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végétaux

Les scientifiques démontrent que les arbres ont une sorte de "battement de coeur"

Il y a un très grand nombre d'êtres vivants sur Terre, tous avec leur propre ensemble de caractéristiques et leur mode de vie unique. Des plus petites fourmis jusqu'aux énormes girafes et éléphants, tous ont en commun d'être vivants ! Les plantes et les arbres en font partie. S'ils ne se promènent pas comme les autres organismes, ou n'ont ni rein ni foie, ils ont en quelque sorte leur propre ensemble d'organes.

Secret battement de coeur
Bien qu'un arbre n'ait pas de cœur, l'idée qu'il ait son propre rythme et son propre sens du rythme n'est plus aussi farfelue qu'on pouvait le penser. Selon une étude menée par András Zlinszky, Bence Molnár et Anders S. Barfod de Hongrie et du Danemark, les arbres ont en fait un type de rythme particulier qui ressemble à celui d'un battement de cœur.

Pour mettre au jour ce battement de coeur caché, les chercheurs ont utilisé des techniques de surveillance avancées, connues sous le nom de balayage atmosphérique au laser, et on étudié le mouvement de vingt-deux types d'arbres différents. Les résultats ont surpris tout le monde, révélant que la nuit, alors que les arbres dorment, ils présentent souvent un battement qui résonne dans tout leur corps, comme les humains et d'autres créatures vivantes.

Qu'est-ce que ?
Bien que ces pulsations ne soient pas de véritables battements de cœur, ils semble qu'elles remplissent une fonction similaire, maintenant le rythme et en pompant des liquides dans l'organisme. Les impulsions que les scientifiques ont découvertes sont en fait l'arbre qui propulse et distribue l'eau dans son corps, tout comme un cœur pompe le sang. On a longtemps supposé que les arbres distribuaient l'eau par osmose, mais cette nouvelle découverte semble indiquer autre chose. Voilà qui pourrait changer à jamais la façon dont les humains voient et comprennent les arbres. Ces "battements de coeur" eux-mêmes sont assez lents et réguliers, certains se produisant toutes les quelques heures. Malgré cela, c'est une découverte étonnante qui prouve que la nature est encore plus complexe que ce que l'on avait imaginé.

Cette étude n'a pas seulement constaté cette forme de rythme cardiaque, elle a également révélé que les arbres bougent beaucoup pendant la nuit, bien plus que ce que les gens pensaient. Il s'est aussi avéré qu'un grand nombre d'espèces ont fait descendre leur feuillage jusqu'à une dizaine de centimètres après le coucher du soleil. Lorsque les arbres font cela, c'est en fait parce qu'ils dorment (un autre trait humain/animal), ils entrent alors dans leur propre type de rythme circadien, connu sous le nom de "mouvements circadiens des feuilles", qui est incroyablement intéressant à observer.

Les arbres et les plantes font partie des organismes vivants les plus mystérieux, ils recèlent encore beaucoup d'informations et de secrets à comprendre. Certains disent même que les arbres ont la capacité de pleurer et de ressentir la douleur, ce qui dans ce cas changerait aussi bien des choses. Nous avons encore beaucoup à apprendre et espérons que d'autres études nous apporteront d'autres informations sur le monde mystérieux et fascinant des plantes et des arbres.

Auteur: Internet

Info: www.frontiersin.org, février 2020

[ sommeil ]

 

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paléolinguistique

Le but de la reconstruction linguistique est d'établir la chronologie relative des étapes préhistoriques et des changements qui précèdent immédiatement les données les plus archaïques. Spéculer sur l'origine des catégories grammaticales telles que le genre, l'aspect, l'humeur, etc. est une entreprise glottogonique qui, étant donné son caractère hautement problématique, devrait être tenue à l'écart de la grammaire historique et comparative. 

L'expression "reconstruction interne" fut utilisée comme terme technique par Pisani, Hoenigswald, Bonfante et d'autres afin de désigner les conclusions diachroniques qui peuvent être tirées d'une analyse synchronique des données linguistiques sans ou avant d'avoir recours à la comparaison, à la géographie linguistique, à la "linguistique aréale" et à la glottochronologie. Les méthodes de reconstruction interne ont été appliquées à un degré croissant, plus ou moins consciemment et explicitement, par les néo-grammairiens. Ainsi, par exemple, ils ont rejeté la possibilité d'une scission phonétique spontanée et ont acquis, au moyen du concept de "loi phonétique", une assez bonne connaissance des changements phonétiques usuels. 

De même, en raison de l'élargissement constant du champ de la recherche linguistique, une attention de plus en plus grande a été accordée aux tendances générales dans le domaine de la sémantique. L'opposition entre diachronie et synchronie, impliquant des différences de buts et de méthodes linguistiques, n'est pas immédiatement donnée par le matériel à notre disposition. Le caractère à la fois transitoire et fluctuant des phénomènes linguistiques, l'hésitation entre procédures résiduelles et improductives d'une part, et les innovations et règles vivantes d'autre part, ont été fréquemment soulignés. Partout, une description "synchronique" complète d'une langue doit avoir recours aux notions d'archaïsme et d'innovation. L'éviction d'une forme ancienne par une nouvelle n'est pas un événement momentané mais un processus qui s'étend dans le temps et dans l'espace. Considéré du point de vue historique, le matériel linguistique, aussi restreint soit-il dans le temps et dans l'espace, est composé de couches chronologiques. Pour s'en rendre compte, il suffit de parcourir quelques pages d'une description minutieuse d'une langue moderne.

Face à la tâche de reconstruction des étapes linguistiques plus anciennes, les chercheurs ont été conscients de la difficulté d'une sélection appropriée du matériel. Les formes qui pourraient être nées indépendamment dans chacune des langues apparentées comme le résultat de règles de dérivation productive, par exemple γόνος = jána en védique, ne témoigne pas de l'existence d'un prototype i.e. (*ĝóno-). Meillet, entre autres, nous a appris que la reconstruction des étapes préhistoriques doit être basée sur les exceptions et les anomalies plutôt que sur les règles grammaticales d'une langue. Un autre principe important est que si une forme est restreinte aux seuls contextes résiduels (idiomes), alors que l'utilisation de son ou ses synonymes est libre, cette forme doit représenter un stade plus ancien. De tels principes méthodologiques appartiennent à ce que l'on nomme ici "reconstruction interne" au sens large.  Ils ne peuvent pas être appliqués dans chaque cas particulier, mais une fois qu'ils le sont, les résultats obtenus ont une valeur cognitive plus élevée que les conclusions obtenues par les statistiques, la linguistique aréale ou la paléontologie linguistique, qui ont un caractère stochastique. En cas de contradiction, l'inférence tirée de la reconstruction interne sera décisive.

Auteur: Kuryłowicz Jerzy

Info: Chapitre 8. Sur les méthodes de reconstruction interne

[ épistémologie ]

 

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animal-minéral

Des progrès dans la compréhension de la biominéralisation par une nouvelle microscopie X

Chez les organismes vivants, les processus de biominéralisation régulent la croissance des tissus minéralisés, tels que les dents, les os, les coquilles… Ces procédés restent fascinants à étudier pour une meilleure compréhension du monde naturel qui nous entoure et de sa diversité, d'autant plus que ces recherches peuvent contribuer à l'élaboration de procédés biomimétiques pour la réalisation de nouveaux matériaux.

Une équipe interdisciplinaire française, à laquelle participe l'équipe du LIONS de l'UMR NIMBE, s'est intéressée à la bio-formation du carbonate de calcium, dont la structure complexe est encore largement incomprise. La texture complexe de matériaux naturels, observés auprès du synchrotron de l'ESRF par une méthode originale de diffraction de rayons X développée par l'Institut Frenel, est décrite et les résultats publiés dans la revue "Nature Materials". Un point de départ pour comprendre l'élaboration de ce composé, et définir les conditions physiques, chimiques et biologiques nécessaires pour produire de façon synthétique ce type de biominéraux.

La compréhension en sciences des matériaux, paléoclimatologie et sciences de l’environnement des phénomènes de biominéralisation ouvrent des perspectives fascinantes et attirent nombre de chercheurs. Le carbonate de calcium en est une bonne illustration : les théories issues de la cristallisation classique ne peuvent expliquer la formation des structures biominérales calcaires extrêmement complexes, telles que celles observées chez l’oursin ou l’huître perlière par exemple. La formation de ce constituant majeur de la croute terrestre reste ainsi encore largement incomprise.

L’étude, menée par une équipe interdisciplinaire française et publiée dans la revue Nature Materials, exploite une nouvelle microscopie en rayons X permettant de révéler les spécificités structurales du biominéral. Elle conduit à l’identification de modèles probables de biominéralisation.

L’approche développée par cette équipe est motivée par une contradiction apparente : tandis que les espèces vivantes capables de cristalliser le carbonate de calcium produisent une remarquable diversité architecturale aux échelles macro et micrométriques, à l’échelle sub-micrométrique, la structure biominérale se caractérise au contraire, par l'observation constante d'une même structure granulaire et cristalline. Par conséquent, une description des caractéristiques cristallines à cette échelle "mésométrique", c'est-à-dire, à l’échelle de quelques granules (50-500 nm), est une clé pour construire des scénarios réalistes de biominéralisation. C’est également une difficulté majeure pour la microscopie, puisqu’aucune des approches expérimentales actuellement utilisées (électroniques, X ou visibles) n’est capable d’y accéder.

Grâce à la nouvelle approche de microscopie X en synchrotron, la ptychographie de Bragg, développée en 2011 par l’Institut Fresnel, il a été possible de révéler les détails tridimensionnels de l'organisation méso-cristalline des prismes de calcite, les unités minérales constituant l’extérieur de la coquille de l’huître perlière. Bien que ces prismes soient habituellement décrits comme des mono-cristaux "parfaits", il a été possible de mettre en évidence l'existence de grands domaines cristallins d’iso-orientations et d’iso-déformations, légèrement différents les uns des autres. Ces résultats entièrement originaux plaident en faveur de chemins de cristallisation non classiques, comme la fusion partielle d’un ensemble de nanoparticules primaires ou l’existence de précurseurs de type liquides.

Ce résultat a été obtenu dans cadre d’un programme de recherche à 4 ans financé par l’ANR (ANR-11-BS20-0005). Il constitue le point de départ d’un projet ERC Consolidator (#724881), qui a pour objectif d’établir les conditions physiques, chimiques et biologiques nécessaires pour produire des biominéraux synthétiques à la demande.

Auteur: Internet

Info: Réf :  F. Mastropietro, P. Godard, M. Burghammer, C. Chevallard, J. Daillant, J. Duboisset, M. Allain, P. Guenoun, J. Nouet, V. Chamard, Revealing crystalline domains in a mollusc shell “single-crystalline” prism, Nature Materials (2017). Communiqué CNRS/INSIS : "Une nouvelle microscopie éclaire la formation des biominéraux", 1er sept 2017

[ évolution ] [ niveaux intermédiaires ] [ méta-moteur ]

 

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bio-technologie

Mi-animal, mi-machine, le "xénobot" est le premier robot vivant
Il s'agit d'un organisme quadrupède manufacturé par l'Homme avec des cellules souches de grenouille. Il est un tout petit peu plus petit qu'une tête d'épingle avec son diamètre de 650 à 750 microns.
Le xénobot est un organisme vivant programmable: il a été assemblé avec des cellules souches de peau et de muscles de cœur de grenouille. Une première scientifique réalisée par des chercheurs des universités américaines du Vermont et de Tufts.
"Ce sont de nouvelles machines vivantes", explique Joshua Bongard, l'un des coauteurs de l'étude publiée par PNAS, le journal de l'Académie américaine des Sciences, le 13 janvier. "Ce n'est ni un robot traditionnel, ni une espèce connue d'animal. C'est une nouvelle classe d'artéfact: un organisme vivant, programmable", selon la description de cet informaticien et expert en robotique de l'Université du Vermont.

(Illustration : grenouille Xénope lisse. Les cellules souches de peau et de cœur d'embryons de cette grenouille ont servis à la fabrication du xénobot, le premier robot vivant. Qui s'appelle donc xénobot, du nom de la grenouille Xenopus laevis, dont les cellules embryonnaires ont été utilisées pour le fabriquer.)

"Génomiquement, ce sont des grenouilles", indique Michael Levin, coauteur de l'étude et directeur du Centre de biologie régénérative et développementale à l'Université de Tufts. "C'est à 100% de l'ADN de grenouille, mais ce ne sont pas des grenouilles". Un peu comme un livre est fait de bois, mais n'est pas un arbre...

La taille du xénobot ne dépasse pas le millimètre de large: il est légèrement plus petit qu'une tête d'épingle avec son diamètre de 650 à 750 microns.

Ses cellules vont exécuter des fonctions différentes de celles qu'elles accompliraient naturellement. Les tissus vivants ont été récoltés et incubés; ensuite les chercheurs les ont assemblés en un corps optimal conçu par des modèles informatiques. L'intelligence artificielle sélectionnait les formes les plus réussies et les plus aptes.

(illustration : Les xénobots calculés par ordinateur - in silico - et réalisés avec des cellules embryonnaires -in vivo.
On voit des petits blocs cubiques de chair, briques structurelles différentes - en rouge, contractables; en vert, passives - qui sont fournies à un algorithme d'évolution. Celui-ci définit un modèle optimal pour l'organisme vivant manufacturé, tout à droite de l'image.
Un résultat comportemental – ici, la maximisation du déplacement – et des briques structurelles différentes - en rouge, contractables; en vert, passives - sont fournies à un algorithme d'évolution. Celui-ci définit un modèle optimal pour l'organisme vivant manufacturé. On voit un gros plan flou à droite de l'image.)

De petits organismes autonomes
L'organisme a réussi à "évoluer" du stade d'amas de cellules souches à celui d'un assemblage bougeant grâce aux pulsations envoyées par les cellules du tissu musculaire cardiaque... ce qui leur a permis de se déplacer pendant plusieurs semaines dans de l'eau, sans avoir besoin de nutriments additionnels.

Ces petits êtres d'un genre nouveau ont été capable de se réparer – se soigner! – tous seuls après avoir été coupés en deux par les scientifiques: "Ils se recousaient et continuaient de fonctionner", remarque Joshua Bongard.

Ces créatures peuvent aussi se diriger vers une cible, ce qui pourrait être très utile dans le domaine de la santé: un xénobot pourrait par exemple administrer des médicaments dans le corps humain, à un endroit prédéterminé. Ou s'occuper d'une artère bouchée.

Des tests ont montré qu'un groupe de xénobots arrivait à se déplacer en cercle, en poussant des pastilles vers un lieu central, de manière spontanée et collective.

De la peau morte
Les applications futures de ces robots vivants peuvent être nombreuses, selon les chercheurs: ils imaginent par exemple qu'ils pourront assembler les microplastiques qui polluent les océans, afin de les nettoyer.

"Ces xénobots sont complètement biodégradables", affirme Joshua Bongard, "Lorsqu'ils ont terminé leur travail après sept jours, ce ne sont plus que des cellules de peau morte".

Une forme de vie étonnante, entièrement nouvelle, qui disparaît presque sans laisser de traces.

Auteur: Jaquet Stéphanie

Info: https://www.rts.ch/info/sciences-tech/technologies. 16 janvier 2020

[ écologie ]

 
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​​​​​​​signes contextualisés

Cette énigme, ce nœud gordien de la "réalité extérieure", avec lequel la modernité avait paralysé les philosophes, est précisément ce que Sebeok a tranché. Confronté au dilemme de l'implication moderne d'un labyrinthe du fonctionnement de l'esprit, il a trouvé la sortie :

Que faut-il faire de tout cela ? Il me semble que, tout au moins pour nous, travailleurs dans un contexte zoosémiotique, il n'y a qu'une seule façon de se frayer un chemin dans ce bourbier, et c'est d'adhérer strictement aux thèses globales de Jakob von Uexküll sur les signes. (Sebeok, 2001, pp. 78 & 193n6) 

Bien sûr, Sebeok évoque ici l'Umweltstheorie, rien de moins, pour laquelle rien n'est plus central que la distinction que fait Sebeok lui-même entre le langage au sens premier (cet aspect du système de modélisation humain ou Innenwelt qui est sous-déterminé biologiquement et, en tant que tel, spécifique à notre espèce) et l'exaptation du langage pour communiquer (ce qui aboutit à la communication linguistique en tant que, encore une fois, moyen spécifique à l'espèce humaine).

L'erreur des relativistes culturels de tout poil, et des modernes en général, du point de vue de Sebeok, a été de traiter le langage comme un système autonome englobant tout, au lieu de réaliser son contexte zoosémiotique (Deely, 1980). Dans ce contexte, "l'unicité de l'homme" n'apparaît que dans la mesure où elle est soutenue par et dépend des points communs de signification qui définissent et constituent le domaine plus large des choses vivantes au sein duquel se trouve le langage, champ bien plus vaste au sein duquel les humains sont nécessairement incorporés et liés par x milliard de connexions que la compréhension même de la vie humaine doit finalement conduire vers une certaine incorporation consciente. En d'autres termes, la dernière contribution de Sebeok, venant de l'intérieur de la modernité, aura été de réaliser qu'il existait une voie au-delà de la modernité, la voie des signes. La question, sous cette forme, ne l'a jamais intéressé, mais dans le sillage de son œuvre, elle mérite d'être posée : que devrait être la postmodernité ? 

Il ne pouvait s'agir que d'une vision du monde qui parviendrait, d'une manière ou d'une autre, à rétablir ce qui est extérieur à nous-mêmes comme étant connaissable en tant que tel ou en tant que tel, sans renoncer à la prise de conscience moderne selon laquelle une grande partie, sinon la majorité, de ce que nous connaissons directement se réduit à nos propres coutumes et conventions selon lesquelles les objets sont structurés et les déductions faites. Sebeok a peut-être été tout à fait moderne. Mais personne n'a fait plus que lui pour s'assurer que l'ère moderne, du moins dans la culture intellectuelle et dans la philosophie dont il n'a jamais prétendu assumer le flambeau, était terminée. Sebeok est devenu, malgré lui, postmoderne jusqu'au bout des ongles. 

Je dis "malgré lui", car je sais qu'il avait une aversion pour l'appellation "postmoderne", pour une très bonne raison. La plus grande partie de la vie professionnelle de Sebeok avait été consacrée à exposer et à surmonter ce qu'on a appelé le "pars pro toto fallacy"*, selon lequel la doctrine du signe trouve son fondement adéquat dans un paradigme linguistique, pour ne pas dire verbal. Telle était la thèse, bien connue à la fin du vingtième siècle, de la proposition de "sémiologie" de Saussure. 

Par contraste, Sebeok a promu dès le début que la doctrine des signes doit être enracinée directement dans une étude générale de l'action des signes, de la manière distinctive dont les signes fonctionnent, action pour laquelle il a accepté de Peirce le nom de "sémiose". Mais si la doctrine des signes concerne avant tout l'action révélatrice de l'être distinctif des signes, alors la proposition adéquate pour son développement n'est pas le terme "sémiologie" mais plutôt le terme "sémiotique", qui exprime l'idéal d'un paradigme non lié au langage et se réfère à l'action des signes comme étant plus grande que, englobante, et en fait présupposée à toute action des signes comme étant de nature verbale. "La sémiose, a très tôt déclaré Sebeok, est un fait omniprésent de la nature comme de la culture" (1977a, p. 183).  

Auteur: Deely John

Info: The Quasi-Error of the External World an essay for Thomas A. Sebeok, in memoriam. *Erreur consistant à confondre une partie d'un objet avec le concept qui représente son intégralité. Trad Mg

[ réagencement permanent ] [ hyper-complexité ] [ historique ]

 

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végétalo-ésotérisme

Ethnobiologiste et baroudeur en Amazonie, Romuald goûta de l'amer breuvage de l'ayahuasca (aujourd'hui courue par les avant-gardistes de la défonce chic) sous la tutelle du chant Icaros d'un chaman. "Son goût était extrêmement amer, et je sentis le liquide descendre dans mon estomac, occasionnant hauts de coeur et nausées. J'espérais ne pas être aussi malade que les autres fois où j'avais cru me vider littéralement de mes organes". Mais bientôt, la douleur s'atténue, laissant place aux visions. Des serpents se dessinent dans le ciel et la conscience éjacule du corps, vaquant au-dessus d'une forêt aux arbres souples comme des flagelles.

Plusieurs questions animent ce livre : les plantes psychotropes trouvent-elles un quelconque intérêt à offrir le plaisir hallucinatoire aux hommes ? Les visions qu'elles procurent ont-elles un sens, et si oui, lequel ? Ces questions étranges se sont imposées à Romuald lorsqu'il remarqua que les hallucinations suscitées par la consommation de DMT végétale sont constituées surtout par des motifs naturels alors que la consommation de DMT synthétique laisse plutôt voir des motifs abstraits. 

Les molécules psychotropes de ces plantes permettent-elles d'accéder à ce qui serait une "mémoire collective de l'espèce" ? On devinera sans mal que cette question est influencée par une lecture quelque peu distraite des hypothèses de l'inconscient collectif de Jung. Mais ne nous arrêtons pas à cette réticence théorique.

Romuald part de l'hypothèse pas inintéressante que les alcaloïdes des plantes psychotropes pourraient être considérés comme des exophéromones* qui annulent la barrière entre les espèces. Un peu comme l'orchidée qui ressemble à s'y méprendre à une abeille et qui dégage des phéromones sexuelles d'abeille pour se faire polliniser par le mâle (il ne suffit donc pas d'être bourré pour baiser n'importe quoi). 

De la même façon, nous dit Romuald, "les esprits des plantes que l'on nomme mères des végétaux sont, pour moi, la résultante de processus mimétiques biochimiques". Il se pourrait même qu'une plante condense en elle l'esprit de plusieurs autres plantes, comme l'ayahuasca que les indigènes considèrent comme l'esprit encyclopédique de la forêt vierge. Si vous avez lu cet incroyable illuminé qu'est Rupert Sheldrake, on peut avancer la notion de champ morphogénétique pour se faire une idée de ce que ça pourrait être, enfin c'est pas sûr non plus. 

Viennent ensuite les arguments proprement biochimiques. L'intentionnalité exophéromonale des plantes psychotropes à destination de l'esprit humain a pu être favorisée, ce qu'expliquent les bien pratiques lois de l'évolution darwinienne : "sous la forme des alcaloïdes messagers, qui lorsqu'ils se connectent à l'ADN neuronal se synchronisent avec un savoir homogène situé dans l'ADN non codant (ADN camelote). Cette mémoire et ce savoir s'expriment à la conscience par une mise en résonance de la stimulation de l'ADN des milliards de neurones de notre cerveau. Ce qui a pour effet de rendre conscient ce savoir sous forme d'images mentales et d'enseignements linguistiques conjoints avec notre cognition".

On en vient à une vision délirante de la réalité. Délirante, mais ô combien réjouissante, ne vous égarez pas ! Ce livre a connu un beau succès dans son milieu et on comprend aisément pourquoi. Les plantes auraient quelque chose à nous dire. Elles auraient traversé des temps immémoriaux pour nous transmettre leur secret – qui est aussi le secret de la vie, car quel citadin ne s'imagine pas aujourd'hui que la nature est la seule chose qui soit vraie ? Grâce à ces plantes, quelque chose comme le savoir universel et absolu deviendrait accessible. Rendez-vous compte ! Une perspective se dessine, la fin d'un égarement apparaît. Plus besoin de perdre du temps et de se fatiguer des vies entières pour creuser, chercher et comprendre dans des voies bien incertaines. le savoir est là et il ne demande, pour se laisser percer, rien d'autre que des investigations en biochimie et en psychologie jungienne, que l'on aura entre-temps redéfinie comme outil de traduction archétypale pour la communication transspéciste, qui succède bien logiquement aux joies asexuées de la réunion transsexiste. 

Les plantes psychotropes tenteraient-elles de réaliser ce que l'homme n'a jamais eu, ne serait-ce que l'idée, de réaliser : comprendre et s'unir à l'esprit des autres espèces vivantes de ce monde, réalisant ce vaste mensonge qu'est l'Unus Mundus ? Ce n'est pas parce que nous préférons ne pas manger de ce pain-là qu'il ne faut pas se poser sérieusement la question, ne serait-ce que pour rire aux larmes des espoirs touchants que nourrit parfois l'humanité.

Auteur: Arcé Alexandra

Info: Critique de l'ouvrage de R.Leterrier : Les plantes psychotropes et la conscience : L'enseignement de l'Ayahuasca. *langage des plantes, inventé par T. McKenna

[ résonances biophysiques ] [ épigénétique ]

 

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cladistique vs phénétique

L'évolution de la vie sur terre: aléatoire ou prévisible ?

L'évolution des êtres vivants met en jeu de nombreux phénomènes aléatoires tels que mutations, rencontres des ovules et spermatozoïdes, accidents météorologiques, etc... Notre monde vivant est-il donc juste une alternative parmi tant d'autres ? Dans une étude publiée dans la revue Interface Focus, Virginie Orgogozo à l'Institut Jacques Monod, revisite la question à la lumière des données actuelles. Elle montre qu'au cours de l'évolution de la vie sur terre, des événements se répètent et semblent prévisibles. Si on rembobinait le film de la vie sur terre et qu'on le relançait en changeant légèrement les conditions initiales, obtiendrait-on les mêmes formes vivantes qu'aujourd'hui ?

Le paléontologue américain Stephen Jay Gould s'était posé la question dans les années 90. Il avait répondu que des formes de vie tout-à-fait différentes seraient apparues car l'évolution dépend de nombreux phénomènes aléatoires non prévisibles (mutations, impact des comètes, etc.). Depuis quelques années, certains biologistes, tel que le paléontologue anglais Simon Conway Morris, remettent en doute la réponse de Stephen Jay Gould. Ils suggèrent que même si le monde ne serait probablement pas exactement pareil, par exemple vous ne seriez pas en train de lire ce texte en ce moment précis, il aurait malgré tout un air de "déjà-vu". Par exemple, les animaux qui nagent dans un milieu liquide auraient un corps en forme de poisson, et la vision de la lumière s'effectuerait grâce à des organes spécialisés que sont les yeux.

L'évolution de la vie est-elle une simple alternative parmi tant d'autres, comme le pensait Stephen Jay Gould, ou bien est-elle prévisible ?

Virginie Orgogozo examine les données actuelles de la génétique et de l'évolution expérimentale pour tenter de répondre à la question. Les données récentes de la biologie indiquent que l'évolution se répète à plusieurs niveaux.

- Premièrement, des traits de caractère semblables sont apparus indépendamment chez différentes espèces vivant dans les mêmes conditions (c'est l'évolution convergente). Par exemple, les poissons et les ichtyosaures, des reptiles disparus, ont évolué indépendamment vers un corps en forme de poisson.

- Deuxièmement, les mêmes traits de caractère et les mêmes mutations apparaissent souvent lors d'expériences d'évolution expérimentale dans lesquelles on laisse évoluer des êtres vivants dans un environnement choisi et que l'on répète cette même expérience plusieurs fois de façon indépendante.

- Troisièmement, l'évolution indépendante du même trait de caractère chez des espèces différentes est souvent causée par des mutations dans le même gène. Par exemple, l'adaptation à une nourriture riche en amidon s'est accompagnée de mutations dans la même famille de gènes chez l'homme et chez le chien. Toutes ces répétitions sont relativement inattendues: si l'évolution était extrêmement sensible aux conditions initiales, on ne devrait pas observer tant de répétitions. Virginie Orgogozo en conclut que l'évolution de la vie sur terre n'est peut-être pas aussi aléatoire que ce qu'on aurait pu croire, et qu'il est possible de faire des prédictions concernant l'évolution des êtres vivants. Ainsi, on peut prédire qu'un mammifère vivant en région polaire va évoluer avec un pelage blanc, ou qu'une plante Arabette des dames qui fleurit plus tôt a de grandes chances d'avoir une mutation dans le gène FRIGIDA.

Comment l'évolution peut-elle être prévisible alors qu'elle met en jeu de nombreux phénomènes aléatoires ?

Virginie Orgogozo l'explique par analogie avec un gaz parfait dans un récipient. Au niveau microscopique, on ne peut prédire ni la position, ni le poids, ni la vitesse des particules. Par contre, au niveau macroscopique, on peut prédire la pression ou la température de ce gaz. Ainsi, même si les mutations apparaissent de façon non prévisible au sein des êtres vivants, on peut prédire les mutations qui ont survécu pendant de longues échelles de temps dans les populations et qui sont responsables de changements évolutifs entre espèces ou entre populations.

Plutôt que de savoir si les formes vivantes seraient différentes des nôtres si on relançait le film de l'évolution, Virginie Orgogozo préfère se demander à quel point elles seraient semblables à celles de notre monde. Répondre à cette question nécessite alors d'examiner les problèmes suivants: comment imaginer d'autres mondes possibles alors que nous sommes limités par notre imagination ? Comment estimer la probabilité d'occurrence d'événements qui ne se sont passés qu'une seule fois au cours de notre évolution ? Peut-on trouver de nouveaux concepts généraux pour prédire l'évolution ? La biologie actuelle commence à apporter des éléments de réponse. Même si il est trop tôt pour s'avancer, l'évolution de la vie sur terre pourrait être en partie prévisible.

Auteur: Orgogozo Virginie

Info: Pour plus d'information voir: Replaying the tape of life in the twenty-first century

[ probabilités ] [ spéculation ]

 

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syndrome cognitif

Dans un de ses cours consacrés aux mécanismes cérébraux impliqués dans la lecture, Stanislas Dehaene, professeur au Collège de France, citait cet extrait de Feu pâle, de Vladimir Nabokov : "Nous sommes absurdement accoutumés au miracle de quelques signes écrits capables de contenir une imagerie immortelle, des tours de pensée, des mondes nouveaux avec des personnes vivantes qui parlent, pleurent, rient. (…) Et si un jour nous allions nous réveiller, tous autant que nous sommes, et nous trouver dans l’impossibilité absolue de lire ?"

Comme c'est en général la règle dans les études de cas, on n'aura que ses initiales. Institutrice américaine de quarante ans, M. P. a eu la douleur de faire de l'hypothèse de Nabokov sa réalité. Racontée le 7 janvier dans la revue Neurology, son histoire commence un jeudi d'octobre 2012, en classe, devant ses jeunes élèves de maternelle. Comme tous les matins, l'enseignante doit faire l'appel. Mais à sa grande surprise, la liste de présence dont elle se sert tous les jours est couverte de signes mystérieux auxquels elle ne comprend goutte. Ainsi qu'elle se le rappelle, la feuille "aurait pu aussi bien être couverte de hiéroglyphes". Les notes qu'elle a préparées pour faire sa classe s'avèrent elles aussi incompréhensibles... M. P. rentre chez elle ce jeudi et, au cours des 48 heures qui suivent, elle éprouve de nouvelles difficultés : elle a du mal à trouver ses mots et sa réflexion est ralentie. Le samedi, sa mère l'emmène aux urgences.

C'est un accident vasculaire cérébral (AVC) qui a causé tout cela. M. P. ne s'est rendue compte de rien mais, dans son cerveau, une petite zone située dans la région occipito-temporale gauche s'est déconnectée et elle restera hors service toute sa vie. On la connaît sous le nom d'aire de la forme visuelle des mots (AFVM) et c'est elle qui est responsable de l'identification visuelle de l'écrit. Cette désactivation n'interrompt pas l'accès au reste des aires cérébrales impliquées dans le langage. M. P. comprend ce qu'on lui dit, parle normalement mais elle ne peut plus lire. En revanche, elle sait toujours écrire ! Les neuroscientifiques parlent d'alexie (incapacité à lire) sans agraphie (incapacité à écrire) ou bien d'alexie pure. Les cas sont très rares et le premier que la littérature scientifique recense est un cas français, décrit en 1892 par le neurologue Jules Dejerine.

M. P. croit d'abord que la zone lésée s'est juste remise à zéro et qu'avec les outils qu'elle connaît bien, elle va pouvoir réapprendre à lire. Et elle ne veut pas laisser sa passion pour les mots écrits s'envoler sans se battre. Mais la porte est fermée et pour de bon : M. P. ne peut pas faire du "b-a ba", tout simplement parce qu'elle ne "voit" ni les "b", ni les "a". Le message que ses yeux lui envoient à la vue des lettres arrive bien à son cerveau mais il ne passe pas la douane des mots. Toutefois, M. P. est tenace. Elle s'aperçoit qu'un autre sens que la vue peut venir à sa rescousse et c'est probablement ce qui fait la beauté de son cas, si l'on met de côté l'ironie cruelle qu'il y a à voir une spécialiste de l'apprentissage de la lecture frappée d'alexie.

Sa roue de secours, M. P. va la trouver dans... le geste. Ses yeux ne lui sont pas d'une grande aide mais sa main a encore la mémoire des lettres tracées. En voyant un mot, l'enseignante ne reconnaît pas la première de ses lettres. Alors, elle se met à dessiner avec le doigt toutes les lettres de l'alphabet, jusqu'à ce qu'elle arrive à celle dont elle voit la forme sans savoir le nom. L'exemple donné dans l'étude est celui du mot "mother" (mère en anglais). M. P. utilise son astuce pour les trois premières lettres, "m", "o" et "t", puis elle complète le mot d'elle-même. Les auteurs de l'article précisent d'ailleurs que, dans son travail de rééducation, M. P. a de vagues réminiscences à la vue de certains mots, des "émotions qui semblent appropriées". Ainsi, à la vue du mot "dessert", elle s'exclame : "Oh, j'aime ça !" En revanche, en voyant le mot "asperge", elle explique ne pas vouloir le déchiffrer car quelque chose en lui la dérange.

Malgré tous ses efforts, malgré la "béquille" qu'elle a trouvée pour déchiffrer, très laborieusement, quelques mots, M. P. ne relira plus jamais de manière automatique et fluide. Elle a dû abandonner son métier et travaille désormais à l'accueil d'un centre sportif. Lire une histoire aux enfants, comme elle le faisait dans sa classe, est la chose qui lui manque le plus, plus encore que dévorer un ouvrage pour elle-même. Et elle a l'intention d'écrire les mémoires d'une institutrice qui ne sait plus lire.

Auteur: Barthélémy Pierre

Info: 9 janvier 2014, sur son blog. Le cas décrit ici est très similaire à celui d'Howard Engel

[ altération mentale ]

 
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palier évolutif

L’explosion cambrienne déclenchée par plusieurs transgressions marines ?

Il y a 542 millions d'années apparaissaient, durant une période de quelques dizaines de millions d'années seulement, les grandes lignées d'animaux multicellulaires, comme les vertébrés et les arthropodes. Les lignées végétales et bactériennes se sont elles aussi diversifiées. 

Quel fut le déclencheur de cet événement planétaire ? 

La libération massive d'ions dans les océans, due à une érosion devenue intense, affirme une équipe américaine. Les organismes marins auraient utilisé ces polluants pour fabriquer des squelettes et des coquilles, une invention qui leur fut très profitable.

Les premières formes de vie seraient apparues sur Terre il y a 3,5 milliards d'années. Curieusement, ces êtres restèrent en grande majorité unicellulaires (vivant parfois en colonies) jusqu'à l'explosion cambrienne survenue il y a seulement 542 millions d'années. Cet événement vit alors naître de nombreux organismes pluricellulaires et des structures biominérales (par exemple des coquillages) en seulement quelques millions d'années, preuve d'une accélération soudaine de l'évolution (comme en témoignent par exemple les schistes de Burgess). Mais quel fut le facteur déclenchant ? Cette question taraude de nombreux scientifiques depuis longtemps car peu d'hypothèses convaincantes ont été apportées.

Il existe pour la même époque une autre grande curiosité, mais cette fois d'ordre géologique, clairement observable dans le Grand Canyon. L'analyse des couches stratigraphiques de cette région révèle l'histoire de la Terre sur près de 2 milliards d'années, ou presque, car il reste plusieurs discordances chronologiques. Ainsi, il n'y a pas de trace de roches datant de l'époque de l'explosion cambrienne. Des sédiments âgés de 525 millions d'années reposent directement sur des roches métamorphiques de 1.740 millions d'années et des couches sédimentaires inclinées âgées de 1.200 à 740 millions d'années. Des roches sédimentaires "jeunes" provenant de mers peu profondes recouvrent donc de "vieilles" roches sans aucune continuité logique. Mais une question se pose : a-t-on vraiment perdu des informations sur l'évolution de la Terre pendant 215 millions d'années à cause de cette inconformité géologique ?

Il semble bien que non. Selon Shanan Peters de l'université de Wisconsin-Madison, cette absence de données géologiques permettrait d'expliquer le mécanisme déclencheur de l'explosion cambrienne. Les résultats obtenus par l'équipe de ce chercheur sont présentés dans la revue Nature. L'inconformité résulterait d'une succession d'événements géologiques ayant causé la libération massive d'ions dans les océans. Les animaux se seraient adaptés en synthétisant des cristaux pour se débarrasser de ces éléments potentiellement néfastes, donnant ainsi naissance à la biominéralisation. Cette dernière changea alors radicalement le cours de l’évolution, tant les avantages qu'elle apporte sont nombreux.

(Illustration - Le Grand Canyon s'étend sur 450 km de long et possède une profondeur moyenne de 1.300 mètres. Les strates visibles permettent littéralement de lire l'histoire géologique du continent nord-américain - L’explosion cambrienne serait liée à un trop plein d'ions)

Ces explications font suite à l'analyse des propriétés géochimiques de plus de 20.000 échantillons de roches prélevés en Amérique du Nord.

Au début du Cambrien, les mers seraient montées et descendues à plusieurs reprises, en érodant à chaque fois les substrats rencontrés et mettant ainsi à nu d'anciennes roches provenant directement des profondeurs de la croûte terrestre. Cette succession de transgressions marines explique donc la disparition de plusieurs couches stratigraphiques. Exposées à l'air et à l'eau, les roches crustales auraient réagi chimiquement, libérant dans les océans de grandes quantités d'ions calcium, potassium, fer et silice. La chimie de l'eau fut alors profondément modifiée.

Un dernier retour des mers il y a 525 millions d'années provoqua le dépôt de sédiments plus jeunes. De nombreuses traces géologiques confirment ces événements - couches de glauconite et d'autres roches particulièrement riches en potassium, fer et silice.

(ici un schéma montre la brutale accélération de l'évolution au Cambrien avec apparition de beaucoup de genres d'espèces vivantes - diversité.

Des minerais pour évacuer le trop plein d’ions

Chaque organisme vivant maintient un équilibre ionique avec le milieu. L'arrivée massive d'ions dans l'environnement marin a dû profondément perturber cette balance. Plusieurs espèces se seraient mises à stocker leurs excédents en ions calcium, potassium, fer et silice sous forme de minerais afin de rétablir l'équilibre. Cette stratégie a deux avantages : les effets des particules chargées sont limités et elles ne sont pas rejetées dans le milieu où elles pourraient à nouveau jouer un rôle néfaste.  

Voilà pourquoi les trois biominéraux majoritairement présents au sein des organismes vivants seraient apparus lors de l'explosion cambrienne. Le phosphate de calcium est le constituant principal de nos os et dents. Le carbonate de calcium entre quant à lui dans la biosynthèse des coquilles d'invertébrés. Et le dioxyde de silicium est utilisé par les radiolaires, du zooplancton, pour synthétiser leur "squelette" siliceux.

Les avantages évolutifs procurés par ces minéraux sont conséquents puisqu'ils sont utilisés pour la conception de coquilles et d'épines (rôle de protection), de squelettes (rôle de soutien) et de griffes ou dents (rôle dans la prédation). Leur apparition permet de mieux comprendre le changement soudain du cours de l'évolution. 

Ce que certains qualifiaient de "trou" dans les enregistrements de l'histoire de la Terre se révèle en réalité être une source d'information d'une valeur inestimable. La "grande inconformité" (en anglais Great Unconformity) révèle ainsi un mécanisme probable du déclenchement de l'explosion radiative du Cambrien.

Auteur: Internet

Info: Quentin Mauguit, Futura-sciences.com, 24/04/2012

[ animal-minéral ] [ paléontologie ]

 

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portrait

Maryam Mirzakhani était mathématicienne, mais elle oeuvrait  comme une artiste, toujours en train de dessiner. Elle aimait s'accroupir sur le sol avec de grandes feuilles de papier, les remplissant de gribouillages : figures florales répétées et corps bulbeux et caoutchouteux, leurs appendices coupés proprement, comme les habitants d'un dessin animé, égarés,  de Miyazaki. L’un de ses étudiants diplômés de l’Université de Stanford a déclaré que Mirzakhani décrivait les problèmes mathématiques non pas comme des énigmes logiques intimidantes mais comme des tableaux animés. "C'est presque comme si elle avait une fenêtre sur le paysage mathématique et qu'elle essayait de décrire comment les choses qui y vivaient interagissaient les unes avec les autres", explique Jenya Sapir, aujourd'hui professeure adjointe à l'Université de Binghamton. "Pour elle, tout arrive en même temps."

Mirzakhani a grandi à Téhéran avec le rêve de devenir écrivain. En sixième année, elle a commencé à Farzanegan, une école pour les filles les plus douées de la ville, et a obtenu les meilleures notes dans toutes ses classes, à l'exception des mathématiques. Vers la fin de l'année scolaire, l'instructeur lui a rendu un test de mathématiques noté 16 sur 20, et Mirzakhani l'a déchiré et a fourré les morceaux dans son sac. Elle a dit à une amie qu’elle en avait assez en mathématiques : " Je ne vais même pas essayer de faire mieux. " Mirzakhani, cependant, était constitutionnellement incapable de ne pas essayer, et elle tomba bientôt amoureuse de la poésie épurée du sujet. Alors qu'elle était au lycée, elle et sa meilleure amie, Roya Beheshti, sont devenues les premières femmes iraniennes à se qualifier pour l'Olympiade internationale de mathématiques, et l'année suivante, en 1995, Mirzakhani a remporté une médaille d'or avec un score parfait.

Mirzakhani a déménagé aux États-Unis à l'automne 1999 pour poursuivre ses études supérieures à Harvard. Sa passion était la géométrie et elle était particulièrement attirée par les " surfaces hyperboliques ", qui ont la forme de chips Pringles. Elle a exploré un univers extrême dans son abstraction – avec des " espaces de modules ", où chaque point représente une surface – et des dimensions qui dépassent les nôtres. D'une manière ou d'une autre, Mirzakhani était capable d'évoquer des aspects de tels espaces à considérer, en griffonnant sur une feuille de papier blanc pour essayer une idée, s'en souvenir ou en rechercher une nouvelle ; ce n'est que plus tard qu'elle transcrira ses aventures dans les symboles conventionnels des mathématiques. "on ne veut pas écrire tous les détails ", a-t-elle dit un jour à un journaliste. "Mais le processus du dessin de quelque chose vous aide d'une manière ou d'une autre à rester connecté." Son doctorat : thèse commencée en dénombrant des boucles simples sur des surfaces, a conduit à un calcul du volume total des espaces de modules. Cela a permis à la jeune chercheuse de publier trois articles distincts dans des revues mathématiques de premier plan, dont l'un contenait une nouvelle preuve surprenante de la célèbre " conjecture de Witten ", une étape importante dans la physique théorique reliant les mathématiques et la gravité quantique. Les mathématiques de Mirzakhani sont appréciées pour leurs grands sauts créatifs, pour les liens qu'elles ont révélés entre des domaines éloignés, pour leur sens de la grandeur.

Lorsque Jan Vondrak, qui deviendra son mari, la rencontre en 2003, il ne savait pas, dit-il, qu'" elle était une superstar ". Mirzakhani terminait ses études à Harvard et Vondrak, aujourd'hui professeur de mathématiques à Stanford, étudiait au MIT ; ils se sont rencontrés lors d'une fête, chacun reconnaissant une âme sœur qui n'aimait pas particulièrement les fêtes. Vondrak l'a initiée au jazz et les deux ont fait de longues courses le long de la rivière Charles. Mirzakhani était à la fois modeste – Vondrak a appris de ses nombreuses réalisations grâce à des amis communs – et extrêmement ambitieuse. Vondrak se souvient de ses rêves de découvertes futures dans l'espace des modules, mais aussi de sa détermination à explorer des domaines plus lointains, comme la théorie des nombres, la combinatoire et la " théorie ergodique ". Elle avait, selon Vondrak, " 100 ans de projets ".

Il y a trois ans, Mirzakhani, 37 ans, est devenue la première femme à remporter la médaille Fields, le prix Nobel de mathématiques. La nouvelle de cette récompense et le symbolisme évident (première femme, première Iranienne, immigrante d'un pays musulman) la troublaient. Elle fut très perplexe lorsqu’elle a découvert que certaines personnes pensaient que les mathématiques n’étaient pas pour les femmes – ce n’était pas une idée qu’elle ou ses amis avaient rencontrée en grandissant en Iran – mais elle n’était pas encline, de par sa personnalité, à dire aux autres quoi penser. À mesure qu’elle devenait une célébrité parmi les Iraniens, les gens l’approchaient pour lui demander une photo, ce qu’elle détestait. La médaille Fields a également été annoncée alors qu'elle venait de terminer un traitement épuisant contre le cancer du sein.

En 2016, le cancer est réapparu, se propageant au foie et aux os de Mirzakhani. Tous ceux qui ont connu Mirzakhani la décrivent comme étant d’un optimisme inébranlable ; ils quittaient toujours les conversations avec un sentiment d'énergie. Mais finalement, il est devenu impossible pour Mirzakhani de continuer ce que sa jeune fille, Anahita, appelait sa " peinture ". Lors d'un service commémoratif à Stanford, Curtis McMullen, directeur de thèse de Mirzakhani et président du département de mathématiques de Harvard, a déclaré que lorsqu'elle était étudiante, elle venait à son bureau et posait des questions qui étaient " comme des histoires de science-fiction ", des scènes vivantes qu'elle avait entrevues. dans un coin inexploré de l’univers mathématique – des structures étranges et des motifs séduisants, tous en mouvement et interconnectés. Puis elle le regardait de ses yeux bleu-gris. " Est ce bien? " demanderait-elle, comme s'il pouvait connaître la réponse.

Auteur: Internet

Info: Nytimes, by Gareth Cook, 2017

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