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concernement

On frappe dans les rues, on frappe sur les toits, on frappe dans les caves. Par ce moyen, on s’envoie des messages. Est-il donc défendu de se parler aujourd’hui ? ça en a l’air. Quelle belle idée ! On frappe avec un marteau sur du bois, avec un marteau sur de fer, sur de la pierre. On frappe dans toutes les maisons, dans toutes les rues les magnifiques chiffres de 1 à 9 et chacun connaît leur signification. […]
Un avion décrit des courbes dans le ciel d’été bleu et rayonnant et laisse derrière lui un gigantesque cercle blanc et lumineux : un signe pour elle ! Et elle pense : "Quelle nuit ! Quelle journée !"
Loin, en bas, dans la rue, un petit chien lui répond : Oui, quelle journée jappe le petit chien, et elle court à la fenêtre et est saluée par des cris d’allégresse, un joyeux concert de klaxons : elle qui représente le tigre à la poursuite du gibier, le fauve terrifiant !

Auteur: Unica Zürn Nora Berta Ruth

Info: Dans "L'homme-jasmin", pages 128-129

[ psychose ] [ communion ] [ mystère ]

 

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poème

Jamais ne se puisse lasser
Ma muse de chanter la gloire
D'un ver petit, dont la mémoire
Jamais ne se puisse effacer :
D'un ver petit, d'un ver luisant,
D'un ver sous la noire carrière
Du ciel, qui rend une lumière
De son feu le ciel méprisant.
Une lumière qui reluit
Au soir, sur l'herbe roussoyante,
Comme la tresse rayonnante
De la courrière de la nuit.
D'un ver tapi sous les buissons,
Qui au laboureur prophétise
Qu'il faut que pour faucher aiguise
Sa faux, et fasse les moissons.
Gentil prophète et bien appris,
Appris de Dieu qui te fait naître
Non pour néant, mais pour accroître
Sa grandeur dedans nos esprits !
Et pour montrer au laboureur
Qu'il a son ciel dessus la terre,
Sans que son œil vaguement erre
En haut pour apprendre le heur
Ou de la teste du Taureau,
Ou du Cancre, ou du Capricorne,
Ou du Bélier qui de sa corne
Donne ouverture au temps nouveau.
Vraiment tu te dois bien vanter
Etre seul ayant la poitrine
Pleine d'une humeur cristalline
Qui te fait voir, et souhaiter
Des petits enfants seulement,
Ou pour te montrer à leur père,
Ou te pendre au sein de leur mère
Pour lustre, comme un diamant.
Vis donc, et que le pas divers
Du pied passager ne t'offense,
Et pour ta plus sûre défense
Choisis le fort des buissons verts.

Auteur: Belleau Rémi

Info:

[ insecte ]

 

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humanisme

Car l’ "Humain" est d’emblée l’institution de son double structural : l’Inhumain. Il n’est même que cela, et les progrès de l’Humanité, de la Culture, ne sont que la chaîne des discriminations successives qui frappent les "Autres" d’inhumanité, donc de nullité. [...]

[...] la définition de l’humain s’est, au fil de la culture, inexorablement rétrécie : chaque progrès "objectif" de la civilisation vers l’universel a correspondu à une discrimination plus stricte, au point qu’on peut entrevoir le temps de l’universalité définitive de l’Homme qui coïncidera avec l’excommunication de tous les hommes – seule rayonnant dans le vide la pureté du concept. 

[...]

Michel Foucault a analysé l’extradition des fous à l’aube de la modernité occidentale, mais nous savons aussi ce qu’il en est de l’extradition des enfants, de leur renfermement progressif, au fil même de la Raison, dans leur statut idéalisé d’enfance, dans le ghetto de l’univers infantile, dans l’abjection de l’innocence. Mais aussi les vieillards sont devenus inhumains, rejetés à la périphérie de la normalité. Et tant d’autres "catégories", qui ne sont justement devenues des "catégories" que sous le signe des ségrégations successives qui marquent le développement de la culture. Les pauvres, les sous-développés, les Q.I. inférieurs, les pervers, les transsexuels, les intellectuels, les femmes – folklore de la terreur, folklore de l’excommunication sur la base d’une définition de plus en plus raciste de l’ "humain normal". Quintessence de la normalité : à la limite, toutes les "catégories" seront exclues, ségrégées, proscrites, dans une société enfin universelle, où le normal et l’universel seront enfin confondus sous le signe de l’humain.

Auteur: Baudrillard Jean

Info: Dans "L'échange symbolique et la mort", éditions Gallimard, 1976, pages 205 à 207

[ cruauté ] [ réification ] [ objectivation ] [ annihilation ]

 
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théorie du genre

Ce livre [La Domination masculine de Pierre Bourdieu], où la différence des sexes est dénoncée comme une fiction, fruit d’une "violence symbolique" destinée à assurer la domination éternelle des hommes sur les femmes, débouche sur une obscure aspiration à en finir avec tous les processus différenciateurs qui ne peut que s’accompagner (mais ce n’est jamais dit) de la levée de l’inceste. Dans cette longue subversion de la norme hétérosexuelle, Bourdieu assigne aux homosexuels un rôle d’éclaireurs. Cependant, plus royaliste que la plupart d’entre eux, il demeure réservé concernant le Pacs, où il voit une soumission des intéressés à la "norme dominante", et même un coup d’arrêt au mouvement homosexuel de subversion symbolique permanente de la domination hétérosexuelle. Au bout du compte, ce n’est même pas l’hétérosexualité, ni la "violence masculine", qui sont visées, mais bien la simple division des sexes qui, assimilée à la division du travail, est regardée comme la source même de toute violence et, comme la division du travail, doit être abolie. Après seulement commencera le paradis de l’indifférenciation omnilatérale, où n’importe qui pourra être n’importe quoi, un rossignol, une pomme de douche, un boulon, une rose jaune faisant l’amour avec une feuille morte, etc. Et, bien sûr, chacun aussi s’exprimera dans une langue de feuille morte, de boulon, de rose jaune ou de pomme de douche. Car le rêve d’abolition de la "violence symbolique" débouche sur le meurtre de la parole, c’est-à-dire de ce qu’il y a de plus humain. C’est là ce que tous les Bourdieu présents et à venir ne disent jamais qu’ils veulent ; et pourtant, du fond de leur nihilisme rayonnant, ils ne veulent que ça.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 3", Les Belles Lettres, Paris, 2002, pages 149-150

[ critique ] [ imaginaire-symbolique ] [ régression ] [ stérile égalitarisme ]

 

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sécurité

Venue d’Allemagne, où elle s’est fait connaître vers la fin des années soixante-dix sous le nom de vorsorgeprinzip, cette "exigence de prudence préventive" comporte l’inestimable avantage, en ces temps d’effondrement de la raison discriminante, de procéder d’un si rayonnant irrationalisme que celui-ci se trouve aussitôt au diapason de la folie qui l’environne. Considéré au pied de la lettre, le principe de précaution n’implique pas seulement que l’on écarte de quelconques risques jugés possibles ou que l’on répare les dommages lorsqu’une catastrophe est arrivée, mais d’abord que l’on travaille à empêcher toute possibilité de risque, même lorsqu’il n’existe aucune preuve "scientifique" de lien causal entre telle source supposée de risque et tel dommage éventuel. [...]

De ce point de vue, le principe de précaution ne relève même plus de cette ère du soupçon qui aura défini la dernière période historique. Il serait plutôt l’indice d’un nouvel âge de la foi. Mais il s’agit d’une foi dans des dieux que personne encore n’avait réellement priés, en tout cas sous de tels noms : Prudence, Prévoyance ou Circonspection.

[...] Les masses du néo-monde, qui disent tout aimer de ce monde, sont également polyphobes de ce même monde dont elles désapprouvent tout sans clairement le savoir. De sorte qu’au moment même où de nouvelles phobies particulières sont inventées quotidiennement par les petits flics de la vie moderne, et que l’on se donne les moyens de les traquer, de les pénaliser, de les piloriser, c’est une phobie totale qui se développe, et aucune des phobies partielles récemment inventées ne fait le poids devant elle. Mais cette polyphobie ne se montre jamais que sous les apparences de l’ "irrationnel" ou de "paniques" disproportionnées, et ainsi n’est-elle pas encore vue comme phobie furieuse.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 4", Les Belles Lettres, Paris, 2010, pages 1617-1618

[ historique ] [ définie ] [ contradiction ] [ rejet de greffe ] [ désamour ]

 

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symbole

De même que la lumière et la chaleur, dans la manifestation physique du feu, se séparent l’une de l’autre, le sentiment n’est véritablement qu’une chaleur sans lumière (et c’est pourquoi les anciens représentaient l’amour comme aveugle) ; on peut aussi trouver dans l’homme une lumière sans chaleur, celle de la raison, qui n’est qu’une lumière réfléchie, froide comme la lumière lunaire qui la symbolise. Dans l’ordre des principes, au contraire, les deux aspects se rejoignent et s’unissent indissolublement, puisqu’ils sont constitutifs d’une même nature essentielle ; le feu qui est au centre de l’être est donc bien à la fois lumière et chaleur, c’est-à-dire intelligence et amour ; mais l’amour dont il s’agit alors diffère tout autant du sentiment auquel on donne le même nom que l’intelligence pure diffère de la raison.



On peut comprendre maintenant que le Verbe divin, qui est le "Cœur du Monde", soit à la fois Intelligence et Amour ; mais, si le Sacré-Cœur n’était pas Intelligence aussi bien qu’Amour, si même il n’était pas Intelligence avant tout, il ne serait pas vraiment le Verbe. D’ailleurs, si l’Intelligence n’était attribuée réellement au Cœur du Christ, nous ne voyons pas en quel sens il serait possible d’interpréter cette invocation des litanies : "Cor Jesu, in quo sunt omnes thesauri sapientiæ et scientiæ absconditi", sur laquelle nous nous permettons d’attirer spécialement l’attention de tous ceux qui ne veulent voir dans le Sacré-Cœur que l’objet d’une simple dévotion sentimentale.



Ce qui est fort remarquable, c’est que les deux aspects dont nous venons de parler ont l’un et l’autre leur représentation très nette dans l’iconographie du Sacré Cœur, sous les formes respectives du Cœur rayonnant et du Cœur enflammé. Le rayonnement figure la lumière, c’est-à-dire l’Intelligence (et c’est là, disons-le en passant, ce qui, pour nous, donne au titre de la Société du Rayonnement intellectuel du Sacré-Cœur toute sa signification). De même, les flammes figurent la chaleur, c’est-à-dire l’Amour ; on sait d’ailleurs que l’amour, même au sens ordinaire et humain, a été fréquemment représenté par l’emblème d’un cœur enflammé. L’existence de ces deux genres de représentations, pour le Sacré-Cœur, est donc parfaitement justifié : on se servira de l’un ou de l’autre, non pas indifféremment, mais selon qu’on voudra mettre spécialement en relief l’aspect de l’Intelligence ou celui de l’Amour. 

Auteur: Guénon René

Info: "Le coeur rayonnant et le coeur enflammé". Ecrits pour Regnabit, éd. Archè, Nino Aragno Editore, 1999, pp. 66-67

[ christianisme ] [ dévotion ]

 

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désir

En se souriant, ils se réjouissaient mutuellement de leur présence, une pure présence, à laquelle on ne pouvait réfléchir, qu’on ne pouvait même connaître. Mais les yeux de Birkin avaient une grimace légèrement ironique.

Elle était étrangement attirée vers lui, comme par un charme. S’agenouillant sur le tapis devant lui, elle noua ses mains derrière ses reins et appuya la tête contre ses cuisses. Richesse ! Richesse ! Elle se sentait submergée par tout un ciel plein de richesses.

- Nous nous aimons, dit-elle, ravie.

- Mieux que cela, répondit-il, en la regardant, le visage rayonnant de plaisir.

Inconsciemment, du bout de ses doigts sensibles, elle suivait la ligne de ses cuisses, y poursuivant un mystérieux courant de vie. Elle avait découvert quelque chose de plus merveilleux que la vie elle-même. C’était l’étrange mystère du mouvement vital, là, sur le derrière de ses cuisses, le long de ses flancs. C’était une étrange réalité de Birkin, l’étoffe même de son être, là sur la chute bien droite de ses cuisses. C’est là qu’elle découvrit qu’il était l’un des fils de Dieu tels qu’ils vivaient au commencement du monde, pas un homme, mais quelque chose d’autre, quelque chose de plus.

C’était un soulagement, enfin. Elle avait eu des amoureux. Elle avait connu la passion ; mais ceci n’était ni l’amour ni la passion. C’était le retour des filles des hommes vers les fils de Dieu, les fils de Dieu étranges et inhumains qui furent au commencement du monde.

Maintenant, son visage était un éblouissement de libre lumière dorée, tandis qu’elle levait les yeux vers lui, et appuyait ses mains en plein sur ses cuisses, par-derrière, comme il se tenait debout devant elle. Il la regardait et ses sourcils épais brillaient comme un diadème au-dessus de ses yeux. Elle était belle comme une fleur merveilleuse nouvellement ouverte à ses genoux, fleur paradisiaque, et non plus une femme, mais une fleur de clarté. Pourtant, il y avait encore en lui un certain embarras. Il n’aimait pas ce rayonnement, cet agenouillement, du moins pas entièrement.

Pour elle, tout était terminé. Elle avait trouvé un fils de Dieu du Commencement du Monde, et lui, il avait trouvé une des plus lumineuses filles des hommes.

Elle suivait avec les mains la ligne de ses reins et de ses cuisses et un feu vivant se transmettait ténébreusement de lui à elle. C’était un flux obscur de passion électrique que, mis en liberté en lui, elle attirait en elle. Elle avait créé un circuit riche et nouveau, un nouveau courant d’énergie passionnelle qui allait de l’un à l’autre depuis les pôles les plus obscurs du corps, en formant un circuit parfait. C’était un sombre feu d’électricité qui jaillissait de lui à elle et les inondait tous deux de satisfaction et de paix somptueuse.

Auteur: Lawrence David Herbert

Info: Femmes amoureuses, traduit de l’anglais par Maurice Rancès et Georges Limbour, éditions Gallimard, 1949, pages 451 à 453

[ homme-femme ] [ imaginaire ] [ sensations ] [ volupté ]

 

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pensée-de-femme

J'écris de chez les moches, pour les moches, les vieilles, les camionneuses, les frigides, les mal baisées, les imbaisables, les hystériques, les tarées, toutes les exclues du grand marché à la bonne meuf. Et je commence par là pour que les choses soient claires : je ne m'excuse de rien, je ne viens pas me plaindre. Je n'échangerais ma place contre aucune autre parce qu'être Virginie Despentes me semble être une affaire plus intéressante à mener que n'importe quelle autre affaire.

Je trouve ça formidable qu'il y ait aussi des femmes qui aiment séduire, qui sachent séduire, d'autres se faire épouser, des qui sentent le sexe et d'autres le gâteau du goûter des enfants qui sortent de l'école. Formidable qu'il y en ait de très douces, d'autres épanouies dans leur féminité, qu'il y en ait de jeunes, très belles, d'autres coquettes et rayonnantes. Franchement, je suis bien contente pour toutes celles à qui les choses telles qu'elles sont conviennent. C'est dit sans la moindre ironie. Il se trouve simplement que je ne fais pas partie de celles-là. Bien sûr que je n'écrirais pas ce que j'écris si j'étais belle, belle à changer l'attitude de tous les hommes que je croise.

C'est en tant que prolotte de la féminité que je parle, que j'ai parlé hier et que je recommence aujourd'hui. Quand j'étais au RMI, je ne ressentais aucune honte d'être exclue, juste de la colère. C'est la même en tant que femme : je ne ressens pas la moindre honte de ne pas être une super bonne meuf. En revanche, je suis verte de rage qu'en tant que fille qui intéresse peu les hommes, on cherche sans cesse à me faire savoir que je ne devrais même pas être là. On a toujours existé. Même s'il n'était pas question de nous dans les romans d'hommes, qui n'imaginent que des femmes avec qui ils voudraient coucher. On a toujours existé, on n'a jamais parlé. Même aujourd'hui que les femmes publient beaucoup de romans, on rencontre rarement de personnages féminins aux physiques ingrats ou médiocres, inaptes à aimer les hommes ou à s'en faire aimer.

Au contraire, les héroïnes contemporaines aiment les hommes, les rencontrent facilement, couchent avec eux en deux chapitres, elles jouissent en quatre lignes et elle aiment toutes le sexe. La figure de la looseuse de la féminité m'est plus que sympathique, elle m'est essentielle. Exactement comme la figure du looser social, économique ou politique. Je préfère ceux qui n'y arrivent pas pour la bonne et simple raison que je n'y arrive pas très bien, moi-même. Et que dans l'ensemble, l'humour et l'inventivité se situent plutôt de notre côté. Quand on n'a pas ce qu'il faut pour se la péter, on est souvent plus créatifs. Je suis plutôt King Kong que Kate Moss, comme fille. Je suis ce genre de femme qu'on n'épouse pas, avec qui on ne fait pas d'enfant, je parle de ma place de femme toujours trop tout ce qu'elle est, trop agressive, trop bruyante, trop grosse, trop brutale, trop hirsute, trop virile, me dit-on.

Ce sont pourtant mes qualités viriles qui font de moi autre chose qu'un cas social parmi les autres. Tout ce que j'aime de ma vie, tout ce qui m'a sauvée, je le dois à ma virilité. C'est donc ici en tant que femme inapte à attirer l'attention masculine, à satisfaire le désir masculin, et à me satisfaire d'une place à l'ombre que j'écris. C'est ici que j'écris, en tant que femme non séduisante, mais ambitieuse, attirée par l'argent que je gagne moi-même, attirée par le pouvoir, de faire et de refuser, attirée par la ville plutôt que par l'intérieur, toujours excitée par les expériences et incapable de me satisfaire du récit qu'on m'en fera. Je m'en tape de mettre la gaule à des hommes qui ne me font pas rêver. Il ne m'est jamais paru flagrant que les filles séduisantes s'éclataient tant que ça. Je me suis toujours sentie moche, je m'en accommode d'autant mieux que ça m'a sauvée d'une vie de merde à me coltiner des mecs gentils qui ne m'auraient jamais emmenée plus loin que la ligne bleue des Vosges. Je suis contente de moi, comme ça, plus désirante que désirable.

Auteur: Despentes Virginie

Info: King Kong Théorie

[ indépendante ] [ patronne ]

 

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description psychologique

Il est presque impossible de juger de l’extérieur les deux types que nous venons de décrire (types sensation et intuition introverties). L’aptitude ou l’empressement des introvertis à s’exprimer est moindre : aussi n’offrent-ils que peu de prise au jugement exact. Leur activité principale étant tournée vers le dedans, on ne voit de l’extérieur que réticence, secrétivité, indifférence ou incertitude et embarras en apparence non fondé. Si quelque chose se traduit à l’extérieur, ce sont le plus souvent des manifestations indirectes de fonctions intérieures et relativement inconscientes. Et des manifestations de ce genre provoquent contre eux naturellement les préventions de l’entourage. Aussi les sous-estime-t-on la plupart du temps, ou du moins ne les comprend-t-on pas. Comme ils ne se comprennent pas eux-mêmes, puisque le jugement leur manque dans une large mesure, ils ne peuvent non plus comprendre pourquoi l’opinion publique les sous-estime continuellement. Ils ne voient point que ce qui, de leur activité, va vers l’extérieur est réellement de moindre valeur. Leur regard est tout absorbé par la richesse des événements subjectifs. Tout ce qui arrive est si captivant et d’un charme si inépuisable, qu’ils ne remarquent pas du tout que ce qu’ils en communiquent à l’entourage ne contient en somme que très peu de ce qu’eux-mêmes sentent y être contenu. Le caractère fragmentaire et, le plus souvent, épisodique de leur communication exige trop de la compréhension et du bon vouloir de l’entourage ; de plus leur manque, pour se communiquer, cette chaleur qui enveloppe l’objet, qui seule pourrait entraîner la conviction. Au contraire ces gens montrent d’ordinaire vers l’extérieur une attitude de refus brutal, bien qu’ils ne s’en rendent pas compte et qu’ils n’aient pas l’intention de se montrer tels. On jugera plus équitablement de tels hommes et on les traitera avec plus d’indulgence, si l’on se rend compte combien il est difficile de traduire dans une langue accessible les visions intérieures. Quoi qu’il en soit, cette indulgence ne doit pas aller jusqu’à leur faire complètement grâce de l’obligation de se communiquer. Il ne pourrait en résulter que du dommage pour eux. Le destin lui-même leur réserve, peut-être plus encore qu’aux autres hommes, d’énormes difficultés extérieures susceptibles de calmer l’ivresse de leur vision intérieure. Une grande douleur est souvent nécessaire pour les amener à se confier à autrui.

D’un point de vue rationaliste extraverti, ces types sont sans doute les plus inutiles parmi les humains. Vus de plus haut, de tels hommes sont la preuve vivante que le monde agité et la vie riche et débordante se rencontrent non seulement à l’extérieur, mais aussi à l’intérieur de l’être. Certes ils représentent d’unilatérales démonstrations de la nature, mais ils sont riches d’enseignements pour qui ne se laisse pas aveugler par la mode intellectuelle du moment. A leur façon, les hommes de cette sorte font progresser la civilisation et sont des éducateurs. Leur vie instruit plus que leurs paroles. Par elle, et surtout par la grosse erreur qu’ils commettent de ne pas pouvoir se confier, nous saisissons un des plus graves défauts de notre civilisation, la superstition de la parole et de l’expression, la surestimation démesurée de l’enseignement par le verbe et la méthode. Un enfant s’en laisse certainement imposer par les grands mots de ses parents et on semble aller jusqu’à croire que c’est ainsi que se pratique l’éducation. En réalité, ce qui éduque l’enfant, c’est la vie des parents, et ce qu’ils y adjoignent de mots et de gestes ne fait guère que le troubler. Il en est de même du maître. Mais on a une telle confiance en les méthodes que la bonne méthode semble sanctifier le maître qui l’applique. Un homme de valeur inférieure n’est jamais un bon maître ; il dissimule sa dangereuse infériorité, empoisonneuse secrète des élèves, derrière d’excellents procédés et une brillante aptitude intellectuelle à l’élocution. Evidemment l’élève d’âge mûr ne demande rien de mieux que de connaitre des méthodes utiles parce qu’il a déjà succombé à l’attitude commune qui croit à la victorieuse méthode. Il a déjà appris que le cerveau le plus vide, pourvu qu’il se fasse l’écho d’une méthode, est aussi le meilleur élève. Tout son entourage dit, et vit de l’idée, que tout succès et tout bonheur est au-dehors et qu’il suffit de méthodes convenables pour atteindre ce que l’on désire. Or la vie de son maître d’instruction religieuse lui montre-t-elle ce bonheur qui doit sortir rayonnant de la richesse de l’intuition intime ? Certes, les types introvertis irrationnels n’enseignent pas la parfaite humanité. Il leur manque la raison et l’éthique de la raison ; mais leur vie enseigne l’autre possibilité, dont le manque se fait cruellement sentir dans notre civilisation.

Auteur: Jung Carl Gustav

Info: Dans les "Types psychologiques"

[ inadaptation moderne ] [ intériorité ] [ changement de focale ]

 

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père-fille

Notre pauvre enfant, Annie, née à Gower St le 2 mars 1841 est décédée à Malvern le 23 avril 1851 à midi. J'écris ces quelques pages, car je pense que dans les années à venir, si nous vivons, les impressions que je viens d'écrire me rappelleront plus vivement ses principales caractéristiques. De quelque point de vue que je la regarde, le trait principal de son caractère qui s'impose immédiatement à moi est sa joie de vivre tempérée par deux autres caractéristiques, à savoir sa sensibilité, qui aurait pu facilement passer inaperçue aux yeux d'un étranger, et sa grande affection. Sa joie et son esprit animal rayonnaient sur tout son visage et rendaient chacun de ses mouvements élastiques, pleins de vie et de vigueur. C'était un plaisir et une joie de la voir. Son cher visage se dresse maintenant devant moi, comme elle avait l'habitude de descendre les escaliers en courant avec une pincée de tabac à priser volée pour moi, son attitude entière rayonnant du plaisir de donner du plaisir. Même lorsqu'elle jouait avec ses cousins et que sa joie se transformait presque en turbulence, un seul regard de ma part, non pas de mécontentement (car je remercie Dieu de n'en avoir presque jamais jeté sur elle), mais de manque de sympathie, modifiait pendant quelques minutes toute sa physionomie. Cette sensibilité au moindre reproche la rendait très facile à gérer et très bonne : elle n'avait presque jamais besoin d'être prise en défaut et n'était jamais punie de quelque manière que ce soit. Sa sensibilité e manifesta très tôt dans la vie, en pleurant amèrement sur toute histoire un tant soit peu mélancolique, ou en se séparant d'Emma, même pour un court laps de temps. Une fois, alors qu'elle était très jeune, elle s'est exclamée "Oh Mamma, que ferions-nous si tu venais à mourir".

L'autre point de son caractère, qui rendait sa joie de vivre et son esprit si délicieux, était sa forte affection, qui était d'une nature très attachante et caressante. Lorsqu'elle était encore un bébé, cela se manifestait par le fait qu'elle ne pouvait jamais se passer de toucher Emma lorsqu'elle était au lit avec elle, et dernièrement, lorsqu'elle était mal en point, elle caressait pendant un certain temps l'un des bras d'Emma. Lorsqu'elle était très malade, le fait qu'Emma s'allonge à côté d'elle semblait l'apaiser d'une manière tout à fait différente de ce qu'elle aurait fait pour n'importe lequel de nos autres enfants. De même, elle passait presque toujours une demi-heure à arranger mes cheveux, à les "rendre", comme elle disait, "beaux", ou à lisser, le pauvre chéri, mon col ou mes manchettes, bref à me caresser. Elle aimait être embrassée ; en fait, chaque expression de son visage rayonnait d'affection et de bonté, et toutes ses habitudes étaient influencées par sa disposition affectueuse.

Outre sa gaieté ainsi tempérée, elle était dans ses manières remarquablement cordiale, franche, ouverte, d'un naturel direct et sans aucune nuance de réserve. Tout son esprit était pur et transparent. On avait l'impression de la connaître parfaitement et de pouvoir lui faire confiance : J'ai toujours pensé que, quoi qu'il arrive, nous aurions eu dans notre vieillesse au moins une âme aimante, que rien n'aurait pu changer. Elle était généreuse, belle et sans méfiance dans toute sa conduite ; elle était exempte d'envie et de jalousie ; elle avait bon caractère et n'était jamais passionnée. Elle était donc très populaire dans toute la maison, les étrangers l'aimaient et l'appréciaient rapidement. La manière même dont elle serrait la main de ses connaissances témoignait de sa cordialité.

Sa silhouette et son apparence étaient clairement influencées par son caractère : ses yeux brillaient, elle souriait souvent, son pas était élastique et ferme, elle se tenait droite et rejetait souvent la tête un peu en arrière, comme si elle défiait le monde dans sa joie de vivre. Pour son âge, elle était très grande, pas mince et forte. Ses cheveux étaient d'un beau brun et longs ; son teint légèrement brun ; ses yeux, gris foncé ; ses dents grandes et blanches. Le Daguerrotype lui ressemble beaucoup, mais l'expression lui fait entièrement défaut : ayant été fait deux ans plus tard, son visage s'était allongé et était devenu plus beau. Tous ses mouvements étaient vigoureux, actifs et généralement gracieux : llorsque nous faisions le tour du chemin de sable ensemble, bien que je marche vite, elle avait souvent l'habitude de me précéder en pirouettant de la manière la plus élégante, son cher visage brillant tout le temps, avec les sourires les plus doux.

De temps en temps, elle avait une attitude coquette envers moi, dont le souvenir est charmant : elle utilisait souvent un langage exagéré, et lorsque je la questionnais en exagérant ce qu'elle avait dit, je revois clairement le petit mouvement de tête et l'exclamation "Oh Papa, quelle honte". - Elle avait un intérêt vraiment féminin pour l'habillement et était toujours soignée : une satisfaction non dissimulée, échappant en quelque sorte à toute teinte de vanité, rayonnait sur son visage lorsqu'elle avait mis la main sur un ruban ou un mouchoir gai de sa mère. Un jour, elle s'est habillée d'une robe de soie, d'un bonnet, d'un châle et de gants d'Emma, ressemblant à une petite vieille femme, mais avec sa couleur exacerbée, ses yeux pétillants et ses sourires bridés, elle était, je m'en rappelle, tout à fait charmante.

Elle admirait cordialement les plus jeunes enfants ; combien de fois l'ai-je entendue déclarer avec emphase. "Quel petit canard cette Betty, n'est-ce pas ?

Elle était très adroite, faisant tout proprement avec ses mains : elle apprenait facilement la musique, et j'en suis sûr, en observant son visage quand elle écoutait les autres jouer, qu'elle avait un goût prononcé pour la musique. Elle avait un certain goût pour le dessin, et pouvait copier les visages très joliment. Elle dansait bien et aimait beaucoup cela. Elle aimait la lecture, mais ne manifestait aucun goût particulier. Elle avait une habitude singulière qui, je présume, aurait fini par se transformer en une activité quelconque, à savoir un grand plaisir à chercher des mots ou des noms dans les dictionnaires, les annuaires, les gazetiers et, dans ce dernier cas, à trouver les lieux sur la carte : de même, elle prenait un intérêt étrange à comparer mot à mot deux éditions du même livre ; et encore, elle passait des heures à comparer les couleurs de n'importe quel objet avec un de mes livres, dans lequel toutes les couleurs sont classées et nommées.

Sa santé s'est légèrement détériorée pendant environ neuf mois avant sa dernière maladie ; mais elle ne lui a donné qu'occasionnellement un de l'inconfort : dans ces moments-là, elle n'a jamais été le moins du monde fâchée, irritable ou impatiente ; c'était merveilleux de voir, à mesure que l'inconfort passait, avec quelle rapidité ses esprits élastiques lui rendaient sa gaieté et son bonheur. Pendant la dernière courte maladie, sa conduite fut tout simplement angélique ; elle ne s'est jamais plainte, ne s'est jamais énervée, a toujours eu de la considération pour les autres et a été reconnaissante de la manière la plus douce et la plus pathétique pour tout ce qui a été fait pour elle. Lorsqu'elle était si épuisée qu'elle pouvait à peine parler, elle louait tout ce qu'on lui donnait, et disait qu'un thé "était merveilleusement bon". Lorsque je lui ai donné de l'eau, elle m'a dit : "Je vous remercie beaucoup" ; et je crois que ce sont là les derniers mots précieux que ses chères lèvres m'ont jamais adressés.

Mais en regardant en arrière, c'est toujours l'esprit de joie qui se dresse devant moi comme son emblème et sa caractéristique : elle semblait formée pour vivre une vie de bonheur : ses esprits étaient toujours retenus par une sensibilité, une peur de déplaire à ceux qu'elle aimait, et son tendre amour ne cessait jamais de se manifester par des caresses et tous les autres petits actes d'affection.

Nous avons perdu la joie du ménage et le réconfort de notre vieillesse : elle devait savoir à quel point nous l'aimions ; oh, si elle pouvait maintenant savoir à quel point nous aimons encore et aimerons toujours son cher visage joyeux, profondément et tendrement. Bénédictions pour elle.

Le 30 avril 1851

Auteur: Darwin Charles

Info: Il a écrit ce mémorial pour sa fille une semaine après sa mort

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