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distraction
Ce qui est propre à la photographie et proprement fascinant en elle tient au fait qu’elle réunit deux des principales activités d’aujourd’hui : la reproduction et l’acquisition. A quoi il faut ajouter le fait que ce qu’on acquiert ainsi [...] ne coûte que le prix des ustensiles nécessaires à cette acquisition, puisque ce que le photographe acquiert (en l’occurrence la vue) se tient gratuitement à sa disposition, ce qui constitue dans notre monde marchand une fabuleuse exception. Ce n’est bien sûr pas un hasard si "appuyer sur le déclencheur" se dit en anglais "to shoot" (tirer) comme si le sujet de la photo était un gibier. Ce qui est fascinant dans la photographie, c’est, en fin de compte, qu’elle est à la fois une acquisition et quelque chose de funny, c’est-à-dire un loisir qui convient aux analphabètes du loisir parce qu’il prend ouvertement l’apparence d’une occupation et souvent même d’un travail, bref, parce qu’il se présente comme un hobby. Le hobby appartient lui aussi à la problématique du fantomatique puisqu’il est un délassement qui joue au travail ou un travail exécuté dans le but de se délasser du travail.
Auteur:
Anders Günther Stern
Années: 1902 - 1992
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain et philosophe de la culture
Continent – Pays: Europe - Autriche
Info:
Dans "L'obsolescence de l'homme", trad. de l'allemand par Christophe David, éditions Ivrea, Paris, 2002, page 207
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critique
]
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possession
]
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effigie
]
labeur dominical
Il est de coutume en Louisiane, comme je suppose dans les autres États esclavagistes, d’autoriser les esclaves à conserver tout salaire obtenu pour un travail accompli le dimanche. C’est leur unique moyen de s’offrir des articles de luxe ou de simple nécessité. Lorsqu’un esclave, acheté dans le Sud ou kidnappé dans le Nord, est amené dans une cabane de Bayou Bœuf, on ne lui donne ni couteau, ni fourchette, ni vaisselle, ni bouilloire, ni pots, ni meubles d’aucune sorte. Il reçoit une couverture avant son arrivée et, une fois qu’il s’en est enveloppé, il a le choix entre dormir debout et s’allonger à même le sol ou sur une planche, si toutefois elle n’est d’aucun usage à son maître. Il est entièrement libre de ramasser une coloquinte pour y conserver ses repas, ou de manger son maïs directement sur l’épi, selon son bon plaisir. S’il osait demander à son maître un couteau, une casserole ou un ustensile quelconque, il se ferait frapper ou rire au nez. Les articles indispensables que l’on trouve dans les cabanes des esclaves ont tous été achetés avec de l’argent gagné le dimanche. Même si la morale s’en trouve offensée, c’est une bénédiction pour les esclaves d’avoir le droit de rompre le sabbat. Ils n’auraient sans cela aucun moyen de se procurer des ustensiles, indispensables pour qui doit cuisiner.
Auteur:
Northup Solomon
Années: 1808 - 1857
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: mulâtre afro-américain né libre. Son père de Solomon, Mintus Northup, fut un esclave afro-américain qui a passé la première partie de sa vie au service de la famille Northup.
Continent – Pays: Amérique du nord - Usa
Info:
Esclave pendant 12 ans
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privilège
]
[
servitude
]
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auto-décomposition
]
peintre
Cet Arcimboldo, qui opérait en partie à la cour du fameux Rodolphe II de Bohême qui a laissé d’autres traces dans la tradition de l’objet rare, se distingue par une technique singulière, qui a porté son dernier surgeon dans l’œuvre de mon vieil ami Salvador Dali, dans ce qu’il a appelé le dessin paranoïaque. Ayant, par exemple, à représenter la figure du bibliothécaire de Rodolphe II, Arcimboldo le fait par un échafaudage savant des ustensiles premiers de la fonction du bibliothécaire, à savoir des livres, disposés sur le tableau de façon que l’image d’un visage soit, plus encore que suggérée, vraiment imposée. Ou encore le thème symbolique d’une saison, incarnée sous la forme d’un visage humain, sera matérialisé par les fruits de cette saison, dont l’assemblage sera réalisé de telle sorte que la suggestion d’un visage s’imposera également dans la forme réalisée.
Bref, ce procédé maniériste consiste à réaliser l’image humaine dans sa figure essentielle par la coalescence, la combinaison, l’accumulation, d’un amas d’objets, dont le total sera chargé de représenter ce qui dès lors se manifeste à la fois comme substance et comme illusion. En même temps que l’apparence de l’image humaine est soutenue, quelque chose est suggéré, qui s’imagine dans le dés-ensemblement des objets. Ces objets qui ont en quelque sorte une fonction de masque, montrent en même temps la problématique de ce masque.
Auteur:
Lacan Jacques
Années: 1901 - 1981
Epoque – Courant religieux: récent et libéralisme économique
Sexe: H
Profession et précisions: psychanalyste
Continent – Pays: Europe - France
Info:
Dans le "Séminaire, livre VIII - Le transfert" page 279-280
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description
]
[
interprétation
]
[
art pictural
]
hommes anciens
Je pense aux gestes oubliés, aux multiples gestes et propos de nos ancêtres, tombés peu à peu en désuétude, dans l’oubli, tombés un à un de l’arbre du temps. J’ai trouvé ce soir une bougie sur une table, et pour m’amuser je l’ai allumée et j’ai fait quelques pas avec elle dans le couloir. Elle allait s’éteindre quand je vis ma main gauche se lever d’elle-même, se replier encre, protéger la flamme par un écran vivant qui éloignait les courants d’air. Tandis que la flamme se redressait, forte de nouveau, je pensais que ce geste avait été notre geste à tous (je pensais tous et je pensais bien, ou je sentis bien) pendant des milliers d’années, durant l’Âge du Feu, jusqu’à ce qu’on nous l’ait changé par l’électricité. J’imaginais d’autres gestes, celui des femmes relevant le bas de leurs jupes, celui des hommes cherchant le pommeau de leur épée. Comme les mots disparus de notre enfance, entendus pour la dernière fois dans la bouche des vieux parents qui nous quittaient l’un après l’autre. Chez moi personne ne dit plus "la commode en camphrier", personne ne parle plus des "trépieds". Comme les airs de l’époque, les valses des années vingt, les polkas qui attendrissaient nos grands-parents.
Je pense à ces objets, ces boîtes, ces ustensiles qu’on découvre parfois dans les greniers, les cuisines, les fonds de placards, et dont personne ne sait plus à quoi ils pouvaient bien servir. Vanité de croire que nous comprenons les œuvres du temps : il enterre ses morts et garde les clefs. Seuls les rêves, la poésie, le jeu — allumer une bougie et se promener avec elle dans le couloir — nous font approcher parfois de ce que nous étions avant d’être ce que nous ne savons pas si nous sommes.
Auteur:
Cortazar Julio
Années: 1914 - 1984
Epoque – Courant religieux: industriel
Sexe: H
Profession et précisions: écrivain
Continent – Pays: Amérique du Sud - Argentine
Info:
Marelle
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routines
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