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existence

Ce jour est aujourd’hui passé, et bien d’autres, qui ont chacun marqué d’un coup ce visage où l’ombre d’un baiser effaçait un sourire. Des jours sont passés, qui revenaient toujours pour frapper la marque et la creuser, creuser la plaie saignante et la durcir en cicatrice. Des maladies, des morts, des guerres, qui burinaient sur la tendre face du printemps le pathétique soleil de l’été. Mais aussi revenait le bain en plein soleil, la coupe poissée de grappes ; toujours plus tard midi sonnait au crépuscule. L’ouragan noir d’automne qui flotte et roule, étendard de désastre, où l’éclair fend le ciel d’un gel irrémédiable, le frappa dans sa chair, et la chair de sa chair. Il souffrit, pour souffrir encore ; les saisons s’acharnaient sur lui pour le ployer sous leurs récoltes. Vinrent des maladies, des morts, des guerres, qui taillaient dans le doux visage du printemps les traits de marbre de l’hiver : il souffrit pour souffrir encore. Alors se leva un vent de tempête qui l’entraînait toujours plus vite ; il lui fallut quitter le toit de son enfance, et la maison de ses amours lui fut enlevée. Ses amis s’éloignèrent ; l’un après l’autre, ses fils prirent leur chemin. Chaque pas qu’il faisait l’enfonçait dans la nuit, ses souvenirs s’effacèrent ; il se tut. Il ne lui manquait que de périr, aussi dès le premier jour sa perte fut-elle inscrite dans son destin.

Le vieil arbre pourtant s’obstinait à fleurir ; il l’aimait. Les années avaient préservé leur tendresse comme si rien ne devait la vaincre ; mais chaque homme a son heure qu’il ne peut partager. Il resta seul, dans la débilité du vieillard, enfant sans mère, portant au flanc la déchirure par où s’était enfui l’amour de sa vie. Et la vie le fuyait ; enfin vaincu, il attendait que lui fût donné une grâce. Il mourut. Voici le seul héros et la seule aventure.

Auteur: Charbonneau Bernard

Info: Dans "Je fus", R&N Éditions, 2021, page 30

[ condition humaine ] [ expression poétique ] [ résumé ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

fraternité

Freuchen raconte comment un jour, après être revenu à la maison affamé suite à une expédition de chasse au morse infructueuse, il tomba sur un chasseur qui avait fait une bonne chasse et rapportait plusieurs centaines de livres de viande. Il le remercia chaleureusement mais l'homme éleva cette objection, indigné : "Dans mon pays nous sommes humains! ... Et comme nous le sommes nous nous entre aidons. Nous n'aimons pas entendre quelqu'un dire merci pour cela. Ce que j'ai eu aujourd'hui tu l'auras peut-être demain. Ici nous avons l'habitude de dire : par des cadeaux on fait les esclaves et par les coups de fouets on fait les chiens."
(...) Le refus de calculer crédit et débit peut être observé partout dans la littérature anthropologique concernant les sociétés de chasseurs égalitaires. Plutôt que se voir comme un homme parce qu'il sait faire des calculs économiques, le chasseur insiste à dire qu'être un homme c'est justement se refuser à de tels calculs. Il ne veut pas mesurer ou se souvenir à qui il a donné quoi, pour la raison précise que ce faisant il créerait inévitablement un monde où débuterait "la comparaison du pouvoir avec le pouvoir". D'où mesures et calculs... Ce qui réduirait les uns et les autres à être des esclaves ou des chiens via la dette.
Ce n'est pas qu'il ait, comme des millions d'innombrables esprits égalitaires partout dans l'histoire, ignoré que les humains ont une propension à calculer. S'il n'en avait pas été conscient, il n'aurait pu dire ceci. Bien sûr que nous avons tous cette propension à calculer. Nous avons toutes sortes d'inclinations. Dans n'importe quelle situation réelle nous avons des penchants qui nous conduisent simultanément dans plusieurs directions différentes, contradictoires. Personne n'est plus réel qu'un autre. La vraie question est : que prenons nous comme fondation pour notre humanité ? Qui pourrait alors constituer la base de notre civilisation.

Auteur: Graeber David

Info: Dette, les 5000 premières années

[ solidarité ] [ détachement ]

 

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insomnie

De tous les plaisirs délicieux que mon corps a commencé à me refuser, le sommeil est le plus précieux, le don sacré qui me manque le plus. Le sommeil sans repos m’a laissé sa suie. Je dors par fragments, quand j’arrive à dormir. Lorsque j’envisageais la fin de ma vie, je ne m’attendais pas à passer chaque nuit dans l’obscurité de ma chambre, les paupières à demi ouverts, calée sur des coussins ratatinés, à tenir salon avec mes souvenirs.
Le sommeil seigneur de tous les dieux et de tous les hommes. Ah, être le flux et le reflux de la vaste mer. Quand j’étais plus jeune, je pouvais dormir n’importe où. Je pouvais m’étaler sur un canapé, m’y enfoncer, l’obligeant à m’accueillir en son sein, et disparaître dans les enfers somnolents. Dans un océan luxurieux je plongeais, dans ses profondeurs je m’abîmais.
Virgile appelait le sommeil frère de la mort, et Isocrate avant lui. Hypnos et Thanatos, fils de Nyx. Cette façon de minimiser la mort est peu imaginative.
"Il est tout aussi indigne, de la part d’un homme pendant, de croire que la mort est un sommeil", a écrit Pessoa. La règle de base du sommeil est que l’on s’en éveille. Le réveil est-il alors une résurrection ?
Sur un canapé, sur un lit, sur une chaise, je dormais. Les rides s’évanouissaient de mon visage. Chaque silencieux tic-tac de l’horloge me rajeunissait. Pourquoi donc est-ce à l’âge où l’on a le plus besoin des vertus curatives d’un sommeil profond qu’on y accède avec le plus de mal ? Hypnos dépérit tandis que Thanatos approche.
Quand je songeais à la fin de ma vie, je n’envisageais pas que je passerais des nuits sans sommeil à revivre mes années antérieures. Je n’avais pas imaginé que je regretterais autant la librairie.
Je me demande parfois à quel point ma vie aurait été différente si je n’avais pas été embauchée ce jour-là.

Auteur: Alameddine Rabih

Info: Les vies de papier, Page 32

[ vieillesse ]

 

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différence sexuelle

Avec le développement autocratique de la science absolue, la question féministe ne se posa même plus. La vie se prolongea indéfiniment par le remplacement progressif des différentes parties du corps. Les hommes ne mouraient plus, un peu comme autrefois du reste, que s’ils le voulaient bien, et les maladies étaient désormais inconnues.

On avait développé, en effet, d’une façon particulière, ce sens très ancien que l’on appelait jadis l’instinct chez les animaux, l’instinct de la conservation physique chez l’homme et qui n’est autre chose qu’une vue intérieure que nous avons des différents phénomènes qui se passent dans notre corps, une prescience certaine des dangers que peuvent lui faire courir tels ou tels germes étrangers.

Lorsque cette vue intérieure fut développée au plus haut point, comme il convenait, les maladies les plus graves furent arrêtées dès leur début. Pour la première fois, lorsqu’il n’y eut plus de médecins, la médecine fut autre chose que du charlatanisme et l’on n’eut plus recours aux vagues indications d’un empirisme inconscient, comme on l’avait fait jadis.

Tout naturellement la question de reproduction de l’espèce devint également sans intérêt. Les femmes ne se distinguant plus des hommes par leurs travaux et leurs occupations, elles ne s’en distinguèrent même plus bientôt par le costume. Elles furent les androgynes primitifs décrits par les religions antiques.

C’est assez dire que l’idée même de la maternité leur devint absolument étrangère.

Au surplus, grâce à des mesures énergiques prises dès le moment de la naissance par les savants du Grand Laboratoire Central, tout ce qui faisait jadis la préoccupation principale et la joie de l’humanité, devint une chose définitivement inconnue et profondément méprisée par des êtres scientifiques qui ne pouvaient connaître par eux-mêmes ce dont on leur parlait et qui considéraient l’amour comme un souvenir historique, comme une déchéance animale intéressant uniquement l’histoire naturelle et ne relevant que des simples recherches anatomiques.

Auteur: Pawlowski Gaston de

Info: Voyage au pays de la quatrième dimension, Flatland éditeur, 2023, page 228-230

[ discours scientifique ] [ indifférenciation ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

détachement

Dès le lendemain matin, je me mis à faire les petites annonces ; il fallait plutôt chercher dans les quartiers sud, pour le travail de Valérie. Une semaine plus tard, j’avais trouvé : c’était un grand quatre-pièces au trentième étage de la tour Opale, près de la porte de Choisy. Je n’avais jamais eu, auparavant, de belle vue sur Paris ; je ne l’avais jamais tellement recherché non plus, à vrai dire. Au moment du déménagement, je pris conscience que je ne tenais à rien de ce qui se trouvait dans mon appartement. J’aurais pu en tirer une certaine joie, ressentir quelque chose qui s’apparente à l’ivresse de l’indépendance ; j’en fus au contraire légèrement effrayé. Ainsi, j’avais pu vivre quarante ans sans établir le moindre contact un tant soi peu personnel avec un objet. J’avais en tout et pour tout deux costumes, que je portais à tour de rôle. Des livres, oui, j’avais des livres ; mais j’aurais pu facilement les racheter, aucun d’entre eux n’avait quoi que ce soit de précieux ni de rare. Plusieurs femmes avaient croisé mon chemin ; je n’en conservais aucune photo, ni aucune lettre. Je n’avais pas non plus de photos de moi : ce que j’avais pu être à quinze, vingt ou trente ans, je n’en gardais aucun souvenir. Pas non plus de papiers véritablement personnels : mon identité tenait en quelques dossiers, aisément contenus dans une chemise cartonnée de format usuel. Il est faux de prétendre que les êtres humains sont uniques, qu’ils portent en eux une singularité irremplaçable ; en ce qui me concerne, en tout cas, je ne percevais aucune trace de cette singularité. C’est en vain, le plus souvent, qu’on s’épuise à distinguer des destins individuels, des caractères. En somme, l’idée d’unicité de la personne humaine n’est qu’une pompeuse absurdité. On se souvient de sa propre vie, écrit quelque part Schopenhauer, un peu plus que d’un roman qu’on aurait lu par le passé. Oui, c’est cela : un peu plus seulement.

Auteur: Houellebecq Michel

Info: Plateforme

[ vie morne ] [ terne existence ]

 
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insomnie

Le "cauchemar" se manifeste durant la phase de sommeil paradoxal.
Les cauchemars et mauvais rêves sont généralement le signe chez le rêveur d'une angoisse liée à une peur récente. Ils peuvent être aussi causés par une maladie ponctuelle, par des douleurs chroniques ou plus simplement par une mauvaise digestion ; ils parlent alors, dans la majorité des cas, d'un événement (presque) anodin et récent ou plus lointain.
Dans d'autres cas, cauchemars et mauvais rêves sont en lien avec une tension psychique présente dans la vie quotidienne, ou encore sont attachés au souvenir d'un événement traumatisant (accident, rupture, perte d'un être cher ...) : ils sont alors généralement récurrents et répétitifs.
Mais dans tous les cas, le rêveur se réveille mal à l'aise, souvent le coeur battant, parfois en nage, apeuré, voire désorienté.
Il est aujourd'hui prouvé, nous disent les pédiatres, que les enfants font plus de cauchemars que les adultes. La raison en est simple : le bébé ou le jeune enfant est dans une phase d'apprentissage de la vie et rencontre tous les jours de nouveaux sons, images, sensations, odeurs, émotions plus ou moins fortes.
La période de sommeil lui permet alors de "gérer" et/ou "d'éliminer" ce trop-plein d'information accumulé quotidiennement par son cerveau. (...)
Les cauchemars perturbent le fonctionnement psychologique pendant la journée. Les affronter permettra une évolution vers des rêves moins menaçants et donc, un sommeil plus serein.
Certains psys n'hésitent pas à dire même que c'est là un très bon moyen de dépasser ses peurs et de faciliter sa propre évolution spirituelle.
La méthode la plus simple demande de prendre quelques minutes, tous les soirs avant de s'endormir, de se placer dans une ambiance olfactive favorable en choisissant une ou deux huiles essentielles aux vertus apaisantes pour le psychisme, et de visualiser ou d'écrire le scénario du cauchemar récurrent, mais en changeant son déroulement ; ainsi, en réinventant l'histoire soir après soir, l'inconscient enregistre le nouveau scénario plus positif.

Auteur: Gérault Guillaume

Info: Retrouver le sommeil

[ thérapie ] [ songe ]

 

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deuil

Il m'arrive souvent Denis de ne pas être assez dans l'instant, je suis avec tes soeurs et te frères mais mes pensées s'évadent vers toi. Je m'en veux, je n'ai pas envie de passer à côté de ces moments précieux de confidences et de partages. Ta mort m'a appris à ne rien perdre de la vie, j'ai besoin de profiter de chaque instant, je prends conscience qu'il faut que je prenne garde à ne pas leur donner le sentiment qu'ils sont abandonnés, ou moins aimés, ils ont tellement besoin d'être entourés. Je ne compte plus les nuits sans dormir entre ton petit rère qui pleure tout le temps et toi Denis qui acapare mon esprit. Il me reste peu de place de repos, les biberons, les caresses pour apaiser ton frère mais pour l'instant je n'ai pas de solution pour toi alors, rendors-toi petit ogre ou je ne tiendrais pas le coup.
Prélude au printemps cette année encore les jonquilles colorent nos forêts et nos champs, comment ne pas penser à toi quand la nature évoque tout ton être, je te revois confectionnant de petites bottes de fleurs que tu déposais dans un seau ou une bouillette pour ensuite ensoleiller chaque pièce de la maison et celle de bien d'autres villageois. Ce geste gratuit te récompensais toujours et tu revenais bien souvent les poches remplies de bonbons et de chocolat. Aujourd'hui mes pensée me guident vers cet endroit si souvent convoité et où tes soeurs et toi avaient passés de sublimes instants. Ce tableau reste vivant et égaie mon coeur. Dans cet écrin de verdur mes émotions se bousculent et laissent échapper quelques perles de larmes. Assis dans les lumières te voilà, délicieux petit homme, dans ce champs, tout de jaune vêtu, ta main vive d'enfant cueille avec coeur de délicates petittes fleurs, je grave dans ma mémoire la saveur de l'instant, aujourd'hui tendrement je dépose sur ta tombe ce bouquet de jonquilles aux couleurs du printemps.

Auteur: Bauwens Pascale

Info: Petit Ogre: Témoignage sur le suicide chez l'enfant

[ souvenirs ]

 

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cité imaginaire

À Maurilia, le voyageur est invité à visiter la ville et, en même temps, à regarder de vieilles cartes postales qui la représentent telle qu'elle était auparavant : exactement le même endroit avec une poule à la place de la gare routière, le pupitre à la place du viaduc, deux jeunes femmes avec des parasols blancs à la place du viaduc, deux jeunes femmes avec des parasols blancs à la place de l'usine d'explosifs. Pour ne pas décevoir les habitants, il est nécessaire que le voyageur fasse l'éloge de la ville dans les cartes postales et la préfère à l'actuelle, en veillant toutefois à contenir son regret des changements dans des règles précises : Reconnaissant que la magnificence et la prospérité de Maurilia en tant que métropole, par rapport à l'ancienne Maurilia provinciale, ne compensent pas une certaine grâce perdue, qui ne peut être appréciée aujourd'hui que sur les vieilles cartes postales, alors qu'avant, avec la Maurilia provinciale en vue, on ne voyait rien de gracieux, et on le verrait encore moins aujourd'hui, si Maurilia était restée telle quelle, et que de toute façon la métropole a cet attrait supplémentaire, qu'à travers ce qu'elle est devenue on peut penser avec nostalgie à ce qu'elle était. Gardez-vous de leur dire que parfois des villes différentes se succèdent sur le même sol et sous le même nom, naissent et meurent sans s'être connues, incommunicables entre elles. Parfois même les noms des habitants restent les mêmes, et les accents de leurs voix, et même les traits de leurs visages ; mais les dieux qui habitent sous les noms et sur les lieux sont partis sans rien dire, et à leur place se sont nichés des dieux étrangers. Il est vain de se demander s'ils sont meilleurs ou pires que les anciens, puisqu'il n'y a aucun rapport entre eux, tout comme les anciennes cartes postales ne représentent pas Maurilia telle qu'elle était, mais une autre ville qui s'est appelée Maurilia comme celle-ci.

Auteur: Calvino Italo

Info: Villes invisibles

[ souvenirs ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

droits des minorités

Il ne faut pas perdre une minute à batailler contre la revendication du "mariage homosexuel". C’est une de ces nouveautés innovantes comme notre temps en raffole, une de ces avancées qui vont de l’avant sans craindre d’aller plus loin que loin, un de ces progrès inéluctables qui ont le vent du futur dans les voiles. [...]

Quant à la contradiction comique mais classique à la faveur de laquelle on veut, comme Christophe Girard et Clémentine Autain, placer sous la protection de l’État une union homosexuelle dont on dit qu’elle sera aussi et surtout "un pied de nez à la conception traditionnelle du mariage", ce serait également perdre son temps que de la relever, quand la course à l’avenir prend les formes d’une marche nuptiale dadaïste qui réclame d’être bénie par les plus hautes autorités au nom de l’égalité. [...]

Sans compter, ainsi que l’écrit un militant de cette magnifique conquête, qu’il n’existe aucun motif rationnel pour l’interdire. Il en existe si peu qu’on se demande pourquoi, dans les siècles des siècles, personne n’avait encore songé à l’autoriser. Il est vrai que les grandes révolutions engloutissent dans leur triomphe jusqu’au souvenir des raisons qui auraient pu les arrêter.

Il est vrai aussi qu’on n’avait pas jusqu’alors pensé à mettre le nez dans les silences du code civil. Providentiels silences d’un code qui a oublié de préciser ce qui lui semblait aller de soi. Ainsi de l’article 144 relatif au mariage, qui ne stipule pas qu’il faut que cela se passe entre personnes du sexe opposé. Une lacune béante dont les partisans du mariage homo ont fait leur premier argument de campagne sur la base d’un principe simple : tout ce dont le code ne parle pas n’est pas interdit. La chose semble en effet irréfutable. On pourrait même la généraliser. Et noter que le code ne mentionne pas non plus qu’il est interdit de se marier avec un bégonia, une onde hertzienne ou un œuf dur.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 4", Les Belles Lettres, Paris, 2010, pages 1586-1587

[ progressisme ] [ appui législatif délirant ] [ pouvoir minoritaire ]

 

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philosophie hégélienne

La Phénoménologie de l’Esprit montre la structure de la raison comme structure de la domination et comme dépassement de cette domination. La raison se développe à travers le développement de la conscience de soi de l’homme qui triomphe de la nature et du monde historique et en fait le matériau de sa propre réalisation. […]

Mais la Phénoménologie de l’Esprit ne serait pas l’auto-interprétation de la civilisation occidentale si elle n’était rien de plus que le développement de la logique de la domination. La Phénoménologie de l’Esprit conduit au dépassement de cette forme de liberté qui provient de la relation antagonique avec l’autre. Et le vrai mode de liberté n’est pas l’activité incessante de la conquête, mais la cessation de cette activité, dans la connaissance limpide et la satisfaction de l’être.  […]

Tout au long de la Phénoménologie de l’Esprit, la tension entre le contenu ontologique et le contenu historique demeure : les manifestations de l’esprit sont les étapes principales de la civilisation occidentale, mais ces manifestations historiques restent entachées de négativité, l’esprit ne revient à lui que dans le savoir absolu et en tant que savoir absolu. C’est en même temps la forme vraie de la pensée et la forme vraie de l’être. L’être est dans son essence même raison. Mais la forme la plus haute de la raison est, pour Hegel, presque à l’opposé de la forme existante : elle est plénitude atteinte et conservée, unité transparente du sujet et de l’objet, de l’universel et de l’individuel, une unité dynamique plutôt que statique, dans laquelle tout devenir est une auto-extériorisation libre (Selbst-Entäusserung), une libération et une jouissance des potentialités. Le travail de l’histoire trouve sa fin dans l’histoire : l’aliénation disparaît, et avec elle la transcendance et le flux du temps. L’esprit "dépasse" sa forme temporelle ; il nie le Temps. Mais la "fin" de l’histoire se ressaisit de son contenu : la force qui accomplit la conquête du temps est la mémoire (recollection du souvenir). […]

L’être n’est plus la transcendance douloureuse vers l’avenir, mais la reconquête pacifique du passé.

Auteur: Marcuse Herbert

Info: Dans "Eros et civilisation", trad. de l'anglais par Jean-Guy Nény et Boris Fraenkel, éditions de Minuit, Paris, 1963, pages 105-108, à propos d'un ouvrage de Hegel

[ résumé ] [ souvenir ] [ ouroboros ] [ appartenance lucide ]

 
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Ajouté à la BD par miguel