourraient très bien être en fonction continue en arrière-plan de nos vies normales. Notre compréhension et nos malentendus avec nos semblables, notre humeur, l'émotionnel général en certaines occasions, les idées qui surgissent soudainement dans nos esprits sans aucune cause évidente introspectable; nos réactions émotionnelles inexplicables immédiates vis à vis de certaines personnes... et ainsi de suite, tout cela pourrait être en partie déterminé par une meilleure connaissance du paranormal et autres influences causales paranormales."

Collègue du professeur Broad à Oxford, le professeur Price a ajouté cette suggestion intéressante en ce qui concerne le caprice apparent des ESP: "Il semble que les impressions reçues par télépathie ont quelques difficultés à franchir un seuil pour se manifester à la conscience. Il semble qu'il y ait une barrière ou un mécanisme répressif qui tende à les exclure de la conscience, une barrière qui est assez difficile à passer, même si on fait usage de toutes sortes d'appareils pour la surmonter. Parfois, en ayant recours aux mécanismes musculaires du corps, ou en les faisant émerger sous forme de parole ou d'écriture automatique. Parfois, ces phénomènes apparaissent sous forme de rêves, parfois d'hallucinations visuelles ou auditives. Et souvent, ils peuvent émerger sous un aspect déformé et symbolique (comme d'autres contenus mentaux inconscients le font). Il est plausible que beaucoup de nos pensées quotidiennes et d'émotions soient télépathes, ou en partie d'origine télépathique, mais elles ne sont pas reconnues comme telles car elles sont trop déformées et mélangées avec d'autres contenus mentaux en franchissant le seuil de la conscience.

Adrian Dobbs, commentant ce passage, a soulevé un point important dans un texte très intéressant et suggestif. Il évoque l'image de l'âme ou du cerveau comme contenants un assemblage de filtres sélectifs, conçus pour couper les signaux indésirables à des fréquences voisines, dont certaines parviendraient sous une forme déformée, exactement comme dans une réception radio ordinaire. La "théorie du filtre", comme on pourrait l'appeler, remonte en fait à Henri Bergson. Elle a été reprise par divers auteurs sur la perception extra-sensorielle. Il s'agit en fait simplement d'une extrapolation de ce que nous savons au sujet de la perception sensorielle ordinaire. Nos principaux organes des sens sont comme des fentes qui admettent seulement une gamme de fréquence très étroite d'ondes électromagnétiques et sonores. Mais même la quantité d'infos qui entrent par ces fentes étroites, c'est déjà trop. La vie serait impossible si nous devions prêter attention aux millions de stimuli qui bombardent nos sens - ce que William James a appelé "l'épanouissement de la multitude du bourdonnement des sensations". Ainsi, le système nerveux, et surtout le cerveau, fonctionnent comme une hiérarchie de filtrages et de classifications de dispositifs qui éliminent une grande partie de nos entrées sensorielles sous forme de " bruits" non pertinents", pour traiter les bonnes informations sous forme gérable avant qu'elles ne soient présentées à la conscience.

Un exemple souvent cité de ce processus de filtrage est le "phénomène cocktail" qui nous permet d'isoler une seule voix dans le bourdonnement général. Par analogie, un mécanisme de filtrage similaire peut être supposé nous protéger de la floraison et de la multitude de bourdonnement des images, des messages, des impressions et des événements confluentiels du "psycho-champ magnétique" qui nous entoure. Comme il s'agit d'un point de grande importance pour essayer de comprendre pourquoi les phénomènes paranormaux se présentent dans ces formes inexplicables et arbitraire, je vais livrer quelques citations plus pertinentes sur ce sujet. Ainsi le psychiatre James S. Hayes, écrivant dans The Scientist, spécule: Je pense depuis longtemps que les questions classiques posées sur la télépathie ("Cela se passe-t'il" et si oui, "comment?") sont moins susceptibles d'être fructueuses que cette question: "Si la télépathie existe, qu'est-ce qui l'empêche de se produire plus ? Comment l'esprit (ou le cerveau) se protègent-ils contre l'afflux potentiel de l'expérience des autres? "

Et Sir Cyril Burt, à nouveau: La conception naturelle qu'a l'homme de l'univers, ou plutôt de la partie étroite à laquelle il a accès, est celle d'un monde d'objets tangibles de taille moyenne, se déplaçant à des vitesses modérées de manière visible en trois dimensions, réagissant à l'impact de forces de contact (le push et pull de simples interactions mécaniques), le tout en conformité avec des lois relativement simples. Jusqu'à tout récemment la conception de l'univers adoptée par le chercheur, son critère de la réalité, était celui de l'Incrédulité de saint Thomas : "ce qui peut être vu ou touché". Pourtant, supputer que sur une telle base que nous pourrions construire une image complète et comprise de l'univers c'est comme supposer que le plan d'une rue de Rome nous dirait ce à quoi la Ville Eternelle ressemblerait.

La nature semble avoir travaillé sur un principe identique. Nos organes des sens et notre cerveau fonctionnent comme une sorte de filtre complexe qui limite et dirige les pouvoirs de clairvoyance de l'esprit, de sorte que dans des conditions normales notre attention soit concentrée seulement sur des objets ou des situations qui sont d'une importance biologique pour la survie de l'organisme et de l'espèce.

En règle générale, il semblerait que l'esprit rejette les idées venant d'un autre esprit comme le corps rejette les greffes provenant d'un autre corps. Burt résume son point de vue, en nous rappelant que la physique contemporaine reconnaît quatre types d'interactions (forte, faible, électromagnétique et gravitationnelle), dont chacune obéit à ses propres lois, et, jusqu'à présent en tout cas, ce modèle a vaincu toutes les tentatives de le réduire à autre chose. Cela étant, il ne peut y avoir aucun antécédent improbable qui nous interdise de postuler un autre système et/ou un autre type d'interaction, en attendant une enquête plus intensive. Un univers psychique composé d'événements ou d'entités liées par des interactions psychiques, obéissant à des lois qui leur sont propres et qui interpénètrent l' univers physique et le chevauchent partiellement, tout comme les diverses interactions déjà découvertes et reconnues se chevauchent les unes les autres. (2e partie)

Auteur: Koestler Arthur

Info: Internet et Roots of coïncidence

[ Holon ] [ corps-esprit ] [ intégratif ] [ spectre continu ] [ dépaysement moteur ]

 

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proto-linguistique

Cette langue ancienne use de la seule grammaire basée entièrement sur le corps humain

Une famille de langues en voie de disparition suggère que les premiers humains utilisaient leur corps comme modèle de réalité

Un matin de décembre 2004, des adultes et des enfants erraient sur le rivage de Strait Island dans le golfe du Bengale lorsque l'un d'eux a remarqué quelque chose d'étrange. Le niveau de la mer était bas et des créatures étranges qui habitent normalement la zone crépusculaire profonde de l'océan se balançaient près de la surface de l'eau. “ Sare ukkuburuko ! ”— la mer s'est renversée! — cria Nao Junior, un des derniers héritiers d'une sagesse transmise sur des milliers de générations à travers sa langue maternelle. Il savait ce que signifiait ce phénomène bizarre. Tout comme d'autres peuples autochtones des îles Andaman. Ils se sont tous précipités à l'intérieur des terres et en hauteur, leurs connaissances ancestrales les sauvant du tsunami dévastateur qui s'est abattu sur les côtes de l'océan Indien quelques minutes plus tard et qui a emporté quelque 225 000 personnes.

Lorsque j'ai rencontré Nao Jr. pour la première fois, au tournant du millénaire, il était dans la quarantaine et l'un des neuf seuls membres de son groupe autochtone, le Grand Andamanais, qui parlait encore l'idiome de ses ancêtres ; les jeunes préférant l'hindi. En tant que linguiste passionnée par le décodage de structure, j'avais étudié plus de 80 langues indiennes de cinq familles différentes : indo-européenne (à laquelle appartient l'hindi), dravidienne, austroasiatique, tibéto-birmane et taï-kadaï. J'étais sur les îles pour documenter leurs voix autochtones avant qu'elles ne se transforment en murmures. Le peu que j'ai entendu était si déconcertant que j'y suis retourné plusieurs fois au cours des années suivantes pour essayer de cerner les principes qui sous-tendent les grandes langues andamanaises.

Ici mes principaux professeurs, Nao Jr. et une femme nommée Licho, parlaient un pastiche de langues qui comptaient encore quelque 5 000 locuteurs au milieu du 19e siècle. Le vocabulaire moderne étant très variable, dérivé de plusieurs langues parlées à l'origine sur l'île d'Andaman du Nord. Ce qui m'était vraiment étranger, cependant, c'était leur grammaire, qui ne ressemblait à rien de ce que j'avais jamais rencontré.

Une langue incarne une vision du monde et, alors qu'une civilisation, change et se développe par couches. Les mots ou les phrases fréquemment utilisés se transforment en formes grammaticales de plus en plus abstraites et compressées. Par exemple, le suffixe "-ed", signifiant le passé en anglais moderne, provient de "did" (c'est-à-dire que "did use" est devenu "used") ; Le vieil anglais où in steed et sur gemong sont devenus respectivement "instead" et "among". Ces types de transitions font de la linguistique historique un peu comme l'archéologie. Tout comme un archéologue fouille soigneusement un monticule pour révéler différentes époques d'une cité-État empilées les unes sur les autres, un linguiste peut séparer les couches d'une langue pour découvrir les étapes de son évolution. Il faudra des années à Nao Jr. et Licho endurant patiemment mes interrogatoires et mes tâtonnements pour que j'apprenne enfin la règle fondamentale de leur langue.

Il s'avère que le grand andamanais est exceptionnel parmi les langues du monde de par son anthropocentrisme. Il utilise des catégories dérivées du corps humain pour décrire des concepts abstraits tels que l'orientation spatiale et les relations entre les objets. Bien sûr, en anglais, nous pourrions dire des choses comme "la pièce fait face à la baie", "la jambe de la chaise s'est cassée" et "elle dirige l'entreprise". Mais en Grand Andamanais, de telles descriptions prennent une forme extrême, avec des morphèmes, ou segments sonores significatifs, qui désignent différentes zones du corps s'attachant aux noms, verbes, adjectifs et adverbes - en fait, à chaque partie du discours - pour créer des significations diverses. Parce qu'aucune autre langue connue n'a une grammaire basée sur le corps humain et/ou un partage des mots apparentés -  des mots qui ont une signification et une prononciation similaires, ce qui indique un lien généalogique - avec le grand andamanais, la langue constitue sa propre famille .

L'aspect le plus durable d'une langue est sa structure, qui peut perdurer sur des millénaires. Mes études indiquent que les Grands Andamanais furent effectivement isolés pendant des milliers d'années, au cours desquelles leurs langues ont évolué sans influence perceptible d'autres cultures. La recherche génétique corrobore ce point de vue, montrant que ces peuples autochtones descendent d'un des premiers groupes d'humains modernes qui a migré hors d'Afrique. En suivant le littoral du sous-continent indien, ils ont atteint l'archipel d'Andaman il y a peut-être 50 000 ans et y vivent depuis dans un isolement virtuel. Les principes fondamentaux de leurs langues révèlent que ces humains anciens ont conceptualisé le monde à travers leur corps.

PIÈCES DU CASSE-TÊTE

Lorsque je suis arrivé en 2001 à Port Blair, la principale ville de la région, pour mener une enquête préliminaire sur les langues autochtones, j'ai été dirigé vers Adi Basera, une maison que le gouvernement indien autorisait les Grands Andamanais à utiliser lorsqu'ils étaient en ville. C'était un bâtiment délabré avec de la peinture écaillée et des pièces sales ; enfants et adultes flânaient nonchalamment dans la cour. Quelqu'un m'a apporté une chaise en plastique. J'ai expliqué ma quête en hindi.

"Pourquoi es-tu venu ?" demanda Boro Senior, une femme âgée. "Nous ne nous souvenons pas de notre langue. Nous ne le parlons ni ne le comprenons. Il s'est avéré que toute la communauté conversait principalement en hindi, une langue essentielle pour se débrouiller dans la société indienne et la seule que les enfants apprenaient." Pendant que je le sondais cependant, Nao Jr. a avoué qu'il connaissait le Jero, mais parce qu'il n'avait personne avec qui en parler, il l'oubliait. Boro Sr. s'est avéré être la dernière personne à se souvenir de Khora, et Licho, alors dans la fin de la trentaine, qui était la dernière à parler le sare, la langue de sa grand-mère. Lorsqu'ils conversaient entre eux, ces individus utilisaient ce que j'appelle le Grand Andamanais actuel (PGA), un mélange de Jero, Sare, Bo et Khora - toutes langues des Andaman du Nord.

Lorsque les autorités britanniques ont établi une colonie pénitentiaire à Port Blair en 1858, les forêts tropicales de Great Andaman - comprenant le nord, le centre et le sud d'Andaman, ainsi que quelques petites îles à proximité - étaient habitées par 10 tribus de chasseurs et de cueilleurs qui semblaient culturellement liées. Les habitants du Great Andaman ont résisté aux envahisseurs, mais leurs arcs et leurs flèches n'étaient pas à la hauteur des fusils et, à une occasion, des canons de navires. Encore plus mortels furent les germes apportés par les étrangers, contre lesquels les insulaires n'avaient aucune immunité. Dans les années 1960, époque à laquelle les Andamans appartenaient à l'Inde, il ne restait plus que 19 Grands Andamanais, vivant principalement dans les forêts du nord d'Andaman. Les autorités indiennes les ont alors installés sur la petite île du détroit.

Un autre groupe de chasseurs-cueilleurs, les Jarawa, vivaient dans le sud d'Andaman, et lorsque les Grands Andamanais s'éteignirent , les Jarawa s'installèrent dans leurs territoires évacués du Moyen Andaman. Les Jarawa ont résisté au contact - et aux germes qui l'accompagnent - jusqu'en 1998 et sont maintenant au nombre d'environ 450. Leur culture avait des liens avec celle des Onge, qui vivaient sur Little Andaman et qui ont été sous controle des Britanniques dans les années 1880. Apparemment, les habitants de North Sentinel Island étaient également apparentés aux Jarawa. Ils continuent d'ailleurs de vivre dans un isolement volontaire, qu'ils ont imposé en 2018 en tuant un missionnaire américain.

(photo-schéma avec détails et statistiques des langage des iles adamans)

Mon enquête initiale a établi que les langues des Grands Andamanais n'avaient aucun lien avec celles des Jarawa et des Onge, qui pourraient constituer leur propre famille de langues. Réalisant que je devais documenter le Grand Andamanais avant qu'il ne soit réduit au silence, je suis revenu avec une équipe d'étudiants en 2005. C'était peu de temps après le tsunami, et les autorités avaient évacué les 53 Grands Andamanais vers un camp de secours à côté d'Adi Basera. Ils avaient survécu, mais leurs maisons avaient été inondées et leurs biens perdus, et un sentiment de bouleversement et de chagrin flottait dans l'air. Dans cette situation, Licho a donné naissance à un garçon nommé Berebe, source de joie. J'ai appris que les bébés étaient nommés dans l'utérus. Pas étonnant que les grands noms andamanais soient non sexistes !

Au camp, j'ai rencontré l'octogénaire Boa Senior, dernier locuteur de Bo et gardien de nombreuses chansons. Nous deviendrons très proches. Les grands jeunes andamanais avaient répondu au mépris des Indiens dominants pour les cultures autochtones en se détournant de leur héritage. Boa Sr me tenait la main et ne me laissait pas partir car elle était convaincue que ma seule présence, en tant qu'étranger rare qui valorisait sa langue, motiverait les jeunes à parler le grand andamanais. Pourtant, je l'ai appris principalement de Nao Jr. et Licho, dont l'intérêt pour leurs langues avait été enflammé par le mien. Il s'est avéré que Nao Jr. en savait beaucoup sur l'environnement local et Licho sur l'étymologie, étant souvent capable de me dire quel mot venait de quelle langue. J'ai passé de longues heures avec eux à Adi Basera et sur Strait Island, les accompagnant partout où ils allaient - pour nous prélasser à l'extérieur de leurs huttes, errer dans la jungle ou pêcher sur la plage. Plus ils s'efforçaient de répondre à mes questions, plus ils puisaient dans les profondeurs de la mémoire. J'ai fini par collecter plus de 150 grands noms andamanais pour différentsespèces de poissons et 109 pour les oiseaux .

Les responsables britanniques avaient observé que les langues andamanaises étaient un peu comme les maillons d'une chaîne : les membres des tribus voisines des Grands Andamans se comprenaient, mais les langues parlées aux extrémités opposées de l'archipel, dans les Andamans du Nord et du Sud, étaient mutuellement inintelligibles. En 1887, l'administrateur militaire britannique Maurice Vidal Portman publia un lexique comparatif de quatre langues, ainsi que quelques phrases avec leurs traductions en anglais. Et vers 1920, Edward Horace Man compila un dictionnaire exhaustif de Bea, une langue des Andaman du Sud. C'étaient des enregistrements importants, mais aucun n'a résolu le puzzle que la grammaire posait.

Moi non plus. D'une manière ou d'une autre, ma vaste expérience avec les cinq familles de langue indienne ne m'aidait pas. Une fois, j'ai demandé à Nao Jr. de me dire le mot pour "sang". Il m'a regardé comme si j'étais une imbécile et n'a pas répondu. Quand j'ai insisté, il a dit: "Dis-moi d'où ça vient." J'ai répondu: "De nulle part." Irrité, il répéta : "Où l'as-tu vu ?" Il fallait que j'invente quelque chose, alors j'ai dit : "sur mon doigt. Sa réponse est venue rapidement — "ongtei !" – puis il débita plusieurs mots pour désigner le sang sur différentes parties du corps. Si le sang sortait des pieds ou des jambes, c'était otei ; l'hémorragie interne était etei; et un caillot sur la peau était ertei . Quelque chose d'aussi basique qu'un nom changeait de forme en fonction de l'emplacement.

Chaque fois que j'avais une pause dans mon enseignement et d'autres tâches, je visitais les Andamans, pendant des semaines ou parfois des mois. Il m'a fallu un an d'étude concertée pour entrevoir le modèle de cette langue - et quand je l'ai fait, toutes les pièces éparses du puzzle se sont mises en place. Très excité, je voulus tout de suite tester mes phrases inventées. J'étais à l'Institut Max Planck d'anthropologie évolutive à Leipzig, en Allemagne, mais j'ai téléphoné à Licho et je lui ai dit : "a Joe-engio eole be". Licho a été bouleversé et m'a fait un compliment chéri : "Vous avez appris notre langue, madame !"

Ma phrase était simplement "Joe te voit". Joe était un jeune Grand Andamanais, et -engio était "seulement toi". Ma percée avait été de réaliser que le préfixe e- , qui dérivait à l'origine d'un mot inconnu désignant une partie interne du corps, s'était transformé au fil des éons en un marqueur grammatical signifiant tout attribut, processus ou activité interne. Donc l'acte de voir, ole, étant une activité interne, devait être eole. Le même préfixe pourrait être attaché à -bungoi , ou "beau", pour former ebungoi, signifiant intérieurement beau ou gentil ; de sare , pour "mer", pour former esare, ou "salé", une qualité inhérente ; et au mot racine -biinye, "pensant", pour donner ebiinye , "penser".

LE CODE CORPOREL

La grammaire que j'étais en train de reconstituer était basée principalement sur Jero, mais un coup d'œil dans les livres de Portman et de Man m'a convaincu que les langues du sud du Grand Andamanais avaient des structures similaires. Le lexique se composait de deux classes de mots : libre et lié. Les mots libres étaient tous des noms faisant référence à l'environnement et à ses habitants, tels que ra pour "cochon". Ils pourraient se produire seuls. Les mots liés étaient des noms, des verbes, des adjectifs et des adverbes qui existaient toujours avec des marqueurs indiquant une relation avec d'autres objets, événements ou états. Les marqueurs (spécifiquement, a- ; er- ; ong- ; ot- ou ut- ; e- ou i- ; ara- ; eto- ) dérivaient de sept zones du corps et étaient attaché à un mot racine, généralement sous forme de préfixe, pour décrire des concepts tels que "dedans", "dehors", "supérieur" et "inférieur". Par exemple, le morphème er- , qui qualifiait presque tout ce qui concernait une partie externe du corps, pouvait être collé à -cho pour donner ercho , signifiant "tête". Une tête de porc était ainsi raercho.

(Photo/schéma désignant les 7 zones du corps humain qui font référence ici)

Zone     Marqueur          Parties corps/sémantique       

1              a -                  en rapport avec la bouche/origine 

2              er -                 corps et parties externes supérieures

3              ong -              extrémités (doigts main, pied) 

4              ut/ot -             (cerveau/intellect) produits corporels, partie-tout,

5              e / i -               organes internes

6              ara -                organes sexuels et formes latérales/rondes

7              o -                   jambes/partie basse         

Cette dépendance conceptuelle n'était pas toujours le signe d'un lien physique. Par exemple, si la tête du porc était coupée pour être rôtie, le marqueur t- pour un objet inanimé serait attaché à er- pour donner ratercho ; ce n'était plus vivant mais toujours une tête de cochon. Le suffixe -icho indiquait des possessions véritablement séparables. Par exemple, Boa-icho julu signifiait "les vêtements de Boa".

Tout comme une tête, un nom, ne pouvait pas exister conceptuellement par lui-même, le mode et l'effet d'une action ne pouvaient être séparés du verbe décrivant l'action. Les Grands Andamanais n'avaient pas de mots pour l'agriculture ou la culture mais un grand nombre pour la chasse et la pêche, principalement avec un arc et des flèches. Ainsi, la racine du mot shile , qui signifie "viser", avait plusieurs versions : utshile , viser d'en haut (par exemple, un poisson) ; arashile, viser à distance (comme un cochon); et eshile, visant à percer.

Inséparables également de leurs préfixes, qui les dotaient de sens, étaient les adjectifs et les adverbes. Par exemple, le préfixe er- , pour "externe", a donné l'adjectif erbungoi , pour "beau" ; le verbe eranye, signifiant "assembler" ; et l'adverbe erchek, ou "rapide". Le préfixe ong- , la zone des extrémités, fournissait ongcho , "piquer", quelque chose que l'on faisait avec les doigts, ainsi que l'adverbe ongkochil, signifiant "précipitamment", qui s'appliquait généralement aux mouvements impliquant une main ou un pied. Important aussi était le morphème a-, qui renvoyait à la bouche et, plus largement, aux origines. Il a contribué aux noms aphong, pour "bouche", et Aka-Jero , pour "son langage Jero" ; les adjectifs ajom , "avide", et amu, "muet" ; les verbes atekho, "parler", et aathitul , "se taire" ; et l'adverbe aulu, "avant".

Ces études ont établi que les 10 langues originales du grand andamanais appartenaient à une seule famille. De plus, cette famille était unique en ce qu'elle avait un système grammatical basé sur le corps humain à tous les niveaux structurels. Une poignée d'autres langues autochtones, telles que le papantla totonaque, parlé au Mexique, et le matsés, parlé au Pérou et au Brésil, utilisaient également des termes faisant référence à des parties du corps pour former des mots. Mais ces termes ne s'étaient pas transformés en symboles abstraits, ni ne se sont propagés à toutes les autres parties du discours.

(Photo - tableau - schéma avec exemples de mots - verbes - adverbes, dérivés des  7 parties)

Plus important encore, la famille des langues semble être d'origine vraiment archaïque. Dans un processus d'évolution en plusieurs étapes, les mots décrivant diverses parties du corps s'étaient transformés en morphèmes faisant référence à différentes zones pour fusionner avec des mots basiques pour donner un sens. Parallèlement aux preuves génétiques, qui indiquent que les Grands Andamanais ont vécu isolés pendant des dizaines de milliers d'années, la grammaire suggère que la famille des langues est née très tôt, à une époque où les êtres humains conceptualisaient leur monde à travers leur corps. La structure à elle seule donne un aperçu d'une ancienne vision du monde dans laquelle le macrocosme reflète le microcosme, et tout ce qui est ou qui se passe est inextricablement lié à tout le reste.

ANCÊTRES, OISEAUX

Un matin sur Strait Island, j'ai entendu Boa Sr. parler aux oiseaux qu'elle nourrissait. J'ai écouté pendant un bon moment derrière une porte, puis je me suis montrée pour lui demander pourquoi elle leur parlait.

"Ils sont les seuls à me comprendre", a-t-elle répondu.

"Comment ça se fait?" J'ai demandé.

"Ne sais-tu pas qu'pas sont nos ancêtres ?"

J'ai essayé de réprimer un rire étonné, mais Boa l'a perçu. "Oui, ce sont nos ancêtres", a-t-elle affirmé. "C'est pourquoi nous ne les tuons ni ne les chassons. Tu devrais demander à Nao Jr.; il connaît peut-être l'histoire."

Nao ne s'en souvint pas tout de suite, mais quelques jours plus tard, il raconta l'histoire d'un garçon nommé Mithe qui était allé à la pêche. Il a attrapé un calmar, et en le nettoyant sur la plage, il a été avalé par un Bol , un gros poisson. Ses amis et sa famille sont venus le chercher et ont réalisé qu'un Bol l'avait mangé. Phatka, le plus intelligent des jeunes, a suivi la piste sale laissée par le poisson et a trouvé le Bol en eau peu profonde, la tête dans le sable. C'était un très grand, alors Phatka, Benge et d'autres ont appelé à haute voix Kaulo, le plus fort d'entre eux, qui est arrivé et a tué le poisson.

Mithe est sorti vivant, mais ses membres étaient engourdis. Ils allumèrent un feu sur la plage et le réchauffèrent, et une fois qu'il eut récupéré, ils décidèrent de manger le poisson. Ils le mirent sur le feu pour le faire rôtir. Mais ils avaient négligé de nettoyer correctement le poisson, et il éclata, transformant toutes les personnes présentes en oiseaux. Depuis ce moment-là, les Grands Andamanais conservent une affinité particulière avec Mithe, la Colombe Coucou Andaman ; Phatka, le corbeau indien ; Benge, l'aigle serpent Andaman; Kaulo, l'aigle de mer à ventre blanc ; Celene, le crabe pluvier; et d'autres oiseaux qu'ils considéraient comme des ancêtres.

Dans la vision de la nature des Grands Andamanais, la principale distinction était entre tajio, le vivant, et eleo , le non-vivant. Les créatures étaient tajio-tut-bech, "êtres vivants avec des plumes" - c'est-à-dire de l'air; tajio-tot chor, "êtres vivants à écailles", ou de l'eau ; ou tajio-chola, "êtres vivants de la terre". Parmi les créatures terrestres, il y avait des ishongo, des humains et d'autres animaux, et des tong, des plantes et des arbres. Ces catégories, ainsi que de multiples attributs d'apparence, de mouvement et d'habitudes, constituaient un système élaboré de classification et de nomenclature, que j'ai documenté pour les oiseaux en particulier. Parfois, l'étymologie d'un nom grand andamanais ressemblait à celle de l'anglais. Par exemple, Celene, composé de mots racines pour "crabe" et "épine", a été ainsi nommé parce qu'il craque et mange des crabes avec son bec dur et pointu.

La compréhension extrêmement détaillée de l'environnement naturel détenue par le peuple des Grands Andamanais (Nao Jr. nomma au moins six variétés de bords de mer et plus de 18 types d'odeurs) indique une culture qui a observé la nature avec un amour profond et un intérêt aigu. Considérant la nature comme un tout, ils ont cherché à examiner l'imbrication des forces qui construisent cet ensemble. L'espace était une construction culturelle, définie par le mouvement des esprits, des animaux et des humains le long d'axes verticaux et horizontaux. Dans la vision du monde des Grands Andamanais, l'espace et tous ses éléments naturels - le soleil, la lune, la marée, les vents, la terre et la forêt - constituaient ensemble le cosmos. Dans cette vision holistique, les oiseaux, les autres créatures et les esprits étaient tous interdépendants et faisaient partie intégrante du concept d'espace.

Le temps aussi était relatif, catégorisé en fonction d'événements naturels tels que la floraison des fleurs saisonnières, la disponibilité du miel - le calendrier du miel, pourrait-on l'appeler - le mouvement du soleil et de la lune, la direction des vents, la disponibilité des ressources alimentaires et le meilleur moment pour chasser le poisson ou d'autres animaux. Ainsi, lorsque la fleur de koroiny auro fleurit, les tortues et les poissons sont gras ; lorsque le bop taulo fleurit, les poissons bikhir, liot et bere sont abondants ; lorsque le loto taulo fleurit, c'est le meilleur moment pour attraper les poissons phiku et nyuri ; et quand le chokhoro taulo fleurissent, les cochons sont les plus gras et c'est le meilleur moment pour les chasser.

Même le "matin" et le "soir" étaient relatifs, selon la personne qui les vivait. Pour dire, par exemple, "Je te rendrai visite demain", on utiliserait ngambikhir, pour "ton demain". Mais dans la phrase "je finirai ça demain", le mot serait tambikhir, "mon demain". Le temps dépendait de la perspective de celui qui était impliqué dans l'événement.

Les mythes des Grands Andamanais indiquaient que leurs premiers ancêtres résidaient dans le ciel, comme dans une autre histoire que Nao Jr. m'a racontée. 

Le premier homme, sortant du creux d'un bambou, trouva de l'eau, des tubercules, de l'argile fine et de la résine. Il modela un pot en argile, alluma un feu avec la résine, fit bouillir les tubercules dans le pot et savoura un repas copieux. Puis il fabriqua une figurine en argile et ll laissa sur le feu. À son étonnement et à sa joie, elle se transforma en femme. Ils eurent beaucoup d'enfants et étaient très heureux. Après un long séjour sur Terre, le couple partit pour un endroit au-dessus des nuages, rompant tous les liens avec ce monde.

Des larmes ont coulé sur les joues de Nao Jr. alors qu'il racontait ce conte de création, qui présentait tous les éléments de la vie : l'eau, le feu, la terre, l'espace et l'air. Pour cet homme solitaire - sa femme l'avait quitté il y a des années pour un autre homme -, créer une partenaire selon ses désirs était la fable romantique ultime. Alors que je lui avais demandé des histoires pour la première fois, il avait dit ne pas en avoir entendu depuis 40 ans et qu'il n'en avait pas pour moi faute de mémoire. Mais au cours de nombreuses soirées, avec le gazouillis des grillons et les cris des grenouilles à l'extérieur, il m'a raconté 10 histoires précieuses, presque inédites pour une langue au bord de l'extinction. Peut-être que l'une des raisons pour lesquelles nous nous sommes tellement liés était que nous étions tous les deux raupuch - quelqu'un qui a perdu un frère ou une sœur. Nao Jr. a été choqué d'apprendre que ni l'anglais ni aucune langue indienne n'a un tel mot. "Pourquoi?" Il a demandé. "n'aimez-vous pas vos frères et soeurs"

Nao Jr. a quitté ce monde en février 2009. Avec cette mort prématurée, il a emporté avec lui un trésor de connaissances qui ne pourra jamais être ressuscité et m'a laissé raupuch à nouveau. Boro Sr. est décédé en novembre et Boa Sr. en janvier 2010, laissant sa voix au travers de plusieurs chansons. Licho est décédé en avril 2020. À l'heure actuelle, seules trois personnes - Peje, Golat et Noe - parlent encore une langue de la grande famille andamanaise, dans leur cas le Jero. Ils ont tous plus de 50 ans et souffrent de diverses affections. Toute la famille de ces langues est menacée d'extinction imminente.

Sur les quelque 7 000 langues parlées par les humains aujourd'hui, la moitié se taira d'ici la fin de ce siècle. La survie à l'ère de la mondialisation, de l'urbanisation et des changements climatiques oblige les communautés autochtones à remplacer leurs modes de vie et leurs langues traditionnels par ceux de la société dominante. Quand l'ancienne génération ne peut plus enseigner la langue aux plus jeunes, une langue est condamnée. Et avec chaque langue perdue, nous perdons une mine de connaissances sur l'existence humaine, la perception, la nature et la survie. Pour donner le dernier mot à Boa Sr. : "Tout est parti, il ne reste plus rien – nos jungles, notre eau, notre peuple, notre langue. Ne laissez pas la langue vous échapper ! Tiens bon !"

Auteur: Anvita Abbi

Info: "Whispers from Deep Time" dans Scientific American 328, 6, 62-69 (juin 2023). Trad et adaptation Mg

[ septénaire ] [ conte mythologique ] [ intraduisible ] [ paléolinguistique ] [ ethnolinguistique ] [ chronos ] [ idiome altruiste ] [ couple ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

post-quantique

Vers une physique de la conscience :   (Attention, article long et ardu, encore en cours de correction)

"Une vision scientifique du monde qui ne résout pas profondément le problème des esprits conscients ne peut avoir de sérieuses prétentions à l'exhaustivité. La conscience fait partie de notre univers. Ainsi, toute théorie physique qui ne lui fait pas de place appropriée est fondamentalement à court de fournir une véritable description du Monde."  Sir Roger Penrose : Les ombres de l'esprit

Où va la physique dans ce siècle ? Pour de nombreux scientifiques, ce type de question évoquera très probablement des réponses tournant autour de la relativité quantique, de la naissance et de l'évolution probable de l'Univers, de la physique des trous noirs ou de la nature de la "matière noire". L'importance et la fascination durable de ces questions sont incontestables.

Cependant, pour une minorité croissante de physiciens, une question encore plus grande se profile à l'horizon : le problème persistant de la conscience.

La révolution de l'information des dernières décennies a eu un impact sur nos vies plus profond qu'il parait. De la physique fondamentale au calcul quantique en passant par la biophysique et la recherche médicale, on prend de plus en plus conscience que l'information est profondément et subtilement encodée dans chaque fibre de l'Univers matériel, et que les mécanismes de contrôle que nous avons l'habitude d'étudier sur des bases purement mécaniques ne sont plus adéquats. Dans de nombreux laboratoires à travers le monde, les scientifiques sondent tranquillement cette interface esprit-matière et esquissent les premières lignes d'une nouvelle vision du monde.

Nous avons demandé à 2 de ces scientifiques de partager leur vision de ce que signifie ce changement de paradigme pour la physique théorique et du type de travail expérimental susceptible de produire les percées les plus importantes.

Lian Sidorov : Vous abordez tous deux les problèmes du modèle standard en révisant ses axiomes de base - en commençant essentiellement par une nouvelle interprétation de ses blocs de construction physiques. Pourriez-vous résumer brièvement cette approche?

M.P. : L'identification des espaces-temps en tant que surfaces à 4 dimensions d'un certain espace à 8 dimensions est l'élément central de TGD (Topological Geometrodynamics) et résout les problèmes conceptuels liés à la définition de l'énergie dans la relativité générale. Le nouveau concept d'espace-temps - "l'espace-temps à plusieurs feuilles" comme je l'appelle - a des implications considérables non seulement pour la physique, mais aussi pour la biologie et pour la conscience. Fondamentalement, parce que la vision réductionniste dure de l'Univers est remplacée par une vision quantitative de la façon dont le réductionnisme échoue.

La mathématisation de la vision de base se fonde sur l'idée que la physique quantique se réduit à une géométrie classique de dimension infinie pour ce qu'on pourrait appeler un "monde des mondes" - l'espace de toutes les surfaces possibles en 3 D. Cette idée est, en un certain sens, très conservatrice. Il n'y a pas de quantification dans cette théorie et son seul aspect quantique est le saut quantique. La croyance est que l'existence géométrique de dimension infinie (et donc aussi la physique) est hautement unique. Que cela puisse être le cas est suggéré par une énorme quantité de travaux probablement futiles qui s'essayent à construire des théories quantiques de champs sans infinis ainsi que par l'expérience avec des géométries de dimension infinie plus simples.

La formulation la plus abstraite de la TGD est une théorie des nombres généraliste obtenue en généralisant la notion de nombre de manière à permettre des nombres premiers infinis, des nombres entiers, etc.  Par conséquent les objets géométriques tels que les surfaces spatio-temporelles peuvent être considérés comme des représentations de nombres infinis, entiers, etc.  La formulation de la théorie des nombres conduit naturellement à la notion de physique p-adique (les champs de nombres p-adiques sont des compléments de nombres rationnels, un pour chaque nombre premier p=2,3,5,7,...).  Et l'on aboutit à la généralisation de la surface de l'espace-temps en permettant à la fois des régions d'espace-temps réelles et p-adiques (ces dernières représentant les corrélats géométriques de la cognition, de l'intention et de l'imagination tandis que les régions réelles représentent la matière).

Une des implication est l'hypothèse dite de l'échelle de longueur p-adique qui prédit une hiérarchie d'échelles de longueur et de temps servant d'échelles caractéristiques des systèmes physiques. La possibilité de généraliser la théorie de l'information en utilisant la notion théorique d'entropie des nombres conduit à une caractérisation théorique des nombres très générale des systèmes vivants pour lesquels une entropie p-adique appropriée est négative et indique ainsi que le système a un contenu d'information positif. La nouvelle vision de la relation entre le temps subjectif et géométrique est un aspect important de l'approche et résout le paradoxe fondamental de la théorie de la mesure quantique et une longue liste de paradoxes étroitement liés de la physique moderne. Il est également crucial pour la théorie de la conscience inspirée du TGD.

LS : Y a-t-il des personnages historiques dont vous pouvez vous inspirer ? Ou des théories physiques en cours de discussion qui offrent des points de convergence avec votre modèle ?

MP : John Wheeler était mon gourou du visionnage à distance, et la lecture de ses écrits fut pour moi une sorte d'expérience charnière. Wheeler a introduit la topologie dans la physique théorique. Wheeler a également introduit la notion de "super-espace" - espace de dimension infinie de toutes les géométries possibles ayant la métrique de Riemann et servant d'arène de gravitation quantique. Le remplacement du super-espace par l'espace des surfaces 3-D dans l'espace imbriqué 8-D ("monde des mondes") s'est avéré être la seule approche donnant l'espoir de construire un TGD quantique. Toutes les autres approches ont complètement échoué. 

Einstein a, bien sûr, été la deuxième grande figure. Il a été assez surprenant de constater que l'invariance générale des coordonnées généralisée au niveau de l'espace de configuration des surfaces 3 D ("monde des mondes") fixe la formulation de base de TGD presque exclusivement, tout comme elle fixe la dynamique de la relativité générale. Soit dit en passant, j'ai appris d'un article d'Einstein qu'il était très conscient des problèmes liés à la relation entre le temps subjectif et le temps géométrique et qu'il croyait que la réalité était en fait à 4 dimensions. Mais que notre capacité à "voir" dans le sens du temps est faible.

La TGD peut également être considéré comme une généralisation de l'approche des super-cordes qui généralise les symétries de base du modèle superstring (la symétrie la plus importante étant la symétrie dite conforme). Dans l'approche superstring, la symétrie conforme contraint les objets de base à être des chaînes unidimensionnelles. Dans TGD, cela les force à être des surfaces 3D. Au niveau algébrique, TGD ressemble beaucoup aux modèles de supercordes. Mais la dimension de l'espace-temps est la dimension physique D=4 plutôt que D=2.

LS : Comment voyez-vous la relation entre les systèmes matériels et la conscience ? L'une est-elle une propriété émergente de l'autre ou sont-elles équivalentes à un certain niveau ?

MP : Je ne partage pas la croyance matérialiste sur l'équivalence de l'esprit et de la matière. Je crois que la conscience - et même la cognition - sont présentes même au niveau des particules élémentaires. Pas de monisme, pas même de dualisme… mais de tripartisme. Le champ de spinor dans le "monde des mondes", l'histoire quantique et la "solution des équations du champ quantique", tout ceci définit ce que l'on pourrait appeler la réalité objective particulière. L'existence subjective correspond à une séquence de sauts quantiques entre des histoires quantiques. L'existence matérielle au sens géométrique correspond aux surfaces d'espace-temps - les réalités de la physique classique.

Dans ce cadre, il n'est pas nécessaire de postuler l'existence séparée de la théorie et de la réalité. Les "solutions des équations de champ quantique" ne représentent pas seulement des réalités, ce sont les réalités objectives. L'expérience subjective correspond à des sauts quantiques entre des "solutions d'équations de champs quantiques" - un truc toujours entre deux réalités objectives. Abandonner la croyance matérialiste en une réalité objective unique résout les problèmes fondamentaux de la théorie de la mesure quantique et offre une nouvelle vision de la relation entre le temps subjectif (séquence de sauts quantiques) et le temps géométrique (coordonnée de la surface espace-temps).

Le prix payé est un niveau d'abstraction assez élevé. Il n'est pas facile de traduire la vision des réalités en tant que champs de spineurs dans le "monde expérimental des mondes" en tests pratiques ! Ici, cependant, la correspondance quantique-classique aide.

LS : Comment résumeriez-vous votre approche des interactions mentales à distance comme la cognition anormale (vision à distance) et la perturbation anormale (PK) ?

MP : Il y a plusieurs éléments en jeu. La quantification topologique du champ, la notion d'hologramme conscient, le partage d'images mentales et le mécanisme de base des interactions mentales à distance basées sur les ME.

(a) L'ingrédient clé est la quantification topologique des champs classiques impliqués par le concept d'espace-temps à plusieurs feuilles. La surface de l'espace-temps est comme un diagramme de Feynman extrêmement complexe avec des lignes épaissies en feuilles d'espace-temps à 4 dimensions. Ces lignes à 4 dimensions représentent les régions de cohérence des champs classiques et de la matière (atomes, molécules, cellules,..). Aux sommets où les droites quadridimensionnelles se rencontrent, les champs classiques interfèrent. Les sommets sont comme des points d'un hologramme tandis que les lignes sont comme des faisceaux laser.

Les "lignes" particulièrement importantes du diagramme de Feynman généralisé sont les "extrémaux sans masse" (ME, "rayons lumineux topologiques"). Ils représentent des champs classiques se propageant avec la vitesse de la lumière d'une manière ciblée précise sans affaiblissement et sans perte d'information - un peu comme un rayonnement se propageant dans un guide d'ondes dans une seule direction. Les ME sont des facteurs clés dans la théorie de la matière vivante basée sur le TGD. Les tubes de flux magnétique et leurs homologues électriques (les biosystèmes ! sont remplis d'électrets) sont des "lignes" tout aussi importantes du diagramme de Feynman généralisé.

(b) L'hologramme conscient est une structure semblable à une fractale. L'implication de base est qu'il n'y a pas d'échelle de longueur préférée où la vie et la conscience émergeraient ou pourraient exister. Le transfert de supra-courants de nappes spatio-temporelles supraconductrices (généralement des tubes à flux magnétique) vers des nappes spatio-temporelles plus petites (par exemple, des nappes spatio-temporelles atomiques) induit une rupture de supraconductivité, une dissipation et une sélection darwinienne par auto-organisation.

Le flux cyclique d'ions entre 2 feuillets d'espace-temps est aussi le mécanisme de base du métabolisme. Un hologramme ordinaire donne lieu à une vision stéréo. Pour l'hologramme conscient, cela correspond à une fusion d'images mentales associées à différents points de l'hologramme. Lorsque les images mentales se ressemblent suffisamment, elles peuvent fusionner et donner lieu à une conscience stéréo (c'est-à-dire que les champs visuels droit et gauche fusionnent pour donner lieu à une stéréovision s'ils se ressemblent suffisamment).

(c) Le partage d'images mentales est une notion nouvelle. Les sous-moi de 2 moi non enchevêtrés peuvent s'entremêler, ce qui signifie qu'il en résulte une image mentale partagée et plus complexe. C'est le mécanisme de base de la télédétection. L'intrication de sous-systèmes de systèmes non intriqués n'est pas possible si l'on utilise la notion standard de sous-système. La nouvelle notion de sous-système s'inspire de la pensée d'échelle de longueur des théories quantiques des champs (tout est toujours défini dans une résolution d'échelle de longueur) et des aspects de type trou noir des feuilles d'espace-temps. L'intrication des sous-systèmes ne se voit pas dans la résolution caractérisant les systèmes, de sorte que l'on peut dire que les systèmes sont "non enchevêtrés" alors que les sous-systèmes sont intriqués.

(d) Un mécanisme plus détaillé pour les interactions mentales à distance est le suivant. Les ME à basse fréquence (gamme EEG généralement) connectent le téléspectateur 'A' à un soi magnétosphérique collectif multi-cerveau 'M' agissant comme un moyen et 'M' à la cible 'T' de sorte que l'enchevêtrement 'A'-'T' et le partage d'images mentales devient possible. Toutes les communications 'A'-'M' (comme poser des questions sur une cible donnée) pourraient être basées sur le partage d'images mentales. Les téléspectateurs pourraient avoir des lignes de communication plus ou moins permanentes avec la magnétosphère.

C'est suffisant pour la télédétection. Pour les interactions motrices à distance (disons PK), des ME à haute fréquence sont également nécessaires. Ils se propagent comme des particules sans masse le long des ME basse fréquence et induisent à la seconde extrémité des fuites de supracourants entre les tubes de flux magnétiques et les nappes d'espace-temps atomiques induisant l'auto-organisation ainsi que l'effet PK. La dichotomie bas-haut correspond à la dichotomie sensori-motrice et à la dichotomie quantique-classique pour les communications quantiques. Les fréquences préférées des ME à haute et basse fréquence devraient être dans certaines proportions constantes, et les découvertes de l'homéopathie appuient cette prédiction.

Les cellules et autres structures ont des "interactions mentales à distance" à l'intérieur du corps via ce mécanisme. De plus, les représentations sensorielles au corps du champ magnétique sont réalisées par le même mécanisme avec des rayons lumineux topologiques micro-ondes (très probablement) du cerveau qui se propagent le long des EEG ME et induisent une auto-organisation au niveau du corps magnétique personnel. Des représentations sensorielles sont également possibles pour une magnétosphère et peut-être même à pour des structures magnétiques plus grandes (qui pourraient avoir des tailles de durée de vie lumineuse). Ainsi, la conscience humaine a un aspect astrophysique défini.

LS : Comment interprétez-vous l'effet des fluctuations géomagnétiques et du temps sidéral local sur la cognition anormale ?

MP : Le faible niveau de bruit magnétique semble être le premier pré-requis pour des performances cognitives anormales. L'interprétation est que l'esprit magnétosphérique doit avoir un faible niveau d'excitation. La performance semble augmenter autour d'un intervalle de 2 heures autour de 13h30 heure sidérale locale, qui est l'heure dans un système de coordonnées fixé par rapport aux étoiles plutôt qu'au Soleil. Ces découvertes - ainsi que la vision générale sur les structures de tubes de flux magnétiques comme modèles de vie - suggèrent que non seulement le champ magnétique terrestre, mais aussi que les champs magnétiques interstellaires pourraient être des acteurs clés dans les interactions mentales à distance.

(a) Que les fluctuations magnétiques puissent masquer des interactions mentales à distance donne une idée de la force du champ magnétique interstellaire. Le délai pour les interactions mentales à distance est de l'ordre de t=13-17 secondes et devrait correspondre à l'échelle de temps définie par la fréquence cyclotron du proton du champ magnétique interstellaire. Cela implique qu'il devrait avoir une force dans l'intervalle 10-13nT. Par contre, aux fréquences correspondant à f = 1/t, l'intensité des fluctuations géomagnétiques est d'environ 10nT. Il semblerait qu'un champ magnétique interstellaire non masqué d'une force d'environ 10-13 nT soit crucial pour les interactions mentales à distance.

(b) Les champs magnétiques interstellaires ont généralement une intensité comprise entre 100 et 0,01 nT, et diverses échelles de temps de cyclotron sont des échelles de temps de la conscience humaine. Le seul champ magnétique interstellaire dont les tubes de flux pourraient émerger dans la direction qui est au méridien 13.30 ST est le champ magnétique de type dipôle créé par le centre galactique ayant une intensité d'ordre 100 nT près du centre galactique et coupant orthogonalement le plan galactique. Les supernovae transportent des champs magnétiques de l'ordre de 10 à 30 nT ; le vent solaire transporte un champ magnétique d'une force moyenne de 6 nT ; la nappe de plasma du côté nuit de la Terre - connue pour être une structure fortement auto-organisée - porte un champ magnétique d'une force d'environ 10 nT. Au moins pour un habitant de l'univers TGD croyant en la fractalité de la conscience, ces découvertes suggèrent que les champs magnétiques galactiques forment une sorte de système nerveux galactique, tout comme le champ magnétique terrestre forme le système nerveux de Mère Gaïa.

c) Pourquoi 13h30 ST est si spécial pourrait être compris si les tubes de flux du champ magnétique interstellaire attachés à la matière vivante vent pendant la rotation de la Terre. Cet enroulement introduit du bruit rendant les interactions mentales à distance moins probables. Pendant l'intervalle de 2 heures autour de 13h30 ST, les effets de l'enroulement sont les plus faibles.

LS : Les effets temporels tels que la pré-cognition et la rétro-pk ont ​​été un casse-tête et une complication de longue date pour l'émergence de modèles physiques convaincants en parapsychologie. Comment résolvez-vous ces paradoxes dans le cadre de votre théorie ?

MP : Dans le cadre du TGD, on est obligé de modifier les croyances de base sur le temps. Le "temps vécu subjectivement" correspond à une séquence de sauts quantiques entre des histoires quantiques. Le temps subjectif n'est cependant pas vécu comme discret puisque les soi ("soi" est un système capable d'éviter l'enchevêtrement de l'état lié avec l'environnement et a une feuille d'espace-temps comme corrélat géométrique) expérimentent la séquence de sauts quantiques comme une sorte de moyenne. La réalité résultant d'un saut quantique donné est une superposition de surfaces d'espace-temps qui se ressemblent dans la résolution dépendante de l'observateur définie par l'échelle de longueur p-adique.

On peut dire que chaque saut quantique conduit à ce qui ressemble sensoriellement à un espace-temps classique unique (sorte d'espace-temps moyen quantique). Le temps subjectif correspond au temps géométrique dans le sens où les contenus de conscience sont fortement localisés autour d'un certain moment du temps géométrique à la surface de l'espace-temps classique. L'espace-temps est à 4 dimensions. Mais notre expérience consciente à ce sujet ne nous renseigne que sur une tranche de temps étroite (du moins nous le croyons) définissant ce que l'on pourrait appeler "le temps psychologique". L'incrément de temps psychologique dans un saut quantique unique est d'environ 10 à 39 secondes selon une estimation basée sur les hypothèses les plus simples possibles. Le temps psychologique correspond aussi au front d'une transition de phase transformant des feuilles d'espace-temps p-adiques (e.g., intentions, plans) en feuilles d'espace-temps réelles (actions) et se propageant vers le Futur géométrique.

A chaque saut quantique, l'espace-temps moyen quantique classique est remplacé par un nouveau. De plus, le passé géométrique change en saut quantique de sorte qu'il n'y a pas de passé géométrique absolu (le passé subjectif étant, bien sûr, absolu). Ceci explique des anomalies causales comme celles observées par Libet, Radin et Bierman, et Peoch. La mémoire géométrique consiste essentiellement à voir dans le passé géométrique. Intentions, plans et attentes signifient voir le Futur géométrique au sens p-adique. La précognition est une mémoire inversée dans le temps. L'intention, la précognition et les souvenirs ne sont pas absolus puisque le futur géométrique et le passé changent à chaque saut quantique. Le "montage" du Passé géométrique (disons changer les mémoires en changeant l'état du cerveau en Passé géométrique) est possible.

LS : Les découvertes de Mark Germine semblent suggérer que la mesure consciente d'un événement par un cerveau tend à réduire l'élément de surprise pour les observateurs conscients ultérieurs, tel que mesuré par le potentiel lié à l'événement associé. Comment interprétez-vous ces résultats ?

MP : La nouvelle vision de champs classiques contraints par la quantification topologique conduit à vers la notion de champ/corps électromagnétique/magnétique. Chaque système matériel, atome, cellule, etc. est généralement accompagné d'un corps de champ qui est beaucoup plus grand que le corps physique et fournit une sorte de représentation symbolique du système analogue au manuel d'un instrument électronique. Le corps magnétique joue le rôle d'un écran d'ordinateur sur lequel sont réalisées des représentations sensorielles. Les "caractéristiques" produites par le traitement de l'information dans le cerveau sont attribuées à un point donné (appelons-le "P") du corps magnétique personnel en enchevêtrant les images mentales correspondantes avec l'image mentale "simple sentiment d'existence" en "P". Les ME EEG ("rayons lumineux topologiques") sont des corrélats de cet enchevêtrement.

Outre les corps magnétiques personnels, des représentations sensorielles dans la magnétosphère terrestre sont également possibles et donnent lieu à la conscience magnétosphérique. Les soi magnétosphériques recevant des informations conscientes de nombreux cerveaux sont possibles et pourraient être un aspect crucial de toutes les structures sociales. Les découvertes de Mark Germine peuvent être comprises si l'on suppose que 2 personnes recevant le stimulus inattendu à des moments légèrement différents sont des "neurones" du même soi multi-cerveau. Après avoir perçu le stimulus bizarre une fois à travers le premier cerveau, le soi multi-cérébral est moins surpris lorsqu'il expérimente le stimulus bizarre à travers le deuxième cerveau.

LS : Vos deux modèles nécessitent une cohérence quantique massive comme base d'une expérience consciente. Comment résoudre le fameux problème de décohérence ?

MP : Dans l'espace-temps à plusieurs nappes, les nappes d'espace-temps atomiques "chaudes, humides et bruyantes" ne sont pas les seules. Il existe des nappes d'espace-temps plus grandes et très froides contenant de faibles densités de matière supraconductrice. En particulier, les tubes de flux magnétique de la Terre sont supraconducteurs. On a donc une cohérence quantique macroscopique. Mais ce n'est pas assez. Il faut aussi avoir une cohérence quantique macro-temporelle. Au début, cela semble impossible. Un seul saut quantique correspond à un incrément de temps géométrique d'environ 10-39 secondes. Ce temps est identifiable comme le temps de décohérence si bien que la situation semble encore pire qu'en physique standard ! Cette image ne peut pas être correcte, et l'explication est simple.

L'intrication à l'état lié est stable dans le saut quantique. Et lorsqu'un état lié est formé, aucune réduction de fonction d'état ni préparation d'état ne se produit dans les degrés de liberté liés. La séquence entière de sauts quantiques (particules élémentaires de conscience) se lie pour former ce qui est effectivement comme un seul saut quantique, période de cohérence quantique macrotemporelle (atome, molécule,... de conscience). Le "temps de décohérence" peut être identifié comme la durée de vie de l'état lié.

Malheureusement, même cela ne suffit pas puisque c'est essentiellement ce que prédit la physique standard. La dernière pièce du puzzle provient de la dégénérescence du verre de spin quantique. La dégénérescence du verre de spin signifie qu'il existe un nombre gigantesque de surfaces d'espace-temps qui diffèrent les unes des autres uniquement parce qu'elles ont des champs gravitationnels classiques légèrement différents. Les états liés se produisent lorsque 2 feuilles d'espace-temps sont connectées par une liaison le long des frontières. La "dégénérescence du verre de spin" signifie que dans ce cas, il existe un grand nombre de liens différents le long des frontières et donc également une immense dégénérescence des états liés. Lorsqu'un état lié est formé, il se désintègre avec une très forte probabilité en un nouvel état lié de ce type puisque pour l'état libre (pas de jointure le long des liaisons aux frontières !), la dégénérescence du verre de spin n'est pas présente et le nombre de ces états est beaucoup plus petit .

Ainsi, le temps passé dans les états liés dégénérés du verre de spin ("temps de décohérence") est beaucoup plus long que dans l'univers physique standard ! Du point de vue de la physique standard, les nouveaux degrés de liberté du verre de spin sont cachés et le physicien standard identifie les états liés dégénérés comme un seul et même état lié. Par conséquent, la durée de vie mesurée de l'état lié semble être beaucoup plus longue que prévu par la physique standard.

LS : Une suite naturelle à la question précédente : Quelle est la base physique de la mémoire individuelle et du partage d'images mentales comme on le voit dans la vision à distance, la télépathie et d'autres expériences transpersonnelles (Jung, Grof, Stevenson) ?

MP : La différence essentielle entre le paradigme du cerveau à 4 dimensions et les neurosciences standard est qu'il n'y a pas besoin de stocker les souvenirs dans le 'Maintenant' géométrique. Le mécanisme le plus simple de la mémoire géométrique est le "mécanisme du miroir quantique". Se souvenir d'un événement qui s'est produit il y a un an, c'est regarder un miroir à une distance d'une demi-année-lumière et voir ce qui se passe "subjectivement maintenant" dans le temps géométrique à une distance temporelle d'un an.

L'option minimale est basée sur le partage d'images mentales rendu possible par l'intrication temporelle. L'intrication temporelle n'est pas autorisée par la physique standard. Dans TGD, l'intrication de type temps est rendue possible par le non-déterminisme partiel du principe variationnel indiquant quelles surfaces d'espace-temps sont possibles. Ce non-déterminisme ainsi que le non-déterminisme inhérent aux équations de champ p-adiques sont des éléments centraux de la théorie de la conscience inspirée du TGD.

Ils rendent également possibles la correspondance quantique-classique et les représentations symboliques et cognitives des réalités objectives et subjectives (niveau du monde des mondes) au niveau de l'espace-temps (niveau du monde) responsables des aspects autoréférentiels de la conscience. J'ai déjà parlé du partage d'images mentales comme mécanisme télépathique de base. Et l'intrication temporelle rend également possible le partage d'images mentales entre le Présent géométrique et le Passé géométrique. La signalisation classique n'est pas nécessaire mais n'est bien sûr pas exclue. Les microtubules semblent être des candidats optimaux en ce qui concerne les mémoires déclaratives à long terme.

Le partage d'images mentales est un mécanisme universel d'expériences sensorielles à distance (mémoire à long terme, représentations sensorielles, télédétection, expériences transpersonnelles). Les actions motrices à distance telles que PK nécessitent l'implication de ME à haute fréquence se propageant le long de l'enchevêtrement générant des ME à basse fréquence et induisant une auto-organisation à l'extrémité réceptrice.

LS : La télédétection d'une cible physique distante (par opposition à l'information collective) est-elle possible dans votre modèle ? Et sur quelle base ?

MP : Dans le monde TGD, tout est conscient. Et la conscience ne peut qu'être perdue. Il y a aussi des raisons de croire que pratiquement tous les systèmes servent d'"écrans d'ordinateur" donnant lieu à des représentations sensorielles. Par conséquent, des cibles physiques "non vivantes" pourraient également définir des représentations sensorielles au niveau de la magnétosphère.

Il y a une découverte étrange à propos des sons de météorites soutenant cette vision. Des sons de météores ont été à la fois entendus et détectés par des instruments. Le spectre de fréquences se situait dans l'intervalle des fréquences de résonance thalamo-corticale autour de 40 Hz alors que l'on s'attendait à ce que le spectre couvre toute la gamme 20-20 000 Hz. L'intensité des sons était également beaucoup plus forte que prévu si le rayonnement électromagnétique (induisant des sons à la surface de la Terre) généré par le météore avait des distributions à symétrie sphérique.

Cela suggère que les ME ELF correspondant à des fréquences autour de 40 Hz connectent non seulement des cerveaux mais aussi des objets "morts" à la magnétosphère, et que le rayonnement a été amplifié sélectivement dans ces guides d'ondes. Ainsi, même des objets "morts" pourraient être représentés sensoriellement dans la magnétosphère. Si le téléspectateur peut être considéré comme un client d'un multi-cerveau magnétosphérique auto-fournissant des services de télévisualisation, il est tout à fait possible que le téléspectateur puisse télédétecter la cible en utilisant les sens du moi magnétosphérique.

LS : Comment interprétez-vous la fragmentation massive des données et la pluralité des modalités sensorielles caractérisant le signal RV typique ? Qu'en est-il du phénomène de bi-localisation ?

MP : Le cerveau traite l'information en la décomposant en "caractéristiques" simples comme les bords, les coins, les mouvements simples, etc. Ces caractéristiques sont dispersées dans le cerveau presque comme dans une mémoire à accès aléatoire. Seules les représentations sensorielles au niveau du corps magnétique lient les caractéristiques appropriées à un point donné de la toile magnétique de sorte que la soupe de caractéristiques s'organise en un champ perceptif.

Dans le cas où la cible est une autre personne, la fragmentation des données pourrait signifier que le moi magnétosphérique s'emmêle avec diverses images mentales dans le cerveau, de sorte que des "caractéristiques" individuelles plutôt que la représentation sensorielle bien organisée du corps magnétique soient vues. Dans le cas d'une cible non vivante, l'organisation en champ perceptif est probablement absente de toute façon. Si le partage d'images mentales se produit de manière très intense, il peut conduire à une bilocalisation. Même un masquage presque total de la contribution ordinaire à l'expérience sensorielle est possible. Les hallucinogènes (par exemple, ceux rapportés par Terence MacKenna) impliquent en effet un remplacement soudain de la réalité sensorielle quotidienne par une nouvelle.

LS : Les travaux de Gariaev sur l'irradiation laser modulée de l'ADN ont donné des aperçus fascinants sur la possibilité d'une régulation génétique non locale, non canonique (basée sur les codons) - peut-être via des grilles d'interférence de biophotons et d'ondes radio à grande échelle menant à l'idée de un modèle holographique électromagnétique pour les organismes vivants. Quelle est la signification de ses résultats pour votre modèle ? Et comment envisagez-vous la hiérarchie des systèmes de contrôle morphogénétiques et régulateurs dans les organismes vivants ?

MP : Le travail de Gariaev fournit une information importante (beaucoup en fait !) pour tenter de concrétiser le point de vue sur le biocontrôle quantique à plusieurs feuilles. Et cela pourrait s'avérer être une preuve convaincante du concept d'espace-temps à plusieurs feuilles. Une contribution décisive pour le modèle de l'homéostasie quantique est venue des conférences de Cyril Smith sur la mémoire de l'eau et l'homéopathie lors de la conférence CASYS 2001. Le constat de base est que certaines fréquences semblent coder les effets du remède homéopathique, et que ces fréquences apparaissent par paires de fréquences basses et hautes qui apparaissent en proportion constante.

Cela peut être compris dans le cadre TGD comme suit. Lorsque les ions "chutent" de (disons) feuilles d'espace-temps atomiques vers des feuilles d'espace-temps plus grandes (disons des tubes à flux magnétique), la différence d'énergie est émise sous forme de rayonnement. L'énergie cinétique Zer-Point de petites feuilles d'espace-temps est la contribution dominante et signifie que le rayonnement a une énergie et donc une fréquence relativement élevées (par exemple, 0,5 eV pour un proton tombant d'une feuille d'espace-temps atomique). Dans les tubes à flux magnétique, les ions abandonnés sont dans des états de cyclotron magnétique excités qui se désintègrent en émettant un rayonnement cyclotron à basses fréquences. La partie "sensorielle" de l'EEG résulte de cette manière. Le rapport des hautes et basses fréquences dépend de la force du champ magnétique et de l'échelle de longueur p-adique de la feuille d'espace-temps à partir de laquelle l'ion est tombé et a tendance à avoir des valeurs discrètes.

En particulier, la lumière visible (comme dans l'expérience de Gariaev) peut "envoyer" des particules chargées des tubes de flux magnétique vers des feuilles d'espace-temps plus petites, à partir desquelles elles peuvent rebondir. Dans ce processus, d'autres ions au niveau du tube de flux magnétique peuvent tomber dans des tubes de flux magnétique plus grands et émettre un rayonnement basse fréquence dans ce processus.

Les tubes de flux magnétique forment dans la matière vivante une hiérarchie avec des intensités de champ magnétique variant comme 1 sur l'échelle de longueur p-adique au carré. Ainsi, il en résulte un rayonnement basse fréquence avec des fréquences qui sont des différences d'harmoniques des fréquences cyclotron au niveau des 2 tubes de flux magnétique impliqués. Cette prédiction est quantitative et testable et - sur la base d'une inspection grossière des spectres de fréquence rapportés dans l'article de Gariaev [1] - l'explication pourrait fonctionner.

La structure de bande de l'EEG reflète dans TGD les périodes du tableau périodique et le spectre des ondes radio devrait également présenter une version agrandie de la structure de bande. De plus, l'action laser à plusieurs feuilles devient possible si la fréquence de la lumière visible est réglée de sorte qu'elle soit juste suffisante pour envoyer une particule chargée sur la plus petite feuille d'espace-temps. La fréquence de la lumière cohérente utilisée dans l'expérience de Gariaev correspond à ce type de fréquence. La chute de la particule chargée génère un rayonnement à la même fréquence, et il en résulte une action laser à plusieurs feuilles puisque les photons cohérents déjà existants augmentent la probabilité de chute et les résultats de "chute stimulée". En outre, un laser à ondes radio à plusieurs feuilles est possible et les biosystèmes devraient contenir une hiérarchie fractale de lasers à plusieurs feuilles.

La notion d'hologramme conscient pourrait permettre d'obtenir une vision unifiée du fonctionnement de l'homéostasie en tant qu'équilibre de flux ionique à plusieurs feuilles. Le mécanisme laser à plusieurs feuilles n'est qu'un élément important de l'image. Fuite d'ions vers les feuilles d'espace-temps atomiques et auto-organisation dissipative qui en résulte ; inversion temporelle de ce processus ayant une interprétation comme un processus de guérison fondamental et impliquant une rupture de la deuxième loi de la thermodynamique en dessous de l'échelle de temps p-adique pertinente ; Les ME agissant comme des jonctions Josephson et contrôlant la génération d'impulsions nerveuses et l'EEG (l'EEG devrait avoir une généralisation fractale) - ce sont quelques facettes du biocontrôle quantique.

De plus, la notion d'ADN à plusieurs feuilles est importante et signifie que l'ADN contrôle le développement de l'organisme dans une large gamme d'échelles de longueur et de temps p-adiques en générant des modèles de rayonnement cohérents représentant le modèle pour le développement du système vivant en tant que hiérarchie fractale. d'hologrammes en 4 dimensions. La notion de "corps de champ" implique que cette structure semblable à un hologramme est de taille astrophysique avec une durée de vie lumineuse fournissant une échelle de temps naturelle.

LS : C'est probablement la question la plus redoutée pour un théoricien. Mais votre modèle est-il falsifiable ? Existe-t-il des tests physiques concevables qui pourraient définitivement valider (ou réfuter) votre théorie ? Qu'en est-il des prédictions quantitatives ? Des données corroborantes pour l'instant ?

MP : Au cours des 24 dernières années, j'ai pratiquement parcouru toute la physique afin de relier la TGD à la réalité théorique et expérimentale existante.  Le succès le plus impressionnant de TGD est le modèle pour les masses des particules élémentaires basé sur la physique p-adique.  Les échelles de masse des particules élémentaires se réduisent à la théorie des nombres et correspondent aux échelles de longueur p-adiques associées à certains nombres premiers préférés p = 2k, k premier ou puissance du nombre premier.  Les prédictions sont exponentiellement sensibles à la valeur de k, de sorte que le succès du modèle relève soit d'un miracle probabiliste, soit de l'exactitude des hypothèses de base.

Les échelles de longueur p-adiques les plus importantes de la physique des particules élémentaires correspondent aux nombres premiers de Mersenne et aux Mersennes dites gaussiennes.  Il est remarquable que toutes les échelles de longueur p-adiques entre l'épaisseur de la membrane cellulaire de 10 nm et la taille de la cellule de 2,5 micromètres (échelles de longueur associées à la hiérarchie d'enroulement de l'ADN !) correspondent à des Mersennes gaussiennes.  C'est un miracle de la théorie des nombres.  Il semblerait que le miracle de la Vie soit étroitement lié à un miracle de la théorie des nombres.

Les prédictions permettant de falsifier la théorie de la manière la plus convaincante apparaissent au niveau de la physique fondamentale.  Les symétries fixent d'une manière tout à fait unique le spectre des particules élémentaires dans toutes les théories unifiées.  La TGD prédit que les symétries de la physique des particules élémentaires sont essentiellement celles du modèle standard.  La découverte de particules élémentaires dont les nombres quantiques ne sont pas conformes à ceux prédits par le modèle standard peut tuer la TGD.  Il existe également d'importantes déviations par rapport au modèle standard, et le fait de ne pas les observer pourrait également signifier la fin du TGD.  Heureusement, la liste des anomalies expliquées par la TGD ne cesse de s'allonger.

Les prédictions de la dégénérescence du verre de spin (cohérence quantique macrotemporelle) et de la quantification du champ topologique (supraconductivité à des échelles de longueur astrophysiques) signifieront tôt ou tard une percée ou la fin de la TGD, car elles permettent des modèles quantiques quantitatifs concrets non seulement pour le biocontrôle mais aussi pour les interactions mentales à distance.

Les derniers résultats de l'approche théorique des nombres sont de véritables mesures de l'information.  Les entropies de la théorie des nombres définies pour les systèmes pour lesquels les coefficients d'intrication sont des nombres algébriques peuvent avoir des valeurs négatives et donc être interprétées comme une information positive.  On pourrait caractériser les systèmes vivants, en théorie des nombres, comme des systèmes pour lesquels les coefficients d'intrication sont des nombres algébriques.  Les opérations de type calcul quantique sont rendues possibles par la cohérence quantique macrotemporelle : les états quantiques ne sont plus fragiles puisque l'espace-temps enveloppé prédit la possibilité de partager et de fusionner des images mentales.  Toutes ces prédictions sont des prédictions tueuses testables.

LS : Quels sont certains des domaines auxquels vous pensez que votre modèle pourrait apporter des contributions majeures (c'est-à-dire la neurophysiologie, l'informatique quantique, la parapsychologie, etc.)

MP : Le réductionnisme est pratiquement toujours considéré comme un axiome de la physique.  L'implication fondamentale de la TGD est que le réductionnisme est brisé à toutes les échelles de longueur et de temps.  De nouveaux phénomènes sont prédits dans toutes les branches de la physique, de la biologie, des neurosciences, de la parapsychologie, etc. L'espace-temps à couches multiples fournit des modèles détaillés pour plusieurs anomalies associées aux phénomènes d'énergie libre.  Ces modèles devraient contribuer au développement de nouvelles technologies énergétiques.  Les processus conscients de type calcul quantique ("résolution de problèmes quantiques" pourrait être un terme plus approprié) avec des mesures d'information théoriques remplaçant l'information de Shannon constituent une deuxième implication technologique.

Les notions d'hologramme conscient et d'équilibre du flux ionique à plusieurs couches promettent une description unifiée d'une grande classe de phénomènes apparemment sans rapport entre eux, comme l'homéostasie, l'homéopathie, les représentations sensorielles et les interactions mentales à distance.

En neurosciences, le modèle basé sur la TGD pour le contrôle quantique de l'EEG et de l'impulsion nerveuse est une application importante.

LS : Quelles sont, à votre avis, les directions expérimentales et théoriques les plus prometteuses à suivre vers une théorie unifiée de l'esprit et de la matière ?

MP : Ma réponse est, nécessairement, très centrée sur la TGD.  Je pense qu'il serait intéressant de voir si les concepts inspirés de l'approche TGD pourraient nous permettre de comprendre qualitativement la conscience, les systèmes vivants et les interactions mentales à distance.  Sur le plan expérimental, la stratégie serait de tester les notions de base :

(a) Tests expérimentaux de la notion d'espace-temps à feuilles multiples, de la quantification des champs topologiques et de la prédiction selon laquelle les feuilles d'espace-temps non atomiques agissent comme des supraconducteurs, même à des échelles de longueur astrophysiques.

(b) Démonstration expérimentale de la présence de diverses signatures physiques pour le transfert d'ions entre les feuilles d'espace-temps et pour la rupture de la deuxième loi en dessous de l'échelle de temps p-adique caractérisant le système.

(c) Tests expérimentaux pour les notions de corps magnétique, de conscience magnétosphérique et de moi collectif multicérébré.  Les travaux de Mark Germine sont très encourageants à cet égard.

Auteur: Pitkanen Matti

Info: Entretien avec Matti Pitkänen et Alex Kaivarainen, interviewés par Lian Sidorov. References :  1.  Germine, Mark.  Scientific Validation of Planetary Consciousness. JNLRMI I (3). URL: www.emergentmind.org/germineI3.htm. 2.  Germine, M.  Experimental Evidence for Collapse of the Wavefunction in  the Whole Human Brain. URL: www.goertzel.org/dynapsyc. [Note: Lian Sidorov's interview with Alex Kaivarainen was more mathematically technical and can be seen at http://www.emergentmind.org/PDF_files.htm/Kaivarainen.pdf .]

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