enseignement

L’homme étant donc un être doué d’intelligence rationnelle et de volonté libre – ce qui définit sa personne – toute éducation est obligée d’en tenir compte et doit nécessairement se proposer comme fin le développement de la pensée droite et l’exercice du libre arbitre.

Mais – et c’est là que surgit la difficulté majeure – comme nous venons de le montrer, le développement de l’intelligence et de la volonté ne saurait être défini d’une manière purement naturelle. […] En vertu de leur potentialité indéfinie – l’âme intellective, dit Aristote, est en puissance relativement à toute chose connaissable – il est impossible de se fonder sur les exigences potentielles de la pensée et de la volonté – et de leur conjonction dans la sensibilité et l’affectivité – pour savoir ce que l’homme doit être, puisque, d’une certaine manière, il peut être "n’importe quoi". C’est pourquoi le savoir traditionnel, qui est présentement requis, n’en appelle pas seulement aux exigences de la nature, mais aussi à celles d’une sorte de supra-naturalité (sinon d’un surnaturel au sens propre).

Autrement dit, […] on ne peut "élever" l’homme […] en se réglant sur le concept de ce qu’il doit naturellement devenir, comme on le fait pour l’apiculture ou la sériculture. Si loin qu’on poursuive l’analyse du devenir naturel de l’homme, on ne rencontre pas de détermination suffisante et décisive. Ce qui ne signifie pas qu’il n’y ait pas de nature humaine – c’est la mauvaise conclusion de Sartre – mais que cette nature ne se réalise pas intégralement par le pur développement naturel de ses virtualités – comme une graine dans le sol.

Ce développement présente donc un hiatus, une faille, une solution de continuité qui ne peut être comblée que par "en-haut", par une miséricordieuse intervention divine. 

Auteur: Borella Jean

Info: Tradition et modernité, L'Harmattan, Paris, 2023, page 119-120

[ limites ] [ grâces actuelles ] [ indétermination ]

 

Commentaires: 3

Ajouté à la BD par Coli Masson

Commentaires

miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2025-01-02 10:39
je vois à nouveau ici le concept d'orthogonalité, qui indique pour moi l'idée que nous sommes tous simultanément a) similaires-objectifs-logiques-assignés et b) différents-subjectifs-ouverts-créatifs
Coli Masson, colimasson@live.fr
2025-01-03 09:14
Oui, tu appelles ça orthogonalité?
miguel, filsdelapensee@bluewin.ch
2025-01-04 09:07
Oui, pour moi un concept important, en tout cas au sens FLPpique... Terme qui permet de concilier mathématiques, langage-sémantiques (particulièrement ici le chiasme)... et, comme par hasard... tétravalence. Il faudrait d'ailleurs qu'on se mette d'accord sur quelques uns de ces mots ;-) puisqu'ils impliquent un " a priori " de l'observateur. Ce genre d'usage ( un peu comme tu as pu me reprocher une utilisation trop systématique-répétée de la triade de Peirce ) doit être précisé quelque part afin d'éviter tant que possible que ces "termes a priori" impliquent des malentendus. En clair ils définissent certains cadres de pensée qui sous-tendent l'observateur (spécifiquement ici l'étiqueteur FLP mg) et donc leurs "a priori"... et donc l'observateur tente ici (lucidement ?) de reconnaître les biais implicites à tel ou tel point de vue. C'est un vrai work in progress qui se développe bcp via les prompts test que je m'amuse à développer ici : https://filsdelapensee.ch/page/prompt_invite_informatique_pour_chatbots