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maturité

Suzanne disait qu'une vie d'adulte, ce n'était parfois rien d'autre que tous les mensonges dont on recouvrait avec une féroce patience l'illumination de l'adolescence. Une sorte de deuil intarissable qui tombait sur l'incrédulité qui avait mis fin à la jeunesse. Avec le sentiment terrible de retrouver enfin le scepticisme de notre père, celui qu'il opposait silencieusement, de façon détournée, à nos désirs de justice et de bien. Nous ne voulions pas le comprendre alors. On ne savait pas qu'il nous attendait, là-bas, depuis sa douleur de père, avec la certitude désolante de ceux qui souffrent d'avoir raison et voudraient tant avoir tort par amour. Il devait se dire que nous connaîtrions ça, à notre tour, que nous n'échapperions pas à ce moment de vertige quand la vérité nous rattrape sous les traits compassés de notre père, par un rebondissement cruel. Peut-être serait-il mort... et malgré tout, il aurait sa victoire.

Auteur: Boyer Frédéric

Info: Est-ce que tu m'aimes ?

[ décalage générationnel ] [ cycles ]

 

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Ajouté à la BD par Le sous-projectionniste

cyclisme

Au dernier jour des longues courses, une petite goutte de tristesse venait parfois se diluer dans le soulagement d'en avoir fini. La fatigue n'est jamais pure, elle comporte ce soupçon de bile qui teinte la joie des aboutissements, la peur du silence qui suit les activités intenses. Les lundis matin sont souvent difficiles pour les coureurs. On a passé plusieurs semaines dans l'agitation et le bruit, on s'est jeté à l'assaut des pentes dans la foule fournaise, on traversé avec les autres d'interminables paysages striés par la pluie silencieuse, on s'est engouffré à pleine vitesse dans l'ombre menaçante des tunnels de montagne et des sous-bois, entre les barrières métalliques de la dernière ligne droite, et puis plus rien. Lundi, à la maison, la solitude et ses acouphènes. Chez les parents lorsqu'on est jeune, puis chez soi. Une épouse qui a manqué, mais dont ni la voix ni l'étreinte ne comble l'incomblable.

Auteur: Haralambon Olivier

Info: Le versant féroce de la joie

[ après-coup ] [ vacuité ] [ contraste ]

 

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nature

Pour décrire notre enfance dans les basses terres de Caroline du Sud, il me faudrait vous emmener dans les marais, un jour de printemps, arracher le grand héron bleu à ses occupations silencieuses, disperser les poules d'eau en pataugeant dans la boue jusqu'aux genoux, vous ouvrir une huître de mon canif et vous la faire gober directement à la coquille en disant "Tenez. Ce goût-là, c'est toute la saveur de mon enfance." Je dirais: "Inspirez fort", et vous avaleriez cet air dont la saveur serait inscrite dans votre mémoire pour le reste de vos jours, arôme exquis et sensuel, impudent et fécond des marais, parfum de Sud caniculaire, du lait frais, du sperme et du vin répandus, avec, toujours, un relent d'eau de mer. Mon âme se repaît comme l'agneau de la beauté des terres baignées d'eau de mer.
J'ai le patriotisme d'une géographie singulière sur la planète; je parle de mon pays religieusement; je suis fier de ses paysages.

Auteur: Conroy Pat

Info: Le Prince des Marées

[ usa ] [ littérature ]

 

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filiation

Cependant, même sans contenu disponible, la mémoire est un instrument de deuil. Irrémédiablement liée à l’absence, à la mort et aux morts. La mémoire c’est même la seule chose qui nous reste de la mort d’autrui. Et de la mort on ne connaît que la mémoire des vivants. Mais cette mémoire-là, lieu où l’exercice quotidien s’accomplit à notre insu, n’a pas grand-chose à voir avec la reconstitution d’un passé historique. Elle est, cette mémoire, hantée par une absence fondatrice. Et de cette absence du mort à la mémoire il n’y a qu’un pas que vient combler sans effort l’oubli. Il porte alors nos existences.
Comment dire pourquoi il arrive qu’on puisse bien se passer d’un vivant et tellement moins bien du mort ? Où a-t-on mal d’une absence qui est cette part de l’autre qui nous blesse ? La mémoire a beau être blanche, et même silencieuse, elle n’en demeure pas moins. En elle persiste cette fraction intime qui nous anime tout en restant inassimilable.

Auteur: Olender Maurice

Info: Le fantôme dans la bibliothèque

[ shoah ] [ manque ] [ passé définitif ]

 

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Ajouté à la BD par Plouin

mobilisation sociale

Celle des Gilets jaunes est la plus originale, révélatrice des fractures sociales et politiques hexagonales. Apparue hors de toute structure préalable, elle tira sa force de cette spontanéité. Son rejet vigilant de toute récupération ou convergence a favorisé la cristallisation d’un "bloc populaire" apte à déjouer les clivages partisans pour affirmer les aspirations sociales, longtemps silencieuses, des "petits", du travail "dur", mal payé et aléatoire. L’inorganisation initiale est allée de pair avec la simultanéité des liens que facilitaient les réseaux sociaux, amplifiés par les médias, tandis que des solidarités élémentaires s’ébauchaient dans l’action. L’inexpérience bouscula les codes des protestations classiques. Expression d’une culture à cent lieues des procédures institutionnelles, mais porteuse de références républicaines à la justice et à la supériorité absolue de la "volonté populaire", la colère a transgressé les protections légales des puissants. Les Gilets jaunes peu soucieux d’informer les autorités de leurs intentions, refusèrent les relégations spatiales et investirent les parages des Champs-Elysées, haut lieu symbolique du pouvoir et de la richesse ostentatoire.

Auteur: Pigenet Michel

Info: Introduction à "La violence dans l'histoire", éd. Le temps des cerises, Montreuil, 2020, page 47

[ révolte ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

introspection

Il est vraiment étrange que, moi qui me moque du patinage comme de je ne sais quoi, à peine je ferme les yeux, je vois une immense patinoire.

Et avec quelle ardeur je patine!

Après quelque temps, grâce à mon étonnante vitesse qui ne baisse jamais, je m'éloigne petit à petit des centres de patinage, les groupes de moins en moins nombreux s'échelonnent et se perdent. J'avance seul sur la rivière glacée qui me porte à travers le pays.

Ce n'est pas que je cherche des distractions dans le paysage. Non. Je ne me plais qu'à avancer dans l'étendue silencieuse, bordée de terres dures et noires, sans jamais me retourner, et, si souvent et si longtemps que je l'aie fait, je ne me souviens pas d'avoir jamais été fatigué, tant la glace est légère à mes patins rapides.

Au fond je suis un sportif, le sportif au lit. Comprenez-moi bien, à peine ai-je les yeux fermés que me voilà en action.

(...)

Auteur: Michaux Henri

Info: La Nuit remue

[ songes ] [ glissades ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

télécommunication

La simplification des mouvements utiles avait apporté du reste, dans le monde scientifique, beaucoup de calme et d’ordre. Aucun bruit au dehors, des villes silencieuses avec de très rares passants et sans canalisations apparentes, tout se faisant par impression à distance, sans nulle difficulté.

Il n’était pas jusqu’au plaisir ancien du théâtre que l’on ne pratiquât à domicile, sans se déranger, par simple suggestion collective. On avait même remplacé, dans la plupart des cas, les représentations par de simples impressions de représentation donnant l’illusion du plaisir et du succès.

Les informations, les nouvelles, les découvertes importantes, les recommandations collectives, en vue de tel ou tel besoin, tout cela se faisait également par suggestion, sans perte de temps, sans déplacement intermédiaire désormais inutile et sans objet.

Le seul défaut de ce groupement social excessif fut de détruire, petit à petit, toute initiative individuelle, toute volonté, toute activité indépendante, et, en supprimant les individualités, de développer progressivement, sans que personne y prît garde, la toute-puissance absolue du Grand Laboratoire Central.

Auteur: Pawlowski Gaston de

Info: Voyage au pays de la quatrième dimension, Flatland éditeur, 2023, page 247

[ dématérialisation ] [ réseau virtuel ] [ conséquences ] [ science-fiction ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

impression de lecture

L’un des signes les moins douteux de cet acculement des âmes modernes à l’extrémité de tout, c’est la récente intrusion en France d’un monstre de livre, presque inconnu encore, quoique publié en Belgique depuis dix ans : les Chants de Maldoror, par le comte de Lautréamont ( ?), œuvre tout à fait sans analogue et probablement appelée à retentir. L’auteur est mort dans un cabanon et c’est tout ce qu’on sait de lui.

Il est difficile de décider si le mot monstre est ici suffisant. Cela ressemble à quelque effroyable polymorphe sous-marin qu’une tempête surprenante aurait lancé sur le rivage, après avoir saboulé le fond de l’Océan.

La gueule même de l’Imprécation demeure béante et silencieuse au conspect de ce visiteur, et les sataniques litanies des Fleurs du Mal prennent subitement, par comparaison, comme un certain air d’anodine bondieuserie.

Ce n’est plus la Bonne Nouvelle de la Mort du bonhomme Herzen, c’est quelque chose comme la Bonne nouvelle de la Damnation. Quant à la forme littéraire, il n’y en a pas. C’est de la lave liquide.

Auteur: Bloy Léon

Info: Dans "Le Désespéré", Livre de poche, 1962, page 38

[ éloge ] [ incomparable ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

réalité

Commençons par considérer l'actualité, et essayons de voir en quoi elle consiste. Si je vous demande comment se compose un événement, vous me l'expliquerez en me parlant de quelque un de ses paramètres. Paramètres ou "spécificités" qui impliquent alors toutes leurs relations avec le reste. La vérité de l'événement semblant se situer dans ses relations avec l'univers des autres événements. Un tribunal habilité à émettre des injonctions et des jugements à mon encontre dont je ne me soucie pas plus que d'un simple claquement de doigts. Que je puis voir comme une futile vapeur. Mais lorsque la main du policier se pose sur mon épaule, je commence à avoir un sens d'actualité. Le réel est quelque chose de brutal. On n'y trouve pas grande raison. On s'imagine en train d'appuyer notre épaule contre une porte en essayant de l'ouvrir de force contre une résistance invisible, silencieuse et inconnue. Nous avons une conscience bilatérale de l'effort et de la résistance, qui me semble raisonnablement proche d'un pur sens de l'actualité. Dans l'ensemble, je pense que nous avons ici le mode d'être d'une chose qui prend connaissance d'une autre. Je nommerai ceci Secondéité.

Auteur: Peirce Charles Sanders

Info: Lowell Lectures on Some Topics of Logic Bearing on Questions Now Vexed. Lecture III [R]. MS [R] 460. 1903

[ matérialité ] [ concret ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

écriture

mon ombre m’espionne à chaque pas

pour rendre son rapport à la Mort

mais moi je fais semblant

d’être calme et obéissant

je regarde les croix qui ne sont autres

qu’emplâtres sur la face de la Terre

et je dis : ça me va, Madame la Mort,

ça me va !



le Temps avale avide

les battements de mon coeur

il me laisse comme pourboire

quelques souvenirs

juste quelques petits souvenirs

et je dis : ça me va, Monsieur le Temps,

ça me va !



heureux et triste à la fois

car je suis encore

une dispersion de la lumière

dans une goutte de sang

je fais ma prière

et je dis : ça me va, Madame la Vie,

ça me va !



je fais semblant

d’être calme et obéissant

mais le soir

ayant l’air d’un rêveur

j’écris

et les mots s’alignent

comme des armées silencieuses

sur la feuille de papier

combattant la fatalité

Auteur: Caragea Ionut

Info: Armées silencieuses

[ poème circadien ]

 

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Ajouté à la BD par miguel