Citation
Catégorie
Tag – étiquette
Auteur
Info



nb max de mots
nb min de mots
trier par
Dictionnaire analogique intriqué pour extraits. Recherche mots ou phrases tous azimuts. Aussi outil de précision sémantique et de réflexion communautaire. Voir la rubrique mode d'emploi. Jetez un oeil à la colonne "chaînes". ATTENTION, faire une REINITIALISATION après  une recherche complexe. Et utilisez le nuage de corrélats !!!!..... Lire la suite >>
Résultat(s): 77
Temps de recherche: 0.0498s

désinvolture

"Le temps c’est de l’argent" - on invoque sur les affiches l’autorité de Lénine pour cette phrase étonnante ; ce sentiment est tellement étranger aux Russes. Ils musardent à tout propos. (On dirait que les minutes sont un tord-boyau dont ils ne peuvent jamais se rassasier, ils sont grisés par le temps.) Lorsqu’on tourne une scène pour un film dans la rue, ils oublient pourquoi ils sont sortis, où ils vont. Ils font escorte pendant des heures et arrivent hagards au bureau. […] L’unité de temps est au fond le "seïtchass". Cela signifie "tout de suite". C’est une réponse qu’on peut entendre selon les cas dix, vingt, trente fois, et on peut perdre son temps avec elle pendant des heures, des jours ou des semaines, avant que n’arrive ce qu’on vous a promis. C’est qu’on entend bien peu facilement la réponse "non". On laisse au temps le soin de refuser.

Auteur: Benjamin Walter

Info: Dans "Moscou" in Images de la pensée, pages 47-48

[ approximation ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

rapports humains

Oh ! oui, elle savait rentrer ses émotions, ses blessures, sa douleur, elle ne faisait même que ça. Elle était devenue une championne dans sa catégorie. A part cette nuit quand elle était venue trouver Johan... Johan qui n'était même pas là pour l'écouter, pour l'entendre. Des mots, des mots bruts sortis du coeur, le sang de son âme, versés en vain. Son père avait peut-être raison, après tout, on ne devrait jamais se livrer, en aucune circonstance, pour ne pas laisser les autres avoir barre sur vous ni leur offrir la possibilité de vous blesser. On se forgeait une armure de silence et de solitude, et on s'y retranchait, pour mieux s'y dessécher, lentement, tranquillement, de l'intérieur, jusqu'à ce qu'enfin il ne deumeure plus que cette cuirasse et rien dedans, un tronc sec dont la sève et les entrailles ont disparu, faute d'amour, et de tendresse, de complicité, pour les irriguer.

Auteur: Marcastel Jean-Luc

Info: Le dernier hiver

[ masque ] [ solitude ]

 

Commentaires: 0

emmerdeur

Feu sir Thomas Robinson, dont la société n'était rien moins qu'agréable, avait contracté l'habitude de se rendre très souvent chez un particulier qui ne se souciait nullement de sa compagnie. Il affectait de ne faire aucun cas des réponses de la servante, qui lui disait que son maître et sa maîtresse étaient absents, et se procurait souvent l'entrée de la maison sous les prétextes suivants ! : "Oh eh bien, en attendant qu'ils reviennent, je vais causer un instant avec les enfants; je jaserai un peu avec le perroquet, je profiterai de cette occasion pour régler ma montre sur la pendule du salon..."

Un matin, alors que la servante le vit arriver de loin par la fenêtre, elle courut à la porte et, la tenant entrebâillée, lui cria plus haut qu'à l'ordinaire : "Monsieur, mon maître et ma maîtresse sont sortis; les enfants sont couchés, le perroquet vient de mourir, et la pendule est arrêtée".

Auteur: Internet

Info: In Encyclopédie comique, ou Recueil anglais de gaietés, de plaisanteries, de traits d'esprit, de bons mots, d'anecdotes... 1677

[ casse-pied ] [ contre-mesure ]

 

Commentaires: 0

rapports humains

En toutes circonstances, et depuis toujours, s’il s’agit de poser une question idiote, ou de faire une réponse totalement à côté de la plaque à une question, ou de formuler un commentaire absurde, à tous les coups je suis la femme de la situation. Il m’arrive de surprendre un regard incrédule posé sur moi et de deviner ce que cette personne est en train de se dire : "Pourtant, il paraît qu’elle écrit des livres… " ou : "La vache, ils engagent vraiment n’importe qui, au Monde diplomatique…" J’en retire le même sentiment de honte que si j’avais trébuché et effectué un vol plané avant de m’écraser au sol sous les yeux d’une assemblée ébahie […]. Cet aspect de moi-même m’exaspère d’autant plus qu’il s’obstine à échapper à tout contrôle. En général, une demi-seconde après que les mots sont sortis de ma bouche, je partage déjà la consternation de mon ou de mes interlocuteurs ; sauf que c’est trop tard.

Auteur: Chollet Mona

Info: Dans "Sorcières", page 177

[ décalage ] [ jugement ] [ communication ] [ trac ] [ parler trop vite ] [ complexe ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

douleur

Artaud a cette phrase terrible, atroce, insoutenable, qu’on peut en effet mettre sur le compte du délire, de la psychose, etc. – la "passion d’Artaud", a dit cliniquement Lacan l’une des très rares fois où il a daigné s’exprimer là-dessus, lui qui avait diagnostiqué en 1937 ou 38, je ne sais plus, qu’Artaud "n’écrirait plus une ligne"* –, ce passage se trouve dans les cahiers d’Ivry, ceux sortis en fac-similé – justement –, et je crois bien n’avoir jamais rien lu de si bouleversant. C’est une phrase où un abîme éthique est en jeu : "Je ne veux pas être bien, parce que je me / reposerais / et que je serais / soulagé dans le mal / Je veux être mal dans / le mal / et mal tant qu’il y aura du mal / Je ne veux pas être bien / Tant qu’il y / aura un atome / un soupçon de mal / je veux souffrir / toujours".

Auteur: Belhaj Kacem Mehdi

Info: Artaud et la théorie du complot. *Une anerie lacanienne de plus. Mg

[ souffrance ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

motivation

Cela fait sans doute longtemps que j'ai envie de réaliser un tel film. Une colère terrible en est à l'origine. Je peux toucher du doigt le moment exact. Il était 9 heures du soir, le 4 avril 1968. Vous connaissez sans doute cette chanson du groupe U2, In The Name of Love [Michael Moore se met à en fredonner quelques paroles - ndlr]. C'était un jeudi saint. Nous étions à la messe en famille. A la fin de l'office, comme à chaque fois, les pères étaient déjà sortis pour allumer les moteurs des voitures garées en face et écouter la radio. Et, brusquement, celles-ci interrompent leurs programmes pour diffuser un bulletin spécial: "Martin Luther King a été tué à Memphis." Et un de ces hommes de reprendre l'information et la crier vers l'assemblée qui quittait l'église: "Martin Luther King a été tué!" Et alors, tous, sur le perron, autour de moi, ils se mettent à siffler, à applaudir, de joie. J'avais treize ans. Voilà précisément où commence mon film.

Auteur: Moore Michael

Info: à propos de son film Bowling for Columbine, L'Humanité 9 octobre 2002

 

Commentaires: 0

saison

Je m'assis sur un petit billot et sortis une cigarette. Devant moi l'Iennisseï s'étalait comme un plateau d'argent ciselé par le vent. Sur la rive opposée, au-delà de la barrière sombre des sapins, ondoyait la profondeur bleutée de la taïga qui était incroyablement automnale. J'ai toujours l'impression, je ne sais pourquoi, qu'ici l'automne n'apparaît pas sur place, mais qu'il vient d'ailleurs, sous la forme d'un air bleuté à la teneur particulière, qui jaunit, flétrit, resserre tout, tandis que soudain, de pair avec une vigueur physique accrue, nous voyons sourdre en nous une étonnante réceptivité à la nature. Et soumis à cette calme volonté, nous avons envie de grimper. sur la plus haute falaise et de tomber à genoux, en regardant la mer lointaine de l'Ienisseï....

Et longtemps s'inscrira en nous le chatoiement funèbre des rives, d'un jaune strié de vert sombre, et la fissure de feu traversant un nuage gris basalte bouchant le nord, jusqu'à ce que dans la fraîcheur d'un petit matin, un coup sourd de rame résonnant dans le brouillard ne donne des ailes au premier poème.

Auteur: Tarkovski Mikhaïl

Info: Le temps gelé, p. 36-37

[ émerveillement ]

 

Commentaires: 0

chichi

"Les hommes préhistoriques menaient des existences nomades." Alors là, pareil, je ne supporte plus alors que j’ai ânonné ça pendant des années. Franchement, ça coûterait quoi de parler d’humains préhistoriques? D’ailleurs, le fait même de mettre préhistorique en adjectif me dérange. Dans l’idéal, ce serait les humains qui vivaient à la préhistoire, ce qui marque la continuité avec nous. On ne dit pas "les humains moyen-âgeu". Je ne vois pas pourquoi une période historique devrait être un adjectif pour ses habitantes et habitants. On comprend bien qu’il s’agissait, au début de l’étude de la préhistoire, d’insister sur leur infériorité par rapport à nous, les modernes. Or on est censé être sortis de cette vision. Ceci étant dit, déjà, remplacer hommes par humains me paraît être le minimum parce que nous appartenons à une espèce qui s’appelle l’espèce humaine. Parler d’humains, c’est nous réinscrire dans un autre rapport plus proche du reste du vivant, là où le générique "les hommes", outre qu’ils invisibilisent une énième fois les femmes, les enfants, les vieux, les vieilles, nous place en situation de supériorité.

Auteur: Lecoq Titiou

Info: https://www.slate.fr/story/174915/mots-langage-transformations

[ étymologie ] [ révolte lexicale ] [ prison du langage ]

 
Mis dans la chaine

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par Coli Masson

armes de guerre

...Voici fuser et se balancer sur la zone bombardée un lourd paquet d’ouate verte qui se délaie en tous sens. Cette touche de couleur nettement disparate dans le tableau attire l’attention, et toutes nos faces de prisonniers encagés se tournent vers le hideux éclatement.
— C’est des gaz asphyxiants, probable. Préparons nos sacs à figure.
— Les cochons!
— Ça, c’est vraiment des moyens déloyaux, dit Farfadet.
— Des quoi? dit Barque, goguenard.
— Ben oui, des moyens pas propres, quoi, des gaz...
— Tu m’fais marrer, riposte Barque, avec tes moyens déloyaux et tes moyens loyaux... Quand on a vu des hommes défoncés, sciés en deux, ou séparés du haut en bas, fendus en gerbes, par l’obus ordinaire, des ventres sortis jusqu’au fond et éparpillés comme à la fourche, des crânes rentrés tout entiers dans l’poumon comme à coup de massue, ou, à la place de la tête, un p’tit cou d’où une confiture de groseille de cervelle tombe, tout autour, sur la poitrine et le dos. Quand on l’a vu et qu’on vient dire: "Ça, c’est des moyens propres, parlez-moi d’ça!"

Auteur: Barbusse Henri

Info: Le Feu (journal d'une escouade)

[ absurde ] [ gaz de combat ]

 

Commentaires: 0

Ajouté à la BD par miguel

persécutions

Je ne pouvais pas rater un spectacle aussi extraordinaire que la déportation des Juifs de Kiev. Dès l'aube, je me précipitai dans la rue. Ils étaient sortis avant le lever du jour, pour arriver le plus tôt possible au train et avoir des places. Pleurant et se querellant, la population juive du kolkhoze maraîcher se déversait dans la rue avec ses enfants qui hurlaient, ses vieillards, ses malades. Des paquets mal ficelés, de vieilles valises en contreplaqué, des sacs rapiécés, des caisses contenant des outils de charpentier... Des vieilles femmes portaient autour du cou des couronnes d'oignons, tels des colliers gigantesques : c'étaient les provisions de route... Vous comprenez, en temps normal, les infirmes, les malades, les vieillards, restent à la maison et on ne les voit pas. Mais là, tout le monde devait venir, et ils étaient tous là. [...] En proie à une agitation convulsive, je courais d'un groupe à l'autre, écoutant les conversations, et plus nous approchions du Podol, plus il y avait de monde dehors. Les habitants se tenaient sur le seuil de leur maison, regardaient, poussaient des soupirs, se moquaient des Juifs ou bien leur criaient des injures.

Auteur: Kuznetsov Anatoli

Info: Babi Yar, récit de Tolia, témoin alors qu'il était enfant

[ camps de concentration ] [ antisémitisme ]

 

Commentaires: 0