Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits. Recherche mots ou phrases tous azimuts. Aussi outil de précision sémantique et de réflexion communautaire. Voir la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats !!!!..... Lire la suite >>
Résultat(s): 83
Temps de recherche: 0.0473s

couchant

Pirate et Osbie Feel sont étendus sur le toit de l'immeuble, un magnifique coucher de soleil traverse et dessine la rivière sinueuse, impérial serpent, une multitude d'usines, d'appartements, de parcs, de tours et de façades enfumées, un ciel incandescent qui se déverse sur les kilomètres de rues profondes, l'encombrement des toits et les ondulations de la Tamise, y mettant une tension drastique d'orange brûlée pour rappeler au visiteur sa fugacité mortelle, pour sceller ou cacher toutes portes et fenêtres visibles à ses yeux, qui ne cherchent qu'un peu de compagnie, un mot ou deux dans la rue avant de monter vers l'odeur de savon de la chambre louée et les carrés corail du coucher de soleil sur le plancher - une lumière antique, intériorisée, combustible consommé dans l'holocauste hivernal programmé, les formes plus lointaines parmi les brins ou les feuilles de fumée sont maintenant elles-mêmes de parfaites ruines carbonisées, les fenêtres plus proches, frappées un instant par le soleil, ne réfléchissent plus rien mais contiennent la même lumière destructrice,  intense décoloration qui ne permet aucune promesse de retour, une lumière qui rouille les voitures du gouvernement sur les trottoirs, qui vernit les derniers visages se pressant devant les magasins dans le froid comme si une vaste sirène avait finalement retenti,  une lumière qui fait que les innombrables rues se transforment en canaux froids déserts, et qui, avec les étourneaux de Londres, emplit tout, les oiseaux convergent par millions vers des piédestaux de pierre embrumés, vers les endroits qui se vident et vers un grand sommeil collectif. Ils convergent en anneaux, des anneaux concentriques sur les écrans radar. Les opérateurs les appellent des "anges".  

Auteur: Pynchon Thomas

Info: Gravity's Rainbow, trad Mg

[ soir ] [ cépuscule ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

théorie-pratique

- Le jeune Tchitcherine est celui qui évoqua les narcotiques politiques. L'opium du peuple.

Wimpe lui rendit son sourire. Un vieux, très vieux sourire, apte à refroidir même le feu vivant au cœur de la Terre.

- La dialectique marxiste ? Ce n'est pas un opiacé, hein ?

- C'est l'antidote.

- Non. Ça peut aller dans les deux sens. Le vendeur de drogue peut savoir tout ce qui va arriver à Tchitcherine, et décider que c'est sans importance, ou bien, suivant la velleïté du moment, il décide de mettre à l'abri le jeune imbécile.

- Le problème fondamental... a toujours été de faire mourir les autres pour soi. Qu'est-ce qui vaut assez pour qu'un homme donne sa vie ? C'est là que la religion a eu l'avantage pendant des siècles. La religion a toujours été une question de mort. Elle n'était pas utilisée comme un opiacé mais plutôt comme une technique - elle faisait mourir les gens pour un ensemble particulier de croyances sur la mort. Pervers, natürlich, mais qui es-tu pour juger ? C'était un bon argument tant que ça marchait. Mais depuis que c'est devenu impossible de mourir pour cette mort là, nous avons une version laïque - la tienne. Mourir pour aider l'Histoire à atteindre sa forme prédestinée. Mourir en sachant que son acte apportera une fin meilleure et rapprochée. Suicide révolutionnaire, très bien. Mais regarde : si les changements de l'Histoire sont inévitables, pourquoi ne pas éviter de mourir ? Vaslav ? Si ça doit arriver de toute façon, quelle importance ?"

- Mais tu n'as jamais eu ce choix à faire, n'est-ce pas ?

- Si jamais j'avais à le faire, tu peux être sûr...

- Tu ne sais pas. Pas avant que tu y sois, Wimpe. Tu ne peux pas le dire.

- Tout ça n'est pas très dialectique.

- Je ne sais pas ce que c'est.

- Donc, jusqu'à la décision, dit Wimpe curieux mais prudent, un homme pourrait encore être parfaitement pur...

- Il peut être n'importe quoi. Je ne m'en soucie pas. Mais il n'est réel qu'aux points de décision. Le temps entre les deux n'a pas d'importance.

- Réel pour un marxiste.

- Non. Réel pour lui-même.

Wimpe reste dubitatif.

- Je suis passé par là. Pas toi. 

Auteur: Pynchon Thomas

Info: Gravity's Rainbow

[ décider ] [ trancher ] [ dialogue ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

peinture surréaliste

À Mexico, ils se sont en quelque sorte égarés dans une exposition de peintures du bel exilé espagnol Remedios Varo : dans le tableau central d'un triptyque, intitulé "Bordando el Manto Terrestre", On pouvait voir un groupe de frêles jeunes filles aux visages en forme de coeur, avec des yeux immenses, des cheveux d'or filé, prisonnières au sommet d'une tour circulaire, et elles brodaient une sorte de tapisserie qui pendait dans le vide par les meurtrières, qui semblait vouloir désespérément combler le vide : car toutes les maisons, toutes les créatures, les vagues, les navires et toutes les forêts de la Terre étaient contenues dans cette tapisserie, et cette tapisserie, c'était le monde.  Oedipa, perverse, s'était tenue devant le tableau et avait pleuré. Personne ne l'avait remarqué ; elle portait des ombres de bulles vert foncé. Pendant un instant, elle s'était demandée si le joint autour de ses lunettes était assez serré pour permettre aux larmes de continuer à couler, de remplir tout l'espace de la lentille et de ne jamais sécher. Elle pouvait aisni porter la tristesse du moment avec elle de cette façon et, pour toujours, voir le monde réfracté au travers de ces larmes, ces larmes spécifiques, comme si des indices encore non trouvés variaient de façon importante d'un pleur à l'autre. Elle avait regardé ses pieds et avait su, grâce à un tableau, que ce sur quoi elle se tenait n'avait été tissé qu'à quelques milliers de kilomètres de là, dans sa propre tour, n'était que par un accident connu sous le nom de Mexique, et donc Pierce ne l'avait éloignée de rien, il n'y avait pas d'échappatoire. De quoi voulait-elle donc s'échapper ? Cette jeune fille si captive, qui a tout le temps de réfléchir, se rend vite compte que sa tour, sa hauteur et son architecture, sont comme son ego, accessoires : que ce qui la maintient vraiment là où elle est magique, anonyme et maléfique, projetté sur elle de l'extérieur et sans aucune raison. N'ayant aucun moyen, n'étaient la peur et la ruse féminine, pour examiner cette magie informe, pour comprendre son fonctionnement, mesurer son intensité ou compter ses lignes de force, elle risque de retomber dans la superstition, ou de s'adonner à un passe-temps utile comme la broderie, ou de devenir folle, voire épouser un disc-jockey. Si la tour est partout et que le preux chevalier de la providence ne peut rien contre sa magie, quoi d'autre ?  

Auteur: Pynchon Thomas

Info: The Crying of Lot 49, p.9, Penguin (2012).

[ sans issue ] [ réalité projetée ] [ littérature ] [ femme-par-homme ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel