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hypothèse

Les anorexiques sont souvent des jeunes filles […] ayant une perception aiguë des êtres et des choses, "prises" littéralement dans une faim qu’aucune nourriture ne pourra jamais assouvir. La faim, c’est la faim de l’Autre. D’un autre qui n’a pas été là pour vous apprendre à dire "je" et "tu", un autre dont l’indifférence, la cruauté ou l’état dépressif les a plongées bébé dans la prostration ou la sidération (l’évitement de la dépendance). Or la maîtrise que leur donne le fait de ne pas manger ou de se faire vomir […] est préférée au fait de supporter le poids de cette attente d’amour rendue vaine, parce que cela leur donne un pouvoir imaginaire. Le pouvoir fait comme si c’étaient elles qui ne voulaient pas de l’amour maternel, et non l’inverse. Alors qu’en réalité, elles vivent dans l’enfer quotidien de leurs crises l’impossible coupure du lien ombilical. Il faut un certain deuil en direction de la douleur et du manque pour inventer une figure autour de ce vide, de cette absence. C’est une réinvention du monde, semblable à celle que rencontre l’artiste dans son travail quotidien avec la matière, que demande le travail de guérison de ces jeunes femmes dont la faim ne pourra être assumée comme telle qu’à se reconnaître pour ce qu’elle est : sexuelle, mais aussi spirituelle.

Auteur: Dufourmantelle Anne

Info: Dans "La sauvagerie maternelle", pages 129-130

[ explication ] [ symptôme ] [ trouble du comportement alimentaire ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

inspiration

Je m'adresse aux esprits humains sublimes, qui se sont jamais trouvés en des moments pour ressentir un tel état, et je demande si, après la réalisation d'un grand rêve, vous n'avez pas été vous-mêmes étonnés devant votre propre travail et si vous n'avez pas adressé à votre propre conscience la demande :

- Est-ce moi qui ai fait cela ?

Eh bien, oui et non !

C'est vous en vérité qui avez travaillé ainsi, mais à votre Moi s'est mêlé un autre Moi, une autre force, qui a doublé en quelque proportion l'intensité de votre pensée individuelle.

Les Grecs anciens avaient aussi parfaitement la conscience de ce phénomène, et c'est pour cela qu'ils avaient consacré figurativement l'existence des neuf Muses, chacune exclusivement correspondant à chaque espèce de manifestation de l'esprit humain. Avant tout travail le noble travailleur intellectuel invoquait la Muse convenable, ou - pour être expliqué conformément aux termes de notre théorie - il lançait un courant de fluide N, qui attirait près de lui toute colonne N du vide (par le moyen de la coattraction de toute idée homogène et par l'attraction du pôle N du cerveau vers le pôle P de la colonne N du vide, à savoir du périsprit du Spirit) et ainsi l'idée humaine et l'idée spirituelle se fondaient en une et la même manifestation torrentueuse, comme il arrive même aujourd'hui aux hommes défiants et ingrats à cette assistance...

Auteur: Arcas Pol

Info: in "Le secret de la vie, traité original physiologique et psychologique" - Pol Arcas est, d'après le catalogue de la Bnf, le pseudonyme de Polynios Dimitrakopoulos - si quelqu'un a une définition du "périsprit", qu'il n'hésite à la donner - pour ma part, je n'ai pas assez avancé dans les subtilités de la théorie de Mr. Pol Arcas pour m'en être formé une notion claire...

[ explication scientifique ] [ mythe ] [ hypothèse nébuleuse ] [ méthodologie ]

 
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Ajouté à la BD par Benslama

faux érotisme

Ce qui fait toute la force austère, à vrai dire, d’une émission comme "Sophie sans interdit" sur TF1, le formidable côté sanitaire, hygiénique même, de ce "magazine de charme", réside dans la capacité de dissuasion sans bornes de son animatrice. La regarder cinq minutes, l’écouter surtout, et ça y est, c’est terminé, on a oublié jusqu’à ce qui restait de sens au mot volupté. Deux phrases d’elle en font plus pour vous convertir à l’abstinence que toutes les lourdes et lentes campagnes d’information possibles et imaginables. Une telle niaiserie pétrifiante a quelque chose de miraculeusement prophylactique et humanitaire. La moindre de ses remarques vous glace le fantasme. En nos temps de virus meurtrier, on devrait la montrer tous les jours, Sophie Favier. Ce n’est pas qu’elle soit pénible à regarder, bien au contraire, elle est plutôt alléchante, comme ça, en péplum, avec sa torchère blonde allumée au-dessus de la tête, ou en collant de danse en train de mimer péniblement, avec je ne sais plus quelle chorégraphe, une "leçon d’érotisme" sous vide. Mais tout ce qu’elle fait ou montre n’éveille jamais rien en vous qu’un vague effroi, et en tout cas pas le moindre souvenir de ce qu’ont pu être, jadis, il y a très longtemps, les plaisirs de la chair. Aucune hostilité non plus. On en sort, hébété, comme après une visite morne dans un écomusée lamentable, une espèce de Disneyland en ruine, un conservatoire analphabète, des arts et traditions sexuels disparus. Comme le reste, à la télé, le sexe a l’allure de ces manifestations dispersées depuis des éternités et dont il ne subsiste plus, sur place, que des banderoles abandonnées avec leurs slogans indéchiffrables. 

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 2 : Mutins de Panurge", éd. Les Belles lettres, Paris, 1998, page 459

[ critique ] [ débandant ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

spiritualité

En Indonésie, il y a le Temple de Borobodur. Sous le regard de bouddhas assis, abrités dans des niches puis dans des stupas en forme de cloche, le pèlerin parcourt en montant 3 kilomètres de corridors et d’escaliers au long desquels des bas-reliefs dépeignent, de manière détaillée et imagée, les grandes étapes du cheminement spirituel. Le soubassement carré, symbolisant la terre, représente le monde du désir, celui où nous vivons ici et maintenant, séduits par toutes sortes de distractions. On traverse, au fil des cinq terrasses suivantes, également carrées, le rupadhatu, le monde de la forme, et les cinq premiers stades conduisant à l’éveil. En gravissant les trois plateformes circulaires et concentriques, symbolisant le ciel, on progresse vers l’arupadhatu, le monde sans forme, qu’atteignent les êtres pleinement éveillés, les bouddhas. Leurs statues, à ces niveaux, contemplent sereinement les collines environnantes par les ouvertures des stupas. Chaque bouddha est représenté dans une posture qui lui est propre et faisant un geste de la main, ou mudra, caractéristique.
Le stupa principal, couronnant le sommet, couvre deux chambres vides, les seuls espaces intérieurs de tout le monument. Ces derniers abritaient-ils des statues de Bouddha ou des reliques sacrées qui ont été pillées, ou symbolisent-il la vacuité du nirvana et la libération ultime du cycle de renaissance et de mort, le samsara, où sont piégés les êtres sensibles, tant qu’ils n’atteignent pas la bouddhéité ? Quoi qu’il en soit, Borobudur, vu du ciel, apparaît bien comme un mandala, une représentation bouddhique de l’Univers.
Certains résument parfois ainsi sa partie sommitale.
"Dans le cercle chaque stupa présente un Bouddha avec un signe distinctif différent. Le Stupa central, vide, symbolise la perfection. Qui n'est pas de ce monde."

Auteur: Internet

Info: Compilé par Mg

[ monument historique ] [ impossibilité ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

introspection

Il semble que l'inconscient collectif, tel que décrit par Jung, à savoir une réalité située dans une dimension en dehors de l'espace et du temps qui constituerait une forme de "mémoire de l'humanité", voire d'âme de l'univers, mériterait quelques améliorations... ou extensions.
Tout d'abord ce modèle de domaine mental traîne inévitablement avec lui des époques, langages, habitudes... manies. Qui font immédiatement surgir les difficultés. Tenez : l'archétype, ce flou modèle général, primitif, éventuellement idéal... Surtout "complexe", dans les deux sens du terme, qui reste souvent à l'état d'archange mal esquissé, perdu au milieu d'un cosmos incolore...
Ici l'intuition sussure "Votre anthropomorphisme les gars ! Trop limitatif..."
Comment aller au-delà ? Et pouvoir mieux observer et décrire ces attracteurs, méta-moteurs, titanesques aimants polarisateurs ? Galaxies psychiques ressenties et reconnues par nous et d'autres espèces. Partagées.
Pensons à ce simple tropisme qui fait que le le soleil attise les plantes et les nourrit, ou à celui de l'eau qui irrigue et fertilise l'écorce terrestre. Et ce besoin absolu de la matière de s'agréger, de rejoindre un centre qui n'existe pas à l'origine... Un peu comme les animaux, forcés de se regrouper en gage de protection et de reproduction...
Quel mode, quel mécanisme, permettra de mieux définir ces modèles, de pointer et créer de nouvelles focales pour certains endroits-phénomènes de nos espaces intérieurs, de "mieux les voir" au sein de cet espace conceptuel, hors du monde carbone-oxygène... Ou, pourquoi pas, dans un monde matériel, mais seulement peuplés d'atome et de champs magnétiques, où ces forces, agissant sur ces derniers, par leurs traces, se laisseront mieux entrevoir.
Et comment conserver et transmettre entre nous, et avec les autres êtres, ce savoir indicible que révélera cette quête de nos mondes intérieurs. Espaces spirituels rassemblés qui ressemblent encore et toujours à un vide absolu.

Auteur: Mg

Info: 1 sept. 2016

[ question ] [ exploration ] [ unicité ] [ dépassement ]

 

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matriarchie

Elles sont déjà là, en réalité, toutes les déesses-mères, elles sont de retour même si elles ne s’appellent pas Isis ou Astarté. Elles occupent toute la place qui leur est due dans le "ciel" du nouveau matriarcat profondément anti-biblique, anti-judaïque et anti-chrétien, les nouvelles matrones tutélaires implacables, les Grandes Nounous garantes de la réasexuation de la société et de la réinfantilisation des humains, voire de leur bestialisation douce dans une vaste nursery high-tech parfaitement télésurveillée de partout, avec des pornos à toute heure, pour assurer la disparition du désir, et la lecture collective et quotidienne au réfectoire, pour les mêmes raisons, d’un chapitre de La vie sexuelle de Catherine M. par la Mère supérieure, en alternance avec un passage du Bébé de Darrieussecq. Toutes ces choses vont très bien ensemble. Le Panoptikon de l’avenir est indifféremment une pouponnière, une crèche, une couveuse, un bordel, mais les véritables aventures s’y résument, au nom du principe de précaution, à prévenir diarrhées, rubéoles, varicelles, scarlatines et oreillons des petits pensionnaires. L’univers qui s’installe est un jardin d’enfants où patrouillent de sévères puéricultrices veillant à ce que leurs jeunes protégés ne soient pas dès leur âge le plus tendre conditionnés à des rôles sexués […]. L’art du passé au premier chef doit être nurseryfié, car cet art du passé représente ce qu’a pu être l’affirmation virile et adulte la plus haute de la période historique. C’est la raison pour laquelle un musée qui n’aurait pas son service poussettes et le nombre de chauffe-biberons réglementaires devrait fermer ses portes instantanément. Je me souviens, l’année dernière, avoir visité l’exposition "Picasso érotique" littéralement suivi, de salle en salle, par une jeune femme qui poussait un landau démoniaque dont les roues grinçaient. Allant ainsi d’œuvre en œuvre avec son landau vide (le bébé était promené par son père, une espèce de forçat à la traîne, livide et ahuri), par sa seule présence décidée elle effaçait la beauté sexuelle des œuvres de Picasso. Et il était impossible de penser qu’elle ne savait pas très bien ce qu’elle faisait ; ni que c’était pour cela seulement qu’elle était venue.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 3", Les Belles Lettres, Paris, 2002, pages 134-135

[ désérotisation ] [ critique de l'idéalisme féministe ] [ hommes-femmes ]

 

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trouble psychologique

A quoi bon se réveiller si personne ne vous attend ? Est-il besoin de donner davantage de commentaires? Notre occident vidé de ses croyances, entouré de ses charniers et des cendres de son passé, essaye d’occulter son désastre en plongeant tête baissée vers le vide et l’oubli. Ecrans, consommation, vide et médiocrité intellectuelle, spirituelle et morale : je m’arrête dans cette grise litanie. Paraphrasant Philippe Muray, je dirais qu’il suffit de mettre le monde entre guillemets pour qu’il nous apparaisse tel qu’en lui-même : porteur de bien peu de promesses et d’attente. L’autisme occidental est ainsi le signe d’une profonde déception ontologique doublée d’un brouillage symbolique dû à la perversion de marqueurs symboliques vitaux devenus illisibles notamment après leurs détournement par les régimes autocratiques et dictatoriaux responsables de meurtres de masse qui ont émaillé l’histoire du XXème siècle, toujours associés à un culte de la personnalité de figures paternelles dévoyées. Il en va de même de pays ayant dû faire face à des situations de guerre et de massacres prolongées, comme par exemple le Liban : je suis ainsi prêt à faire le postulat d’une corrélation entre le taux d’autisme relevé dans un pays et son histoire géopolitique et stratégique plus ou moins récente. On m’objectera que l’humanité est en guerre depuis les tout premiers moments de son émergence, sans que cela se soit jamais traduit par une explosion du taux de prévalence de l’autisme comparable à celle que nous observons actuellement. Certes, mais la grande nouveauté consiste présentement dans l’affaiblissement voire l’absence radicale au sein des sociétés contemporaines des marqueurs symboliques fondamentaux qui autrefois constituaient l’horizon structurant de toute société humaine, et qui offraient un cadre signifiant protecteur. En un raccourci efficace et frappant, on pourrait dégager un lien dynamique entre l’affirmation nietzschéenne "Gott ist tod", ou plus exactement le contexte sociétal et civilisationnel qui a rendu possible sa formulation, et de nombreux désordres symboliques contemporains observés, parmi lesquels l’autisme prend sa place.

Tout ceci n’est cependant dû qu’à une grave erreur de perspective, que les autistes précisément viennent nous forcer à reconsidérer, en nous invitant à tourner la page de l’efficacité destructive et binaire portée par la modernité depuis trois cent quatre-vingts ans exactement - soit depuis la publication du Discours de la Méthode - et les diverses monstruosités qu’elle a fini par engendrer, pour recentrer notre humanité dans ce qui la fonde substantiellement : une intersubjectivité refondée.

Auteur: Farago Pierre

Info: Une proposition pour l'autisme, page 44

[ signifiant maître dénié ] [ perversion ] [ sécularisation ] [ conséquences néfastes ]

 

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guitare

Cher Monsieur Reinhardt,
En Juillet dernier, je fus convié à participer à New York à un colloque sur la paix dans le monde. Le soir venu, avec quelques amis, nous nous sommes rendus au Café Society à Greenwich village afin d'assister au concert donné par Duke Ellington, car on nous avait informé que vous étiez maintenant membre de son orchestre et telle ne fut pas notre surprise de constater votre absence.
À la fin du concert, j'allais féliciter Monsieur Ellington pour sa prestation pianistique et la grande qualité de son orchestre.
Il nous présenta la très chaleureuse Rosetta Tharpe qui assurait la première partie de la soirée. C'est une femme très douée, pourvue de grandes qualités morales s'accompagnant d'une étrange guitare, possédant en son centre une espèce de couvercle de métal vibrant engendrant un son envoûtant correspondant parfaitement à son répertoire au caractère très spirituel.
Vous pensant quelque peu souffrant, j'interrogeais Monsieur Ellington, qui eut l'air navré de ne pas satisfaire ma requête, ne sachant pas où vous étiez présentement. Il me rassura sur votre état de santé et me confia que la veille au soir vous étiez dans une " forme électrique" (c'est le terme qu'il a employé). J'en déduisis que vous étiez en bonne santé tout en constatant que Monsieur Ellington avait une conception quelque peu personnelle de l'électricité. Très posément, il me fit votre éloge vantant vos qualités d'expressions hors normes laissant même ses propres musiciens dont le jovial Fred Guy, subjugués par votre facilité à changer de tonalité dans l'improvisation.
J'ai cru comprendre que vos habitudes étaient peu compatibles avec la rigueur imposée par les tournées américaines et comme je vous comprends : toute ma vie, j'ai lutté pour la liberté et je continue à lutter contre toutes les contraintes susceptibles de juguler l'esprit créatif si cher au musicien comme au scientifique.
Vous et moi sommes de la famille des déracinés, quelque part nous sommes des incompris et je serais le plus heureux des hommes le jour où je vous serrerais la main. Et ce jour-là, nous pourrions échanger, si vous n'y voyez pas offense quelques notes, vous et votre guitare que beaucoup considèrent comme exceptionnelle et moi avec mon violon, un Aegidius Klotz de très bonne facture que ma mère avait exigé de mon père qu'il l'achetât afin que j'entreprenne une carrière de violoniste, car tels étaient ses désirs... J'en joue encore un peu à l'occasion lorsque j'ai besoin de ressentir, et je pense que vous me rejoindrez sur ce thème, la sphéricité du tout qui est si peu de chose comparé au vide créateur.
Nous nous rencontrerons un jour, j'en suis sûr, car rien n'est établi.
Sincèrement vôtre.

Auteur: Einstein Albert

Info: Lettre du 15 Septembre 1946

[ jazz ]

 

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progrès

Selon des traditions dignes de foi, ce serait au cours du XVIe siècle, période d’intense animation spirituelle, que l’homme, renonçant à violer les secrets de la nature comme il l’avait tenté jusqu’alors pendant vingt siècles de spéculation religieuse et philosophique, se contenta, d’une façon que l’on ne peut qualifier que de "superficielle", d’en explorer la surface. Le grand Galilée, par exemple, qui est toujours le premier cité à ce propos, renonçant à savoir pour quelle raison intrinsèque la Nature avait horreur du vide au point qu’elle obligeait un corps en mouvement de chute à traverser et remplir espace après espace jusqu’à ce qu’il atteignît enfin le sol, se contenta d’une constatation beaucoup plus banale : il établit simplement à quelle vitesse ce corps tombe, quelle trajectoire il remplit, quel temps il emploie pour la remplir et quelle accélération il subit. L’Eglise catholique a commis une grave faute en forçant cet homme à se rétracter sous peine de mort au lieu de le supprimer sans plus de cérémonies : c’est parce que lui et ses frères spirituels ont considéré les choses sous cet angle que sont nés plus tard (et bien peu de temps après si l’on adopte les mesures de l’histoire) les indicateurs de chemin de fer, les machines, la psychologie physiologique et la corruption morale de notre temps, toutes choses à quoi elle ne peut plus tenir tête. Sans doute est-ce par excès d’intelligence qu’elle a commis cette faute, car Galilée n’était pas seulement l’homme qui avait découvert la loi de la chute des corps et le mouvement de la terre, mais un inventeur à qui le Grand capital, comme on dirait aujourd’hui, s’intéressait ; de plus, il n’était pas le seul à son époque qu’eût envahi l’esprit nouveau. Au contraire, les chroniques nous apprennent que la sobriété d’esprit dont il était animé se propageait avec la violence d’une épidémie ; si choquant qu’il soit aujourd’hui de dire de quelqu’un qu’il est animé de sobriété, quand nous penserions plutôt en être saturés, le pas que l’homme fit à cette époque hors du sommeil métaphysique vers la froide observation des faits dut entraîner, si l’on en croit quantité de témoignages, une véritable ardeur, une véritable ivresse de sobriété. Si l’on se demande comment l’humanité a pu penser à se transformer ainsi, il faut répondre qu’elle a agi comme tous les enfants raisonnables quand ils ont essayé trop tôt de marcher ; elle s’est assise par terre, elle a touché la terre avec une partie du corps peu noble sans doute, mais sur laquelle on peut se reposer. L’étrange est que la terre se soit montrée si sensible à ce procédé et qu’elle se soit laissé arracher, depuis cette prise de contact, une telle foison de découvertes, de commodités et de connaissances qu’on en crierait presque au miracle. 

Auteur: Musil Robert

Info: Dans "L'homme sans qualités", tome 1, trad. Philippe Jaccottet, éditions du Seuil, 1957, pages 472-473

[ sciences ] [ matérialisme ] [ dénigrement ] [ décadence ]

 

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judéo-christianisme

De fait, la Bible ne prône nulle part l’épanouissement du vivant, le body-building, la relaxation, les loisirs, le télé-travail, l’Internet-citoyen, la réduction du temps de travail, les trente-cinq heures, les trente-deux heures, les vingt-sept heures, les dix-huit heures, les deux heures, la disparition des heures, les vide-greniers, les pique-niques citoyens, la gymaquatique, la muscu, les randonnées en tenue fluo, les félicités électroniques, la movida hilare et les Gay Prides.

On n’y trouve aucune contribution à l’accroissement des droits des malades, du droit au logement et de celui des handicapés, des sans-fenêtres, des sans-portes ou des sans-papiers. L’épisode de Babel est une insulte à notre idéal de culture interculturelle et transfrontalière. La différence des sexes marquée à jamais, dans la Genèse, comme condition de possibilité de toute humanité (avec l’énoncé des maux différents, ou plutôt différenciés avec une extrême précision, que Dieu promet à l’homme et à la femme après l’épisode du péché : multiplication des peines de grossesse pour elle, souffrance du travail quotidien pour lui et retour à la terre par la mort), justifie la haine de tous les transgenristes, de tous les partisans du "l’un et l’autre" ou du "ni l’un ni l’autre", de tous les déligitimeurs de l’ "ordre symbolique" et de tous les apologistes du "contre-pouvoir féminin" menacé par le front réactionnaire de l’Internationale machiste.

Et, assurément, les guerres et les massacres qui sont évoqués dans l’Ecriture ont le malheur d’avoir été "réels" ; de ne pas s’être rapprochés de l’idéal "zéro mort" des guerres "parfaites" d’aujourd’hui. […]

Quant à l’hostilité vétérotestamentaire vis-à-vis de ce qui relève de l’occultisme ("Si un homme ou une femme ont en eux un esprit de divination, ils seront punis de mort, on les lapidera", etc.), elle ne peut qu’apparaître odieuse à nos esprits modernes où cohabitent si harmonieusement les inepties des cartomanciennes et les prestiges de la technique la plus ravageante.

Et je ne parle même pas du paternalisme abusif dont le Livre regorge, ni de sa prétention paranoïaque à un châtiment descendu du ciel. Ou plutôt si, j’en parle. Je ne parle que de ça : de la fonction centrale du Père dans la Bible et du caractère spécifiquement douteux de la paternité réelle, introduisant la dimension symbolique et la parole articulée (du moins jusqu’à ce que les récentes conquêtes de la science n’en finissent avec ce doute et ne rendent la paternité possiblement certaine, donc sans intérêt, en même temps que d’autres conquêtes, sociétales celles-là, annonçant la joyeuse destruction du langage articulé et le retour à l’inceste).

En tous ces domaines, et en bien d’autres, la Bible n’a cessé de se rendre antipathique. Elle n’est pas du tout glamrock. Elle ne cultive pas le maximum respect. Les démocraties terminales d’Occident, dans leur frénésie de chasser tout ce qui a pu être différent, à un degré ou à un autre, de ce qu’elles considèrent maintenant comme le devenir enviable de l’humanité, ne peuvent donc qu’être conduites à mettre en accusation ses "passages sanglants" et "contraires aux droits de l’homme". […] La part d’ombre, le flou, le louche, le tortueux, l’ambivalent, la négativité, caractéristiques il n’y a pas si longtemps de ce qu’il y avait de plus humain et de plus libre dans la condition humaine, ne sont plus que des crimes ou des infirmités.

Auteur: Muray Philippe

Info: Dans "Exorcismes spirituels, tome 3", Les Belles Lettres, Paris, 2002, pages 37 à 39

[ anti-moderne ] [ liste des griefs ] [ choc des discours ] [ révisionnisme ] [ évolution ]

 
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