Mais d’où est venu à cette ville le nom d’Athènes, nom qu’évidemment elle emprunte à Minerve, appelée en grec " Ἀθηνᾶ " ? Voici l’origine que Varron signale. Un olivier était soudain sorti de terre ; ailleurs, une source d’eau vive venait de jaillir. Frappé de ce prodige, le roi envoie consulter l’oracle de Delphes, pour savoir ce qu’il faut penser, ce qu’il faut faire. L’oracle répond que l’olivier est l’emblème de Minerve, l’eau celui de Neptune, et qu’il était au pouvoir des citoyens de choisir, pour nommer leur ville, entre les noms de ces deux divinités. A cette réponse de l’oracle, Cécrops appelle aux suffrages les citoyens de l’un et de l’autre sexe : car selon l’ancien usage de ce pays, les femmes mêmes avaient voix dans les délibérations publiques. La multitude est consultée. Les hommes se prononcent en faveur de Neptune, les femmes en faveur de Minerve ; et comme il se trouve une femme de plus, Minerve l’emporte. Alors Neptune irrité précipite sur la terre des Athéniens les flots de la mer. Est-il donc si difficile aux démons de répandre au loin quelque masse d’eau que ce soit ? Pour apaiser la colère de ce dieu, les Athéniens, suivant le même auteur, frappèrent les femmes d’une triple déchéance : elles ne durent plus à l’avenir être admises aux suffrages ; nul enfant en naissant ne dut recevoir désormais le nom de sa mère ; enfin il ne fut plus permis de les appeler "Athéniennes". Ainsi, c’est à la raillerie des démons qui se jouent dans le débat de ces deux divinités, mâle et femelle, c’est à la victoire procurée par les femmes à la femme, que cette cité nourrice des arts libéraux, mère de tant d’illustres philosophes, cette cité, la gloire de la Grèce, doit le nom d’Athènes. Et cependant, frappée par le dieu vaincu, elle est forcée de punir la victoire même de la déesse, redoutant plus les eaux de Neptune que les armes de Minerve. Et dans les femmes ainsi châtiées, Minerve victorieuse est vaincue. Et elle ne vient pas en aide à celles qui l’ont assistée de leurs suffrages, afin qu’en dédommagement du droit dont elles sont déchues, et de cette rigueur qui rend les fils étrangers au nom de leurs mères, il leur soit du moins permis de s’appeler Athéniennes et de porter le nom de la déesse qui doit sa victoire à leurs suffrages !
Auteur:
Info: La cité de Dieu, volume 3, traduction du latin de Louis Moreau revue par Jean-Claude Eslin, éditions du Seuil, mai 1994, pages 20-21
Commentaires: 1
miguel
06.06.2024
étymologie ?