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genèse

Au commencement, la Terre était faite toute de travers, et il fallut bien des efforts pour la rendre plus habitable. Pour traverser les fleuves il n'y avait pas de ponts. Pas de sentiers pour gravir les montagnes. Voulait-on s'asseoir ? Même pas l'ombre d'un banc. Tombait-on de sommeil ? Le lit n'existait pas. Ni souliers ni bottes pour éviter de se faire mal aux pieds. Si vous aviez une mauvaise vue, pas moyen de trouver des lunettes. Aucun ballon pour faire une partie de football. On n'avait pas de feu ni de marmites pour faire cuire les spaghetti, et d'ailleurs cela n'avait pas d'importance car les spaghetti n'existaient pas. Il n'y avait rien de rien. Zéro multiplié par zéro égale zéro. Il n'y avait que les hommes, avec leurs deux bras pour travailler, et c'est ainsi qu'on put remédier aux plus grosses erreurs. Des erreurs, pourtant, il en reste encore beaucoup à corriger : retroussez vos manches, il y a du travail pour tout le monde.

Auteur: Rodari Gianni

Info: Histoires au téléphone

[ humour ] [ matérialisme ]

 

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post-darwinisme

Il me semble plus efficace de définir la mémétique comme une approche naturaliste de l’évolution culturelle et de ses manifestations reproductibles, qui pour moi prennent la forme de solutions. J’appelle solution la manière de passer d’une situation ayant atteint un point d’instabilité à une autre situation qui en découle et qui est plus stable (par exemple, un repas). Les solutions culturelles sont alors aux mèmes ce que les organismes vivants sont aux gènes : des interacteurs propres à subir les pressions sélectives de l’environnement. Le façonnage de la société commence là, évoquant la théorie des formes sociales proposée au début du xxe siècle par Georg Simmel, ou l’idée sartrienne de résolution dialectique. Le potentiel de transformation d’une situation se décharge à travers ces solutions. Entre le piercing, le recyclage, les symboles d’appartenance religieux, le combat fumeur vs non-fumeur, les sushi bars, les objets imprimés à la maison, le mariage homosexuel, les écrans tactiles, les printemps arabes et les réseaux sociaux… allons-y, chaussons des lunettes de méméticien et nous n’aurons que l’embarras du choix.

Auteur: Jouxtel Pascal

Info: In Cairn infos, reprenant Hermès, La Revue 2013/3 (n° 67), pages 50 à 56

[ noosphère ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

enfance

Je te vois au bord de la Corne d’Or, dans les rues bondées, dans les souks, les parcs, sur les collines et les plages qui n’existent plus. Parfois tu es ma mère mais le plus souvent tu es une autre. Une sublime blonde en Vespa, une musicienne de rue, une étudiante à lunettes, une prostituée, une femme du monde, une chanteuse en robe fourreau, une danseuse de chachacha devant un orchestre cubain, une paysanne voilée fraîchement débarquée en ville, une entremetteuse lasse d’un cabaret minable, une mendiante ou une jeune ingénue. Tu es toutes ces femmes et tu marches devant des caméras – des Arriflex de mon enfance, la modernité absolue – qui te suivent dans des rues aujourd’hui détruites pour la plupart qui ont laissé place à des avenues sans âme et à des shopping malls hideux avec mosquées intégrées pour abrutir les gens en les poussant à acheter et à prier en permanence.

(sa maman est une célébrité en Turquie)

Auteur: Ecer Sedef

Info: Trésor national

[ femmes-par-femme ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

métamorphoses de l'esprit

Le premier pas consiste donc à se charger du poids des siècles, à se soumettre à la tradition collective nourrissante (lorsque la tradition – chrétienne, en l’occurrence – et la communauté – cité, nation, Empire, Église – existaient encore, cela va de soi). Est sage qui s’approprie ce qui ne dépend pas de lui et s’inscrit dans sa lignée native.

Deuxième pas : le moment satanique, le "Non serviam" luciférien, la négation méphistophélique, la révolte (l’ "orgueil", si l’on use des lunettes chrétiennes que Nietzsche fut contraint de chausser). L’esprit libre pense différemment de son milieu d’origine ou de son temps, ce en quoi il fait preuve de courage et d’intempestivité. Il ne brait plus avec le troupeau et choisit de s’éloigner, solitaire, vers les escarpements les plus risqués.

Troisième pas, enfin : l’affirmation créatrice du surhomme libéré de la névrose chrétienne ou obsessionnelle (l’enfer du devoir) ainsi que de son revers malin, l’approbation joyeuse du monde comme jeu créateur et destructeur. 

Auteur: Soulié Rémi

Info: Dans "Nietzsche ou la sagesse dionysiaque", éditions Point, 2014, pages 17-18

[ zarathoustra ] [ triade philosophique ] [ explication ] [ réfléchir ]

 

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Ajouté à la BD par Coli Masson

mère-filles

De ses quatre filles, j'étais celle qui correspondait le moins à ses canons esthétiques. Planche à pain, j'avais les cheveux qui n'ondulaient pas, un front trop bombé, des sourcils mal dessinés, des dents pas du tout éclatantes, des lèvres charnues, indices d'une sensualité à réfréner, une myopie m'obligeant à porter des lunettes aux verres aussi épais que des culs de bouteille, la dégaine d'une iroquoise qui a avalé son parapluie, bref, selon Big Mother, je faisais bien d'être une bûcheuse, car je n'étais pas mariable - qui s'intéresserait à moi, promise à un emploi d'institutrice ou de prof de français, insatisfaite et mal rétribuée? Je m'offusquais de ce mépris pour mes enseignants, sans qui le dressage de Big Mother aurait occasionné un ébranlement. Aller en classe, c'était lui échapper pour quelques heures, fouiner dans les bibliothèques, c'était amasser des trésors et y puiser, pas seulement afin de me doter d'une teinture de culture: forte de ces richesses, je me fabriquais une personnalité, je me blindais contre les méchancetés de celle qui, en tous lieux, se plaisait à nous diminuer, mes sœurs et moi.

Auteur: Lê Linda

Info: À l'enfant que je n'aurai pas

[ sororie ] [ famille ] [ autoportrait ] [ humiliation ]

 
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Ajouté à la BD par miguel

migration

Un pied devant l'autre, il s'agira de descendre du train sans trébucher, puis d'avancer à travers toutes les nuances de l'un des bouts du monde.

Le sifflement du train ne encore fait entendre mais son arrivée à Machin Ville ne saurait plus tarder.

Le jeune homme dont nous avons fait la connaissance dans le train, délicat et bien soigné, dans un costume impeccable, le regard naïf cerclé de fines lunettes rondes va découvrir les confins de l’Ouest américain du temps de la conquête.

Bill Blake, car c’est comme cela qu’il s’appelle, a trouvé un emploi de comptable dans la ville de Machine City étape finale du train venant de Cleveland. Nous sommes ici dans la dernière cité industrielle de ce no man’s land qu’est alors la frontière séparant l’Est civilisé américain au très wild wild Ouest, zone mouvante d’un pays à la découverte de son continent.

Nous ne sommes pas encore rentré dans le tunnel qui nous fera passer dans le monde de Machine City et nous écoutons la mort parler à ce jeune homme.

Sous les riffs incandescents de Neil Young.

Auteur: anonyme

Info: Critique de "Dead man" de Jim Jarmush. Road to now here.

[ Etats-Unis ] [ film ]

 
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Ajouté à la BD par Les Cendres

cité imaginaire

Si je n'avais pas vu le nom de la ville en grosses lettres lorsque j'ai atterri à Trude, j'aurais pensé être arrivé au même aéroport que celui d'où j'étais parti. Les banlieues que l'on m'a fait traverser n'étaient pas différentes des autres, avec les mêmes maisons jaunes et vertes. En suivant les mêmes flèches on faisait le tour de parterres de fleurs similaires dans des quartiers identique. Les rues du centre présentaient des enseignes d'emballage de marchandises qui ne changeaient en rien. C'était la première fois que je venais à Trude, mais je connaissais déjà l'hôtel où je descendais au hasard ; j'avais déjà entendu et exprimé mes conversations avec les acheteurs et les vendeurs de ferraille ; d'autres journées comme celle-ci s'étaient terminées en regardant à travers les mêmes lunettes des nombrils similaires qui se balançaient. Pourquoi venir à Trude ? Me suis-je demandé. Et je voulais déjà partir. - Vous pouvez prendre un vol quand vous voulez, - m'ont-ils dit, - mais vous arriverez à une autre Trude, la même point par point, le monde est couvert par un unique Trude qui ne commence ni ne finit, seul le nom à l'aéroport change.

Auteur: Calvino Italo

Info: Villes invisibles

[ normalisée ]

 

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Ajouté à la BD par miguel

personnage

Nugent Miller se releva. C'était un grand gaillard long et maigre comme un jour sans pain, au visage recuit par le soleil, vêtu d'une chemisette bleue, d'un pantalon kaki et chaussé d'espadrilles. Un havresac complétait sa silhouette, de même qu'un compteur Geiger qu'il tenait à la main et des lunettes à grosse monture d'écaille. La branche gauche de ces dernières était cassée ; il l'avait rafistolé avec une allumette et de la ficelle, poussant la précaution jusqu'à renforcer le pince-nez en y enroulant du fil de fer. Les verres semblaient tenir solidement, mais il se méfiait. il était très myope et se serait trouvé incapable de remplacer un verre brisé. Il lui arrivait de faire un cauchemar, toujours le même : ses lunettes tombaient, il lançait la main en avant pour les attraper au vol, les manquait de justesse et elles disparaissaient en tournoyant dans un précipice.
Il raffermit l'aplomb de la monture sur son nez, fit quelques pas et interrogea le sol encore une fois. Il parvint à relever deux ou trois séries de traces différentes, peut-être même quatre - et à en juger d'après la nature du terrain, des traces toutes fraîches.

Auteur: Sheckley Robert

Info: Les filles et Nugent Miller, in Histoires de fins du monde de Anthologie de la Science Fiction

[ inquiétude ]

 
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eros-thanatos

Je laisse courir mes doigts sur la photo

déchirée d’un magazine & pliée

chez Fils et Amants.

Elle a une main sur sa hanche

& l’autre pointe un revolver

vers une cible échappant

de l’objectif. Entre une équipe

de femmes en treillis, elle met au défi

le soleil de pénétrer son ao dai.

Des officiers de haut rang laissent leurs yeux

voyager sur la soie tandis qu’ils poussent des pions

sur des cartes sous un ciel de mort.



Les ombres rampent sous ses pieds.

Sait-elle que les soldats la déshabillent

derrière leurs lunettes noires d’aviateurs ?

Elle est aussi délicate qu’un roseau

sur la berge, juste soupesant le flingue

dans sa main, un lotus maculé de sang

enraciné dans l’air agité.

Un autre genre de fleurs voluptueuses

dans la chair, de mauvais augure comme une photo

sur un cercueil attendant d’être

perdue parmi les papiers & les notes,

mais cela fait quand même mal quand le pistolet

joue avec le cœur de cette manière.

Auteur: Komunyakaa Yusef

Info: Le Xuan, Beau printemps, traduction Cédric Barnaud

[ guerre ] [ brutalité ] [ réconfort ]

 
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Ajouté à la BD par Coli Masson

gauche-droite

Considérons le cas du socialiste ardent. Il trouve qu'il y a beaucoup de mal dans notre monde et nous serons tous sans doute d'accord avec lui. Sa conclusion enthousiaste est que "le capitalisme" doit être remplacé par le "socialisme". Mais il est plus sûr de dire que, dans la plupart des cas, pour ce socialiste ce sera très difficile de définir l'un comme l'autre. L'idée la plus haute dans son esprit est qu'actuellement c'est "l'anarchie" ou la "jungle" et que par la suite il y aura ordre, justice et planification. Son adversaire, qui défend non pas le "capitalisme" mais l'économie de marché, expliquera que la théorie et une vaste expérience démontrent que le socialisme est plutôt susceptible d'être une amère déception. Il est fort probable qu'ils passeront leur temps à parler de manière antagonistique parce que le socialiste a à l'esprit des problèmes à résoudre tout à fait différents alors que son adversaire n'a jamais pensé que l'économie de marché devait être la réponse à tous ces problèmes, mais seulement l'une d'elles, en l'occurence le problème particulier de l'ordre économique. Il dira comme Shaw qu'"aucune personne saine d'esprit refuse de porter des lunettes parce qu'elle souffre d'un mal de dents".

Auteur: Röpke Wilhelm

Info: Freedom and Inflation

[ lucidité ]

 

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