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spiritisme

En fait, la plupart de ceux qui croient ainsi "faire de la magie" ne font en réalité rien de plus ni d’autre que de s’autosuggestionner purement et simplement ; ce qu’il y a de plus curieux ici, c’est que les cérémonies arrivent à en imposer, non pas seulement aux spectateurs, s’il y en a, mais à ceux mêmes qui les accomplissent, et, quand ils sont sincères (nous n’avons à nous occuper que de ce cas, et non de celui ou le charlatanisme intervient), sont véritablement, à la façon des enfants, dupes de leur propre jeu. Ceux-là n’obtiennent donc et ne peuvent obtenir que des effets d’ordre exclusivement psychologique, c’est-à-dire de même nature que ceux que produisent les cérémonies en général, et qui sont du reste, au fond, toute la raison d’être de celles-ci ; mais, même s’ils sont restés assez conscients de ce qui se passe en eux et autour deux pour se rendre compte que tout se réduit à cela, ils sont bien loin de se douter que, s’il en est ainsi, ce n’est que du fait de leur incapacité et de leur ignorance. Alors, ils s’ingénient à bâtir des théories, en accord avec les conceptions les plus modernes, et rejoignant directement par là, bon gré mal gré, celles de la "science officielle" elle-même, pour expliquer que la magie et ses effets relèvent entièrement du domaine psychologique, comme d’autres le font aussi pour les rites en général ; le malheur est que ce dont ils parlent n’est point la magie, au point de vue de laquelle de pareils effets sont parfaitement nuls et inexistants, et que, confondant les rites avec les cérémonies, ils confondent aussi la réalité avec ce qui n’en est qu’une caricature ou une parodie ; si les "magistes" eux-mêmes en sont là, comment s’étonner que de semblables confusions aient cours parmi le "grand public" ?

Auteur: Guénon René

Info: Aperçus sur l'initiation, chapitre XX

[ critique ] [ crédulité ] [ rationalisation inappropriée ]

 

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totalisation

Hegel est le premier à comprendre, au début du XIXe siècle, que l’humanité est en train de basculer d’une ère à une autre, que nous sommes en train de sortir de l’histoire, et qu’il est vain de tenter de maintenir tout ce qui est en train de s’effondrer. Ce qui s’achève sous les yeux de Hegel, c’est le processus de réalisation de la raison et de rationalisation de la réalité : et en effet, nous ne vivons plus dans un environnement naturel, mais dans un univers intégralement artificiel et numérique, au sein de ce que Hegel nomme une "seconde nature", qui s’est substituée à la première. Hegel lui-même y voit l’accomplissement du platonisme, l’achèvement de la métaphysique, et c’est ce qu’il oppose à Kant : la Critique de la raison pure veut montrer que la métaphysique est impossible parce que les idées de la raison ne peuvent pas trouver de vérification expérimentale dans les structures de la subjectivité finie, et tout particulièrement dans les formes de l’espace et du temps ; Hegel lui objecte que ce n’est précisément pas par les sujets finis que se fait cette vérification, mais par le biais du travail millénaire de peuples qui se sont succédés pour opérer cette rationalisation intégrale du réel, et ce dans le temps de l’histoire et dans l’espace du monde. Hegel conçoit ainsi notre époque comme synthèse de toutes les contradictions, comme identité achevée de l’idéal et du réel, adéquation parfaite du réel et du rationnel : de son point de vue, la Sagesse que recherchaient les philosophes est enfin atteinte, nous sommes entrés dans l’ère du Vrai et du Bien, et il conçoit même l’avènement de cette totalité rationnelle comme marche de Dieu sur terre. Hegel est ainsi fondamentalement le penseur de la réconciliation : c’est pourquoi il n’est pas un penseur de la crise. Il demeure en effet idéaliste et reste pris dans les structures de la métaphysique, en ce qu’il identifie la réalité à l’idéalité, le réel et le rationnel.

Auteur: Vioulac Jean

Info: http://actu-philosophia.com/Entretien-avec-Jean-Vioulac-Autour-d-Approche-de

[ résumé ] [ message philosophique ] [ modernité ]

 
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chronos

(...) si l’utilisation permanente du chronomètre a suffi à faire d’une technique fruste une supposée science, c’est probablement parce que le chronomètre, et son ancêtre l’horloge, bénéficiaient depuis longtemps d’une représentation très favorable dans l’imaginaire social occidental. Et, de fait, le comptage exact du temps remonte au Moyen Âge, vers 1330, au moment de l’invention de l’horloge mécanique à poids venue remplacer la clepsydre (horloge à eau), imprécise et soumise aux conditions atmosphériques (sécheresse, gel…).

Non seulement la manière de percevoir le temps allait radicalement changer, mais, comme l’explique Jacques Le Goff dans La Civilisation de l’Occident médiéval, les activités humaines allaient devoir se soumettre de plus en plus strictement aux exigences de l’horloge. En effet, le temps circulaire du calendrier liturgique, le temps linéaire des histoires et des récits, le temps des travaux et des jours, le temps des saisons, tous ces temps différents, allaient devoir s’aligner sur un seul et même temps divisible en parties égales et mécaniquement mesurables, celui des horloges. La notion d’ " heure " allait elle-même profondément changer. Avant, l’heure était en quelque sorte variable : il y avait, quelle que soit la saison, douze heures pour la nuit et douze heures pour le jour. En hiver donc, l’" heure diurne " était plus courte qu’en été et l’" heure nocturne " plus longue qu’en été. Avec la machine à mesurer le temps, cette sorte de respiration interne des heures est devenue obsolète. C’est ainsi que vers 1400 fut institué le système moderne des " heures égales ".

Déjà, dans Technique et Civilisation (1934), Lewis Mumford affirmait que l’horloge constituait un bien meilleur point de départ que la machine à vapeur pour comprendre la révolution industrielle à venir : non seulement parce que la fabrication des horloges est devenue l’industrie à partir de laquelle les hommes ont appris comment fabriquer des machines, toutes sortes de machines, mais surtout parce qu’elle a été la première machine automatique qui ait pris une importance significative dans la vie des humains, en la transformant profondément.

On peut comprendre ces transformations en lisant le remarquable livre, à mi-chemin entre essai et science-fiction, de l’historien des sciences Pierre Thuillier, La Grande Implosion. Rapport sur l’effondrement de l’Occident – titre prémonitoire s’il en est. Il montre qu’à cette transformation du temps en quantité pure correspondent les débuts du règne du marchand. Cet homme quantitatif par excellence a en effet tout de suite compris que l’horloge l’aiderait à gérer plus efficacement ses affaires, à mieux utiliser son temps et celui des autres. C’est pourquoi les bourgeois d’alors organisèrent très tôt un véritable culte du temps mécanique en installant une imposante horloge partout visible au plus haut du beffroi de leur hôtel de ville.

Auteur: Dufour Dany-Robert

Info: Le délire occidental

[ historique ] [ ordre ] [ rationalisation ]

 

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organisation scientifique du travail

Du point de vue de l’effet moral sur les ouvriers, la taylorisation a sans aucun doute provoqué la disqualification des ouvriers. Ceci a été contesté par les apologistes de la rationalisation, notamment par Dubreuilh dans Standards. Mais Taylor a été le premier à s’en vanter, en arrivant à ne faire entrer que 75 % d’ouvriers qualifiés dans la production, contre 25 % d’ouvriers non qualifiés pour le finissage. Chez Ford, il n’y a que 1 % d’ouvriers qui aient besoin d’un apprentissage de plus d’un jour.

Ce système a aussi réduit les ouvriers à l’état de molécules, pour ainsi dire, en en faisant une espèce de structure atomique dans les usines. Il a amené l’isolement des travailleurs. C’est une des formules essentielles de Taylor qu’il faut s’adresser à l’ouvrier individuellement ; considérer en lui l’individu. Ce qu’il veut dire, c’est qu’il faut détruire la solidarité ouvrière au moyen des primes et de la concurrence. C’est cela qui produit cette solitude qui est peut-être le caractère le plus frappant des usines organisées selon le système actuel, solitude morale qui a été certainement diminuée par les événements de juin. Ford dit ingénument qu’il est excellent d’avoir des ouvriers qui s’entendent bien, mais qu’il ne faut pas qu’ils s’entendent trop bien, parce que cela diminue l’esprit de concurrence et d’émulation indispensable à la production.

La division de la classe ouvrière est donc à la base de cette méthode. Le développement de la concurrence entre les ouvriers en fait partie intégrante ; comme l’appel aux sentiments les plus bas. Le salaire en est l’unique mobile. Quand le salaire ne suffit pas, c’est le renvoi brutal. À chaque instant du travail, le salaire est déterminé par une prime. À tout instant, il faut que l’ouvrier calcule pour savoir ce qu’il a gagné. Ce que je dis est d’autant plus vrai qu’il s’agit de travail moins qualifié.

Ce système a produit la monotonie du travail. Dubreuilh et Ford disent que le travail monotone n’est pas pénible pour la classe ouvrière. Ford dit bien qu’il ne pourrait pas passer une journée entière à un seul travail de l’usine, mais qu’il faut croire que ses ouvriers sont autrement faits que lui, parce qu’ils refusent un travail plus varié. C’est lui qui le dit. Si vraiment il arrive que par un tel système la monotonie soit supportable pour les ouvriers, c’est peut-être ce que l’on peut dire de pire d’un tel système ; car il est certain que la monotonie du travail commence toujours par être une souffrance. Si on arrive à s’y accoutumer, c’est au prix d’une diminution morale.

En fait, on ne s’y accoutume pas, sauf si l’on peut travailler en pensant à autre chose. Mais alors il faut travailler à un rythme ne réclamant pas trop d’assiduité dans l’attention nécessitée par la cadence du travail. Mais si on fait un travail auquel on doive penser tout le temps, on ne peut pas penser à autre chose, et il est faux de dire que l’ouvrier puisse s’accommoder de la monotonie de ce travail.

Auteur: Weil Simone

Info: "La condition ouvrière", Journal d'usine, éditions Gallimard, 2002, pages 321-322

[ conséquences ] [ individualisation ] [ clivage ]

 
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transition scientifique

B.T. Dobbs a fait de l’alchimie du XVIIe siècle un portrait qui donne des indications irremplaçables concernant le problème des "pratiques" alchimiques. Cette époque charnière représente en effet un moment clé dans l’histoire de l’art hermétique, puisque celui-ci va subir une "métamorphose" qui explique pour une large part les erreurs contemporaines relatives à sa juste compréhension. Selon B.T. Dobbs valorisant ce changement radical, l’alchimie qui jusque-là était étroitement liée à des "spéculations mystiques (...) trop fortement orientées vers l’illumination intérieure" va recevoir une "influence apaisante du rationalisme et de la nouvelle philosophie mécaniste. La voie était tracée, est-il ajouté, pour que l’alchimie s’ouvre à la rationalisation, qu’elle admette une formulation chimique, bref qu’elle accepte une clarification de ses méthodes et de ses modes de pensée". Plusieurs groupes, dont celui de Hartlib, seront responsables de ce processus révolutionnaire. Son objectif connu consistait en une "opération concertée ayant pour but la fabrication et la commercialisation de l’or". Cette démarche, dont B.T. Dobbs note qu’elle était étrangère à "la littérature alchimique antérieure", visait dans le même temps à "faire partager au plus grand nombre les secrets alchimiques". Il s’agit donc d’une triple sécularisation : vénale, commerciale et démocratique qui engage l’alchimie traditionnelle dans une voie rationnelle, puis expérimentale. Les conceptions de S. Hartlib n’eurent d’influence sur Newton que par l’intermédiaire d’un de ses plus proches disciples, d’ailleurs plus connu, R. Boyle, qui poursuivra le projet d’assimilation de l’œuvre alchimique à la vision mécaniste naissante de l’univers. Celui-ci "réfute la théorie alchimique des trois Principes (Soufre-Mercure-Sel) et les qualifie de paradoxes antichimiques", ce qui montre l’ampleur de la rupture qui se prépare. Toutefois, à côté de ces objectifs vulgaires, certains aspects de l’ancienne quête alchimique vont être également victimes d’une sorte de détournement de sens. La réalisation, notamment, de "l’eau mercurielle" qui, d’après B.T. Dobbs, ne fut auparavant "décrite nulle part en termes physiques" fut l’objet dans ces milieux novateurs d’investigations expérimentales qui d’ailleurs n’aboutirent pas à grand chose, selon leurs propres témoignages.

Un peu plus tard (au XVIIIe s.), on sait que H. Bœrhaave fera encore cette expérience de "chauffer du mercure" sans davantage de succès. Or, c’est ce même genre d’opération qu’entreprend Newton vers 1660. Ainsi, l’alchimie devient-elle, une fois débarrassée de son mystère, "une branche respectable de la physique". Curieusement, dans un climat déjà paradoxal, l’alchimie est simultanément respectée, vénérée et défigurée. Son ésotérisme n’étant plus compris, il faut en reconstituer la signification sur des bases nouvelles, sans rapport avec les anciennes, afin de retrouver la clé tant recherchée de l’univers. L’intention profonde de Newton, dans cette perspective, est de chercher à élucider "les mouvements des corps de petites dimensions, de manière à compléter, rapporte B.T. Dobbs, le système universel qu’il était en train d’édifier". Pour ce faire, et aussi étrange que cela puisse paraître, Newton essaiera d’extraire le "mercure" des métaux. Il participe donc à cette large entreprise de matérialisation des Principes hermétiques, de telle sorte que cette néo-alchimie en vint à concevoir l’existence d’un "mercure philosophique" concret. On peut donc penser qu’il ne l’était pas à l’origine, d’où une contradiction avec ce qu’affirmait au début de son livre B.T. Dobbs, qui admet la coexistence de "deux aspects" de l’ancienne alchimie : "la science occulte et les expériences au fourneau". Or, il apparaît clairement, d’après sa propre enquête, que cette concrétisation est le fait de chimistes manipulateurs tardifs, soucieux "d’expérimentations quantitatives". Cette mutation n’a d’ailleurs pu s’effectuer que par une sorte de transcription des "mythes" de l’alchimie ancienne en opérations de laboratoire, et ceci explique pourquoi Newton étudia avec tant de zèle ces vieux traités hermétiques.

Auteur: Geay Patrick

Info: Dans "Hermès trahi", pages 56-57

[ historique ] [ interprétation littérale ] [ incompréhension ]

 

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magouille sémantique

Manipulation du savoir : L'intersection de la fenêtre d'Overton et de l'activisme académique

Les frontières de la science sont-elles devenues poreuses avec l'activisme académique ? C'est la question centrale que soulève Jean-François Le Drian dans son nouvel ouvrage, "Activismes" paru chez VA Éditions, et au cours de cette entrevue. Au fil de la discussion, l'auteur dévoile les dessous d'une manipulation subtile du savoir, où l'intersection de la fenêtre d'Overton et de l'activisme académique joue un rôle déterminant. Il décrit avec précision comment de simples idées peuvent être élevées au rang de concepts scientifiquement acceptables, affectant ainsi l’intégrité de la recherche authentique et de la méthodologie scientifique. Cet échange éclairant met en lumière le combat essentiel pour préserver l'authenticité et l'objectivité de la science face à une mer montante de pseudoscience et d'idéologies activiste.

(Q) Pour nos lecteurs qui ne sont pas familiers avec la fenêtre d'Overton, pourriez-vous brièvement expliquer ce concept et comment il peut être utilisé pour changer la perception du public sur certaines idées ?

(R) Pour expliquer ce concept, il est préférable de l’illustrer avec un exemple. Si je vous disais que les djinns existent, peuvent nous posséder, nous adresser des injonctions, vous seriez dans un premier temps tenter de ranger cette thèse dans la catégorie des superstitions et des lubies et vous auriez certainement raison.

Si un philosophe se met à distinguer entre la propriété des pensées et la paternité des pensées et décide d’étudier en employant un jargon académique la possibilité d’une paternité extérieure des pensées, l’impensable devient tout à coup pensable.

Justement, dans mon livre, j’explique comment un philosophe reconnu par ses pairs en arrive à affirmer que la psychologie est nécessairement culturelle et que par conséquent certaines théories psychologiques peuvent valablement affirmer la possibilité d’une paternité extérieure des pensées.

Ici on passe de l’impensable au pensable puis au possible. Il ne reste plus qu’à faire porter ces idées par les activistes de la folie pour les rendre acceptables, le stade suivant étant de loger ces représentations dans le registre du " souhaitable ".

Ainsi, un idéologue activiste doté d’un doctorat peut donc tout à fait, s’il s’y prend bien, faire entrer l’idée la plus absurde dans le registre de l’acceptable voire parfois même du non discuté.

(Q) Dans votre texte, vous mettez en lumière la manière dont certaines idées reçoivent un "sceau académique" sans une vérification empirique rigoureuse. Comment les institutions académiques, selon vous, ont-elles été transformées en vecteurs de diffusion d'idées influencées par l'activisme ?

(R) Selon moi, l’une des grandes erreurs de notre temps consiste à accorder trop d’importance à la sociologie de la connaissance au détriment de la philosophie des sciences. Au lieu de s’intéresser au contenu, la tendance consiste à s’attacher aux intentions présumées du créateur d’idées, de thèses, à son " habitat social ".

Il est malheureusement facile de construire des théories qui font rentrer tous les faits et qui par conséquents ne devraient pas être qualifiées de théories scientifique. C’est le cas de certaines théories dites " normatives " dont le degré de scientificité est généralement très faible.

Le simple usage d’un jargon spécialisé usité au sein d’une mouvance universitaire permettra à un universitaire militant d’obtenir une reconnaissance par ses pairs qui aux yeux du public vaudra reconnaissance du caractère scientifique d’une thèse qui en réalité ne possèdera le plus souvent qu’un caractère normatif.

(Q) Vous évoquez la saturation de l'espace académique avec des "hadiths scientifiques". Comment ce mécanisme fonctionne-t-il et quels sont ses effets sur la recherche authentique ?

(R) Les hadiths scientifiques sont des scripts normatifs sans degré de scientificité auxquels on attache une connotation scientifique le plus souvent parce que leurs inventeurs disposent d’un titre académique et que le hadith possède un vernis académique qui lui confère une apparence de scientificité.

(Q) Face à la montée d'un tel activisme, que recommanderiez-vous aux chercheurs pour préserver l'intégrité de leurs travaux et s'assurer qu'ils ne sont pas noyés dans un "océan de pseudoscience" pour reprendre vos termes ?

(R) La première chose est de bannir le raisonnement téléologique, celui qui consiste à décider à l’avance du résultat à atteindre et à ajuster son raisonnement à ses intentions. Un " vrai " chercheur devrait parfois pouvoir aboutir à des conclusions qui lui déplaisent et qui contredisent ses croyances préexistantes.

Il faut revenir à la méthode qui consiste à chercher continuellement à falsifier, à réfuter ses propres convictions. Aujourd’hui, même dans les milieux universitaires, on procède de manière inverse en produisant les rationalisations ou en sélectionnant les faits qui viendront soutenir une idéologie préexistante.

Le biais de confirmation est exactement le contraire de la méthode scientifique. Malheureusement, il affecte autant les départements de sociologie et de sciences politiques que le grand public.

Auteur: Internet

Info: https://www.journaldeleconomie.fr/, 17 Octobre 2023, par La Rédaction

[ instrumentalisation ] [ onomasiologique ] [ science molle ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

querelle du filioque

La source la plus claire de la notion de pardon que le christianisme développera pendant des siècles remonte, dans les Évangiles, à saint Paul et à saint Luc. Comme tous les principes de base de la chrétienté, elle sera développée chez saint Augustin, mais c’est chez saint Jean Damascène (au VIIIe siècle) qu’on trouvera une hypostase de la "bienveillance du père" (eudoxia), de la "tendre miséricorde" (eusplankhna) et de la "condescendance" (le Fils s’abaisse jusqu’à nous)(synkatabasis). A rebours, ces notions peuvent être interprétées comme préparant la singularité du christianisme orthodoxe jusqu’au schisme de Per Filium/Filioque.

Un théologien semble avoir profondément déterminé la foi orthodoxe qui s’exprime puissamment chez Dostoïevski et donne à l’expérience intérieure propre à ses romans cette intensité émotionnelle, ce pathos mystique si surprenants pour l’Occident. Il s’agit de saint Syméon le Nouveau Théologien (999-1022). [...] Saint Syméon comprend la Trinité comme une fusion des différences que sont les trois personnes, et l’énonce intensément à travers la métaphore de la lumière.

Lumière et hypostases, unité et apparition : telle est la logique de la Trinité byzantine. Elle trouve immédiatement, chez Syméon, son équivalent anthropologique : "Comme il est impossible qu’il existe un homme avec parole ou esprit sans âme, ainsi il est impossible de penser le Fils avec le Père sans le Saint-Esprit [...]. Car ton propre esprit, de même que ton âme, est dans ton intelligence, et toute ton intelligence est dans tout ton verbe, et tout ton verbe est dans tout ton esprit, sans séparation et sans confusion. C’est l’image de Dieu en nous." Dans cette voie, le croyant se défie en fusionnant avec le Fils et avec l’Esprit : "Je te rends grâce que sans confusion, sans changement, tu te sois fait un seul Esprit avec moi, bien que tu sois Dieu par-dessus tout, tu sois devenu pour moi tout en tout."

Nous touchons ici l’ "originalité de l’orthodoxie". Elle aboutira, à travers maintes controverses institutionnelles et politiques, au schisme accompli au XIe siècle et achevé avec la prise de Constantinople par les Latins en 1204. Sur le plan proprement théologique, c’est Syméon plus que Photius qui formule la doctrine orientale Per Filium opposée au Filioque des Latins. Insistant sur l’Esprit, il affirme l’identité de la vie dans l’Esprit et de la vie dans le Christ, cette pneutamologie puissante trouvant dans le Père son origine. Toutefois, une telle instance paternelle n’est pas simplement un principe d’autorité ou une cause mécanique simple : dans le Père, l’Esprit perd son immanence et s’identifie au royaume de Dieu défini à travers des métamorphoses germinales, florales, nutritives et érotiques qui connotent, par-delà l’énergétisme cosmique souvent considéré spécifique à l’Orient, la fusion ouvertement sexuelle avec la Chose aux limites du nommable.

Dans cette dynamique, l’Église elle-même apparaît comme un soma pneumatikon, un "mystère", plus qu’une institution à l’image des monarchies.

Cette identification extatique des trois hypostases entre elles et du croyant avec la Trinité ne conduit pas à la conception d’une autonomie du Fils (ou du croyant), mais à une appartenance pneumatologique de chacun aux autres, que traduit l’expression Per Filium (l’Esprit descend du Père par le Fils) opposée au Filioque (l’Esprit descend du Père et du Fils).

Il a été impossible, à l’époque, de trouver la rationalisation de ce mouvement mystique interne à la Trinité et à la foi, où, sans perdre sa valeur de personne, l’Esprit fusionne avec les deux autres pôles et, du même coup, leur confère, au-delà de leur valeur d’identité ou d’autorité distinctes, une profondeur abyssale, vertigineuse, certainement aussi sexuelle, dans laquelle se logera l’expérience psychologique de la perte et de l’extase. Le nœud borroméen que Lacan a utilisé comme métaphore de l’unité et de la différence entre le Réel, l’Imaginaire et le Symbolique permet peut-être de penser cette logique, si tant est qu’il soit nécessaire de la rationaliser. Or, précisément, tel ne semblait pas être le propos des théologiens byzantins du XI au XIIIe siècles, préoccupés de décrire une nouvelle subjectivité post-antique plutôt que de la soumettre à la raison existante. En revanche, les Pères de l’Église latine, plus logiciens, et qui venaient de découvrir Aristote (alors que l’Orient en était nourri et ne cherchait plus qu’à s’en différencier), ont logifié la Trinité en voyant en Dieu une essence intellectuelle simple articulable en dyades : le Père engendre le Fils ; le Père et le Fils en tant qu’ensemble font procéder l’Esprit. Développée par la syllogistique d’Anselme de Cantorbury au concile de Bari en 1098, cette argumentation du Filioque sera reprise et développée par Thomas d’Aquin. Elle aura l’avantage d’asseoir d’une part l’autorité politique et spirituelle de la papauté, d’autre part l’autonomie et la rationalité de la personne du croyant identifié à un Fils ayant pouvoir et prestige à égalité avec le Père. Ce qui est ainsi gagné en égalité et donc en performance et en historicité, est peut-être perdu au niveau de l’expérience de l’identification, au sens d’une instabilité permanente de l’identité.

Auteur: Kristeva Julia

Info: Dans "Soleil noir", éditions Gallimard, 1987, pages 218 à 222

[ influence ] [ psychanalyse ]

 
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intelligence artificielle

La vérité sur la soupe acronymique de l'IA (ANI, AGI, ASI)

(désambiguïser le jargon et les mythes qui entourent l'IA.)

L'IA est souvent expliquée à l'aide des catégories suivantes : intelligence artificielle étroite (ANI), intelligence artificielle générale (AGI) et superintelligence artificielle (ASI)[1]. Bien que ce cadre conceptuel étrange n'apporte aucune valeur réelle, il se retrouve dans de nombreuses discussions[2]. Si vous n'êtes pas familier avec ces catégories, considérez-vous chanceux et passez à un autre article, plus conséquent. Sinon, je vous invite à poursuivre votre lecture.

Tout d'abord, déplorer les catégorisations - comme je m'apprête à le faire - n'a qu'une valeur limitée car les catégories sont arbitrairement similaires et distinctes, en fonction de la manière dont nous classons les choses. Par exemple, le théorème du vilain petit canard démontre que les cygnes et les canetons sont identiques si l'on souhaite manipuler les propriétés à des fins de comparaison. Toutes les différences n'ont pas de sens si nous n'avons pas de connaissances préalables sur ces différences. Hélas, cet article décortique ces catégories suspectes d'un point de vue commercial.

L'intelligence artificielle étroite (ANI) est souvent confondue avec l'intelligence artificielle faible. John Searle, philosophe et professeur à l'université de Californie, a expliqué dans son article fondateur de 1980, "Minds, Brains, and Programs", que l'intelligence artificielle faible serait toute solution à la fois étroite et ressemblant superficiellement à l'intelligence. Searle explique qu'une telle recherche serait utile pour tester des hypothèses sur des segments d'esprits mais ne serait pas des esprits[3]. L'ANI réduit cela de moitié et permet aux chercheurs de se concentrer sur l'étroitesse et la superficialité et d'ignorer les hypothèses sur les esprits. En d'autres termes, l'ANI purge l'intelligence et les esprits et rend l'intelligence artificielle "possible" sans rien faire. Après tout, tout est étroit, et si l'on louche suffisamment, tout peut ressembler superficiellement à de l'intelligence.

L'intelligence artificielle générale (AGI) est la solution idéalisée que beaucoup imaginent lorsqu'ils pensent à l'IA. Alors que les chercheurs travaillent plus sur l'étroitesse et la superficialité, ils parlent de l'AGI, comme une représentation histoirique, d'une IA unique qui remonte aux années 1950, avec un renouveau au cours de la dernière décennie. L'AGI implique deux choses à propos d'une solution qui ne devraient pas s'appliquer à la résolution de problèmes centrés sur l'entreprise. Primo, un tel programme possède l'aptitude générale à l'intelligence humaine (voire toute l'intelligence humaine). Deuxio l'AGI peut résoudre des problèmes généraux ou remplir une ardoise vierge, ce qui signifie que toute connaissance d'un problème est rhétorique et indépendante d'une stratégie de résolution de ce problème[4]. Au lieu de cela, la connaissance dépend d'une aptitude vague et mal définie liée à la structure multidimensionnelle de l'intelligence naturelle. Si cela semble ostentatoire, c'est parce que c'est le cas.

La superintelligence artificielle (ASI) est un sous-produit de la réalisation de l'objectif de l'AGI. L'idée communément admise est que l'intelligence générale déclenchera une "explosion de l'intelligence" qui entraînera rapidement l'apparition de la superintelligence. On pense que l'ASI est "possible" en raison de l'auto-amélioration récursive, dont les limites ne sont limitées que par l'imagination débridée d'un programme. L'ASI s'accélère pour atteindre et dépasser rapidement l'intelligence collective de l'humanité. Le seul problème pour ASI est qu'il n'y a plus de problèmes. Quand ASI résout un problème, elle en demande un autre avec le dynamisme d'un Newton au berceau. Une accélération de ce type se demandera quelle est la prochaine étape à l'infini, jusqu'à ce que les lois de la physique ou de l'informatique théorique s'imposent.

Nick Bostrom, chercheur à l'Université d'Oxford, affirme que nous aurons atteint l'ASI lorsque les machines sont plus intelligentes que les meilleurs humains dans tous les domaines, y compris la créativité scientifique, la sagesse générale et les compétences sociales[5]. La description de l'ASI par Bostrom a une signification religieuse. Comme leurs homologues religieux, les adeptes de l'ASI prédisent même des dates précises auxquelles le second avènement révélera notre sauveur. Curieusement, Bostrom n'est pas en mesure d'expliquer comment créer une intelligence artificielle. Son argument est régressif et dépend de lui-même pour son explication. Qu'est-ce qui créera l'ASI ? Eh bien, l'AGI. Qui créera l'AGI ? Quelqu'un d'autre, bien sûr. Les catégories d'IA suggèrent un faux continuum à l'extrémité duquel se trouve l'ASI, et personne ne semble particulièrement contrarié par son ignorance. Cependant, le fanatisme est un processus d'innovation douteux.

Une partie de notre problème collectif lorsque nous parlons d'IA est que nous ancrons notre pensée dans des dichotomies prévalentes mais inutiles[6]. Les fausses dichotomies créent un sentiment artificiel qu'il existe une alternative. L'ANI, l'AGI et l'ASI suggèrent un faux équilibre entre diverses technologies en présentant plusieurs aspects d'un argument qui n'existe pas. Même si nous acceptons la définition de l'ANI et ignorons sa trivialité, l'AGI et l'ASI n'ont rien de convaincant. Mentionner quelque chose qui n'existera pas pour évaluer la technologie d'aujourd'hui avec un nom plus accrocheur comme ANI est étrange. Nous ne comparons pas les oiseaux aux griffons, les chevaux aux licornes ou les poissons aux serpents de mer. Pourquoi comparerions-nous (ou mettrions-nous à l'échelle) l'informatique à l'intelligence humaine ou à l'intelligence de tous les humains ?

Toute explication qui inclut l'AGI ou l'ASI déforme la réalité. L'ancrage est un biais cognitif dans lequel un individu se fie trop à un élément d'information initial (connu sous le nom d'"ancre") lorsqu'il prend des décisions. Des études ont montré qu'il est difficile d'éviter l'ancrage, même en le recherchant[7]. Même si nous reconnaissons que l'AGI et l'ASI sont significativement erronées ou mal placées, elles peuvent encore déformer la réalité et créer des désalignements. Nous ne devons pas nous laisser abuser par une fausse dichotomie et un faux équilibre.

L'IA ne se résume pas à trois choses. Ce n'est pas quelque chose qui s'échelonne en fonction de l'"intelligence" ou qui se range proprement dans trois catégories. Ces catégories ne délimitent pas des technologies spécifiques, ne mettent pas en évidence des domaines de recherche ou ne représentent pas un continuum où l'on commence par travailler sur l'ANI et où l'on termine avec l'ASI. Elles sont absurdes. L'IA est une chose : un objectif singulier et sans précédent de recréer l'intelligence ex nihilo. Cependant, cet objectif est en décalage permanent avec le monde des affaires.

Les objectifs commerciaux ne peuvent pas être totalisés et absorber tout ce qui les entoure, car la communication d'entreprise, qui comprend toutes les stratégies, n'est efficace que lorsqu'elle ne peut pas être mal comprise. À moins que vous n'envisagiez d'aligner votre entreprise sur l'objectif unique et sans précédent de l'IA, vous devez faire attention lorsque vous appelez vos objectifs "IA", car vous ne pouvez pas dire "IA" de nos jours si vous voulez être compris. Comme nous appelons de plus en plus de choses "IA", la tâche de communiquer un but et une direction devient encore plus difficile. Cependant, dire ANI, AGI ou ASI n'arrange pas les choses. Cela nuit à la communication. Le meilleur conseil que l'on puisse donner aux responsables techniques est d'éviter les faux continuums, les fausses dichotomies et les faux équilibres. Comme l'explique Jay Rosen, critique des médias, en empruntant une phrase au philosophe américain Thomas Nagel, "le faux équilibre est un point de vue de nulle part'".

Auteur: Heimann Richard

Info: 3 novembre 2022

[ limitation consumériste ] [ rationalisation restrictive ] [ normalisation commerciale ] [ délimitation normative ] [ bridage marchand ] [ chambre chinoise mercantile ] [ impossibilité holistique ]

 

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autodétermination

Le (non-)rôle de la conscience
Le biologiste François Jacob a utilisé à propos de notre cerveau, une image admirable : le cerveau humain est conçu, dit-il, comme une brouette sur laquelle aurait été greffé un moteur à réaction. Par cette image frappante, il attirait notre attention sur le fait que notre cerveau n’est pas constitué comme une machine d’une seule pièce. Il y a en son centre, le cerveau reptilien, appelé ainsi parce qu’il possède déjà la même structure chez le reptile, et le cerveau des mammifères s’est construit comme une couche additionnelle, absolument distincte : le cortex est d’une autre nature que le cerveau reptilien. Lequel est celui des sens, de la réaction immédiate, celui du réflexe, de l’affect, comme s’expriment les psychologues.

Le cortex s’est spécialisé dans le raisonnement, dans la réflexion rationnelle, l’enchaînement des arguments, le calcul mathématique, tout ce qui est de l’ordre des symboles, et il est greffé sur ce cerveau reptilien qui est lui d’une nature purement instinctive, ce qui fait que nous réagirons par l’enthousiasme ou par la peur devant ce que notre cerveau-cortex aura déterminé de faire. Les plus beaux exemples dans ce domaine, ce sont bien sûrs les traders qui nous les proposent. Ceux d’entre mes lecteurs qui connaissent des traders savent que le jour où ils ont gagné beaucoup d’argent ils sont dans les restaurants et les bars des beaux quartiers, ils fument de gros cigares et boivent beaucoup, alors que les jours où ils ont perdu des sommes impressionnantes, on les voit beaucoup moins : ils sont à la maison, ils essaient de dormir et ont pris des cachets pour tenter d’y parvenir.

Une autre caractéristique de notre cerveau, c’est que la conscience que nous avons de ce que nous faisons, cette conscience n’a pas véritablement été conçue comme un instrument qui nous permette de prendre des décisions. Quand les psychologues sont allés expérimenter, dans les années 1960, autour de la question de la volonté, ils ont fait la découverte sidérante que la volonté apparaît dans le cerveau après qu’a été réalisé l’acte qu’elle est censée avoir déterminé. La représentation de la volonté que nous allons poser un acte, n’intervient en fait qu’une demi-seconde après que l’acte a été posé, alors que l’acte lui-même a pu être réalisé un dixième de seconde seulement après l’événement qui en a été le véritable déclencheur.

Le psychologue qui a découvert cela est Américain et son nom est Benjamin Libet (1916-2007). La première hypothèse qu’il a émise, quand les faits lui sont apparus dans toute leur clarté, a été d’imaginer qu’il existait un mécanisme dans le cerveau qui permet à une information de remonter le temps. Son explication première n’a pas été que "volonté" est un mot dénotant un processus illusoire, une mésinterprétation de notre propre fonctionnement, mais que la volonté devait bien – comme nous l’imaginons spontanément parce que les mots de la langue nous le suggèrent fermement – décider des choses que nous allons accomplir, et que la seule explication possible était que la volonté remonte dans le temps pour poser les actes que nous supposons qu’elle détermine, seule manière de rendre compte du décalage d’une demi-seconde observé.

Il n’y a donc pas comme nous l’imaginions avant la découverte de l’inconscient, une conscience décidant de tous nos actes, à l’exception des actes réflexes. Il n’y a pas non plus, comme Freud l’avait imaginé, deux types d’actes : les uns déterminés par la conscience et les autres par l’inconscient, il n’y a – du point de vue décisionnel – qu’un seul type d’actes, déterminés par l’inconscient, la seule différence étant que certains apparaissent dans le "regard" de la conscience (avec une demi-seconde de retard sur l’acte posé), et certains non.

Dans l’article où je proposais pour la première fois une théorie complète de la conscience tenant compte des découvertes de Libet, j’écrivais : "la conscience est un cul-de-sac auquel des informations parviennent sans doute, mais sans qu’il existe un effet en retour de type décisionnel. C’est au niveau de l’affect, et de lui seul, que l’information affichée dans le regard de la conscience produit une rétroaction mais de nature "involontaire", automatique" (Jorion 1999 : 179). Je suggérais alors de remplacer, pour souligner les implications de la nouvelle représentation, le mot "conscience" par "imagination", et le mot "inconscient", par "corps", pour conclure alors que toutes nos décisions sont en réalité prises par notre corps mais que certaines d’entre elles (celles que nous avions l’habitude d’attribuer à notre "volonté") apparaissent à notre imagination : "En réalité, la prise de décision, la volonté, a été confiée au corps et non à l’imagination" (ibid. 185).

Il restait à comprendre pourquoi le regard de la "conscience" est apparu dans l’évolution biologique. L’explication – en parfait accord avec les observations de Libet – est qu’il s’agit d’un mécanisme nécessaire pour que nous puissions nous constituer une mémoire (adaptative) en associant à nos percepts, les affects qu’ils provoquent en nous, et ceci en dépit du fait que les sensations en provenance de nos divers organes des sens (nos "capteurs"), parviennent au cerveau à des vitesses différentes (ibid. 183-185).

Les observations de Libet, et la nouvelle représentation de nos prises de décision qui en découle, ont d’importantes conséquences pour nous, et en particulier quand nous voulons reconstruire sur un nouveau mode la manière dont nous vivons. Il faut que nous tenions compte du fait que notre conscience arrive en réalité toujours quelque temps après la bataille.

Il y a des gens heureux : ceux dont la conscience constate avec délice les actes qui ont été posés par eux. Il n’y a pas chez eux de dissonance, il n’y a pas de contradiction : nous sommes satisfaits de constater notre comportement tel qu’il a eu lieu. Et c’est pour cela que l’affect n’est pas trop déçu de ce qu’il observe. L’affect réagit bien entendu : soit il cautionne ce qu’il peut observer comme étant à l’œuvre, soit il est déçu quand il constate le résultat. On peut être honteux de ce qu’on a fait. Nous pouvons nous retrouver parfaitement humiliés par les actes qui ont été posés par nous : par ce que la conscience constate après la bataille. En voici un exemple : je me trouve dans le studio de FR 3, pour l’émission "Ce soir (ou jamais !)", et la personne invitée pour la partie musicale en fin d’émission, c’est Dick Rivers, et je lui dis : "C’est formidable, cette époque où vous chantiez avec Les chaussettes noires !", et il me répond : "En réalité, le nom de mon groupe, c’était Les chats sauvages". J’étais tellement humilié d’avoir commis une pareille bévue ! Il s’agit là d’un exemple excellent de dissonance, et ma conscience qui intervenait avec une demi-seconde de retard était extrêmement gênée de devoir être confrontée au triste sire que j’étais.

Bien sûr, nous sommes devenus très forts dans notre manière de vivre avec une telle dissonance : nous réalisons des miracles en termes d’explications après-coup de notre propre comportement. J’écoute parfois, comme la plupart d’entre nous, des conversations dans le métro ou dans le bus où une dame explique à l’une de ses amies à quel point elle était maître des événements : "Elle m’a dit ceci, et tu me connais, je lui ai répondu du tac-au-tac cela, et tu aurais dû voir sa tête…". Nous sommes très forts à produire des récits autobiographiques où nous intégrons l’ensemble des éléments qui font sens dans une situation, après coup. Plusieurs concepts de la psychanalyse renvoient aux différentes modalités de nos "rattrapages après la bataille", quand la conscience constate les dégâts que nous avons occasionnés par nos actes et tente de "faire avec" : la psychanalyse parle alors d’élaboration secondaire, de rationalisation, de déni, de dénégation, etc.

Pourquoi est-ce important d’attirer l’attention sur ces choses ? Parce que nous contrôlons beaucoup moins de manière immédiate ce que nous faisons que nous ne le laissons supposer dans les représentations que nous en avons. Dans celles-ci, nos comportements sont fortement calqués sur ce qu’Aristote appelait la cause finale : les buts que nous nous assignons. Bien sûr, quand nous construisons une maison, nous définissons les différentes étapes qui devront être atteintes successivement et nous procédons de la manière qui a été établie. Nous avons la capacité de suivre un plan et un échéancier, de manière systématique, mais la raison n’est pas, comme nous le supposons, parce que nous procédons pas à pas, d’étape en étape, mais plutôt parce que nous avons posé la réalisation de la tâche comme un "souci" projeté dans l’avenir, souci dont l’élimination nous délivrera et nous permettra… de nous en assigner de nouveaux. Encore une fois, c’est l’inconscient ou, si l’on préfère, le corps, qui s’en charge. J’écrivais dans le même article : "Wittgenstein s’est souvent interrogé quant à la nature de l’intention. Il se demande par exemple, "‘J’ai l’intention de partir demain’ – Quand as-tu cette intention ? Tout le temps : ou de manière intermittente ?" (Wittgenstein 1967 : 10). La réponse à sa question est en réalité "tout le temps dans le corps et de manière intermittente dans l’imagination"" (ibid. 189).

Mais dans nos actes quotidiens, dans la façon dont nous réagissons aux autres autour de nous, parce que nous vivons dans un univers entièrement social, il faut que nous prenions conscience du fait que nous avons beaucoup moins de maîtrise immédiate sur ce que nous faisons que nous ne l’imaginons le plus souvent, une maîtrise beaucoup plus faible que ce que nous reconstruisons par la suite dans ces discours autobiographiques que nous tenons : dans ces discours de rationalisation, d’autojustification faudrait-il dire, que nous produisons à l’intention des autres. Il faut bien dire que, sachant comment eux-mêmes fonctionnent, ils n’y croient pas en général. Et nous en sommes les seules dupes.

Auteur: Jorion Paul

Info: 7 avril 2012, dans Notre cerveau : conscience et volonté, "Le secret de la chambre chinoise", L’Homme 150, avril-juin 1999 : 177-202, Wittgenstein, Ludwig, Zettel, Oxford, Basil Blackwell, 1967

[ illusion ]

 

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évolution technologique

Intelligence artificielle ou stupidité réelle ?

Bien que le battage médiatique augmente la sensibilisation à l'IA, il facilite également certaines activités assez stupides et peut distraire les gens de la plupart des progrès réels qui sont réalisés.
Distinguer la réalité des manchettes plus dramatiques promet d'offrir des avantages importants aux investisseurs, aux entrepreneurs et aux consommateurs.

L'intelligence artificielle a acquis sa notoriété récente en grande partie grâce à des succès très médiatisés tels que la victoire d'IBM Watson à Jeopardy et celle de Google AlphaGo qui a battu le champion du monde au jeu "Go". Waymo, Tesla et d'autres ont également fait de grands progrès avec les véhicules auto-propulsés. Richard Waters a rendu compte de l'étendue des applications de l'IA dans le Financial Times : "S'il y a un message unificateur qui sous-tend la technologie grand public exposée [au Consumer Electronics Show] .... c'est : "L'IA partout."

Les succès retentissants de l'IA ont également capturé l'imagination des gens à un tel point que cela a suscité d'autres efforts d'envergure. Un exemple instructif a été documenté par Thomas H. Davenport et Rajeev Ronanki dans le Harvard Business Review. Ils écrirent, "En 2013, le MD Anderson Cancer Center a lancé un projet ""Moon shot " : diagnostiquer et recommander des plans de traitement pour certaines formes de cancer en utilisant le système cognitif Watson d'IBM". Malheureusement, ce système n'a pas fonctionné et en 2017 le projet fut mis en veilleuse après avoir coûté plus de 62 millions de dollars sans avoir été utilisé pour les patients.

Waters a également abordé un autre message, celui des attentes modérées. En ce qui concerne les "assistants personnels à commande vocale", note-t-elle, "on ne sait pas encore si la technologie est capable de remplacer le smartphone pour naviguer dans le monde numérique autrement autrement que pour écouter de la musique ou vérifier les nouvelles et la météo".

D'autres exemples de prévisions modérées abondent. Generva Allen du Baylor College of Medicine et de l'Université Rice a avertit , "Je ne ferais pas confiance à une très grande partie des découvertes actuellement faites qui utilisent des techniques de machine learning appliquées à de grands ensembles de données". Le problème, c'est que bon nombre des techniques sont conçues pour fournir des réponses précises et que la recherche comporte des incertitudes. Elle a précisé : "Parfois, il serait beaucoup plus utile qu'ils reconnaissent que certains sont vraiment consolidés, mais qu'on est pas sûr pour beaucoup d'autres".

Pire encore, dans les cas extrêmes, l'IA n'est pas seulement sous-performante ; elle n'a même pas encore été mise en œuvre. Le FT rapporte, "Quatre jeunes entreprises européennes sur dix n'utilisent aucun programme d'intelligence artificielle dans leurs produits, selon un rapport qui souligne le battage publicitaire autour de cette technologie.

Les cycles d'attentes excessives suivies de vagues de déception ne sont pas surprenants pour ceux qui ont côtoyé l'intelligence artificielle pendant un certain temps. Ils savent que ce n'est pas le premier rodéo de l'IA. En effet, une grande partie du travail conceptuel date des années 1950. D'ailleurs, en passant en revue certaines de mes notes récentes je suis tombé sur une pièce qui explorait les réseaux neuronaux dans le but de choisir des actions - datant de 1993.

La meilleure façon d'avoir une perspective sur l'IA est d'aller directement à la source et Martin Ford nous en donne l'occasion dans son livre, Architects of Intelligence. Organisé sous la forme d'une succession d'entrevues avec des chercheurs, des universitaires et des entrepreneurs de premier plan de l'industrie, le livre présente un historique utile de l'IA et met en lumière les principaux courants de pensée.

Deux perspectives importantes se dégagent de ce livre.

La première est qu'en dépit des origines et des personnalités disparates des personnes interrogées, il existe un large consensus sur des sujets importants.

L'autre est qu'un grand nombre des priorités et des préoccupations des principales recherches sur l'IA sont bien différentes de celles exprimées dans les médias grand public.

Prenons par exemple le concept d'intelligence générale artificielle (AGI). Qui est étroitement lié à la notion de "singularité" ce point où l'IA rejoindra celle de l'homme - avant un dépassement massif de cette dernière. Cette idée et d'autres ont suscité des préoccupations au sujet de l'IA, tout comme les pertes massives d'emplois, les drones tueurs et une foule d'autres manifestations alarmantes.

Les principaux chercheurs en AI ont des points de vue très différents ; ils ne sont pas du tout perturbés par l'AGI et autres alarmismes.

Geoffrey Hinton, professeur d'informatique à l'Université de Toronto et vice-président et chercheur chez Google, dit : "Si votre question est : Quand allons-nous obtenir un commandant-docteur Data (comme dans Star Trek ) je ne crois pas que ce sera comme çà que ça va se faire. Je ne pense pas qu'on aura des programmes uniques et généralistes comme ça."

Yoshua Bengio, professeur d'informatique et de recherche opérationnelle à l'Université de Montréal, nous dit qu'il y a des problèmes très difficiles et que nous sommes très loin de l'IA au niveau humain. Il ajoute : "Nous sommes tous excités parce que nous avons fait beaucoup de progrès dans cette ascension, mais en nous approchant du sommet, nous apercevons d'autres collines qui s'élèvent devant nous au fur et à mesure".

Barbara Grosz, professeur de sciences naturelles à l'Université de Harvard : "Je ne pense pas que l'AGI soit la bonne direction à prendre". Elle soutient que la poursuite de l'AGI (et la gestion de ses conséquences) sont si loin dans l'avenir qu'elles ne sont que "distraction".

Un autre fil conducteur des recherches sur l'IA est la croyance que l'IA devrait être utilisée pour améliorer le travail humain plutôt que le remplacer.

Cynthia Breazeal, directrice du groupe de robots personnels du laboratoire de médias du MIT, aborde la question : "La question est de savoir quelle est la synergie, quelle est la complémentarité, quelle est l'amélioration qui permet d'étendre nos capacités humaines en termes d'objectifs, ce qui nous permet d'avoir vraiment un plus grand impact dans le monde, avec l'IA."

Fei-Fei Li, professeur d'informatique à Stanford et scientifique en chef pour Google Cloud dit lui : "L'IA en tant que technologie a énormément de potentiel pour valoriser et améliorer le travail, sans le remplacer".

James Manyika, président du conseil et directeur du McKinsey Global Institute, fait remarquer que puisque 60 % des professions ont environ un tiers de leurs activités qui sont automatisables et que seulement environ 10 % des professions ont plus de 90 % automatisables, "beaucoup plus de professions seront complétées ou augmentées par des technologies qu'elles ne seront remplacées".

De plus, l'IA ne peut améliorer le travail humain que si elle peut travailler efficacement de concert avec lui.

Barbara Grosz fait remarquer : "J'ai dit à un moment donné que 'les systèmes d'IA sont meilleurs s'ils sont conçus en pensant aux gens'". Je recommande que nous visions à construire un système qui soit un bon partenaire d'équipe et qui fonctionne si bien avec nous que nous ne nous rendions pas compte qu'il n'est pas humain".

David Ferrucci, fondateur d'Elemental Cognition et directeur d'IA appliquée chez Bridgewater Associates, déclare : " L'avenir que nous envisageons chez Elemental Cognition repose sur une collaboration étroite et fluide entre l'intelligence humaine et la machine. "Nous pensons que c'est un partenariat de pensée." Yoshua Bengio nous rappelle cependant les défis à relever pour former un tel partenariat : "Il ne s'agit pas seulement de la précision [avec l'IA], il s'agit de comprendre le contexte humain, et les ordinateurs n'ont absolument aucun indice à ce sujet."

Il est intéressant de constater qu'il y a beaucoup de consensus sur des idées clés telles que l'AGI n'est pas un objectif particulièrement utile en ce moment, l'IA devrait être utilisée pour améliorer et non remplacer le travail et l'IA devrait fonctionner en collaboration avec des personnes. Il est également intéressant de constater que ces mêmes leçons sont confirmées par l'expérience des entreprises.

Richard Waters décrit comment les implémentations de l'intelligence artificielle en sont encore à un stade assez rudimentaire.

Éliminez les recherches qui monopolisent les gros titres (un ordinateur qui peut battre les humains au Go !) et la technologie demeure à un stade très primaire .

Mais au-delà de cette "consumérisation" de l'IT, qui a mis davantage d'outils faciles à utiliser entre les mains, la refonte des systèmes et processus internes dans une entreprise demande beaucoup de travail.

Ce gros travail prend du temps et peu d'entreprises semblent présentes sur le terrain. Ginni Rometty, responsable d'IBM, qualifie les applications de ses clients d'"actes aléatoires du numérique" et qualifie nombre de projets de "hit and miss". (ratages). Andrew Moore, responsable de l'intelligence artificielle pour les activités de Google Cloud business, la décrit comme "intelligence artificielle artisanale". Rometty explique : "Ils ont tendance à partir d'un ensemble de données isolé ou d'un cas d'utilisation - comme la rationalisation des interactions avec un groupe particulier de clients. Tout ceci n'est pas lié aux systèmes, données ou flux de travail plus profonds d'une entreprise, ce qui limite leur impact."

Bien que le cas HBR du MD Anderson Cancer Center soit un bon exemple d'un projet d'IA "au clair de lune "qui a probablement dépassé les bornes, cela fournit également une excellente indication des types de travail que l'IA peut améliorer de façon significative. En même temps que le centre essayait d'appliquer l'IA au traitement du cancer, son "groupe informatique expérimentait l'utilisation des technologies cognitives pour des tâches beaucoup moins ambitieuses, telles que faire des recommandations d'hôtels et de restaurants pour les familles des patients, déterminer quels patients avaient besoin d'aide pour payer leurs factures, et résoudre les problèmes informatiques du personnel".

Dans cette entreprise, le centre a eu de bien meilleures expériences : "Les nouveaux systèmes ont contribué à accroître la satisfaction des patients, à améliorer le rendement financier et à réduire le temps consacré à la saisie fastidieuse des données par les gestionnaires de soins de l'hôpital. De telles fonctions banales ne sont peut-être pas exactement du ressort de Terminator, mais elles sont quand même importantes.

Optimiser l'IA dans le but d'augmenter le travail en collaborant avec les humains était également le point central d'une pièce de H. James Wilson et Paul R. Daugherty "HBRpiece". Ils soulignent : "Certes, de nombreuses entreprises ont utilisé l'intelligence artificielle pour automatiser leurs processus, mais celles qui l'utilisent principalement pour déplacer leurs employés ne verront que des gains de productivité à court terme. Grâce à cette intelligence collaborative, l'homme et l'IA renforcent activement les forces complémentaires de l'autre : le leadership, le travail d'équipe, la créativité et les compétences sociales de la première, la rapidité, l'évolutivité et les capacités quantitatives de la seconde".

Wilson et Daugherty précisent : "Pour tirer pleinement parti de cette collaboration, les entreprises doivent comprendre comment les humains peuvent le plus efficacement augmenter les machines, comment les machines peuvent améliorer ce que les humains font le mieux, et comment redéfinir les processus commerciaux pour soutenir le partenariat". Cela demande beaucoup de travail et cela va bien au-delà du simple fait de balancer un système d'IA dans un environnement de travail préexistant.

Les idées des principaux chercheurs en intelligence artificielle, combinées aux réalités des applications du monde réel, offrent des implications utiles. La première est que l'IA est une arme à double tranchant : le battage médiatique peut causer des distractions et une mauvaise attribution, mais les capacités sont trop importantes pour les ignorer.

Ben Hunt discute des rôles de la propriété intellectuelle (PI) et de l'intelligence artificielle dans le secteur des investissements, et ses commentaires sont largement pertinents pour d'autres secteurs. Il note : "L'utilité de la propriété intellectuelle pour préserver le pouvoir de fixation des prix est beaucoup moins fonction de la meilleure stratégie que la PI vous aide à établir, et beaucoup plus fonction de la façon dont la propriété intellectuelle s'intègre dans le l'esprit du temps (Zeitgeist) dominant dans votre secteur.

Il poursuit en expliquant que le "POURQUOI" de votre PI doit "répondre aux attentes de vos clients quant au fonctionnement de la PI" afin de protéger votre produit. Si vous ne correspondez pas à l'esprit du temps, personne ne croira que les murs de votre château existent, même si c'est le cas". Dans le domaine de l'investissement (et bien d'autres encore), "PERSONNE ne considère plus le cerveau humain comme une propriété intellectuelle défendable. Personne." En d'autres termes, si vous n'utilisez pas l'IA, vous n'obtiendrez pas de pouvoir de fixation des prix, quels que soient les résultats réels.

Cela fait allusion à un problème encore plus grave avec l'IA : trop de gens ne sont tout simplement pas prêts à y faire face.

Daniela Rus, directrice du laboratoire d'informatique et d'intelligence artificielle (CSAIL) du MIT déclare : "Je veux être une optimiste technologique. Je tiens à dire que je vois la technologie comme quelque chose qui a le potentiel énorme d'unir les gens plutôt que les diviser, et de les autonomiser plutôt que de les désolidariser. Mais pour y parvenir, nous devons faire progresser la science et l'ingénierie afin de rendre la technologie plus performante et plus utilisable." Nous devons revoir notre façon d'éduquer les gens afin de nous assurer que tous ont les outils et les compétences nécessaires pour tirer parti de la technologie.

Yann Lecun ajoute : "Nous n'aurons pas de large diffusion de la technologie de l'IA à moins qu'une proportion importante de la population ne soit formée pour en tirer parti ".

Cynthia Breazeal répéte : "Dans une société de plus en plus alimentée par l'IA, nous avons besoin d'une société alphabétisée à l'IA."

Ce ne sont pas non plus des déclarations creuses ; il existe une vaste gamme de matériel d'apprentissage gratuit pour l'IA disponible en ligne pour encourager la participation sur le terrain.

Si la société ne rattrape pas la réalité de l'IA, il y aura des conséquences.

Brezeal note : "Les craintes des gens à propos de l'IA peuvent être manipulées parce qu'ils ne la comprennent pas."

Lecun souligne : " Il y a une concentration du pouvoir. À l'heure actuelle, la recherche sur l'IA est très publique et ouverte, mais à l'heure actuelle, elle est largement déployée par un nombre relativement restreint d'entreprises. Il faudra un certain temps avant que ce ne soit utilisé par une plus grande partie de l'économie et c'est une redistribution des cartes du pouvoir."

Hinton souligne une autre conséquence : "Le problème se situe au niveau des systèmes sociaux et la question de savoir si nous allons avoir un système social qui partage équitablement... Tout cela n'a rien à voir avec la technologie".

À bien des égards, l'IA est donc un signal d'alarme. En raison de l'interrelation unique de l'IA avec l'humanité, l'IA a tendance à faire ressortir ses meilleurs et ses pires éléments. Certes, des progrès considérables sont réalisés sur le plan technologique, ce qui promet de fournir des outils toujours plus puissants pour résoudre des problèmes difficiles. Cependant, ces promesses sont également limitées par la capacité des gens, et de la société dans son ensemble, d'adopter les outils d'IA et de les déployer de manière efficace.

Des preuves récentes suggèrent que nous avons du pain sur la planche pour nous préparer à une société améliorée par l'IA. Dans un cas rapporté par le FT, UBS a créé des "algorithmes de recommandation" (tels que ceux utilisés par Netflix pour les films) afin de proposer des transactions pour ses clients. Bien que la technologie existe, il est difficile de comprendre en quoi cette application est utile à la société, même de loin.

Dans un autre cas, Richard Waters nous rappelle : "Cela fait presque dix ans, par exemple, que Google a fait trembler le monde de l'automobile avec son premier prototype de voiture autopropulsée". Il continue : "La première vague de la technologie des voitures sans conducteur est presque prête à faire son entrée sur le marché, mais certains constructeurs automobiles et sociétés de technologie ne semblent plus aussi désireux de faire le grand saut. Bref, ils sont menacés parce que la technologie actuelle est à "un niveau d'autonomie qui fait peur aux constructeurs automobiles, mais qui fait aussi peur aux législateurs et aux régulateurs".

En résumé, que vous soyez investisseur, homme d'affaires, employé ou consommateur, l'IA a le potentiel de rendre les choses bien meilleures - et bien pires. Afin de tirer le meilleur parti de cette opportunité, un effort actif axé sur l'éducation est un excellent point de départ. Pour que les promesses d'AI se concrétisent, il faudra aussi déployer beaucoup d'efforts pour mettre en place des infrastructures de systèmes et cartographier les forces complémentaires. En d'autres termes, il est préférable de considérer l'IA comme un long voyage plutôt que comme une destination à court terme.

Auteur: Internet

Info: Zero Hedge, Ven, 03/15/2019 - 21:10

[ prospective ]

 
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