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éloge

Sa prétention à une érudition profonde et obscure, ses entreprises gaffeuses en pseudo-humour guindé et travaillé, ses éclats et préjugés critiques, souvent au vitriol, doivent tous être reconnus et pardonnés. Par-dessus et au-delà, les rapetissant jusqu'à l'insignifiance, il y avait une vision maîtresse de la terreur qui nous oppresse de l'intérieur et de l'extérieur, du ver qui se tord et bave dans ces abîmes si hideusement proches. Pénétrant toutes les horreurs purulentes de cette gaie et moqueuse toile nommée existence, cette solennelle mascarade des sentiments de la pensée humaine, cette vision eut le pouvoir de se transmuter et se projeter en de noires cristallisations magiques, jusqu'à ce qu'elles fleurissent dans la stérile Amérique des années mille huit cent trente et quarante, comme de ces jardins nourris par la lune, tapissés de magnifiques champignons vénéneux dont même la plus sombre et profonde pente de Saturne n'oserait se vanter.

Auteur: Lovecraft Howard Phillips

Info: Eldritch Tales, A Miscellany of the Macabre, à propos d'Edgar Allan Poe. Trad. Mg

[ ténébreux ] [ sinistre ] [ lugubre ] [ littérature ]

 

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nostalgie

Retournée, mise en place et contemplée enfin sans blasphèmes ni marchandage, cette toile (Un village breton sous la neige) devenait un paysage breton, village d'hiver sous la neige : quelques maisons de chaume épaulent la ligne d'horizon et se pressent autour du clocher juste central. A gauche, une falaise violette tombe vers un ciel de crépuscule. A droite filent des arbres maigres. Tout le sol est fait de neige, ruisselant de lumières fondues, magnifique pelage bleu et rose, fourrure sur le sol froid. C'est donc cela que le Peintre, en mourant, recréait avec nostalgie ? Sous les soleils de tous les jours, le suscitateur des dieux chauds voyait un Village breton sous la neige ! Cette toile, je l'ai gardée. Le don même en serait injurieux, Gauguin mourut en la peignant, c'est un legs. Seule de tant d'autres, elle se signe de l'absence du nom.

Auteur: Segalen Victor

Info: Dans "Premiers écrits sur l'art (Gauguin, Moreau, Sculpture)"

[ compensation ] [ oeuvre oubliée ] [ art pictural ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

gêne

- Le roi du baby-foot, dit Beatriz Gonzalez en appuyant son petit doigt sur la toile cirée. Qu'est-ce qu'on vous sert ?
Mario demeura le regard rivé sur ses yeux et pendant une demi-minute il tenta d'obtenir de son cerveau qu'il lui donne les informations minimales pour survivre au choc qui l'anéantissait : qui suis-je, où suis-je, comment fait-on pour respirer, comment fait-on pour parler ?
La fille eut beau répéter : "Qu'est-ce qu'on vous sert ?" en tambourinant sur la table toute la gamme de ses doigts fragiles, Mario Jimenez ne parvint qu'à s'enfoncer dans son silence. Alors Beatriz Gonzalez dirigea son regard impérieux vers son compagnon et formula, d'une voix modulée par cette langue qui fulgurait entre les dents généreuses, une question que Neruda eût considérée comme de routine en d'autres circonstances :
- Et pour vous, qu'est-ce que ça sera ?
- La même chose que lui, répondit le barde.

Auteur: Skármeta Antonio

Info: Une ardente patience

[ humour ] [ dialogue ]

 

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labeur

Août dans la buanderie. La poussiéreuse lumière argentait les cactus en pots enrobés de toiles d'araignées. Sueur. Bassines grattées au couteau. Vapeurs de Javel qui brûlent les yeux. Sueur sur le carrelage, sur le rouge, le bleu, belles couleurs qui ressurgissent. Gouttes qui se noient, se diluent dans la lavasse. L'eau jetée à pleins seaux dans le trou d'égout, sous le mur, au fond de la cour. Il fallut tout d'abord ramoner avec une de ces tiges de fer dont on arme le ciment, forer les gravats, l'étoupe, après quoi de l'autre côté, vérifier que l'eau s'écoulait bien dans la rigole de la ruelle, la "rouette" comme elle dit. L'eau stagnait encore, la flaque lentement baissait de niveau. Enfin sur la marche, repos, les mains entre les genoux, comme autrefois à la nuit tombante, quand la chose la plus délicieuse était de lire sur cette marche, à l'orée du couloir, sous un carré de ciel bleuissant, strié de vols d'hirondelles.

Auteur: Bassez Danielle

Info: L'égarée, Cheyne Editeur, Collection Grands Fonds, p. 10 et 11

[ littérature ]

 

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beaux-arts

Mon goût cinématographique n'est pas d'origine cinématographique, mais pictural. Les images, les champs visuels que j'ai dans la tête, ce sont les fresques de Masacio, de Giotto - les peintres que j'aime le plus, avec certains maniéristes (comme, par exemple, Pontormo). Je n'arrive pas à concevoir des images, des paysages, des compositions de figures, en dehors de ma passion fondamentale pour cette peinture du Trecento, qui place l'homme au centre de toute perspective. Quand mes images, donc, sont en mouvement, elles sont en mouvement un peu comme si l'objectif se déplaçait devant un tableau : je conçois toujours le fond comme le fond d'un tableau, comme un décor, c'est pour cela que je l'attaque toujours de front. Et les figures se déplacent sur cette toile de fond de façon toujours symétrique, à chaque fois que c'est possible : gros plan contre gros plan, panoramique-aller contre panoramique-retour, rythmes réguliers (ternaires, si possibles) des plans, etc. Il n'y a presque jamais de montage gros plans/plans généraux.

 

Auteur: Pasolini Pier Paolo

Info: Texte écrit lors du tournage de "Mamma Roma" (1962), et cité dans les Cahiers du cinéma, hors-série n°9, 1981 - cité dans "Passage du cinéma", éd. Ansedonia, p. 191

[ art italien ] [ forme picturale ] [ structure filmique ] [ influences ]

 

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Ajouté à la BD par Benslama

créativité

Je préfère toujours que mes toiles soient dans un cadre et sous verre. C’est une idée d’aujourd’hui qui veut qu’on n’encadre plus les tableaux, mais j’ai l’impression que par rapport à ce que c’est que la peinture, c’est une idée fausse. Le cadre, c’est quelque chose d’artificiel, et il est là précisément pour renforcer l’aspect artificiel de la peinture. Plus l’artifice des tableaux qu’on réalise est apparent, mieux cela vaut, et même, plus la toile a des chances de marcher, de montrer quelque chose. Cela peut paraître paradoxal, mais c’est une évidence en art : on atteint son but par l’emploi du maximum d’artifice, et l’on parvient d’autant plus à faire quelque chose d’authentique que l’artificiel est patent. Prenez par exemple les poètes grecs ou classiques, leur langue était très artificielle, très construite. Tous, ils travaillaient à l’intérieur d’un cadre très contraignant, cela représentait une soumission considérable, et c’est pourtant ainsi qu’ils ont donné leurs plus grands chefs-d’œuvre, ceux qui nous donnent à nous lecteurs cette impression de liberté et de création maximales

Auteur: Bacon Francis II

Info: Entretiens, p 140-1

[ dépassement ] [ sujétion ] [ oulipo ] [ fond-forme ]

 

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Ajouté à la BD par Plouin

portrait

Mais la plus aimable convive était la jeune duchesse de D…, dont l’esprit alerte et clair, jamais inquiet ni troublé, contrastait si étrangement avec l’incurable mélancolie de ses beaux yeux, le pessimisme de ses lèvres, l’infinie et noble lassitude de ses mains. Cette puissante amante de la vie sous toutes ses formes, bonté, littérature, théâtre, action, amitié, mordait sans les flétrir, comme une fleur dédaignée, ses belles lèvres rouges, dont un sourire désenchanté relevait faiblement les coins. Ses yeux semblaient promettre un esprit à jamais chaviré sur les eaux malades du regret. Combien de fois, dans la rue, au théâtre, des passants songeurs avaient allumé leur rêve à ces astres changeants ! Maintenant la duchesse, qui se souvenait d’un vaudeville ou combinait une toilette, n’en continuait pas moins à étirer tristement ses nobles phalanges résignées et pensives, et promenait autour d’elle des regards désespérés et profonds qui noyaient les convives impressionnables sous les torrents de leur mélancolie. Sa conversation exquise se parait négligemment des élégances fanées et si charmantes d’un scepticisme déjà ancien. 

Auteur: Proust Marcel

Info: Un dîner en ville

[ contrastes ] [ femme captivante ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

autoportrait

[…] Vermeer semble bien s’être peint une fois, par un jeu de double miroir : dans cette toile sans nom précis, aujourd’hui appelée l’Atelier. Mais de dos, comme un peintre quelconque, qui pourrait être n’importe quelle autre personne occupée à sa toile. Rien, dans le costume, la taille, l’attitude du peintre, qui puisse être regardé comme signe distinctif, rien donc qui fasse état d’une complaisance quelconque du peintre à l’égard de sa propre personne. Dans le même temps cet Atelier – comme toutes les toiles de Vermeer – semble riche d’un bonheur d’exister qui irradie de toutes parts et saisit d’emblée le spectateur, et qui témoigne d’une jubilation perpétuelle au spectacle des choses : à en juger par cet instant de bonheur, on se persuade aisément que celui qui a fait cela, s’il n’a fixé dans sa toile qu’un seul moment de sa joie, en eût fait volontiers autant de l’instant d’avant comme de l’instant d’après. Seul le temps lui a manqué pour célébrer tous les instants et toutes les choses.

Auteur: Rosset Clément

Info: "Le réel et son double" in L'école du réel, page 70

[ interprétation ] [ émotion ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

habitude

Cet isolement forcé lui fit prendre conscience qu'il avait passé la majorité de sa vie enfermé, comme la plupart des gens.
Une routine de l'emprisonnement volontaire devenue inconsciente.
Le matin, on quittait sa maison pour se rendre en voiture au travail avant de retourner se confiner dans sa prison personnelle. Oh certes, il arrivait qu'on sorte faire du sport dans une "salle" sur des vélos immobiles ou des tapis roulants. Et lorsque l'on avait besoin de décompresser, où se rendait-on ? Parfois au cinéma, les yeux concentrés sur une toile, au milieu de quatre murs, parfois boire un coup dans un pub, et parfois en boîte, terme suffisamment explicite pour être développé.
Tous les prétextes étaient bons pour justifier sa propre captivité. En hiver, il faisait trop froid, en été, trop chaud (même si cette disposition tendait à s'effacer à cause du réchauffement climatique), et en automne ou au printemps, on se plaignait de la pluie ou du vent. Pas étonnant que certains détenus de longue date ne puissent quitter les barreaux rassurants de leur cellule.
On cultivait sa propre captivité.
Pire, il nous arrivait même de l'acheter.

Auteur: Gaulon Pierre

Info: Enragés

[ cachot ] [ renoncement ] [ train-train ]

 

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désintéressement

Spinoza était si sobre qu'il ne buvait généralement pas plus d'une pinte de vin par mois. On voit, par différents comptes trouvés dans ses papiers, dit son biographe Colerus, qu'il a vécu un jour entier d'une soupe au lait accommodée avec du beurre, ce qui lui revenait à trois sous, et d'un pot de bière d'un sou et demi. Un autre jour, il n'a mangé que du gruau apprêté avec des raisins et du beurre, et ce plat lui avait coûté quatre sous et demi.
Afin de pouvoir se livrer en paix à ses spéculations philosophiques, il apprit l'art de tailler des verres d'optique, et il partageait son temps entre l'étude et la fabrication de ces verres. Quand il était las et qu'il voulait se relâcher l'esprit, il cherchait des araignées, qu'il faisait lutter ensemble, et des mouches qu'il jetait dans la toile d'araignée, et regardait ensuite cette bataille avec tant de plaisir qu'il éclatait quelquefois de rire. Il refusa plusieurs fois les dons et les legs qu'on lui voulait faire; cependant Jean de Witt l'avait forcé d'accepter une rente de deux cents florins ; mais ses héritiers, faisant difficulté de continuer cette rente, Spinoza leur mit son titre entre les mains avec une si tranquille indifférence qu'ils rentrèrent en eux-mêmes.

Auteur: Saisset Émile-Edmond

Info: Précurseurs et disciples de Descartes

[ philosophie ] [ ascétisme ] [ anecdote ]

 

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