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averse

Etsuko s’abandonna à ses pensées.

Le bruit de la pluie est pareil aux voix de dizaines de milliers de moines lisant des sutras. Yakichi bavarde, Kensuké bavarde, Chiéko bavarde… Ah, que les mots sont inutiles ! Quelle insignifiance ! Quelle futilité ! Quelle duperie que cet affairement perpétuel, cette dépense d’énergie pour une activité dépourvue de sens ! "Nulle parole ne saurait rivaliser avec cette puissante et implacable pluie. La seule chose qui puisse rivaliser avec le bruit de cette pluie, qui puisse briser ce mortel mur de son est le cri d’un homme qui refuse de s’incliner devant ce bavardage, le cri d’une âme simple qui ignore la parole."

Auteur: Mishima Yukio

Info: Une soif d'amour

[ sonorités ] [ hurlement ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

professeurs

Les enseignants, quant à eux, constitueraient groupés les statistiques navrantes d’une perte de romantisme éperdu. Armés du maigre prestige de la réussite au concours, ils tenteraient avant tout d’embrasser le confort. Ils parleraient très souvent de leurs vacances et se marieraient entre eux. Ils frémiraient toujours au contact d’Alfred de Musset sous la forme d’une dissertation, s’agripperaient à la sécurité grammaticale et au cahier de présence. Leurs élèves ne sauraient pas parler le français et ils étudieraient pourtant L’Île des esclaves de Marivaux en seconde générale. On les instruirait de liberté alors qu’ils seraient en cage, avec leurs soixante mots de vocabulaire. Mais les Lumières figureraient au programme, on s’inclinerait. Les profs, ceux d’entre eux qui le deviendraient, ouvriraient via ShowYou des groupes de réflexion sur le décloisonnement du savoir, arboreraient barbes et jupes longues, et des colliers ethniques imitant à merveille l’ambre de Saint-Domingue. Ils seraient des fonctionnaires de la littérature et iraient muséifier leur passion en visitant la maison de Victor Hugo accompagnés d’un groupe scolaire en survêtement de sport.

Auteur: Bied-Charreton Solange

Info: Dans "Enjoy", éditions Stock, 2012, pages 174-175

[ portrait ironique ] [ déconnectés de la réalité ] [ égoïstes ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

maya

Que les hommes publics diffusent des mensonges

N’a rien de nouveau. Que l’Amérique accepte

La corruption et l’empire comme les républiques historiques

C’est admis depuis des années.



Pour commencer tu peux en vouloir au soleil

Si ces choses te mettent en colère. Regarde la roue s’incliner et tourner,

Ils sont tous liés à la roue, ces gens, ces guerriers,

Cette république, Europe, Asie.



Observe-les gesticuler,

Observe-les chuter. Le groupe sert des mensonges, l’homme

Passionné joue son rôle ; la froide passion pour la vérité

Chasse sans la meute.



Tu n’es pas Catulle, tu sais,

A railler ces caricatures grossières de César. Tu es loin

Des vers de Dante, et encore plus loin de ses haines

Politiques retorses.



Laisse les garçons chercher le plaisir, et les hommes

Lutter pour le pouvoir, et les femmes peut-être pour la gloire,

Et les serviles servir un Chef et les dupes être dupés.

Ta vie n’est pas la leur.

Auteur: Jeffers Robinson

Info: Dans "Mara ou Tu peux en vouloir au soleil", Préface, trad. de l’anglais (États-Unis) par Cédric Barnaud, éditions Unes, 2022, page 125

[ témoin ] [ hors-jeu ] [ théâtre social ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

protestantisme

La guerre des paysans : le grand reniement de Martin Luther. Ainsi le veut la tradition. Peut-être oui, peut-être non ?

Nous n’avons pas à dire ce que fut le soulèvement de 1524-1525, ni comment d’autres révoltes l’avaient précédé, ni quels hommes, d’origines et de tendances très diverses y prirent part, soit comme chefs, soit comme exécutants. Mais que, dès le début, Martin Luther ait été mis en cause et par les deux partis à la fois, il faudrait être naïf pour en marquer quelque surprise. Aux yeux des uns, il était tout naturellement le père et l’auteur de la sédition ; ses doctrines, ses prédications, son exemple funeste l’avaient provoquée ; et si l’on devait réprimer les mutins, encore plus fallait-il châtier le suppôt de Satan qui, ayant semé le vent sur la paisible Allemagne récoltait la tempête. Les autres, non moins naturellement, saluaient en Luther l’avocat d’office de tous les opprimés, le patron-né de tous les révoltés, l’adversaire obligé de toutes les tyrannies. Et d’ailleurs, n’étaient-ils pas, eux les paysans, les véritables champions de l’Évangile contre les Princes ? En tête de leurs articles, ne revendiquaient-ils pas le droit d’élire des pasteurs   qui, traduisant clairement la Sainte Parole et la prêchant sans adultération, leur donnassent occasion de prier, d’entretenir en eux la véritable foi ? Ne soyons pas surpris qu’à la fin d’avril 1525, Luther, intervenant enfin, ait publié sa fameuse Exhortation à la paix à propos des douze articles des paysans de Souabe, et aussi, contre l’esprit de meurtre et de brigandage des autres paysans ameutés.

Le plan est net, la thèse simple. Une courte introduction ; puis, deux discussions séparées, l’une, avec les princes, l’autre, beaucoup plus longue, avec les paysans ; pour conclure, quelques phrases d’exhortation aux deux partis. Or, que veut Luther ? Examiner ce qu’ont de juste, ou d’injuste, les demandes des paysans ? Arbitrer un différend politico-social ? En aucune façon. Traiter un point de religion, oui.

Les paysans articulent : "Nous ne sommes ni des rebelles, ni des révoltés, mais les porte-parole de l’Évangile. Ce que nous réclamons, l’Évangile nous justifie de le réclamer." Voilà la prétention contre laquelle Luther s’élève uniquement, mais avec une violence, une passion, une fougue incomparables. Aux Princes, il dit peu de choses, et vagues : que ceux d’entre eux ont tort, qui défendent de prêcher l’Évangile ; tort aussi, ceux qui accablent leurs peuples de fardeaux trop pesants. Ils devraient reculer devant la colère qu’ils déchaînent, traiter les paysans "comme l’homme sensé traite les gens ivres ou hors de leur bon sens". Ce serait prudence ; justice aussi, au sens humain du mot ; l’autorité n’est pas instituée pour faire servir les sujets à l’assouvissement des caprices du maître. Mais une fois ce pâle discours au conditionnel terminé, quelle voix claire et sonore retrouve Martin Luther, sitôt qu’il harangue, qu’il accable les paysans ! Pour eux, avec eux, l’Évangile ? Quelle monstrueuse sottise ! Qu’on le brûle, lui, Luther, qu’on le torture, qu’on le mette en morceaux — tant qu’il lui restera un souffle, il clamera la vérité : l’Évangile ne justifie pas, mais condamne la révolte. Toute révolte.

Ils disent, les paysans : "Nous avons raison, ils ont tort. Nous sommes opprimés et ils sont injustes." Il se peut. Luther va plus loin. Il dit : je le crois. Et puis après ? "Ni la méchanceté, ni l’injustice n’excusent la révolte." L’Évangile enseigne : "Ne résistez pas à celui qui vous fait du mal ; si quelqu’un te frappe à la joue droite, tends l’autre. " Luther a-t-il jamais tiré l’épée ? prêché la révolte ? Non, mais l’obéissance. Et c’est pour cela, précisément, qu’en dépit du pape et des tyrans, Dieu a protégé sa vie et favorisé les progrès de son Évangile. Ceux qui "veulent suivre la nature et ne pas supporter le mal", ce sont les païens. Les chrétiens, eux, ne combattent pas avec l’épée ou l’arquebuse. Leurs armes sont la croix et la patience. Et si l’autorité qui les opprime est réellement injuste, ils peuvent être sans crainte : Dieu lui fera expier durement son injustice. En attendant, qu’ils se courbent, obéissent et souffrent, en silence.

Voilà la doctrine de l’Exhortation à la paix. Et certes, il est facile d’ironiser, facile de souligner le contraste et son énorme comique : ici tumulte, hurlements de haine, campagnes remplies de cris de rage et de lueurs d’incendie ; et là, le Dr Martin Luther, les yeux au ciel, jouant de toute son âme et de ses joues gonflées, comme s’il ne voyait et n’entendait que lui, son petit air de flageolet chrétien. Il est facile. Mais il y a une chose qu’on n’a pas le droit de dire : c’est que Luther en mauvaise passe invente sur-le-champ, en 1525, des arguments pharisaïques.

Sa doctrine ? Elle ne naît pas, comme un expédient, de la révolte paysanne. N’inspire-t-elle pas, déjà, la lettre à Frédéric  du 5 mars 1522 ? "Celui-là seul qui l’a instituée de ses mains peut détruire et ruiner l’Autorité : autrement, c’est la révolte, c’est contre Dieu !" N’anime-t-elle pas, d’un bout à l’autre, le traité de 1523 sur l’Autorité séculière : royaume du Christ, royaume du monde, et dans ce royaume, à ses rois l’obéissance absolue, même si l’ordre est injuste ? Car le proverbe dit vrai : qui rend les coups a tort ; et nul ne doit juger sa propre cause. Non, en vérité, Luther n’invente rien en 1525, lorsqu’il crie aux serfs de se résigner, aux paysans de s’incliner. Et quand il ajoute : la seule liberté dont vous deviez vous soucier, c’est la liberté intérieure ; les seuls droits que vous puissiez légitimement revendiquer, ce sont ceux de votre spiritualité — ces formules, brandies sur la tête de rustres poussés à bout et qui se battent comme des bêtes pour leur vie, peuvent bien sembler énormes de dérision. Luther, en s’y tenant avec obstination est logique avec lui-même : Luther, le vrai Luther, celui de Leipzig, de Worms, de la Wartbourg.

Auteur: Febvre Lucien

Info: Un destin : Martin Luther, PUF, 1968, pages 160 à 162

[ soumission extérieure ] [ réponse ]

 

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