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insulte

Mon cher Camus,
Notre amitié n'était pas facile mais je la regretterai. Si vous la rompez aujourd'hui, c'est sans doute qu'elle devait se rompre. Beaucoup de choses nous rapprochaient, peu nous séparaient. Mais ce peu était encore trop : l'amitié, elle aussi, tend à devenir totalitaire ; il faut l'accord en tout ou la brouille, et les sans-parti eux-mêmes se comportent en militants de partis imaginaires.
[...]
Un mélange de suffisance sombre et de vulnérabilité a toujours découragé de vous dire des vérités entières. Mais dites-moi, Camus, par quel mystère ne peut-on discuter vos oeuvres sans ôter des raisons de vivre à l'humanité ? Mon Dieu, Camus, comme vous êtes sérieux, et, pour employer un de vos mots, comme vous êtes frivole ! Et si vous vous étiez trompé? Et si votre livre témoignait simplement de votre incompétence philosophique ? S'il était fait de connaissances ramassées à la hâte de seconde main ? Avez-vous si peur de la contestation ? Je n'ose vous conseiller de vous reporter à la lecture de L'Etre et le Néant, la lecture vous en paraîtrait inutilement ardue. Vous détestez les difficultés de pensée.
[...]
Il se peut que vous ayez été pauvre, mais vous ne l'êtes plus. Vous êtes un bourgeois comme Jeanson et comme moi.
[...] Votre morale s'est d'abord changée en moralisme, aujourd'hui elle n'est plus que littérature, demain elle sera peut-être immoralité.

Auteur: Sartre-Jean Paul

Info: lettre d'août 1952 à Camus

[ vacherie ]

 

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violées

Vocable pour suggérer le viol, ou pour le contourner : après le passage des soldats près de la rivière, eux que la jeune femme, cachée durant des heures, n'a pu éviter. A rencontrés. A subis. "J'ai subi la France", aurait dit la bergère de treize ans, Chérifa, elle qui justement n'a rien subi, sinon, aujourd'hui, le présent étale.

Les soldats partis, une fois qu'elle s'est lavée, qu'elle a réparé son désordre, qu'elle a renoué sa natte sous le ruban écarlate, tous ces gestes reflétés dans l'eau saumâtre de l'oued, la femme, chaque femme, revient, une heure ou deux après, marche pour affronter le monde, pour éviter que le chancre ne s'ouvre davantage dans le cercle tribal - vieillard aveugle, gardiennes attentives, enfants silencieux avec des mouches sur les yeux, garçonnets déjà soupçonneux :

- Ma fille, y a-t-il eu "dommage" ?

L'une ou l'autre des aïeules posera la question, pour se saisir du silence et construire un barrage au malheur. La jeune femme, cheveux recoiffés, ses yeux dans les yeux sans éclat de la vieille, éparpille du sable brûlant sur toute parole : le viol, non dit, ne sera pas violé. Avalé. Jusqu'à la prochaine alerte.

Vingt ans après, puis-je prétendre habiter ces voix d'asphyxie ? Ne vais-je pas trouver tout au plus de l'eau évaporée ? Quels fantômes réveiller, alors que, dans le désert de l'expression d'amour (amour reçu, "amour" imposé), me sont renvoyées ma propre aridité et mon aphasie.

Auteur: Djebar Assia

Info: L'amour, la fantasia

[ guerre ] [ forcées ] [ colonialisme ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

non-violence

Quand une époque est une grande époque, l’homme politique qu’elle engendre est, par nécessité, moins pire. Il est obligé de s’adapter. Inventez une manière d’être qui soit de l’ordre de l’impeccabilité, devenez un guerrier parfait, agissez tous les jours comme si vous deviez, à vous seul, reconstruire l’humanité, et autour de vous : tout changera, tout s’adaptera, tout s’améliorera. Cessez de pester sur les hommes politiques racistes, sexistes, policiers, capitalistes ou militaires : devenez un peu moins raciste, sexiste, policier, capitaliste et militaire et ils le deviendront un peu moins malgré eux : parce qu’ils n’auront pas le choix. Ne leur donnez surtout pas le choix : soyez formidables.

C’est quand nous n’aurons plus aucune attente dans le domaine purement électoral, quand nous n’attendrons plus rien des partis préexistants et des représentants, administrateurs et tribuns, que commencera vraiment la Grande Politique. C’est quand nous accepterons que tout a été soldé depuis des décennies aux domaines économique, industriel et militaire, que nous commencerons à penser ensemble à une nouvelle façon de vivre et d’agir. C’est pour ça que le monde politique va continuer à nous submerger d’élections, de propositions, d’effets d’annonce, de convocations, de chantages… C’est pour ça que les médias ne nous lâcheront pas comme ça non plus, et continueront à nous "retenir" dans leur monde avec la moindre info, le moindre événement… Ils ont peur qu’on commence à vivre. Ils ont peur qu’on leur dise, simplement, sans colère et sans haine, que leur temps est révolu.

Auteur: Thiellement Pacôme

Info: http://www.pacomethiellement.com/corpus_texte.php?

[ exemplarité ] [ responsabilité individuelle ] [ histoire-miroir ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

chicane

"La vérité sur l'administration de la justice. Cet ouvrage présente particulièrement la vérité sur le jugement de Moreau, pour l'exactitude de l'histoire de France, et pour répondre à la brochure de M. Lecourbe, intitulée : Opinion sur la conspiration de Moreau, Pichegru et autres. Ma défense avec des motifs urgens pour désigner des juges à la place de la Haute-Cour, à l'effet de juger une prise à partie contre la Cour royale de Paris, et juger surtout MM. Lecourbe, Thuriot et Séguier, et pour désigner aussi une autre Cour royale à la place de celle de Paris, à l'effet de juger les causes de ceux qui l'ont prise à partie. Quelques idées très-simples pour une nouvelle organisation judiciaire. Par J.B. SELVES, ancien magistrat, ex-législateur fructidorisé." (*)

J'ai cru devoir recopier ce long titre tout entier, parce que je ne connois pas de titre au monde qui soit plus propre à rendre une analyse inutile, à tenir lieu d'une table de chapitres bien complète, et à donner une exacte idée du style et des formes de l'auteur. Il ne fallait pas moins, à la vérité, pour le sommaire d'une simple requête de 472 pages, in-8°, que M. Selves a judicieusement subdivisée en trois points, et dont toutes les parties sont d'ailleurs en raison proportionnelle du volume démesuré de l'ouvrage. Il n'y a pas un mot qui ne soit polysyllabe, quand la synonymie l'a permis, pas une phrase qui n'occupe une page, pas une période qui n'en couvre quatre, et où la pensée, bonne ou mauvaise, fausse ou vraie, utile ou ridicule qui en fait le fond, ne soit délayée, dénaturée, atténuée, effacée, au point de devenir méconnoissable, et de se perdre dans l'expression, sans rien laisser à l'esprit.

Auteur: Nodier Charles

Info: in "Mélanges de littérature et de critique" - disponible sur Gallica - le verbe "fructidoriser" fait référence au coup d'état du 18 fructidor an V, et aux sanctions endurées par les partisans de Pichegru (ne m'en demandez pas plus !)

[ éreintement ] [ prolixité ] [ vanité ] [ vacherie ]

 
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agglomérations

Ils commencent par se construire un toit, un petit coin, une place à eux. Comme ces migrants n'ont pas d'argent, puisqu'ils sont justement partis en ville pour en gagner - le village traditionnel africain ignore la notion de l'argent -, ils ne peuvent se réfugier que dans les bidonvilles. L'architecture de ces quartiers est invraisemblable. Le plus souvent , les autorités de la ville affectent aux pauvres les terrains les plus mauvais : des marécages, ou bien des terres nues et sablonneuses. C'est là qu'on installe la première cabane. A côté d'elle vient s'installer une deuxième. Puis une troisième. Spontanément surgit une rue. Quand cette rue en rencontre une autre, cela forme un croisement. Puis ces rues commencent à se séparer, tourner, se ramifier. C'est ainsi que naît un quartier. Mais comment se procurent-ils les matériaux ? C'est la grand mystère. En creusant le sol ? En décrochant les nuages ? En tout cas il est sûr et certain que cette foule de miséreux n'achète rien. Sur la tête, sur les épaules, sous le bras, ils transportent des morceaux de tôle, de planches, de contreplaqué, de plastique, de carton, de carrosserie, de cageot, puis ils assemblent, montent, clouent, collent ces pièces en un ensemble qui tient de la cabane ou de la hutte et forme un collage multicolore improvisé. En guise de couche, ils tapissent la terre d'herbe à éléphant, de feuilles de bananiers, de rafia ou de paille de riz, car souvent le sol est boueux ou pierreux. Faites de bric et de broc, ces architectures monstrueuses en papier mâché sont infiniment plus créatives, imaginatives, inventives et fantaisistes que les quartiers de Manhattan ou de La Défense à Paris. La ville entière tient sans une brique, sans une poutre métallique, sans un mètre carré de verre !

Auteur: Kapuscinski Ryszard

Info: Ebène - Aventures africaines

[ favelas ] [ auto-organisation ] [ débrouile ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

laissé pour compte

Un idiot du village, au sens littéral du mot, qui aime réellement la vérité, quand même il n'émettrait jamais que des balbutiements, est par la pensée infiniment supérieur à Aristote. Il est infiniment plus proche de Platon qu'Aristote ne l'a jamais été. Il a du génie, au lieu qu'à Aristote le mot de talent convient seul. Si une fée venait lui proposer de changer son sort contre une destinée analogue à celle d'Aristote, la sagesse pour lui serait de refuser sans hésitation. Mais il n'en sait rien. Personne ne le lui dit. Tout le monde lui dit le contraire. Il faut le lui dire. Il faut encourager les idiots, les gens sans talent, les gens de talent médiocre ou à peine mieux que moyen, qui ont du génie. Il n'y a pas à craindre de les rendre orgueilleux. L'amour de la vérité est toujours accompagné d'humilité. Le génie réel n'est pas autre chose que la vertu surnaturelle d'humilité dans le domaine de la pensée.

Au lieu d'encourager la floraison des talents, comme on se le proposait en 1789, il faut chérir et réchauffer avec un tendre respect la croissance du génie ; car seuls les héros réellement purs, les saints et les génies peuvent être un secours pour les malheureux. Entre les deux, les gens de talent, d'intelligence, d'énergie, de caractère, de forte personnalité, font écran et empêchent le secours. Il ne faut faire aucun mal à l'écran, mais il faut le mettre doucement de côté, en tâchant qu'il s'en aperçoive le moins possible. Et il faut casser l'écran beaucoup plus dangereux du collectif, en supprimant toute la part de nos institutions et de nos mœurs où habite une forme quelconque de l'esprit de parti. Ni les personnalités ni les partis n'accordent jamais audience soit à la vérité soit au malheur.

Auteur: Weil Simone

Info: Dans "La personne et le sacré"

[ savoir-connaissance ] [ intelligence intuitive ] [ incorruptibilité ] [ exclu ] [ quart-monde ]

 
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division bipartisane

La distinction moderne entre la "Droite" et la "Gauche "(qui est une transposition française de l’opposition, née en Angleterre, des Tories et des Whigs) correspond tout au long du XIXe siècle au conflit entre les défenseurs de l’ "Ancien Régime" - c’est-à-dire d’une société agraire et théologico-militaire – et les partisans du "Progrès" pour qui la révolution industrielle et scientifique (forme pratique du triomphe de la Raison) conduira, par sa seule logique, à réconcilier l’humanité avec elle-même. Le socialisme originel, au contraire, est, dans son principe, parfaitement indépendant de ce clivage. Il constitue avant tout la traduction en idées philosophiques des premières protestations populaires (luddites et chartistes anglais, canuts de Lyon, tisserands de Silésie, etc.) contre les effets humains et écologiques désastreux de l’industrialisation libérale. On ne trouvera par conséquent pas, chez Fourier ou chez Marx, de vibrants appels à unir un mystérieux "peuple de gauche" contre l’ensemble des forces supposées "hostiles au changement". Et durant tout le XIXe siècle, les socialistes les plus radicaux s’ont d’abord attentifs à ne pas compromettre la précieuse autonomie politique des travailleurs lors des différentes alliances éphémères qu’ils sont obligés de nouer, tantôt contre les puissances de l’Ancien Régime, tantôt contre les industriels libéraux. Ce n’est qu’après l’affaire Dreyfus – et non sans débats passionnés – que s’opérera véritablement pour le meilleur et pour le pire, l’inscription massive du mouvement socialiste dans le camp de la Gauche défini comme celui des "forces de Progrès". Pour valider cette opération historique, à la fois féconde et ambiguë, il sera d’ailleurs nécessaire (Durkheim jouant ici un rôle important) d’accentuer autrement la généalogie du projet socialiste. On choisira d’u voir désormais moins le produit de la créativité ouvrière qu’un développement "scientifique" de la philosophie des Lumières, rendu possible par l’œuvre du comte de Saint-Simon, et importé ensuite "de l’extérieur" dans la classe ouvrière. 

Auteur: Michéa Jean-Claude

Info: Préface à "La culture du narcissisme" de Christopher Lasch, éditions Flammarion, Paris, 2018

[ historique ] [ réappropriation bourgeoise ] [ gauche-droite ]

 

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cité imaginaire

À Maurilia, le voyageur est invité à visiter la ville et, en même temps, à regarder de vieilles cartes postales qui la représentent telle qu'elle était auparavant : exactement le même endroit avec une poule à la place de la gare routière, le pupitre à la place du viaduc, deux jeunes femmes avec des parasols blancs à la place du viaduc, deux jeunes femmes avec des parasols blancs à la place de l'usine d'explosifs. Pour ne pas décevoir les habitants, il est nécessaire que le voyageur fasse l'éloge de la ville dans les cartes postales et la préfère à l'actuelle, en veillant toutefois à contenir son regret des changements dans des règles précises : Reconnaissant que la magnificence et la prospérité de Maurilia en tant que métropole, par rapport à l'ancienne Maurilia provinciale, ne compensent pas une certaine grâce perdue, qui ne peut être appréciée aujourd'hui que sur les vieilles cartes postales, alors qu'avant, avec la Maurilia provinciale en vue, on ne voyait rien de gracieux, et on le verrait encore moins aujourd'hui, si Maurilia était restée telle quelle, et que de toute façon la métropole a cet attrait supplémentaire, qu'à travers ce qu'elle est devenue on peut penser avec nostalgie à ce qu'elle était. Gardez-vous de leur dire que parfois des villes différentes se succèdent sur le même sol et sous le même nom, naissent et meurent sans s'être connues, incommunicables entre elles. Parfois même les noms des habitants restent les mêmes, et les accents de leurs voix, et même les traits de leurs visages ; mais les dieux qui habitent sous les noms et sur les lieux sont partis sans rien dire, et à leur place se sont nichés des dieux étrangers. Il est vain de se demander s'ils sont meilleurs ou pires que les anciens, puisqu'il n'y a aucun rapport entre eux, tout comme les anciennes cartes postales ne représentent pas Maurilia telle qu'elle était, mais une autre ville qui s'est appelée Maurilia comme celle-ci.

Auteur: Calvino Italo

Info: Villes invisibles

[ souvenirs ]

 

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droits des minorités

Il ne faut pas perdre une minute à batailler contre la revendication du "mariage homosexuel". C’est une de ces nouveautés innovantes comme notre temps en raffole, une de ces avancées qui vont de l’avant sans craindre d’aller plus loin que loin, un de ces progrès inéluctables qui ont le vent du futur dans les voiles. [...]

Quant à la contradiction comique mais classique à la faveur de laquelle on veut, comme Christophe Girard et Clémentine Autain, placer sous la protection de l’État une union homosexuelle dont on dit qu’elle sera aussi et surtout "un pied de nez à la conception traditionnelle du mariage", ce serait également perdre son temps que de la relever, quand la course à l’avenir prend les formes d’une marche nuptiale dadaïste qui réclame d’être bénie par les plus hautes autorités au nom de l’égalité. [...]

Sans compter, ainsi que l’écrit un militant de cette magnifique conquête, qu’il n’existe aucun motif rationnel pour l’interdire. Il en existe si peu qu’on se demande pourquoi, dans les siècles des siècles, personne n’avait encore songé à l’autoriser. Il est vrai que les grandes révolutions engloutissent dans leur triomphe jusqu’au souvenir des raisons qui auraient pu les arrêter.

Il est vrai aussi qu’on n’avait pas jusqu’alors pensé à mettre le nez dans les silences du code civil. Providentiels silences d’un code qui a oublié de préciser ce qui lui semblait aller de soi. Ainsi de l’article 144 relatif au mariage, qui ne stipule pas qu’il faut que cela se passe entre personnes du sexe opposé. Une lacune béante dont les partisans du mariage homo ont fait leur premier argument de campagne sur la base d’un principe simple : tout ce dont le code ne parle pas n’est pas interdit. La chose semble en effet irréfutable. On pourrait même la généraliser. Et noter que le code ne mentionne pas non plus qu’il est interdit de se marier avec un bégonia, une onde hertzienne ou un œuf dur.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 4", Les Belles Lettres, Paris, 2010, pages 1586-1587

[ progressisme ] [ appui législatif délirant ] [ pouvoir minoritaire ]

 

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géopolitique

Aux termes des accords conclus entre la Mongolie, la Chine et la Russie le 21 octobre 1912, le 23 octobre 1913 et le 7 juin 1915, la Mongolie extérieure a obtenu son indépendance. Le souverain pontife de notre religion jaune, Sa Sainteté le Bouddha vivant, est devenu le suzerain des Khalkhas, de tout le peuple mongol de la Mongolie extérieure, avec le titre de Bogdo Djebtsung Damba Houtouktou Khan. Tant que la puissance russe s’étendait sur l’Asie et garantissait le respect de ces décisions politiques, le gouvernement de Pékin a observé le traité ; mais quand, au début de la guerre avec l’Allemagne, la Russie a dû retirer ses troupes de Sibérie, Pékin a voulu revendiquer ses anciens droits sur la Mongolie. C’est pour cela que les deux premiers traités de 1912 et 1913 ont été complétés par la convention de 1915. A partir de 1916 cependant, lorsque toutes les forces de la Russie se sont trouvées concentrées dans une guerre malheureuse, puis quand quelques mois plus tard a éclaté la première Révolution russe de février 1917, renversant la dynastie des Romanoff, le gouvernement chinois a récupéré la Mongolie sans autre forme de procès. Les ministres et les saïts mongols ont été révoqués et remplacés par des personnalités acquises à la Chine ; de nombreux Mongols partisans de l’autonomie ont été arrêtés et emprisonnés à Pékin ; les Chinois ont établi leur propre administration à Ourga et dans d’autres villes mongoles, retirant à Sa Sainteté le Bogdo Khan la gestion des affaires administratives et les réduisant à n’être plus qu’une machine à signer leurs propres décrets ; l’arrivée des troupes sur le territoire a couronné l’entreprise. Elle a amené dans son sillage un flot de marchands et de coolies chinois qui ont déferlé sur le pays. Les Chinois ont exigé le paiement des impôts, des taxes et des arriérés depuis 1912. La population mongole a été promptement dépouillée de tous ses biens : aujourd’hui, aux abords des villes et des monastères, ce sont des colonies entières de Mongols, ruinés, qui vivent dans des abris souterrains. Tous nos arsenaux, tous nos trésors ont été réquisitionnés ; tous les monastères soumis à l’impôt. Les Mongols œuvrant pour la liberté de leur pays ont été persécutés ; en les achetant avec de l’argent, des décorations et des titres, les Chinois ont fait de certains princes sans fortune des partisans de leur cause.

Auteur: Ossendowski Ferdynand

Info: Dans "Bêtes, hommes et dieux", traduit de l’anglais par Robert Renard, éditions Phébus, Paris, 1995, pages 112-113

[ historique ]

 

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